A la suite de la succession des idéologies qu’ont été le rationalisme, l’humanisme matérialiste, l’évolutionnisme, l’existentialisme, le nihilisme, le structuralisme, et maintenant le post-humanisme nous pouvons dire que dans la quête de soi, les hommes modernes ont échoué. L’impasse, nous la ressentons tous, elle s’insinue dans les moindres recoins de nos vies ; l’impasse philosophique, religieuse, morale, politique, sociale et économique. Il y a bien une continuelle dégradation de l’homme qui s’apprête à entrer dans l’infrahumain.
Le « règne de la quantité » est le fondement de la société de l’automatisme et du calcul stratégique. C’est pourquoi l’on ne peut plus faire l’impasse sur une métaphysique des principes atemporels et anhistoriques. Sans cette métaphysique qui est le règne de l’Esprit, le temps qui se meut ne cessera d’emporter les hommes d’un mirage à un autre. Une métaphysique débouche nécessairement sur une morale qui doit incarner la doctrine du Vrai.
Si nous nous attachons à la singulière situation des communautés musulmanes nous devons avoir toute la lucidité afin de comprendre pourquoi une partie de leur jeunesse cultive une pulsion de mort qui est un déni fondamental aux valeurs morales de l’Islam. La Vérité ne s’impose pas sinon elle ne serait plus vérité.
C’est un principe métaphysique que partagent toutes les religions ancestrales. Ce qui s’impose en revanche, et ce tout le long de l’histoire, ce sont bien les « communautés de vue » ou plutôt une représentation sur un discours reconnu comme révélé. La représentation est la véritable idole que les religions ne cessent de combattre depuis leur commencement.
Selon le fameux propos du Prophète, il doit survenir une génération qui sera en rupture avec le patrimoine authentique de l’Islam. Cette génération n’aura ainsi qu’une représentation de l’Islam puisqu’elle sera dans la dénégation des savoirs pérennes, constitutifs de l’héritage commun d’une communauté de destin. Nous y voyons dans ce propos prophétique, tous ceux qui s’inscrivent dans la « contre-tradition », c’est-à-dire ces individus ayant l’habillement de l’Islam (Talbisse) mais pour mieux le saborder de l’intérieur. Et nous osons affirmer, que la modernité et ces jeunes à l’instinct de mort partagent le même horizon : le nihilisme. Ils sont les deux faces d’une même pièce.
La « modernité nihiliste » nie la réalité spirituelle, comme ce jeune à l’instinct de mort haïssant la dimension spirituelle de l’Islam. Cette modernité nie la faculté de penser (pour chacun) afin de réduire l’homme à un consommateur compulsif, comme ce jeune qui s’accoutre d’un vêtement qu’il perçoit comme « traditionnel », alors qu’il chausse des « Nikes » ; ce dernier a le comportement du consommateur compulsif et se dénie à lui-même la faculté de penser, ce qui l’empêche de voir ses propres contradictions.
La « modernité techniciste » dénie à l’homme son humanité, et ce jeune compulsif à l’instinct de mort, déteste l’homme au point d’haïr l’humanité dans toute sa diversité qu’il veut détruire. La « modernité égoïste » est fondée sur le ressentiment à l’instar de l’idéologie mortifère à laquelle adhère ce jeune salafo-whahhabi.
La « modernité individualiste » atomise la société afin que les hommes, comme les atomes, ne se distinguent plus les uns des autres comme notre jeune à la pulsion de mort récusant la divergence interprétative des textes en ramenant la lettre à une linéarité appauvrissante en la dénuant de l’Esprit qui la nourrit.
A partir de ce que nous venons d’exposer, nous pouvons faire une lecture plus précise de notre devenir comme musulman en contexte moderne. Effectivement, nous sommes entrés dans l’ère de la « mal-croyance » dont il conviendra dans un avenir proche d’en faire une esquisse psychologique plus détaillée. Nous sommes en face d’une génération de musulmans français structurée par la « mal-croyance » et qui est donc à rebours de « l’homme testimonial » tel que voulu et décrit dans le Coran (la sourate 17 en donne la définition).
Ce symptôme a pour cause l’amnésie historique, l’analphabétisme spirituel et la négation tout à la fois de la métaphysique et de la morale. Il ne reste plus pour le « mal-croyant » qu’une représentation déformée de l’Islam qu’il fait émerger instantanément de lui-même, d’une psychologie malade. La maladie provient de cette culture d’un mental aux surgissements instantanés sans plus aucune filiation à la fois métaphysique et morale.
Il faut que nos concitoyens comprennent, que ce qui structure actuellement l’homme-musulman est la « mal-croyance » avec tous les maux qui en découlent : un ressentiment dû au mal-être que génère ce déséquilibre, et une distorsion de l’altérité qui est vue comme un formidable miroir inversé. Par là même, l’autre m’apparaît comme insupportable puisque ne pouvant plus harmonieusement accueillir la différence, l’altérité doit devenir une différance pour ne plus jamais se présenter à moi.
Etrangement, la modernité et cette « mal-croyance » comportent les mêmes causes et les mêmes symptômes : ces deux horizons nihilistes effacent les aspérités humaines cherchant à récuser la partie intemporelle de l’homme pour l’abandonner à son instant qui se répète et le dénuant ainsi, de son passé et de sa destinée métaphysique. Une partie de notre jeunesse de culture musulmane, dans nos banlieues, est en réalité travaillée et structurée par la « mal-croyance » potentiellement nihiliste, une génération Z comme zéro futur et zéro espérance.
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