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Ibn ‘Arabî et son monde magique d’humilité et de pureté (1/2)

Ibn ‘Arabî (1165-1240), surnommé le shaykh al-akbar, « le plus grand des maîtres », est une figure absolument majeure du soufisme. Son œuvre immense, mêle mystique amoureuse et métaphysique profonde.

Qu’est-ce que le soufisme ?

Le soufisme i désigne l’effort d’intériorisation de la Révélation coranique, la rupture avec la religion purement juridique et la volonté de revivre l’expérience intime du prophète Muhammad la nuit du Mi’râj : l’ascension pour recevoir les prescriptions de Dieu sur les cinq prières. ii

Le but suprême du soufi est d’identifier sa volonté à la volonté de Dieu et d’être, corps et âme, un lieu de manifestation divine. Il s’agit d’une voie initiatique et ascétique, où la lutte contre les passions, avec l’aide du cœur, conduit à l’extase par une union avec Dieu, fondée sur l’amour mutuel mentionné dans le Coran.

L’étymologie généralement admise fait dériver le mot soufi du mot arabe sûf qui signifie “laine”. Le mot ferait référence à la coutume de certains hommes religieux de porter des vêtements en laine blanche et un manteau et ne contiendrait donc aucune référence à la doctrine spirituelle qui distingue les soufis dans l’Islam. Il est fort probable que le vêtement de laine était déjà associé à la spiritualité à l’époque préislamique, en Arabie Heureuse (Felix Arabia) iii et ailleurs.

Le soufisme et la purification intérieure

Le soufisme n’est pas une école théologique et juridique qui viendrait s’ajouter aux quatre écoles déjà existantes (malékite, chafi’ite, hanafite et hanbalite). Il ne s’agit pas non plus d’un schisme. Il s’agit d’une conception ésotérique de la relation de l’homme au monde et à l’entité divineiv C’est une méthode de perfectionnement intérieur, d’équilibre et une source de ferveur profondément vécue et transformatrice. C’est l’amour infini de Dieu et la réalisation de cet amour par une purification intérieure.

Cette quête de la vérité, semée d’efforts et de doutes, nécessite une initiation et un renoncement à tout ce qui n’est pas Dieu. Le but de cette démarche spirituelle ésotérique est de réaliser la fusion avec Dieu. Pour cela, l’initié effectue une sorte d’introspection profonde. Il s’agit d’une dévotion intériorisée de l’être humain qui implique l’observation de règles et de rites stricts combinés à des expériences individuelles.

Loin de la vulgate islamique, le soufisme est une école de grande humilité, de tolérance sans limites et de solidarité active. C’est l’expérience de l’union ultime avec Dieu. Le tasawuf est donc la marche résolue d’une catégorie de privilégiés (khâssa), assoiffés de Dieu, mus par sa grâce pour ne vivre que par et pour Lui dans le respect du Coran et de la Sunnah, médités, expérimentés et intériorisés.

Le soufisme est une voie d’amour et de connaissance. Il est double :

1- L’amour de Dieu est l’aboutissement de la connaissance (ma’rifa) conduisant au dévoilement du mystère (kashf) (selon le poète persan al-Hallâj (858-922) et ar-Rûmî, poète persan et érudit islamique (1207-1273)).

2- Les manifestations intellectuelles du soufisme à travers des moyens externes tels que : études, prières, règles, ablutions, purification, récitations (dikr), autocritique, vérité, pauvreté, renoncement, etc. (selon al-Djunayd, mystique perse, (830-910)). v

Histoire du soufisme

Les ascètes du tasawuf sont d’abord apparus dans les territoires arabes et persans. Puis, les tarîqahs (voies mystiques) se sont développées en Afrique du Nord, en Egypte, dans les Balkans et en Inde. Les adeptes du renoncement au monde, assoiffés de connaissances mystiques et vêtus de laine pour se distinguer des riches vêtements des dignitaires, s’efforçaient d’établir une relation forte avec Dieu, pour l’amour de lui et son adoration. Le soufi, fervent de l’amour de Dieu, est en désaccord avec le monde et ses attraits, mais aussi avec soi-même (an-nafs) et ses multiples désirs et inclinations.

Il s’éduque à une autodiscipline rigoureuse car son être physique est le siège de désirs intempestifs ou vils qui l’éloignent de l’islam et de la volonté de Dieu. L’extinction finale (al-fanâ’) est la cessation existentielle menant à l’absorption ultime en Dieu et à la vie éternelle de l’âme. vi La voie (tarîqah) est la voie de l’ordre que le mystique emprunte menant à ce but ultime. L’expérience intérieure qui l’y conduit nécessitera un certain nombre d’arrêts (manâzil), de niveaux et de degrés (maqâmât) et d’états d’être (ahwâl). C’est une sorte de voyage vers Dieu à travers les difficultés de ce monde et ses attraits.

