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Le musulman entre la dévotion et la distraction, entre la piété et le plaisir

La vie n’est pas un long fleuve tranquille. Elle est faite de hauts et des bas, plus souvent de bas que de hauts d’ailleurs, avec des moments de peine et de tristesse, des soucis ou des blessures, des périodes de doute et de remise en question. Nous éprouvons souvent le besoin de souffler, de respirer, d’oublier ou de faire une pause, physiquement mais aussi intérieurement, dans notre tête, dans un quotidien si difficile, si tourmenté et parfois si insoutenable.
Mais voilà, le besoin de se reposer, d’oublier ou de se détendre peut être source de conflits chez les musulmans qui posent sans cesse la question de savoir si les divertissements sont conformes aux valeurs de l’islam.
Les musulmans peuvent-ils se laisser aller sans avoir à se sentir coupables ? Ont-ils le droit de rire ou même sourire, se distraire ou se divertir sans se sentir mal ou négligents par rapport au Tout Pardonnant?
Peuvent-ils prendre le temps de souffler, exprimer leur joie de vivre ou simplement vivre leur vie, sans qu’on leur dise : ce n’est pas “islamique”, ce n’est pas conforme à la “sunna”, c’est une “bid’a”[1] ou pire encore, c’est “haram”[2] ?
Ont-ils le droit de rechercher la beauté et la satisfaction esthétique, écouter la musique ou aller au cinéma sans être rappelés à l’ordre par la police de la pensée ?
Ce n’est là qu’un petit échantillon des très nombreuses questions qui préoccupent les musulmans d’aujourd’hui et occupent leurs discussions au quotidien. Nous assistons impuissants, étranglés par la tristesse et la culpabilité, à ce triste spectacle ou l’islam est tronqué et réduit à l’application d’un code pénal atemporel et inhumain, comme on le voit dans certains pays dits  “musulmans.”
En réalité, ces débats interminables, tristes et stériles montrent la paresse intellectuelle, la superficialité dans la réflexion et le manque de discernement qui sévissent cruellement dans les sociétés musulmanes. Beaucoup de musulmans continuent à se disputer à coup de versets du Coran, de “hadiths”[3] ou de propos de tel ou tel savant musulman considéré comme plus sûr, plus honnête ou plus compétent que tel autre.
Un jour, un des scribes (secrétaires) du prophète (Psl), le compagnon Handhala al-Ussaydi, voulant démêler les fils des sentiments contradictoires qui l’assaillaient, rencontra Abu Bakr qui lui dit : “Comment te sens-tu ce matin Handhala ?”.
“Je me sens hypocrite”, lui dit-il.
“Gloire à Dieu, te rends-tu compte de ce que tu dis ?” dit Abu Bakr, surpris et troublé par les propos de Handhala qui lui confia : “Quand nous nous trouvons en présence du prophète (psl), nous ne sommes pas loin de voir le paradis et de l’enfer quand il nous en parle. Mais lorsqu’on s’éloigne de l’envoyé de Dieu, nous sommes tellement distraits par nos femmes, nos enfants et nos affaires que nous oublions ses paroles.”
Vivant ces mêmes tensions, Abu Bakr lui confie alors : “Par Dieu, je ressens exactement la même chose que toi”. Ils s’en allèrent ensemble voir le prophète (Psl) pour le questionner sur ces sentiments apparemment contradictoires et faire le point sur l’état de leurs cœurs. Handhala expose ses sentiments et ses préoccupations au Prophète (psl) et lui exprime la nature de ses doutes et le prophète (Psl) lui répond : “Par celui qui détient mon âme entre Ses Mains, si vous aviez le pouvoir de demeurer dans l’état spirituel où vous êtes quand vous êtes en ma compagnie et dans le souvenir permanent de Dieu, les anges vous salueraient et vous serreraient les mains dans vos lits et sur les chemins”. “Mais il n’en est rien, Handhala, Il est une heure pour cela[4] et une heure pour cela[5] ” (il le répéta trois fois), (rapporté par Muslim).
L’islam ne s’oppose pas au bien-être et à la joie de vivre. Le prophète (Psl) nous a montré le chemin, et indiqué la voie. Il pratiquait l’humour, savait plaisanter, écoutait la poésie et aimait le beau car “Dieu est beau et Il aime le beau” (rapporté par Muslim). Etre avec Dieu, ce n’est pas être sérieux en permanence, toujours prier ou lire le Coran, ne jamais se relâcher et avoir en permanence les yeux fixés sur l’au-delà, ses récompenses et ses châtiments. “Il y a un moment pour les choses de ce bas monde et un moment pour l’au-delà” dit le prophète (Psl).
Sourire à la vie, faire du sport, écouter la musique, voir un bon film ou une pièce de théâtre ne constitue aucun mal en soit. Dans le domaine de “Al-mu’âmalât”, c’est-à-dire les affaires sociales, “tout est permis sauf ce qui est explicitement interdit par un texte[6]” stipule la règle juridique bien connue. Il y a certes des excès qui sont effrayants. Chercher le plaisir pour le plaisir, au risque de se déshumaniser, est évidemment contraire aux valeurs de l’islam.
Prier avec amour, lire le coran avec méditation et se souvenir de Dieu tout en profitant pleinement de la vie sans se perdre et sans oublier le Tout pardonnant au risque de s’oublier, telles sont les conditions de l’équilibre émotionnel, physique et spirituel que beaucoup de musulmanes et de musulmans ont du mal à construire et respecter.
[1] Innovation.
[2] Illicite ou non permis
[3] Paroles du prophète (Psl)
[4] La dévotion, les soucis de l’au-delà
[5] Le repos, la distraction dans ce bas monde
[6] Texte : un verset coranique ou un hadith authentique

