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Coronavirus et Ramadan : Le mufti malgré lui

En terre d’islam et ces temps de Coronavirus, quelque chose peut s’avérer plus viral, plus rapide et  dangereux que ce qu’on connaît du sinistre virus, c’est une fake news informant urbi et orbi (à la ville et au monde) les musulmans qu’un mufti (interprète de la loi islamique) imaginaire leur demandait de renoncer à jeûner cette année pour préserver leur vie et celle des non-musulmans avec qui ils peuvent être en contact.
Moins de vingt-quatre heures après la publication sur ma page Facebook et deux journaux on line (« lematindalgérie.com » et « oumma.com ») d’un article sur le « Coronavirus et les civilisations » le 8 de ce mois, je me suis retrouvé sous un déluge de critiques, d’insultes et de menaces de mort provenant de mon pays et de l’étranger parce ce que j’aurais commis le sacrilège d’appeler à une suspension de l’obligation religieuse de jeûner à cause du covid19, une idée aussi farfelue que sans précédent dans l’histoire millénaire de l’islam.
Pas plus que les épidémiologistes ne connaissent le « patient zéro » qui a reçu la première charge virale, je ne sais d’où est partie cette fausse nouvelle qui s’est propagée à travers les réseaux sociaux à la vitesse de la lumière. Le plus incroyable c’est que la plupart des pages et sites qui relayaient la fausse information reproduisaient mon article intégralement, en arabe ou en français, alors que ce dont ils m’accusent ne s’y trouve absolument pas.
On sait que dans la vie il y a ceux qui ne veulent croire qu’en ce qu’ils voient ou touchent, en citant parfois abusivement Saint Thomas, ceux qui pratiquent le bouche-à-oreille ou le téléphone arabe, ceux pour qui la rumeur est toujours la première source d’information, mais on n’a jamais vu de gens croire au contraire de ce qu’ils ont sous les yeux ou de ce qu’ils partagent sans l’avoir lu.
Je peux donner l’exemple de deux grands journaux algériens, « Le soir d’Algérie » paraissant en français et « Al-Hiwar » paraissant en arabe, dirigés respectivement par un laïc qui s’assume et un islamiste qui s’affiche. Les deux journalistes ont repris mon écrit sur leurs pages Facebook en le faisant précéder d’une présentation où le premier salue mon audace d’avoir ouvert le sujet, tandis que le second me blâme de m’être institué en mufti du monde musulman. Un mufti imaginaire car les deux organes ont, dans un passé récent, publié chacun une cinquantaine de contributions intellectuelles de moi et savent très bien que je ne suis pas un hurluberlu, un twaychi. Désinvolture ? Désinformation ? Traquenard pour soulever contre moi les islamistes du monde entier ? Allez savoir !
La relation entre ce que j’ai écrit et l’exploitation quasi criminelle qui en a été faite ? Qu’on en juge d’après le paragraphe où j’ai fait allusion au sujet : « Si les « Infidèles » (les adeptes des quatre autres civilisations-religions) ne règlent pas son compte au Covid-19 d’ici le ramadhan, soit dans 15 jours, le vieux savoir religieux invariable en tout temps et tout lieu sera confronté à un sérieux embarras : consentir à la suspension du jeûne cette année car un gosier sec favorise l’implantation du virus, ou la refuser et braver le risque d’une plus large contamination des musulmans et des non-musulmans qui vivent ensemble presque partout. Qu’est-ce qui doit primer ? La vie d’un nombre indéterminé d’êtres humains ou une prescription religieuse ? »
A la veille de la publication de cet article j’avais eu connaissance du communiqué de la célèbre Université théologique d’al-Azhar (le Caire) faisant état de l’examen par ses instances des possibles incidences du coronavirus sur le jeûne. L’institution la plus qualifiée au monde pour l’élaboration des fatwas (jurisprudence à caractère consultatif) concluait QU’A LA DATE DU JOUR OU LE COMMUNIQUE ETAIT PUBLIE, IL N’Y AVAIT PAS LIEU DE PRECONISER L’EMPECHEMENT DU JEUNE. Ce qui veut dire que si les choses venaient à empirer elle pourrait le faire car l’esprit coranique, l’esprit des lois comme dirait Montesquieu, l’y autorise. Tout musulman peut faire jouer le principe de « hukm daroura » qui admet que la nécessité puisse suspendre les prescriptions coraniques.
Al-Azhar, le siège du savoir religieux musulman, savoir à qui je reproche de longue date son non-renouvellement depuis mille ans, m’étonnait en envisageant après consultation des spécialistes médicaux l’éventualité d’émettre une proclamation d’état d’empêchement car le savoir religieux a bridé le libre-arbitre chez les musulmans depuis un millénaire et réduit les facultés que le Coran leur accorde.
Où a-t-on vu un appel de ma part, mufti malgré lui, à ne pas jeûner cette année ? On ne le saura jamais. Il a suffi d’un désinformateur zéro pour que des essaims de mouches électroniques prennent d’assaut ma page, d’un premier « bêêê » ovin pour que des milliers de moutons de Panurge se mettent à bêler et à chevroter dans ma direction dans le but de faire de moi un mouton noir, un excommunié, un individu maudit par sa communauté.