Le maître soufi al-Muhâsibî (781-857) fut le premier cheikh à développer une étude introspective et exigeante de ses premières expériences soufies. Le soufisme est né à l’époque du califat omeyyade (661-750), sous le sage calife Abdelmâlek (646-705) et, progressivement, de grandes écoles de soufisme se sont ouvertes au public sous la direction d’éminents maîtres soufis. C’est Hassan al-Basrî (642-728) qui a fondé avec ses élèves et ses disciples la véritable école de soufisme de Bagdad, qu’il a développée avec la principale figure religieuse de l’époque, à savoir Mohammad al-Djunayd (830-910). vii

Parmi les autres grands soufis de cet âge d’or figurent : Abu Sa’id al-Kharrâz (mort en 899) connu sous le nom de ” Cobbler ” et aussi comme ” la langue du soufisme ” et al-Nûrî (840-907).

Qui est Ibn ‘Arabî ?

Il est né à Murcie, dans l’Espagne musulmane, en 1165. Il est issu d’une famille aristocratique de savants et d’intellectuels. Son père était un ami personnel d’Ibn Rushd (Averroès). viii Il suit sa famille à Séville en 1172, où il suit des études classiques avec beaucoup de ferveur et un vif intérêt. En 1185, suite à une grave maladie, il abandonne sa carrière littéraire et fait une retraite mystique de neuf mois sous la direction du maître spirituel al-Uraynî, originaire du Portugal.

Mais cet Andalou de bonne famille, qui a très vite tout abandonné pour suivre la voie soufie, était déjà riche de vingt ans de vie spirituelle marquée par des visions extatiques bouleversantes. Il se mit à l’école des maîtres soufis, parcourant toute l’Andalousie, puis le Maghreb, pour recueillir leurs enseignements et s’imprégner de leur savoir.

En l’an 1200, Ibn ‘Arabî quitte définitivement al-Andalus, l’Espagne musulmane du Moyen Âge, pour voguer vers l’Orient (al-mashriq). Ce mystique et poète d’exception parcourt des milliers de kilomètres, à la Mecque et en Anatolie, et produit en même temps une œuvre spirituelle aux dimensions colossales et à la texture incroyable, qui marquera profondément et pour toujours l’Islam universel.

En 1202-1204, il se rend à la Mecque, après avoir visité l’Egypte et les sanctuaires de Jérusalem et d’Hébron. Il écrit “L’Interprète des désirs ardents” (dîwân turjumân al-ashwâq), en mémoire de Nizam, la fille du cheikh qui l’a accueilli à La Mecque. En 1203-1233, il rédige le ” Les Illuminations de La Mecque ” (Kitâb al-futuhât al-Makkiyya), dont le manuscrit original est aujourd’hui conservé intact. En 1204, il reçoit l’initiation du soufi Ali ben Abd Allâh ben Djamî, à Mossoul et écrit ” Le livre des théophanies divines ” (Kitâb al-tajalliyât al-ilâhiyya).

En 1206, il se trouve au Caire avec un groupe de soufis andalous. Dénoncé par un avocat, il est emprisonné puis libéré par la suite. De 1206 à 1210, il se rend à nouveau à la Mecque et en 1210, il est reçu par le sultan Kay-Khusraw Ier à Qonya en Anatolie. En 1211, il se rend à Bagdad et en 1224, il est installé définitivement à Damas et en 1229, il écrit ” Le livre des joyaux de la sagesse ” / “Le Livre des chatons des sagesses“ (Kitâb fusûs al-hikam).

Ibn ‘Arabî représente la tradition soufie dans toute sa pureté, son originalité et son universalité. Ce grand mystique croit que la chose primordiale dans l’existence terrestre est la place du Créateur dans la vie de l’homme et ses multiples manifestations divines. Il était opposé à Ibn Rushd pour ses penchants agnostiques, ce dernier étant strictement aristotélicien, alors qu’Ibn ‘Arabî est un fervent de la tradition platonicienne.

Ibn ‘Arabî est reconnu dans la tradition du soufisme comme le ” Grand Maître ” (ash-shaykh al-Akbar). Il est le philosophe qui a sans doute le mieux théorisé l’unicité de Dieu, connue dans l’érudition islamique sous le nom de tawhîd, reconnaissant la présence divine dans toute forme et toute image possible. Parlant de lui-même, il dit :

“Je ne suis ni un prophète ni un envoyé, je suis simplement un héritier, quelqu’un qui laboure et sème le champ de la vie future”.

Néanmoins, Ibn ‘Arabî s’est donné la capacité de convoquer les prophètes dans le domaine des “présences imaginaires” en se considérant comme l’équivalent des respectés Envoyés de Dieu (ar-rusul).