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5 commentaires

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  1. Interdiction ?
    Le Coran ne le dit nulle part et comme le rappellent si pertinemment les vrais soufis, « les silences de Dieu ne sont jamais omission », ma conviction est donc que ça n’est pas du tout interdit et en fait sans en être certain, je crois que l’interdit qui apparait dans les ahadiths ou supposés tels, a été pris de l’ancien testament (ça ne serait pas la seule fois loin s’en faut cf le « hadith » de abu houreira encore lui, sur les étapes de la création le samedi rien qui vaille, le dimanche Esther city, le lundi des non-dits et le mardi gras du bide … à un moment où n’existaient ni matin ni soir et pour cause pas de rotation de la terre autour de son astre puisqu’aucun des deux n’avait encore été créé…
    Exode 20
    « Tu n’auras pas d’autres dieux devant ma face. 4Tu ne te feras point d’image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. 5Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point; car moi, l’Eternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l’iniquité des pères sur les enfants jusqu’à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent,… »
    Qui est au passage un mensonge manifeste sur Dieu dont l’équité est telle qu’il ne punit jamais une âme du fait des fautes d’une autre…
    Sourate de l’étoile n°53
    أَلَّا تَزِرُ وَازِرَةٌ وِزْرَ أُخْرَىٰ (38)
    وَأَن لَّيْسَ لِلْإِنسَانِ إِلَّا مَا سَعَىٰ (39)
    وَأَنَّ سَعْيَهُ سَوْفَ يُرَىٰ (40)
    ثُمَّ يُجْزَاهُ الْجَزَاءَ الْأَوْفَىٰ (41)
    [38] qu’aucune âme ne sera chargée des péchés d’une autre âme, [39] que l’homme ne récoltera que les fruits des efforts qu’il aura lui-même déployés [40] et qui seront appréciés à leur juste valeur [41] pour être ensuite amplement récompensés ;
    Je disais donc que pour moi il n’y avait pas faute car le Coran ne l’interdit nulle part, mais ça va plus loin comment pourrait-il s’agir d’ « abominations » alors que l’un des plus grands prophètes de Dieu en commandait aux djinns ?
    Sourate Saba n°34
    وَلَقَدْ آتَيْنَا دَاوُودَ مِنَّا فَضْلًا ۖ يَا جِبَالُ أَوِّبِي مَعَهُ وَالطَّيْرَ ۖ وَأَلَنَّا لَهُ الْحَدِيدَ (10)
    أَنِ اعْمَلْ سَابِغَاتٍ وَقَدِّرْ فِي السَّرْدِ ۖ وَاعْمَلُوا صَالِحًا ۖ إِنِّي بِمَا تَعْمَلُونَ بَصِيرٌ (11)
    وَلِسُلَيْمَانَ الرِّيحَ غُدُوُّهَا شَهْرٌ وَرَوَاحُهَا شَهْرٌ ۖ وَأَسَلْنَا لَهُ عَيْنَ الْقِطْرِ ۖ وَمِنَ الْجِنِّ مَن يَعْمَلُ بَيْنَ يَدَيْهِ بِإِذْنِ رَبِّهِ ۖ وَمَن يَزِغْ مِنْهُمْ عَنْ أَمْرِنَا نُذِقْهُ مِنْ عَذَابِ السَّعِيرِ (12)
    يَعْمَلُونَ لَهُ مَا يَشَاءُ مِن مَّحَارِيبَ وَتَمَاثِيلَ وَجِفَانٍ كَالْجَوَابِ وَقُدُورٍ رَّاسِيَاتٍ ۚ اعْمَلُوا آلَ دَاوُودَ شُكْرًا ۚ وَقَلِيلٌ مِّنْ عِبَادِيَ الشَّكُورُ (13)
    [10] David reçut une insigne grâce de Notre part : «Ô montagnes, faites écho à ses cantiques ! Et vous, oiseaux, reproduisez-en aussi les airs !» Et Nous avons rendu le fer malléable entre ses mains [11] en lui disant : «Fabrique des cuirasses et que les mailles en soient bien ajustées ! Accomplissez de bonnes actions, car Je vois tout ce que vous faites.»
    [12] Et à Salomon Nous soumîmes le vent qui se mit à parcourir, le matin, la distance d’un mois de marche, et autant, le soir, dans le sens contraire. Et Nous fîmes jaillir pour lui la source d’airain. Par ordre de son Seigneur, des djinns étaient affectés à son service. Et Nous aurions fait goûter le châtiment du Brasier à quiconque parmi eux se serait soustrait à Nos ordres.
    [13] Ils fabriquaient pour Salomon ce qu’il voulait en fait de sanctuaires, de statues, de chaudrons pareils à des bassins, et de marmites bien ancrées. Travaillez, ô gens de David, et rendez grâce au Seigneur, car peu de Mes serviteurs sont reconnaissants.
    و الله اعلى و اعلم

