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Des filles en niqab arrêtées et conduites dans un fourgon de police

Paris mercredi 11 mai 2011. Pour la cinquième fois, Rachid Nekkaz fait parler de son association « Touche pas à ma constitution ». Il a choisi cette fois le Bristol pour sa conférence de presse un mois jour pour jour après l’application de la loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public. Encore une fois, il sera invité, pas très cordialement, au poste de police. La conférence de presse se termine par un appel au boycott sur les ventes d’armes françaises dans les pays musulmans.

Deux femmes en niqab, Lila et Sarah, attendent depuis 10h dans le hall de l’hôtel. Elles sont arrivées une heure avant le début de la conférence. Leur avance leur permet de passer entre les mailles du dispositif policier, non encore opérationnel. Trois autres femmes en niqab, qui arrivent un peu plus tard avec Rachid Nekkaz, n’ont pas cette chance. Elles sont arrêtées et conduites dans un fourgon de police pour un contrôle d’identité.

Le porte-parole de l’association « Touche pas à ma constitution », Rachid Nekkaz, accueille les participants devant l’hôtel. Apprenant que l’une des femmes arrêtées vient de faire un malaise, il s’élance en direction du fourgon. Il est alors intercepté par une dizaine de policiers qui l’embarquent sans ménagement. Encore une fois, Rachid Nekkaz ne pourra assister à la manifestation qu’il a organisée (comme le 11 avril devant Notre-Dame).

Marie, l’une des femmes interpellée, est libérée après avoir accepté de retirer son voile dans la rue. Elle rejoint Lila et Sarah. Les autres sont conduites au commissariat car elles ne veulent pas céder. La conférence de presse commence avec les trois femmes qui s’installent. Mais elles refusent aussitôt de participer tant que les autres ne sont pas libérées.

Les hommes prennent le relais

Jean-Bruno Roumegoux, président de « Touche pas à ma constitution », et Hassan Ben M’Barek, porte parole du collectif Banlieue respect, prennent la parole : « A ce jour, aucune fille voilée n’a été verbalisée. Nous disons que cette loi n’a qu’un seul but, celui de stigmatiser la communauté musulmane ».

Jean-Bruno Roumegoux commence par rappeler les quatre happenings déjà organisés par l’association : devant l’Elysée le 11 avril, à la terrasse du Fouquet’s (« haut lieu symbolique du quinquennat présent ») le 15 avril, devant l’Assemblée nationale le 20 avril, devant la mairie de Meaux le 5 mai. Ainsi qu’une prière universelle sur le parvis de Notre-Dame. Il rappelle qu’aucune amende n’a été infligée lors de ces happenings, uniquement des rappels à la loi. Seuls des procès verbaux d’audition ont été établis. « On a un réseau de 288 femmes portant le niqab. Aucune n’a eu d’amende à ce jour. »

Il développe ses craintes vis-à-vis des musulmans tout en rappelant ses origines chrétiennes. Selon lui : « Il faut toujours défendre les minorités lorsqu’on appartient à la majorité : se battre pour les minorités chrétiennes dans les pays musulmans, se battre pour les minorités juives. La population musulmane est constamment mise à l’index, montrée du doigt. Il faut lutter parce qu’on a eu de mauvaises expériences, il y a quelques dizaines d’années, en France et dans d’autres pays européens. »

Et de poursuivre : « Ce qui est très embêtant dans cette loi, c’est de l’avoir étendue à la rue. Car la rue, c’est le patrimoine de la démocratie et de la liberté. Que la loi touche l’ensemble des lieux publics, on comprend. Pour entrer dans une Poste, il est normal de présenter son visage et son identité. Mais il ne faut pas toucher à la sacralité de la liberté dans la rue. Je reviens de Londres où il n’y a aucun problème. Là-bas une femme sur deux s’habille comme elle veut. En France, c’est un coup de canif dans les traditions qui n’est pas acceptable. »

Des femmes assignées à résidence

Il insiste sur les dérives de la loi : « Le phénomène très inquiétant, ce sont ces jeunes Françaises qui ne veulent plus sortir. Sur la région de Grenoble, environ trente jeunes femmes se cloîtrent chez elles. Elles ne descendent plus. Elles sont assignées à résidence par cette loi. L’effet répressif immédiat de la loi n’a pas eu lieu. Ces femmes estiment que leur foi vaut plus que 150 euros. Ils pensaient que la loi était tellement coercitive qu’une fois appliquée, plus personne ne sortirait avec le voile intégral. Mais ce n’est pas le cas. »

Jean-Bruno Roumegoux rappelle les actes de violence qu’elles subissent : « Les gens se permettent de faire justice eux-mêmes. Hind, l’une des jeunes femmes qui a été arrêtée aujourd’hui, a reçu un coup de poing sur le visage dans la rue. Une autre a pris un caddie dans les jambes au supermarché, devant ses enfants. »

Mohamed Chanaï, membre du collectif Banlieues Respect intervient : « Ça va plus loin que le niqab. C’est aussi le débat sur l’islam. Dans les dangers qui menacent notre pays, il y a cette division de la société, notamment avec la stigmatisation de l’islam. Les actions dans lesquelles je m’investis, c’est pour dire : ça suffit ! On veut une vie citoyenne à part entière avec l’égalité, et basta. »

L’association estime avoir repris intégralement la proposition des socialistes qui approuve la loi dans les espaces publics mais pas dans la rue. Elle estime que Jean-François Copé a franchi les limites en incluant la rue. Son but : « Au moins amender cette loi sous le gouvernement actuel. On insiste sur la liberté de circuler comme on veut dans la rue. »

Boycott sur les ventes d’armes

L’association lance un boycott sur les ventes d’armes françaises dans le monde, et en particulier dans les pays musulmans. Rachid Nekkaz sera en tournée dans les capitales du Golfe du 3 au 10 juin 2011. « Aujourd’hui les pays arabes et musulmans remettent en cause leurs liens avec la France. Un ministre koweitien a appelé au boycott des produits français. »

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