Référence majeure du soufisme, Ibn ‘Arabî a toujours fondé ses enseignements sur le Coran et l’exemple prophétique, c’est-à-dire la Sunnah du prophète Muhammad. Dans Les cinq piliers de l’islam, anthologie thématique de son chef-d’œuvre, ” Les Illuminations de La Mecque “, il présente le sens profond des fondements de la religion musulmane : la profession de foi, la prière, le jeûne, l’aumône rituelle et le pèlerinage. Un écrit qui illustre que, loin de la recherche du pouvoir et du savoir, aujourd’hui répandue à des fins plus politiques que spirituelles, d’autres visions de l’Islam sont possibles et plus gratifiantes spirituellement par l’humilité et la puretéix

La conversion d’Ibn ‘Arabî au soufisme

A l’âge de vingt ans, une maladie le met au bord de la mort. A la suite de cette maladie, il entend l’appel du Ciel qui lui demande de s’adonner à l’amour de Dieu et y répond par l’élection de la “Voie soufie”. Il abandonne alors immédiatement son existence de lettré et de haut fonctionnaire et se lance dans une recherche intérieure de l’adoration de Dieu et de l’apaisement de son âme.

Sa conversion s’exprime d’abord par une retraite de neuf mois de la vie active, sous la direction d’un maître spirituel, qui se consacre à la formation de jeunes gens attirés par la vie spirituelle du soufisme. Une fois sa retraite achevée, il approfondit ses connaissances métaphysiques et rendit visite aux grands maîtres soufis des différentes écoles de pensée dans toute l’Andalousie. Il commença alors à composer ses premières œuvres ésotériques, et forma, lui aussi, des âmes qui aspiraient, comme lui, à la spiritualité et au salut.

Dès son entrée dans la voie soufie, il fit preuve de connaissances psychiques et d’une érudition exceptionnelles, phénomènes qui attirèrent la curiosité du grand philosophe et penseur Averroès, qui était un ami très proche du père d’Ibn ‘Arabî. Ibn ‘Arabî raconte cette rencontre mémorable entre deux esprits diamétralement opposés quant à leur vision du monde (mystique et rationnelle). Ibn ‘Arabî a alors 14 ans et sa vocation est marquée par une quête de sincérité, de perfection et de vérité.

Cette attitude d’ouverture à l’universel ne pouvait pas vraiment s’exprimer dans l’environnement andalou de son époque, comme souhaité et désiré. Il est de plus en plus confronté à l’autorité spirituelle et temporelle qui le pousse à soumettre ses pensées et ses sentiments à la lettre de la religion. En 1198, il assiste aux funérailles d’Averroès.

Cette même année 1198, à l’âge de 33 ans, il décide de partir en Orient. Il voyage alors dans son Andalousie natale, rendant visite aux différents maîtres soufis qu’il a connus, pour leur faire ses adieux et solliciter leur sagesse. Il se rend ensuite au Maghreb, où il visite des centres d’études islamiques renommés tels que Salé, Marrakech, Fès et Tunis.

À Tunis, il a eu une vision divine qui lui a ordonné de se rendre en Orient. De Tunis, il se rend au Caire, puis à Hébron et à Jérusalem, où il prie dans la mosquée al-Aqsâ et part ensuite, à pied, vers La Mecque, où il arrive en 1202, au moment même de la saison du pèlerinage. x

A cette époque, commence pour lui une grande aventure de 40 ans dans l’Orient musulman. Il reste deux ans à La Mecque, plongé dans des méditations qui aboutissent à des visions et des rêves mystiques. Ses voyages le conduisent à Bagdad, Mossoul et en Anatolie. Partout, il côtoie des maîtres soufis, reçoit et transmet des enseignements métaphysiques et spirituels, pour le plus grand plaisir de son âme. Puis en 1224, il s’installe définitivement à Damas et malgré les critiques des oulémas orthodoxes, il mène une vie de travail acharné, de recherches approfondies et d’enseignement assidu et meurt dans cette grande capitale islamique, tranquillement, à l’âge de 76 ans où il est enterré et sa tombe continue d’être, aujourd’hui comme hier, un lieu de pèlerinage pour les savants religieux et les mystiques.

Les œuvres d’Ibn ‘Arabî

Ses ouvrages savants sont extrêmement variés et nombreux. Un chercheur syrien, Osman Yahia, les a répertoriées, en excluant les attributions abusives, et en a trouvé 856, dont 550 sont parvenues jusqu’à nous et sont attestées par 2 917 manuscrits. Quarante de ses œuvres ont été traduites à ce jour dans diverses langues du monde.

