Malika Bayan, une jeune norvégienne de 24 ans convertie à l’islam, rejetée en 2015 d’un salon de coiffure sans ménagement, en raison de son hijab, attendait avec fébrilité le verdict de la justice dans l’affaire de discrimination qui l’opposait à Merete Hodne, 47 ans, la coiffeuse mise hors d’elle à sa vue, assurant ne nourrir ni rancœur, ni rancune personnelle contre celle qui lui a fait subir un terrible affront.
Dépassée par l’énorme retentissement politico-médiatique de son procès et le débat houleux qu’il a généré, à son corps défendant, sur la place de l’islam dans la société européenne, attisé par les ultras du nationalisme norvégien, le soulagement de la jeune femme n’en a été que plus grand à l’annonce de sa victoire judiciaire. Une victoire d’autant plus belle et réconfortante qu’elle a triomphé d’une adversité dont elle ne soupçonnait pas la fureur en portant plainte, un an auparavant, pour un ostracisme intolérable.
Le tribunal du comté de Rogaland, situé au sud-ouest du pays des fjords, a tranché en faveur de Malika Bayan, faisant fi de la levée de boucliers qui a agité les rangs bouillonnants des extrémistes de droite, déclenchant la colère implacable entre autres de Carl I. Hagen, le leader du parti islamophobe et anti-immigration Progress, ainsi que celle du député Peter Myrhe, qui s’est livré à des amalgames abjects entre l’islam et le nazisme.
Condamnée à verser 1 000 euros à celle qu’elle a refoulée violemment de son salon, au titre du préjudice moral subi, et 667 euros pour les frais de justice, Merete Hodne, qui était poursuivie pour « discrimination délibérée » contre une femme musulmane, n’a pas fait profil bas pour autant devant sa défaite cuisante.
Dans le vacarme ambiant rendu assourdissant par ses soutiens enragés, la coiffeuse, dont la presse a révélé la proximité idéologique avec les partis islamophobes de Norvège et des Pays-Bas, n’a pas mis en veilleuse son aversion pour l’islam mais l’a au contraire fait éclater au grand jour sur la chaîne à forte audience TV2, en ne lésinant pas, elle aussi, sur des raccourcis avec le nazisme hautement délétères.
A ses yeux, le " hijab est un signe ostentatoire représentant une idéologie totalitaire au même titre que la croix gammée est le symbole du nazisme", s'est-elle époumonée devant les caméras, sans craindre de tomber à nouveau sous le coup de la loi.
Se retrouvant au cœur de cette bourrasque politico-médiatique bien malgré elle, on en arriverait presque à oublier que Malika Bayan, cette victime norvégienne de l’islamophobie ordinaire qui gangrène le Vieux Continent, a pu sortir la tête haute du prétoire, son honneur ayant été réhabilité par la justice de son pays. Un signal fort envoyé à ses détracteurs islamophobes, mais aussi et surtout à la communauté musulmane norvégienne vers laquelle sont allées ses premières pensées.
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