Il a fait mentir superbement tous les Cassandre de l’Etat de Virginie, et laissé fort déconfits ou cramoisis de colère les islamophobes qui y sévissent, Qasim Rashid, un avocat et fervent militant des droits de l’homme, vient de graver son nom dans l’histoire du Parti démocrate et de la politique américaine.
Plébiscité par son camp, il est en effet devenu, mardi 23 juin, le premier musulman à remporter une primaire à l’échelle locale, et de surcroît dans la course effrénée au Congrès. Une course qui s’annonce haletante et palpitante, et sans doute jalonnée de coups bas, puisqu’elle l’opposera au vieux briscard Républicain qu’est Robert Wittman, un parlementaire qui règne sur son fief sans partage depuis 2007.
A l’annonce de son éclatante victoire interne, le premier champion d’origine pakistanaise des Démocrates dans une Virginie verdoyante, que son adversaire a longtemps pris pour sa propre baronnie, a fendu l’armure.
Devant les médias, la carapace qu’il s’est forgée au fil des années, à mesure que sa notoriété grandissait, a fini par se briser, laissant transparaître un homme heureux mais aussi bouleversé, ne pouvant s’empêcher de songer au long chemin parcouru pour en arriver là. Un chemin souvent tortueux, parsemé d’embûches et de préjugés ravageurs qui lui ont valu des courriers orduriers et menaçants tout au long de sa campagne, mais aussi fermé de nombreuses portes par le passé, dont celles d’un cabinet d’avocats prestigieux.
« Il y a 10 ans, alors que je correspondais parfaitement au profil recherché, un grand cabinet d’avocats a refusé de m’embaucher et n’a pas pris de gants pour justifier son refus. « Vous faites trop musulman et vous risquez de rendre les clients mal à l’aise », selon les propres termes des responsables. Je ne déforme pas leurs propos, ni ne les exagère », s’est-il remémoré dans un communiqué, puis dans un tweet, avec un sentiment d’amertume que le temps n’a pas émoussé. « Cette entreprise a depuis fermé ses portes », a-t-il ajouté sans le moindre esprit revanchard, mais simplement pour mieux mettre en lumière la grande priorité de son engagement politique : « Mon combat pour la justice ne s’arrêtera pas».
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« Ma foi m’apprend à servir toute l’humanité », a écrit le très pieux Qasim Rashid sur Twitter, en forçant le respect de tous sur les réseaux sociaux. C’était en mars dernier, alors que bien des espoirs se cristallisaient autour de sa candidature et qu’un certain engouement commençait à naître autour de lui, Oscar Dillon, un habitant de Fredericksburg, choisissait ce moment précis pour déverser son fiel en quelques tweets ignobles, le traitant de « sale musulman », de « balayeur » ou encore de « terroriste en puissance » voulant « imposer la loi de la charia à Washington », tout en le sommant de « rentrer chez lui ».
Bien qu’ayant le cuir épais, Qasim Rashid, profondément blessé, a très vite redouté l’impact des mots sur l’opinion et, pire encore, qu’ils puissent armer le bras de fous furieux, avant finalement que l’empathie ne l’emporte.
En effet, celui qui n’était encore que candidat à l’investiture Démocrate fut particulièrement touché par l’impasse inextricable à laquelle se trouvaient acculés Oscar Dillon et son épouse malade, comprenant dès lors que sa détestation de l’altérité pouvait avoir été exacerbée par une cause extérieure : un surendettement insurmontable. Ni une ni deux, Qasim Rashid lança une campagne de collecte de fonds GoFundMe, afin d’aider son détracteur plein de hargne à « couvrir ses frais médicaux écrasants ».
Quelques jours plus tard, une improbable rencontre a eu lieu… Après s’être confondu en excuses, se disant sous l’influence de la propagande islamophobe « trumpienne », Oscar Dillon a pu exaucer son souhait le plus cher : rencontrer Qasim Rashid, sa victime expiatoire. Une photo saisissante a immortalisé l’instant, suspendu dans le temps, du rapprochement entre le premier candidat musulman au Congrès de Virginie et le citoyen qui l’avait si injustement et odieusement diabolisé.
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