Retenons principalement ses trois œuvres les plus connues :

– Le Livre des conquêtes spirituelles de la Mecque ou les Illuminations de la Mecque (Kitâb al-futuhât al-Makkiyya: Al-arabi prétendit que chaque mot de ce travail lui fut dicté par un agent surnaturel. Il comprend cinq cent soixante chapitres, divisés en six grandes sections. xi

– Le Livre des Théophanies divines (Kitâb al-tajalliyât al-ilâhiyyaxii Ouvrage écrit sous forme d’un dialogue. Il veut prouver que l’unité divine correspond à l’unité de l’être. xiii

– La Sagesse des Prophètes (Kitâb Fusûs al-hikam: Également appelée « Les chatons des sagesses » (car les « formes » spirituelles des différents prophètes sertissent la sagesse divine, comme le chaton sertit la pierre précieuse), cette œuvre a marqué l’histoire du soufisme et de l’islam profond. Chaque chapitre est dédié à un des prophètes mentionnés dans le Coran, en commençant par Adam considéré en islam comme prophète, jusqu’à Muhammad qui « scelle » la prophétie universelle. xiv

Pour Florian Besson, Ibn ‘Arabî dégage dans ses travaux trois modes d’accès à Dieu : xv

Ibn Arabî dégage trois modes d’accès à Dieu. Celle de la Sharîa, de la Loi, consiste à appliquer à la lettre les préceptes rapportés par le Coran, la Sunna et les hadîth : c’est la voie la plus répandue, la moins difficile, mais aussi la moins satisfaisante car l’on n’arrive qu’à une connaissance indirecte de Dieu, la connaissance directe devant attendre la mort. La voie de la Haqîqa, vérité métaphysique, est celle des philosophes qui tentent de comprendre les causes et les effets. Enfin, la voie de la Tarîqa (le chemin) est la voie spirituelle et exotérique qui seule peut mener à la « réalisation de la Vérité dans le cœur du croyant ». Cette voie mystique n’est pas à proprement parler irrationnelle pour Ibn Arabî, car précisément elle permet à l’esprit d’échapper à lui-même, d’aller au-delà de la raison charnelle (le nafs) et de ses limites, pour atteindre Dieu. Les grands philosophes-médecins (Ibn Rushd, Ibn Sina/Avicenne, Maimonide) faisaient de l’étude des phénomènes un mode de connaissance de Dieu, alliant ainsi la science et la foi. Ibn Arabî reprend en partie cet héritage, mais en déplace les enjeux : Dieu a créé le monde, et se manifeste dans toutes les créatures. « Le monde est un miroir pour Dieu » écrit-il dans. Ibn Arabî ne s’oppose donc pas à la démarche scientifique d’un Averroès (contrairement à Al-Ghazalî), mais la considère comme incomplète, relevant de la Haqîqa. En sorte que le parfait croyant n’est plus celui qui cherche à élucider les phénomènes pour mieux connaître Dieu, mais celui qui comprend que le monde n’est qu’un miroir, et donc que les phénomènes ne sont que les reflets de Dieu. Alors que le philosophe étudie les œuvres de Dieu, le mystique, lui, « voit Dieu à l’œuvre » écrit Ibn Arabî. “

Le monde musulman est aujourd’hui confronté à des problèmes si redoutables qu’un retour à la sagesse du mysticisme soufi semble plus que nécessaire pour saisir le message de l’Islam dans toute sa profondeur et l’une des figures les plus représentatives du soufisme authentique est, sans aucun doute, Ibn ‘Arabi.

La “wahdat al-wujûd” ou “l’unicité de l’existence” est un concept fondamental de la doctrine islamique. Il a été repris et développé par plusieurs maîtres de l’ésotérisme musulman et même si cette formule n’est pas de lui, cette thématique est celle pour laquelle le ash-shaykh al-akbar Ibn ‘Arabi a été le plus controversé car, pour lui, son sens, le plus profond, a été mal compris ou mal interprété. Du point de vue de l’exotérisme, il professe une séparation totale entre Dieu et sa création, ce qui induit une dualité qui va à l’encontre du principe d’Unicité.

Du point de vue d’un ésotérisme mal compris, on réduit parfois Dieu à sa manifestation dans le monde matériel et donc à son immanence, allant jusqu’à une sorte de panthéisme. La difficulté de percevoir la “wahdat al-wujûd” est liée à la perception de l’unité et de la multiplicité et à la capacité de les concilier car on est habitué à penser de manière binaire et on a besoin de délimiter les choses. Or, Dieu est infini et pour l’être, il doit surmonter toute opposition et toute détermination. Dieu est donc à la fois transcendant et immanent. xvi

L’œuvre d’Ibn ‘Arabî est monumentale, et on ne peut pas séparer les écrits authentiques des apocryphes. Il a laissé deux listes de ses écrits, dans lesquelles on trouve 317 titres. Il précise qu’elles ne sont pas exhaustives : 106 correspondent au répertoire général de son œuvre. Les bibliothèques conservent cependant 948 ouvrages qui lui sont attribués.

Ibn ‘Arabî, le poète mystique

Contrairement à un autre soufi plus ancien, Abou Hamid al-Ghazâlî (1058-1111), qui s’est mis à l’école des philosophes gréco-musulmans de son temps afin de détruire le plus efficacement possible les doctrines jugées pernicieuses pour la foi islamique, Ibn ‘Arabi, lui, a opté pour une solution irénique.

