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L’islam en Argentine

A l’heure où l’Argentine en liesse célèbre ses héros du ballon rond, pourquoi ne pourrait-on pas profiter opportunément de l’occasion pour braquer les projecteurs ailleurs ? En l’occurrence, sur l’islam et les musulmans qui, depuis les grandes explorations et conquêtes espagnoles des XVème et XVIème siècles, se sont ancrés au coeur de cette terre majoritairement chrétienne.  

Saviez-vous que la religion musulmane connaît un bel essor en Amérique Latine, et que l’Argentine, terre du défunt Maradona, la légende du football, mais aussi de la sanglante dictature militaire des années 70-80, compte en son sein bien plus de citoyens de confession musulmane qu’on ne l’imagine ?  

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Saviez-vous que les deux premières mosquées qui y ont été érigées sont sorties de terre en 1983 et 1985, et que le prestigieux Centre culturel islamique du Roi Fahd (photos ci-dessus et ci-dessous), à Buenos Aires, est le plus grand d’Amérique Latine ?

C’est ce coup de projecteur édifiant que donne la vidéo ci-dessous, tout en mettant en lumière un constat : alors qu’un certain nombre d’Argentins musulmans et arabes ont fini par perdre leur identité religieuse en se fondant dans le moule, notamment à travers les mariages mixtes, beaucoup d’entre eux restent toutefois fermement attachés à leur foi, aux valeurs et aux traditions islamiques.

Quant à la nouvelle génération, une exigence urgente se fait jour : pouvoir bénéficier d’un enseignement de l’islam en langue espagnole, fiable et de qualité.

Voir la traduction d’Oumma ci-dessous

Le Mondial 2022 aura permis de promouvoir l’islam et de mieux connaître les musulmans,
grâce aux efforts déployés dans ce sens par les autorités qataries.
Alors que nous avons lu ou entendu parler de plusieurs conversions à l’islam pendant le Mondial, il est intéressant d’en savoir plus sur les minorités musulmanes qui vivent dans des pays non musulmans.

L’Argentine, qui s’étend sur un vaste territoire de 2,8 millions de km² (soit cinq fois la France) est réputée pour ses prouesses sur les terrains de football, ainsi que pour la qualité de ses vins, sa cuisine délicieuse et ses monuments historiques emblématiques.

Avons-nous jamais imaginé que l’Argentine comptait des musulmans pratiquants en son sein ?
La réponses est NON, car les minorités musulmanes en Amérique Latine ont jusqu’ici suscité un bien moindre intérêt que leurs coreligionnaires vivant en Europe et aux Etats-Unis.

L’islam est une religion en plein essor en Amérique Latine. Un développement notable que les politiciens n’ont pas encore officiellement reconnu. Selon l’Association ayant vocation à archiver les données religieuses, environ 2% des Argentins sont de confession musulmane et se revendiquent comme tels. L’identification religieuse n’est ni remise en question, ni prise en compte par les statistiques du recensement national.

L’Argentine est une terre chrétienne. En tant que nation sécularisée, les musulmans ont le droit d’y construire leurs mosquées et de recourir à la Da’wa pour propager le message de l’Islam et y faire adhérer plus de personnes.

La loi en Argentine interdit toute forme de discrimination religieuse. Elle sanctionne sévèrement ceux qui s’en rendent coupables, soit en les condamnant à de lourdes amendes, soit à de la prison ferme. C’est quelque chose que nous ne voyons pas partout, notamment dans d’autres pays plus développés ou faisant partie des grandes nations, là où l’islamophobie et les actes islamophobes sévissent, frappant des musulmans qui vivent en marge.

Comment l’islam est-il arrivé en Argentine ? La présence musulmane en Argentine remonte au temps lointain des grandes explorations et expéditions maritimes espagnoles, durant les XVème et XVIème siècles. Alors que les explorateurs espagnols sillonnaient le monde, à la conquête de pays afin de les placer sous le joug de la monarchie espagnole, les Maures morisques, ces musulmans issus de la péninsule ibérique et d’Afrique du Nord, avaient rejoint les équipages des expéditions maritimes.

Nombre d’entre eux firent définitivement escale en Argentine, fuyant les persécutions qui les frappaient en Espagne. L’Eglise catholique romaine, de concert avec la monarchie espagnole, les forçait à se convertir au christianisme, sous peine d’être condamnés à l’exil, l’Espagne ayant alors déclaré hors-la-loi la pratique de l’islam sur son sol.

Les monarchies unifiées d’Espagne et du Portugal se sentaient menacées par cette présence musulmane, redoutant qu’elle n’entraînât des invasions de la part de l’Empire ottoman, après la chute de Constantinople. Ainsi, nombreux furent les musulmans qui s’enfuirent d’Espagne et embarquèrent à bord des bateaux qui naviguaient autour du monde. Au 19ème siècle, l’Argentine a vu une immense vague d’Arabes, de Syriens et de Libanais s’installer à l’intérieur de ses frontières. Il est à noter que ces Arabes n’étaient pas musulmans, mais chrétiens.

Les deux premières mosquées à s’implanter en Argentine furent construites dans les années 80. La première, la mosquée AT Tauhid, destinée à la communauté chiite, vit le jour à Buenos Aires en 1983, grâce au soutien de l’ambassade d’Iran. La deuxième mosquée Al Ahmad, destinée à la communauté sunnite, sortit de terre en 1985, et fut le premier édifice à se démarquer dans le paysage par son architecture typiquement islamique. Cette imposante mosquée bénéficia du soutien du roi Fahd, le souverain de l’Arabie saoudite de l’époque.