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14 commentaires

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  1. Franchement, alors que le saint Coran nous enseigne plutôt que le jeûn durant le mois sacré de Ramadhan est l’un des bienfaits sur la santé. N’est-ce pas que les musulmans au cours de leur histoire ont reçu de nombreux bienfaits pendant le mois du jeûn, parmi lesquels les victoires suivantes :
    – la bataille de Badr
    – la bataille de Khandaq
    – la prise deLa Mecque
    – la bataille de Tabuk
    – Salaheddin libéra Jérusalem des croisés
    – En 1973 les Égyptiens chassèrent les Israéliens d’Égypte pendant Ramadan.
    SVP Monsieur BOUKROUH, laissez-nous ouvertes les portes du Paradis durant ce mois sacré !

    • Ils usent toujours de la même ficelle : les gentils laïcs (on notera le c et pas laïque, car je doute qu’il connaisse la différence) d’un côté, les vilains islamistes de l’autre côté et la pauvre victime à secourir, plaindre et soutenir.
      Bref, il ne faut pas croire que son texte est destiné à faire une analyse scientifique. L’objectif est tout autre cher Omar, il cherche à séduire sur le dos de la religion. C’est un islamiste laïc (comprendre un islamiste messianiste judéo-chrétien), car son discours n’est pas destiné à faire raisonner pour notre Créateur mais à faire de la politique idéologique. Il faut dire qu’il est nul et manque de baguages intellectuels pour travailler savamment ses textes.

      • Kalim, Pas plus qu’un beau parleur, un flatteur qui “vit aux dépens de celui qui l’écoute”(Jean de la Fontaine, livre 1, Le Corbeau et le Renard, 1668).
        Ce mec est imbu de sa personne, un grand diseur de riens : il est comme ces arbres qui, pour avoir trop de feuilles, ne portent point de fruits. Bref, il m’étourdit plus qu’il ne m’amuse.

    • Juste pour qu’il n’y’ait pas d’amalgame:
      Les Musulmans ont certes gagné des batailles durant le mois de Ramadhan, mais ils n’étaient pas contraints de jeûner durant ces batailles. On sait que la chari’a autorise au Musulman de ne pas jeûner alors qu’il est en voyage, et donc à fortiori pendant qu’il combat.

      • Omar, Allah saura reconnaître les siens !
        C’est vrai, les victoires de ces valeureux combattants découlent de leur foi authentique à l’égard des préceptes du saint Coran que certains charlatans s’affairent à souiller pour le compte de leurs valets.et autres mécréants sur Terre.