La légende ou un récit largement hagiographique raconte qu’Ibn ‘Arabî aurait assisté aux funérailles d’Averroès, philosophe accompli s’il en est, et aurait, à cette occasion, récité magistralement une composition poétique de son cru à la gloire de ce grand homme de tous les temps.

Sa grande anthologie (diwân) semble prendre comme point de départ des vers inspirés des sourates coraniques qui servent d’envolées lyriques mystiques. Mais à la lecture de ces poèmes, on pense immédiatement à d’autres mystiques, d’autres horizons religieux, comme les kabbalistes juifs (même s’ils sont plus intellectualistes ou cérébraux) ou les mystiques chrétiens, comme Maître Eckhart (1260-1327), figure marquante de la mystique rhénane. xvii

Certes, il n’y a pas eu d’influence de l’un sur l’autre, mais on sent chez Ibn ‘Arabî un fort désir de transcender la condition humaine et une puissante envie d’aller jusqu’au bout de l’ascension spirituelle.

Il faudrait évidemment trouver un équivalent arabe au terme allemand, Abgeschiedenheit, mais chez un autre philosophe mystificateur du XIIe siècle, Abu Bakr ibn Tufayl (1105 – 1185), la vision extatique de son héros, nommé Hayy ibn Yaqdhan حي بن يقظان  (Le Vivant, fils de l’Éveillé), xviii on lit le terme al-fanâ’ qui signifie l’anéantissement, la neutralisation de son moi afin de spiritualiser son essence, de se débarrasser de son enveloppe charnelle et ainsi participer au monde du divin.

On peut penser au Sofer des kabbalistes xix qui recherchait également la conjonction avec l’essence divine. Mais il y a aussi la lecture des Psaumes qui a laissé une trace indélébile dans la théologie islamique des premiers siècles de l’Islam.

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Ibn ‘Arabî a presque mené une vie errante, voyageant d’ouest en est, visitant les villes de Fès, Marrakech, Bougie, Tunis et tant d’autres villes arabes. Certains de ses poèmes relatent des situations vives et profondes vécues lors de ses pérégrinations : ” J’ai fait tant d’efforts pour rencontrer un être parfaitement droit, mais il n’y en a pas parmi les hommes ” dit-il.

La nature charnelle de l’homme a toujours été un obstacle plus ou moins insurmontable pour atteindre le voisinage de son créateur. Et il semble que la différence fondamentale entre la spéculation philosophique ou rationnelle, d’une part, et l’approche ou l’adhésion mystique, d’autre part, soit due à cette différence : là où le philosophe parle de son intellect qui permet d’approcher l’univers, le mystique adopte une attitude de quasi-soumission envers son créateur : il est une créature qui doit tout à son créateur. Cette créature entretient en permanence cette relation de dépendance ontologique.

On est à des années-lumière des spéculations de la théologie rationnelle. Dieu a tout créé, nous sommes tous ses créatures et rien d’autre ne compte. C’est la seule configuration possible de notre relation avec Dieu. C’est aussi ce qui apparaît de manière claire et convaincante dans la poésie religieuse du grand philosophe juif de tendance néo-platonicienne, Salomon Ibn Gabirol (1021-1070). xx

Le grand diwân d’Ibn ‘Arabî pourrait, lui aussi, s’intituler “À la recherche de l’amour de Dieu“. Les éditeurs ont trouvé une très belle formule : un geste d’amour d’un Dieu qui aspire à l’amour. C’est une dialectique bien connue qui oppose la peur de Dieu à l’amour de Dieu.

Contrairement aux penseurs gréco-arabes qui ont largement repris la division tripartite de l’âme humaine, les mystiques en ont fait une véritable étincelle divine qui se consume d’amour pour son créateur. Il faut donc se connaître soi-même, le fameux ” connais-toi toi-même. ” xxi

Cette maxime de Delphes xxii a retenu l’attention des théologiens des trois religions monothéistes. Les Arabes n’ont pas fait exception, mais ils l’ont adaptée à leur situation religieuse. Chez eux, cela donne : ” Ô homme, connais ton âme et tu connaîtras ton Dieu ” (a’raf nafsaka ya insane wa ta’raf rabbaka).

La Bible hébraïque a la même résonance lorsqu’elle dit : ” reviens à ton cœur et le Seigneur ton Dieu reviendra à toi … “(we-chavta el levavékha we shav ha-Shem élohékha lakh …).

