Dans cette seconde chronique, Faker Korchane explore la place de la raison en Islam, en mettant particulièrement l’accent sur son lien avec l’unicité de Dieu (Tawhid). Il souligne que si la raison est la première des preuves, elle ne saurait être dissociée du texte révélé. La raison s’enrichit du Coran et de la tradition, ce qui permet une compréhension plus profonde du monothéisme islamique. Faker Korchane est professeur de philosophie, et fondateur de l’Association pour la renaissance de l’islam mutazilite. Il est également l’auteur du livre
Compte rendu de l’intervention de Faker Korchane
L’orateur commence par rappeler que la réflexion rationnelle peut mener à la croyance en un Dieu unique. Il mentionne les travaux de philosophes antiques, comme Aristote, qui ont démontré rationnellement l’existence d’un principe créateur unique. L’observation de la nature, appelée “le livre de la création”, est une autre source de réflexion permettant d’aboutir à cette conclusion. Cependant, il insiste sur l’importance du Coran, qui vient enrichir et compléter cette approche.
L’unicité de Dieu à travers la sourate Al-Ikhlas
Faker Korchane s’appuie sur la sourate Al-Ikhlas (chapitre 112 du Coran), qu’il considère comme fondamentale pour comprendre le Tawhid. Il en cite la traduction :
“Dis : Il est Dieu, un. Dieu de plénitude. Il n’engendra pas et ne fut pas engendré. Et nul ne Lui est égal.”
L’accent est mis sur le mot “As-Samad”, souvent traduit par “celui qui exauce les prières”. Or, dans son contexte, Samad signifie plutôt plénitude absolue, un bloc indivisible qui incarne l’unité totale. L’orateur explique que cette notion est essentielle pour comprendre la nature de Dieu dans l’Islam : Il est Un, sans division ni composition.
Pour approfondir cette réflexion, Faker Korchane cite également le verset du Trône (Ayat Al-Kursi, Coran 2:255). Ce passage renforce l’idée que Dieu est omnipotent, éternel, sans égal et sans dépendance. Ces versets coraniques, couplés à une analyse rationnelle, permettent de mieux saisir l’essence du monothéisme islamique.
La question des attributs divins
Une des discussions centrales de son intervention concerne le rapport entre l’essence divine et ses attributs. Dans la théologie islamique classique, il est souvent admis que Dieu possède des attributs éternels et distincts de Son essence, comme la connaissance, la puissance ou la volonté.
Cependant, Faker Korchane évoque la pensée des Mu’tazila, une école théologique qui s’est opposée à cette conception. Selon eux, attribuer à Dieu des attributs coéternels reviendrait à introduire une multiplicité en Lui, ce qui contredit le Tawhid. Ils affirment que Dieu sait non pas parce qu’Il a un attribut distinct de la science, mais parce que Son essence même est connaissance.
Cette distinction, bien que subtile, est essentielle dans le débat théologique. Elle met en lumière une tension entre une conception traditionnelle qui reconnaît des attributs éternels à Dieu et une approche plus philosophique qui insiste sur Son unicité absolue.
Le débat sur le Coran créé ou incréé
Un autre point majeur abordé est la question du Coran créé. Ce débat théologique a marqué l’histoire de l’Islam, notamment entre les Mu’tazila et la théologie sunnite classique.
La position traditionnelle affirme que le Coran est incréé, c’est-à-dire éternel et existant de tout temps. Mais Faker Korchane souligne une problématique majeure : si le Coran est éternel, ne crée-t-on pas une seconde entité éternelle en dehors de Dieu ? Or, en Islam, seul Dieu est éternel.
Les Mu’tazila, pour préserver la pureté du Tawhid, affirment donc que le Coran a été créé à un moment donné. Il reste valable tant qu’il y a des humains pour le recevoir, mais après le Jugement dernier, il n’aura plus de raison d’exister. Cette approche vise à éviter toute forme de coéternité avec Dieu, garantissant ainsi Son unicité absolue.
Une quête de cohérence
À travers son analyse, Faker Korchane montre comment ces débats visent à assurer une cohérence absolue du Tawhid. La raison est un outil fondamental pour comprendre l’unicité divine, mais elle doit s’appuyer sur le texte révélé pour éviter toute dérive spéculative.
Il conclut en rappelant que les Mu’tazila n’ont jamais cherché à diminuer la grandeur de Dieu ou du Coran. Leur objectif était simplement d’assurer que l’unicité divine ne soit pas compromise par des conceptions qui introduiraient des éléments éternels en dehors de Dieu.
En somme, cette intervention souligne l’importance du raisonnement en Islam et la nécessité d’une approche équilibrée entre raison et révélation pour mieux comprendre le Tawhid.



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