in

Lyon : un sans-papiers tunisien accusé de « mise en danger de la vie d’autrui » après s’être immolé par le feu

Depuis mercredi dernier, l’étincelle du désespoir, qui a transformé en torche humaine un sans-papiers tunisien de 22 ans, s’est répandue comme une traînée de poudre dans l’enceinte du tribunal de Lyon et au-dehors, tant l’inhumanité du parquet a choqué les esprits, s’avérant digne d’un régime autocratique où l’immolé par le feu est accusé d’être un pyromane… Un ahurissant bûcher de la double peine au pays des droits de l’Homme, dont on se demande si même Ben Ali aurait osé le dresser à ses heures les plus mortifères.

Sans état d’âme, les juges des libertés et de la détention, qui devaient statuer ce jour-là sur le cas de deux « retenus » étrangers, dont ce jeune homme menacé d’expulsion et résolu à s’extraire de l’inextricable en s’aspergeant d’essence lors de l’audience publique, n’ont fait preuve d’aucune commisération à son égard, et c’est un euphémisme…

Rapidement secouru par quatre policiers, le Tunisien, hospitalisé pour des blessures légères, a été aussitôt reconduit à la case départ, le centre de rétention administrative de Lyon, où un traitement de faveur l’attendait : placé d’abord à l’isolement, il s’est vu signifier sans délais sa mise en garde à vue aux motifs qui laissent pantois : « tentative de soustraction à une mesure d’éloignement » et « mise en danger de la vie d’autrui ».

Comme si le glaive de la justice n’était pas assez acéré, le procureur général demandait vendredi son placement en détention provisoire, atteignant là les limites de l’iniquité et du supportable pour nombre d’avocats en charge des permanences pour les étrangers, saisis d’effroi devant un tel acharnement judiciaire frisant l’ubuesque.

La « commission droit des étrangers » du barreau de Lyon, le syndicat de la magistrature, tous se sont dits atterrés par la tournure d’une affaire qui fait passer pour un crime un geste désespéré, dont la seule et unique victime est l’auteur de l’acte lui-même.

Publicité
Publicité
Publicité

"Le parquet fait preuve d’incohérence. Le procureur nous dit que la tentative de suicide est bidon. Mais à ce compte-là pourquoi le poursuivre pour mise en danger de la vie d’autrui ? Après avoir poursuivi ceux qui aident les étrangers en situation irrégulière, on pénalise désormais un comportement qui marque le désespoir. La justice pénale a d’autres choses à faire, surtout sous un gouvernement de gauche", a fustigé  la présidente du syndicat, Françoise Martres.

Brûler à l’âge de tous les possibles, quand on a que la désespérance pour horizon, semble avoir consumé la raison du tribunal de Lyon, se croyant sans doute revenu aux temps moyenâgeux de l’Inquisition. Au cours de ce même vendredi de la honte judiciaire, un juge d’instruction a fort heureusement réagi promptement en désavouant le procureur général, permettant ainsi au jeune Tunisien d’échapper à une incarcération certaine pour lui conférer le statut de témoin assisté, comme le rapporte Rue89.

Alors que ce dernier, assisté d’un avocat, est condamné pour l’heure à attendre que la justice passe derrière le grillage du centre de rétention, on est fondé à s’interroger sur la nature du message envoyé par le parquet de Lyon. Si c’est malheur aux sans-papiers désespérés qui auraient l’outrecuidance de perturber une audience publique dans l’enceinte d’un prétoire en commettant un geste fatal, la justice française se tirerait, elle, une balle dans le pied…

Publicité
Publicité
Publicité

Laisser un commentaire

Chargement…

0

Madonna assure étudier le Coran

Israël s’insurge contre le Conseil de l’Europe et sa résolution anti-circoncision