Tous les mystiques luttent avec le langage dont ils sont tributaires pour exprimer des expériences intérieures ineffables. Le Psalmiste dit qu’il soupire après Dieu : (ken nafchi ta’arog lékha Elohim, tasm’a nafchi l’Elohim) ce qui signifie : ” Il a soif, soif de Dieu. ” (Cf. Le Grand Diwan). xxiii

Mais comment Ibn ‘Arabî en est-il venu à la poésie ? Il nous parle de sa première rencontre avec la poésie, alors qu’elle était étrangère à son univers. Il nous parle d’une partie de sa vie où il était militaire de l’armée almohade, puis de son emploi de secrétaire à la même cour sultanesque almohade. Après cette période et cette expérience, il voit en rêve les trois envoyés Moise, Jésus et Muhammad qui lui donnent chacun une instruction.

Puis il nous parle d’une deuxième vision où il voit un ange qui lui apporte la sourate des poètes toute brillante de lumière et il l’avale. Il a senti un poil pousser dans sa poitrine et grandir pour devenir un animal avec une tête, une langue, deux yeux et deux lèvres. L’animal jaillit de sa poitrine pour couvrir les deux horizons, l’est et l’ouest, puis se rétracta à son point de départ. Ibn ‘Arabî commenta cette vision en disant que sa parole atteindrait l’est et l’ouest, ce qui fut le cas.

Il n’est pas nécessaire de s’attarder sur la relation entre la sourate des poètes (ash-shu’arâ’xxiv et les cheveux (sha’ra) ainsi que la poésie (shi’r). Ils dérivent tous de la même racine. S’y ajoute le mot arabe shu’ûr (perception). La racine SH’R exprime l’idée d’une connaissance immédiate et globale. La poésie est donc le lieu de cette éblouissante connaissance immédiate.

La bayt ash-shi’r, littéralement, la maison de la poésie est donc à l’image de la bayt ash-sha’r, la fameuse maison en cheveux des Bédouins, c’est-à-dire la tente qui navigue métaphoriquement sur un océan de sable dans le désert.

Le poème est un vaisseau qui permet de voyager dans des réalités supérieures comme la tente du bédouin qui voyage dans l’immensité du désert. L’initiation est donc un voyage à travers un langage poétique capable de décrire les subtilités du mundus imaginalisxxv La poésie pour Ibn ‘Arabî est aussi un mur fait de pierres, c’est-à-dire de mots.

Notes de fin de texte :

i Geoffroy, Éric. « Qu’est-ce que le soufisme ? », Laurent Testot éd., La Grande Histoire de l’islam. Éditions Sciences Humaines, 2018, pp. 78-84. https://www.cairn.info/la-grande-histoire-de-l-islam–9782361064778-page-78.htm#:~:text=1Le%20soufisme%20est,islam%20sunnite%20pour%20l’essentiel.

Le soufisme est un aspect de la sagesse éternelle, universelle, qui s’est incarné dans le corps de la religion islamique, née en Arabie au viie siècle. On peut le définir comme la dimension intérieure, spirituelle de l’islam, et de l’islam sunnite pour l’essentiel.

Parmi les diverses significations évoquées du terme sûfî, deux sont plausibles sur le plan linguistique. La première, immatérielle, fait dériver le terme du verbe arabe sûfiya, « il a été purifié ». Le but du soufisme serait donc de reconduire l’homme à la pureté originelle, dans cet état où il n’était pas encore différencié du monde spirituel. Selon la seconde étymologie, le mot sûfî dérive du mot sûf, la laine.

Le soufisme s’est développé en climat sunnite, car il est fondé sur l’intériorisation du modèle muhammadien, la sunna. La relation de maître à disciple, fondamentale, n’y a de sens qu’en référence au Prophète, le « Maître des maîtres », et tout ordre soufi trouve sa légitimité dans la « chaîne initiatique » qui remonte à lui. Les saints musulmans s’alimentent donc à l’influx béni (baraka) de celui qui est pour eux « l’Homme parfait ». “

ii Geoffrey, Eric. “ Le Mi‘raj, l’ascension céleste du Prophète Muhammad, “Saphir News du 11 mars 2021. https://www.saphirnews.com/Le-Mi-raj-l-ascension-celeste-du-Prophete-Muhammad_a27893.html

De façon générale, le Coran évoque la possibilité d’une ascension jusqu’au ciel : dans la sourate 40, verset 38, Pharaon donne à Haman l’ordre de construire un palais pour qu’il puisse atteindre les régions du ciel et monter jusqu’au Dieu de Moïse ; dans la sourate 52, verset 38, il est demandé aux négateurs s’ils ont une échelle (sullam) pour entendre la voix céleste ; dans la sourate 6, verset 35, est estimé l’effet que pourraient avoir sur les auditeurs du Prophète des signes qu’il tirerait du ciel s’il avait une échelle pour y monter. “

iii L’Arabie Heureuse désignait, pour les Grecs et les Romains, l’Arabie du Sud (actuel Yémen), relativement humide grâce à ses montagnes et à un important système d’irrigation, centre de la riche civilisation des Sabéens.

iv Joris, Michel. “Nietzsche et le soufisme : concordances spirituelles”, Philosophique [Online], 10 | 2007, Online since 06 April 2012, connection on 29 September 2021. URL: http://journals.openedition.org/philosophique/123; DOI: https://doi.org/10.4000/philosophique.123