Le prestigieux Centre culturel islamique du roi Fahd fut construit en 1996. C’est indéniablement le plus grand d’Amérique Latine. Outre sa mosquée, il comprend 2 écoles, une bibliothèque et est entouré de jardins verdoyants.

La plupart des musulmans ont été ignorés de leurs concitoyens argentins jusqu’en 1989, lorsque l’un d’entre eux accéda au pouvoir suprême : Carlos Menem. Fils d’un couple de syriens ayant émigré vers l’Argentine, Carlos Menem devint le premier président de la Nation argentine d’origine arabe et de confession musulmane. Malheureusement, il abandonna sa foi islamique pour se convertir au catholicisme, et ce, uniquement pour assouvir ses ambitions.

Bien que converti, ses racines se sont rappelées à lui, au point de faire un don substantiel à la Mosquée King Fahd, en vendant un terrain de plus de 3 hectares. Les Argentins musulmans considèrent d’ailleurs que cette mosquée prestigieuse est la pierre angulaire de l’héritage de Menem.

Durant les 19ème et 20ème siècles, près d’un demi-million de musulmans firent de l’Argentine leur terre d’asile. En dépit de l’accroissement de la population musulmane, le nombre de musulmans, s’identifiant comme tels, a étonnamment stagné.

C’est une triste réalité. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce phénomène : nombre d’Argentin(e)s de confession musulmane ont épousé des non-musulman(e)s, contractant des mariages mixtes, leurs enfants n’ayant de fait qu’un seul parent musulman et ne reconnaissant pas l’arabe comme leur première langue.

Ceci a conduit au fait que beaucoup d’entre eux ne peuvent ni ne savent lire le Coran, et sont incapables d’accéder à la littérature, au savoir islamiques, d’autant plus que les transcriptions ou traductions du Coran ne sont pas disponibles gratuitement.

A cela s’ajoute le manque de centres d’études islamiques, tels que des Madrassas. C’est un grave problème auquel se heurtent les jeunes argentins musulmans qui aspirent à étudier leur religion, mais dans une langue qu’ils maîtrisent parfaitement, à savoir l’espagnol. 

Une partie des musulmans sont si bien intégrés en Argentine, en adoptant ses us et coutumes, qu’ils ont fini par perdre leur propre identité, notamment religieuse. 
Force est de constater également que le nombre de fidèles qui accomplissent leur devoir religieux, lors de la grande prière collective, est plutôt bas. Ainsi, ils ne sont qu’une vingtaine à se recueillir, chaque vendredi, dans la grande Mosquée de Buenos Aires, ce qui est très insuffisant pour un pays où résident 1 million et demi de musulmans.

On observe aussi que les musulmans qui aspirent du fond du coeur à approfondir leur connaissance de l’islam, de ses principes fondamentaux, qui désirent assister à des programmes spécifiques sont des convertis à l’islam. Ceux qui sont nés musulmans ne montrent pas l’engagement dont font preuve ceux qui ont choisi d’embrasser l’islam, en d’autres termes, qui sont revenus à l’islam.

En 2011, une loi autorisant les femmes musulmanes à porter le hijab dans tout l’espace public, sans craindre la moindre persécution, a été promulguée. Dans cette droite ligne, les femmes argentines musulmanes sont autorisées à poser voilées sur leurs photos d’identité. Cette loi garantit la liberté de religion et d’expression.

Autre fait notable : l’islam fait beaucoup moins peur en Argentine qu’aux Etats-Unis et en Europe, même si toutefois, l’islamophobie galopante et l’impact négatif des médias occidentaux ont rendu difficile la pratique assidue de leur foi pour certains Argentins musulmans.

D’un autre côté, il y a un bon nombre de musulmans qui restent fermement attachés à leur foi, aux traditions et valeurs islamiques, transmises de génération en génération. Actuellement, une exigence urgente se fait jour pour les jeunes argentins musulmans : pouvoir bénéficier d’un enseignement de l’islam en langue espagnole, qui soit fiable et de qualité.

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Enfin, si l’intérêt pour l’islam n’a cessé de croître en Amérique Latine en général, et en Argentine en particulier, c’est en grande partie grâce au rôle impartial crucial joué par les différents gouvernements en place et leurs populations respectives, lesquels n’ont jamais cherché à polluer la vraie nature de l’islam et l’authenticité de son message, qui prône la paix, la tolérance, la gentillesse.

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Un commentaire

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  1. J’ai bien ri en lisant l’article.
    Ainsi donc, il faudrait regretter les mariages mixtes, parce que les enfants ne deviennent pas musulmans ?
    Et chaque fois qu’il y aurait un mariage, le conjoint devrait se convertir ? A l’islam bien sûr ?
    On appelle ça de la colonisation culturelle.

    “Une partie des musulmans sont si bien intégrés en Argentine, en adoptant ses us et coutumes, qu’ils ont fini par perdre leur propre identité, notamment religieuse” :
    C’est quand même mieux que de voir ce qui se passe dans nos banlieues, où de petites crapules vendant de la drogue, mais quand même de culture musulmane, nous posent bien des soucis.

    Cette situation peut finir en guérilla civile. J’envie l’Argentine. Qui ne compte encore que peu de musulmans. Après viennent les problèmes, au-delà d’un certain seuil…

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