        • C’était important de le souligner pour ceux qui pensent que le Musulman doit observer le jeûne du mois de Ramadhan .. . même en combattant ! Au fond de leurs personnes, ils pourraient se dire que c’est dur de le faire. Or, l’Islam est en fait pragmatique, il est facilités et non pas difficultés (YOUSR et non pas OUSR). Notons que durant la bataille de BADR, les Musulmans ne s’en privèrent pas de boire de l’eau avant qu’ils ne sabotèrent les puits d’eau pour empêcher l’ennemi de s’en servir. Oui, je ne vous le fais pas dire, ils étaient très valeureux, mais en plus de la foi, il faut prendre ses dispositions et ses précautions (EL AKHDH BI EL ASBAB, A’KILHA THOUMMA TAWAKKEL).
          Puisqu’on est à l’heure d’une pandémie, il serait intéressant de considérer ces deux GRANDES figures de l’Islam que sont Abou Oubeida Ibn El Djarrah et Omar Ibn El Khattab (que DIEU les agrée). Lors d’une bataille qu’ils devaient livrer en actuelle Syrie, une pandémie sévissait. Omar se ressaisit et ne voulût pas entrer en Syrie (EL AKHDH BI EL ASBAB). Abou Oubeida lui rétorqua comment pouvait-il se détourner de la Volonté de DIEU (KADHAA ALLAH). Ce à quoi Omar lui répondit “nous nous détournons de la Volonté de DIEU pour nous réfugier dans la Volonté de DIEU”. Le grand valeureux Oubeida (il remplaça, dans le commandement des combattants Musulmans, l’autre grand valeureux personnage, Khaled Ibn El Walid, que DIEU l’agrée) mourût dans cette pandémie alors que Omar en échappa. Cet exemple simple montre que ces deux grandes figures de l’Islam ont, TOUTES DEUX, une foi inébranlable en DIEU, mais l’un d’eux (Omar) l’utilisa mieux en pratique.

  2. Pourquoi pas ? le Quran autorise explicitement l’interruption du jeûne dans le cas d’un malade (ou voyageur).
    Si les médecins prescrivent l’humidification de la gorge, alors je ne vois pas où est le problème d’interrompre le jeûne, afin de sauver sa vie et celle d’autrui.
    Rien de nouveau sous le soleil de Géo.

  3. D’une part, il est dit dans l’article : “le savoir religieux a bridé le libre-arbitre chez les musulmans depuis un millénaire et réduit les facultés que le Coran leur accorde.” En effet, ce qu’accorde le Coran à l’homme est malheureusement ignoré. Pour paraphraser Kant dans un tout autre domaine que le droit de propriété, le délaissement de sa capacité de raisonnement à une tierce personne est une aliénation. Dieu dit en s’adressant aux anges (sourate 2 verset 30) “je vais établir sur Terre un vicaire”. N’a-t-IL pas dès lors doté l’homme de savoirs comme il est rappelé dans le verset 31 de la même sourate “et il a appris à ADAM les noms de toutes choses ? Ainsi l’homme a une essence divine donc une capacité de raisonnement et il est par ailleurs doté d’un outil langagier pour désigner les choses et les concepts. Par usages culturel et environnemental, les mots prennent des formes différentes. Les langues ont une même origine linguistique mais qui de générations en générations, de peuplements en peuplement, de contrées en contrées, celle-là ont variées.
    D’autre part, concernant le sujet de l’article le jeûne, Il est dit au verset 183 sourate 2 que le jeûne est prescrit. Y-a-t-il alors obligation d’autant plus que ledit verset est employé à la forme impersonnel et qu’il n’y a pas de forme impérative contrairement au rite de la prière que l’on cite retrouve par “aqimou salat oua atou zakat” plusieurs fois dans le Coran ? De là, le fondement de l’obligation du jeûne ne tombe-t-il pas ? c’est l’une des raisons peut-être que certains spécialistes de la question remettent en cause la validité du Hadith de Jibril au sujet de l’islam l’imane et l’ihsane. Certes, on sait que le jeûne est un bienfait pour ses aspects sanitaires et spirituels. Mais sur quel fondement islamique est-il alors devenu obligatoire ?
    Dans le verset suivant (V184) il est précisé “…Mais ceux qui ne pourraient le supporter (par une difficulté) il y a compensation : nourrir un pauvre… “. N’y-a-t-il pas en cela une capacité de discernement à mesurer les risques et bénéfices d’une telle pratique à la lumière des connaissances actuelles ? Peut-on s’interroger sur l’intérêt de la primauté de la vie une pratique rituelle qui peut nuire et aggraver les sociétés en pertes humaines aux conséquences sanitaires, sociales, économiques et environnementales ? C’est pourquoi et je le comprend que l’institution d’al Azhar avance avec mesure.