Sous une carapace d’athéisme, on trouve dans l’œuvre du philosophe allemand des éléments hermétiques ou gnostiques qui permettent d’appréhender différemment son Dionysos ou sa volonté de puissance. Par ces aspects et au travers de l’ascétisme transvalué qu’il propose, Nietzsche est proche des conceptions du soufisme, la mystique qui a été développée à partir des sources scripturaires de l’Islam. C’est ce que montre ensuite cet article en proposant une comparaison entre le surhomme nietzschéen et la figure de l’homme partait, « el insan el kamil » d’Ibn Arabî, un des plus célèbres théoriciens du soufisme. En conclusion, l’auteur se pose la question des écrits qui auraient pu mettre le philosophe allemand en contact avec la mystique musulmane. “

v Feuillebois-Pierunek, Eve. “La maîtrise du corps d’après les manuels de soufisme (Xe-XIVe siècles), “Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée [Online], 113-114 | November 2006, Online since 10 November 2006, connection on 29 September 2021. URL : http://journals.openedition.org/remmm/2969 ; DOI : https://doi.org/10.4000/remmm.2969

vi Ghurab, M. (ed.). Kitab al-fana’ fi-l-mushâhada, in Rasâ’il Ibn ‘ArabiBeirut: Dar Sadir, 1997, pp. 15–16; cf. traduction française par Vâlsan, Michel. Le livre de l’extinction dans la contemplation. Paris: Éditions de l’Œuvre, 1984, pp. 27–30.

vii Chih, Rachida. “ Sainteté, maîtrise spirituelle et patronage : les fondements de l’autorité dans le soufisme, “ Arch. de Sc. soc. des Rel., 2004, 125, (janvier-mars 2004), pp. 79-98. https://journals.openedition.org/assr/1034?file=1

viii Chtatou, Mohamed. “Ibn Rochd (Averroès), l’homme de tous les savoirs, “Oumma du 31 mai 2021. https://oumma.com/ibn-rochd-averroes-lhomme-de-tous-les-savoirs/

ix M. Chodkiewicz. introduction to Ibn ‘Arabi. Les illuminations de la MecqueParis: Sindbad, 1989.

x Dagli, Caner K. Ibn al-‘Arabi and Islamic Intellectual Culture. From Mysticism to Philosophy. London: Routledge. 2019.

Ibn ‘Arabī (m. 1240) fut l’une des figures imposantes de l’histoire intellectuelle de l’Islam, et porte toujours parmi les soufis le titre d’ash-shaykh al-akbar, ou “le plus grand maître”. Ibn ‘Arabī et la culture intellectuelle islamique retrace l’histoire du concept d’”unicité de l’être” (wahdat al-wujūd) dans l’école d’Ibn ‘Arabī, afin d’explorer la relation entre mysticisme et philosophie dans la vie intellectuelle islamique. Il examine comment le langage conceptuel utilisé par les premiers auteurs mystiques s’est engagé de plus en plus avec le temps dans la culture intellectuelle islamique au sens large, pour finalement s’intégrer au vocabulaire philosophique et théologique commun de cette dernière. Il se concentre sur quatre générations successives de penseurs (Sadr ad-Dīn al-Qūnawī, Mu’ayyad ad-Dīn al-Jandī, ‘Abd ar-Razzāq al-Kāshānī, et Dāwūd al-Qaysarī), et examine comment ces “philosophes-mystiques” ont affiné et développé les idées d’Ibn ‘Arabī. Grâce à une analyse minutieuse des textes, l’ouvrage retrace clairement la cristallisation d’une école de pensée influente dans l’histoire islamique et sa place dans la culture intellectuelle plus large. Offrant une exploration du développement de l’expression et de la pensée soufie, ce livre sera une ressource précieuse pour les étudiants et les spécialistes de la pensée, de la philosophie et du mysticisme islamiques.

L’auteur entreprend une lecture attentive de sources primaires déconcertantes aux conclusions d’un large éventail de spécialistes, démontrant au passage ses impressionnants talents d’analyse et de synthèse. Avec une lucidité remarquable, il cisèle les longs arguments métaphysiques et en atteint le cœur en quelques phrases.

xi  Traduction partielle de Michel Chodkiewicz (1988), Albin Michel, coll. « Spiritualités vivantes », 2008, 353 p.

xii Ruspoli, Stéphane. Le Livre des théophanies d’Ibn Arabî (Patrimoines – Islam). Paris : CERF, 2000.

