in

L’heure du choix

Quelques aspects purement politiques

Depuis 1989, je me suis attaché à conseiller et à défendre les filles qui souhaitaient porter le foulard. Vous pouvez imaginer ce que j’ai pu vivre en termes de drames personnels, de menaces, de contraintes, de révoltes, d’obstination, de victoires et d’échecs, de joies et de peines…

Le Conseil d’État, arbitre suprême de nos libertés laïques, avait trouvé un équilibre qui permettait aux filles attachées à la pratique de cet aspect de la religion de défendre leur point de vue sans que celles qui agissaient sous une éventuelle contrainte ne soient empêchées de s’en émanciper. Les musulmans respectaient ces arbitrages, seule une petite minorité de l’encadrement scolaire refusait la jurisprudence extrêmement claire, les cas litigieux allaient en diminuant d’année en année.

Jusqu’à ce que l’équipe politique dirigeant notre pays décide de faire de la lutte contre le foulard islamique à l’école son principal cheval de bataille électoral. Le but évident était d’utiliser cette diversion pour ne pas parler du bilan catastrophique des deux premières années de gestion du pays par l’UMP érigé en parti unique de gouvernement.

Exit donc les turpitudes de certains énarques corrompus et patrons voyous qui ont eu l’intelligence d’investir massivement dans les deux seules organisations politiques capables à terme de diriger le pays : le Parti Socialiste d’un côté, l’UMP de l’autre. Exit l’augmentation de la pauvreté et de la précarité d’un nombre toujours croissant de citoyens. Exit le démontage de pans entiers du service public. Exit les sommes colossales que le contribuable français va devoir payer au titre de la corruption et de la gestion catastrophique d’entreprises liées à l’État, que ce soit dans l’affaire « Executive Life », à E.D.F. ou dans l’affaire des frégates de Taiwan, pour ne citer que les plus récentes. Exit enfin la réforme des retraites des fonctionnaires, la diminution des libertés publiques de la loi Perben 2. Le débat sur le foulard islamique a permis d’anesthésier l’opinion publique, de focaliser son attention sur ce sujet primordial… Dans ce cas précis, la religion a bien fait office d’opium du peuple, mais pas dans le sens prévu par Marx…

Outre cette évidente défocalisation, ce faux débat cache une manœuvre politique plus perverse. Le débat sur le foulard islamique à l’école, pudiquement maquillé en une « réflexion globale sur la laïcité » qui ne trompe personne, doit jouer le rôle tenu lors de l’élection présidentielle d’avril 2002 par le débat sur l’insécurité.

Publicité
Publicité
Publicité

Il s’agit de déplacer le centre de gravité politique du pays du conflit traditionnel droite-gauche à l’intérieur duquel on retrouve une répartition de quarante-neuf à cinquante et un pour cent des électeurs alternativement pour l’un et l’autre camp vers une confrontation droite-extrême droite par laquelle le parti présidentiel obtient quatre-vingts pour cent des suffrages contre vingt pour cent aux nationalistes extrêmes. Il s’agit là de répéter le « coup du 21 avril ».

Qu’importe alors de prendre le risque de réveiller de vieux démons ! Qu’importe alors de susciter la réprobation quasi-unanime de la communauté internationale qui refuse de comprendre l’exception française et qui ne voit dans ces débats que l’expression d’un racisme bien franchouillard à l’égard d’immigrés musulmans minoritaires. Une large victoire politique est trop belle, il faut bien que quelqu’un en paye le prix !

En préparation des élections du printemps 2004, le cynisme politique est à son apogée : les deux partis institutionnels, le P.S. et l’U.M.P., relèguent en position inéligible les candidats issus de l’immigration. À ces faire-valoir qui osent parfois protester, on rappelle vertement l’horreur de la classe politique française pour le communautarisme. Les bonnes intentions nationales, longuement répétées au cours des discours prometteurs ont dû faire face aux réalités locales. Il faut savoir se sacrifier pour le bien commun ! Et puis, que chacun reste à sa place tout de même ! Il y a les « maîtres » d’un côté, et les « esclaves » de l’autre ! ça n’a naturellement rien à voir avec du racisme….. C’est la laïcité à la française ! Qu’ont-ils ces immigrés récents à ne rien vouloir comprendre aux subtilités de notre société ?

Pour contrer ce mépris envers les citoyens de seconde zone, comment réagir ?

Dans une démocratie, le principal moyen qu’ont les citoyens d’exprimer leur mécontentement est de voter.

Publicité
Publicité
Publicité

Laisser un commentaire

Chargement…

0

Islam, Négritude et culture arabe : acculturation ou assimilation critique ?

Les menteurs ne passeront pas