    • Vous êtes sérieux ou quoi ?
      Bien sûr que le jeûne du mois de Ramadhan est une OBLIGATION (et non un choix) pour toute personne qui est en mesure de jeûner (les détails sont donnés dans le Coran et la tradition Prophétique).
      D’ailleurs, vous devriez savoir qu’une personne capable de jeûner et rompt volontairement le jeûne doit compenser CHAQUE jour non jêuné par ….. DEUX MOIS CONSÉCUTIFS ou nourrir SOIXANTE pauvres pour chacun de ces jours. Cette FORTE sanction correspond, selon vous, à un choix de jeûner le mois de Ramadhan ou une obligation ?
      Vous êtes entrain de raisonner comme ceux qui n’ont pas voulu s’acquitter de la ZAKAT après la mort du Prophète (que le salut de DIEU soit sur lui) car selon eux, le verset Coranique dit “Prends (cad Ö Mohamed) de leurs richesses une part ….). Comme le Prophète n’était plus de ce monde, ils ne voyaient alors plus d’obligation de donner la ZAKAT (comme quoi, on dribble même dans la religion). Vous devriez connaître la décision du Calife Abou Bakr (que DIEU l’agrée) à ce sujet.
      Ceci étant, je vous souhaite, à l’avance, un bon RAMADHAN.

    • Mohamed,
      Sourate Al Bakara,versets 183-187 :”O croyants ! On vous a prescrit A-Syam comme on l’a prescrit à ceux d’avant vous,ainsi atteindrez-vous la piété…Ces jours sont le mois de Ramadan au cours duquel le Coran a été descendu comme guide pour les gens,et preuves claire de la bonne direction et du discernement.Donc,quiconque d’entre vous est présent en ce mois,qu’ils jeûne !…”
      -“Quiconque d’entre vous est présent en ce mois,qu’il jeune !”le verbe jeûner est employé ici dans le mode du subjonctif avec la valeur de l’ordre(fal yassoumhou).
      -Verset184 :”…Quiconque d’entre vous est malade ou en voyage,devra jeûner un nombre égal de jours.Mais pour ceux qui ne pourraient pas le supporter(qu’avec grande difficulté),il y a compensation:Nourrir un pauvre.Et si quelqu’un fait plus de son propre gré,c’est pour lui.Mais il est mieux de jeûner,si vous saviez”
      “Mais pour ceux qui ne pourraient pas le supporter”: Ce verset ne précise pas les catégories de personnes qui ne pourraient pas supporter le jeûne,comme le verset précédent pour les malades et les voyageurs,mais la responsabilité de suspendre le jeune est laissée à l’appréciation du ou de la concernée,responsabilité o combien délicate et dépendant essentiellement de la sincérité et de la foi de l’individu,d’autant plus que la suspension est soit longue,soit définitive et elle est liée à la compensation de nourrir un pauvre pour chaque jour non jeûné.A titre d’exemple où de nombreux musulmans ne peuvent supporter le jeûne et le compensent par la nourriture d’un pauvre : le grand âge,la femme enceinte,,la femme qui allaite,les malades chroniques.
      Les courants pernicieux qui invitent les musulmans à suspendre le jeûne du mois de Ramadan en cette période de pandémie ne traduisent que la guerre sournoise que mènent des charlatans connus et que certains par ignorance ou en connaissance de cause s’en font les portes paroles.Après avoir fermer les mosquées on veut suspendre le jeûne et toutes les pratiques de la religion.On voudrait”laïciser” les musulmans comme cela a été fait pour les autres religions monothéiste et les faire adhérer à la nouvelle religion mondialisée…
      Que Dieu nous guide et nous inscrive parmi ceux qui le craignent et ont la foi.

  4. Je n’ai jamais entendu d’un scientifique qu’un gosier sec favorise l’implantation du virus. Le confinement et la distanciation sociale sont pour l’instant les meilleurs moyens d’éviter le virus aux gosiers secs et humides.
    Concernant les positions concernant le jeûne de M. Boukrouh, je les trouve honnêtement ambiguës et ses justifications un peu alambiquées n’y aident pas trop.

  5. Nour-Eddine Boukrouh oublie une chose,
    Il n y a pas de clèrgé dans l’islam. Personne n’est le centre et les gens tournent autour. Chacun doit rendre des comptes à dieu, seul, sans avocat ni mufti, l’homme muni de son livre.
    Quand on vide une université de ses élites, on ne peut plus parler d’université, on dira que cette construction était une université.
    C’est le cas de Al Azhar,
    Cette construction représente, actuellement, une seule religion
    ” Dieu sous la religion des hommes “

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