xiii Lory, Pierre & Stéphane Ruspoli. Le Livre des théophanies d’Ibn ‘Arabî. Introduction philosophique, commentaire et traduction annotée du Kitâb al-tajalliyât. Paris : Cerf, 2000, Abstracta Iranica [Online], Volume 23 | 2002, document 225, Online since 08 February 2010, connection on 29 September 2021. URL : http://journals.openedition.org/abstractairanica/35601 ; DOI : https://doi.org/10.4000/abstractairanica.35601

xiv En traduction intégrale par Charles-André Gilis. Paris: Éditions AL-Bouraq, 1999. Disponible dans une autre version (partielle) : La Sagesse des Prophètes, trad. partielle. Paris : Albin Michel, coll. « Spiritualités vivantes », 1974, réed. 2008.

xv Besson, Florian. “Ibn Arabî, “Les clés du Moyen-Orient du 1 avril 2013.

xvi M. Chodkiewicz. Le sceau des saints. Prophétie et sainteté dans la doctrine d’Ibn Arabî. Paris: Collection Bibliothèque des Sciences humaines, Gallimard, 1986.

Ibn Arabî – « le Maître spirituel par excellence » – exerce depuis huit siècles une influence majeure sur la mystique musulmane. Critiquée, aujourd’hui comme hier, par les adversaires du soufisme, son œuvre immense offre en particulier la première formulation globale et cohérente d’une doctrine de la sainteté en islam.

Cet enseignement, qui ne sépare jamais l’énoncé doctrinal de l’expérience visionnaire, expose une vaste typologie des saints fondée sur la notion d’héritage prophétique. Il décrit avec précision les étapes et les épreuves redoutables du voyage spirituel. Mais si cet itinéraire est d’abord une montée vers Dieu, il ne trouve son accomplissement que dans le retour vers les créatures, faisant ainsi du saint l’indispensable médiateur entre Ciel et terre.

xviii Hayy ben Yaqdhân. Roman philosophique d’Ibn Thofaîl, Alger, P. Fontana et Cie, 1900.

Hayy ben Yaqdhân, fac-similé sans le texte arabe de l’édition de 1936 parue à Beyrouth, Paris, J. Vrin, coll. « Vrin reprise », 1983.

L’Éveillé ou Le Philosophe autodidacte, Paris, Libretto no 561, 2017, 110 p. (Rivages-Poche. Petite bibliothèque, n° 974).

xix Goetschel, Roland. « Le mouvement kabbaliste de 1150 à 1492 », Roland Goetschel éd., La Kabbale. Paris: Presses Universitaires de France, 2013, pp. 61-95.

xxi Bousquet, Jean. “Inscriptions de Delphes, “Bulletin de Correspondance Hellénique, Année 1956, 80, pp. 547-597. https://www.persee.fr/doc/bch_0007-4217_1956_num_80_1_6542

xxii Provençal, Jean. Le sens premier du « CONNAIS-TOI TOI-MÊME ». Ou la connaissance de soi avant Socrate. Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en philosophie pour l’obtention du grade de maître ès arts (M.A.). Faculté de Philosophie, Université Laval, Québec, 2006.

xxiii Hammami, Omar & Patricia Mons. Le Grand Diwan. Ibn ‘Arabî. Paris : Albin Michel, Spiritualites Vivantes, Poche N° 297, 2016.

De l’œuvre poétique d’Ibn ‘Arabî, seul est connu en français son superbe Interprète des désirs, que « le plus grand des maîtres » commenta lui-même. On ignore souvent qu’il a en outre composé deux immenses recueils poétiques ou Dîwâns, pourtant très célèbres dans le monde arabe. C’est du premier d’entre eux, le « Grand Dîwân », que sont extraits les quarante-cinq poèmes traduits et commentés dans ce volume. Poèmes mystiques où se mêlent images cosmiques et descriptions charnelles, où Dieu et l’homme se rapprochent jusqu’à parfois échanger leurs rôles, ils nous initient à une vision du monde par-delà les voiles des conventions sociales et religieuses.

Omar Hammami et Patricia Mons, poètes arabisants, nous donnent les clés de lecture de ces textes envoûtants qui méritent pleinement leur place aux côtés des autres œuvres du grand maître de la mystique andalouse. “

xxiv Sourate 26 du Saint Coran: Ash-Shu’arâ’ (Les poètes), une Sourate mecquoise qui comporte 227 versets. Coran en ligne. http://www.coran-en-ligne.com/Sourate-026-Ash-Shu-ara-Les-poetes-francais.html

xxv Pour les soufis, le mundus imaginalis, également appelé ‘alâm al-malakût – c’est-à-dire le monde de l’âme des âmes – est le monde “réel”, dans lequel le mystère du monde caché de l’inconscient, le sens symbolique et la véritable essence de l’existence sont tous révélés.

Cf. Nouriani, D. Steven. “Mundus Imaginalis: Bridging Body and Spirit, “Psychological Perspectives, 60:3, 2017, pp. 386-394. https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00332925.2017.1350807?journalCode=upyp20#:~:text=For%20Sufis%2C%20the%20mundus%20imaginalis,of%20existence%20are%20all%20revealed.

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