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Quel Conseil Théologique du CFCM ?

 
L’Union des Mosquées de France (UMF) a exprimé ses craintes face à l’annonce faite par le bureau du CFCM de la mise en place de ce qu’il  a appelé le « Conseil Théologique du CFCM ». Cette annonce, via un communiqué de presse daté du 8 mai 2016, avait surpris les membres du Conseil d’Administration (CA) du CFCM et les présidents des CRCM qui n’ont été ni consultés ni informés de cette décision. 
Dans une déclaration au site saphirnews.com[1], le mercredi 11 mai 2016, le président du CFCM, M. Anouar Kbibech, qui juge ma réaction et celles des administrateurs dont six présidents de CRCMs « précipitée » se défend d’avoir commis une erreur : « Parler d’une surprise est totalement inapproprié alors que le conseil théologique est un vieux projet du CFCM (…) C’est un projet qu’on voulait concrétiser de longue date. (…) Dans mon discours d’orientation générale, j’avais fixé la mise en place d’un conseil théologique – qu’on appelait à l’époque commission théologique – comme une des priorités de la direction collégiale ». Dans cette même déclaration, il dit que « le projet a été évoqué publiquement à de multiples reprises, dernièrement lors de la réunion de l’instance de dialogue avec l’islam en mars dernier».
Le président du CFCM considère le fait d’avoir évoqué à certaines occasions son intention de mettre en place ce conseil théologique est synonyme de concertation et de consultation. Le discours d’orientation générale dont il parle a été prononcé devant des journalistes lors d’une conférence de presse. Les administrateurs ont en pris connaissance par la presse!
Entre évoquer dans un discours l’intention de proposer un projet de conseil théologique et le mettre en place, il y a bien une différence ! Les administrateurs et les présidents des CRCMs doivent être parties prenantes du projet dans ses différentes étapes.  Comme dans toute association, les grandes décisions sont prises par leur Conseil d’Administration qui charge le bureau exécutif de les mettre en oeuvre. Ne pas associer les administrateurs au processus de concertation sur les modalités de la mise en place de ce « Conseil Théologique »  et annoncer la clôture de sa première réunion, via encore un communiqué de presse à une semaine de la réunion du Conseil d’Administration, est plus qu’une erreur, c’est une faute.
Par ailleurs, le président du CFCM interrogé sur les membres de ce « Conseil Théologique », nous apprend qu’ils sont au nombre de 22. Leur liste qui n’a pas encore été rendue publique « va être soumise au Conseil d’Administration ce samedi et elle devrait être élargie avant la première session du conseil théologique, après l’été et le Hajj, probablement entre octobre et mi-novembre»[2]. A noter que l’ordre du jour de ce CA de samedi ne fait aucune allusion à ce sujet, à moins qu’il le considère comme un simple point dans la rubrique « Divers ».
Au-delà de ces considérations et de ce manque manifeste de concertation à ne pas sous-estimer, il convient de dire un mot sur le fond du sujet en partant du contenu du communiqué du CFCM du 8 mai 2016.
Je cite : « La mise en place du Conseil Théologique du CFCM, (…), a pour objectif notamment d’engager la réflexion et l’effort intellectuel (Ijtihad) sur la « contextualisation » de la pratique religieuse en France. Il pourra ainsi contribuer à l’effort de la Réforme qui a toujours été porté par les savants musulmans. Le Conseil Théologique est composé des Savants et des Théologiens désignés par les Fédérations et les Grandes Mosquées statutaires du CFCM. Le Conseil Théologique pourra être élargi ultérieurement sur décision du Bureau du CFCM à d’autres Savants ou Théologiens, au-delà même des Fédérations et des Grandes Mosquées.»
En d’autres termes, le président du CFCM nous dit que les membres de ce conseil désignés par les fédérations et les mosquées statutaires sont des savants théologiens habilités à faire l’effort de l’ijtihad afin de contextualiser la pratique religieuse musulmane en France et qu’il sera élargi sur décision du bureau exécutif et non du Conseil d’Administration du CFCM.
Les mots ont un sens ! « Savants théologiens habilités à faire de l’ijtihad » est un titre dont il faut connaître la portée avant de le décerner aux désignés. Ces derniers, j’en suis convaincu, n’oseraient pas revendiquer, en leur âme et conscience, cette reconnaissance et ce titre de responsabilité chargé d’une dimension particulière.
Les musulmans, en premier lieu les administrateurs du CFCM, ont le droit d’être informés sur quels critères ces « savants théologiens, habilités à contextualiser la pratique religieuse musulmane en France » ont été désignés et reconnus comme tels ?
Le bureau du CFCM ne peut pas créer un tel conseil et conférer à ses membres de tels titres. Il n’en a ni les moyens ni les compétences.
Après avoir organisé plus d’une douzaine de rencontres régionales avec des centaines d’imams et d’aumôniers, notamment sur la question de la radicalisation, l’Union des Mosquées de France avait préconisé plusieurs recommandations. La première étant la création de conseils d’imams et d’aumôniers au niveau régional et national. De nombreux acteurs musulmans confrontés également aux réalités du terrain sont arrivés à la même conclusion.
Les conseils régionaux permettraient aux  imams et aumôniers confrontés aux défis quotidiens des musulmans de France d’avoir des espaces de dialogue et de réflexion permanents. Le conseil national serait l’émanation de ces conseils régionaux. Il aura  leur reconnaissance et leur adhésion et facilitera la transmission et la diffusion de ses avis et recommandations. De ce fait, le CFCM n’aura pas la lourde et délicate responsabilité de décerner aux membres du conseil des titres autres qu’imam qu’ils ont déjà de par leur fonction.
Enfin, il est fort à craindre que le manque de concertation et l’opacité qui entourent la mise en place de ce « Conseil théologique » vont engendre chez les musulmans de France l’incompréhension et des interrogations, voire le rejet de tout ce que ce conseil pourrait proposer.

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