    • Une fois n’est pas coutume, je vais citer un hadith mais pas n’importe lequel –oh que non- d’abord de par son contenu qui fera tilt chez tous ceux encore capables de raisonner, de comparer, de voir au-delà de la ligne d’horizon puis d’en déduire toutes les conclusions qui s’imposent, ensuite sa source : Rapporté par l’émir des croyants du hadith en personne, El darakoutni rahmatou allahi alaih (*)en plus de Al hakem, Al baihaki, Al bazzar et AL tabarani pour finalement être également authentifié par El Albani (n°2256)
      (*) Celui-là même qui déclarait et quitte à me répéter, que « la part d’authentique dans ce qui a été attribué au messager de Dieu est à l’image du poil blanc sur un taureau noir …»
      Ce que Dieu a rendu licite dans son livre est licite, ce qu’il a interdit est interdit et ce qu’il a tu, relève de son pardon/miséricorde, alors acceptez de Dieu sa miséricorde/bien être/ facilité. (**)
      (**) Sourate 19 Marie Maryam, verset 64
      ” ما أحل الله في كتابه فهو حلال و ما حرم فهو حرام و ما سكت عنه فهو عفو ,
      فاقبلوا من الله عافيته *( و ما كان ربك نسيا )* ” .
      ———————————————————–
      [1] مريم : الآية : 64 . اهـ .
      قال الألباني في ” السلسلة الصحيحة ” 5 / 325 :
      أخرجه الدارقطني في ” سننه ” ( 2 / 137 / 12 ) و الحاكم ( 2 / 375 ) و عنه
      البيهقي ( 10 / 12 ) و البزار في ” مسنده ” ( 1 / 78 / 123 – كشف الأستار ) و
      الطبراني في ” مسند الشاميين ” ( ص 416 ) من طرق عن عاصم بن رجاء بن حيوة عن
      أبيه عن # أبي الدرداء # قال : قال رسول الله صلى الله عليه وسلم : ( فذكره ) .
      و قال الحاكم : ” صحيح الإسناد ” . و وافقه الذهبي . و قال البزار : ” إسناده
      صالح ” . قلت : و هذا هو الأقرب لحال عاصم بن رجاء , فإن فيه كلاما , فقد قال
      الذهبي في ” الكاشف ” : ” قال ابن معين : صويلح ” . و قال الحافظ في ” التقريب
      ” : ” صدوق يهم ” . و لذلك قال الهيثمي في ” مجمع الزوائد ” ( 1 / 171 ) : ”
      رواه البزار , و الطبراني في ” الكبير ” , و إسناده حسن , و رجاله موثقون ” . و
      هو – أعني عاصما – ممن ذكرهم ابن حبان في ” ثقاته ” ( 7 / 259 ) , و صحح له في
      ” صحيحه ” منها حديثا في فضل طالب العلم ( رقم 88 – الإحسان ) .

    • Texte tronqué à cause de caractères spéciaux désolé, je reposte:
      Ce que Dieu a rendu licite dans son livre est licite, ce qu’il a interdit est interdit et ce qu’il a tu, relève de son pardon/miséricorde, alors acceptez de Dieu sa miséricorde/bien être/ facilité.
      «Nous ne descendons disent les anges, que sur ordre de ton Seigneur qui est le Maître de notre présent, de notre passé et de notre avenir. Ton Seigneur n’est point oublieux (**)
      (**) Sourate 19 Marie Maryam, verset 64.

    • Peut importe qui a tort et qui a raison, on verra après cette vie.
      Chez les musulmans, même les vendeurs de vêtements utilisent des mannequins sans tète.
      C’est la tète qui définit l’être vivant, le corps est une périphérique.

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