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Réflexion sur le concept d’intellectuel religieux

L’intellectuel religieux, un concept novateur et une réalité ancienne

Lorsque l’ouvrage de Zakî Al-Mîlâd, « L’épreuve de l’intellectuel religieux avec son temps », apparaît pour la première fois en 2000, il est le premier à employer le concept d’intellectuel religieux. Concept d’autant plus pionnier qu’il a suscité des interrogations au sein des penseurs, faisant l’objet de nombreux comptes rendus, articles et études au Liban, Syrie, Jordanie, Irak, Egypte, Algérie, Maroc, Arabie Saoudite, Qatar, Emirats ainsi qu’en Angleterre. Cet ouvrage jette les bases d’une réflexivité radicale sur l’expérience intellectuelle, plus précisément, pourrait-on dire qu’il s’interroge sur les conditions de possibilité de l’expérience intellectuelle…religieuse. « La religion nous empêche-t-elle d’être des intellectuels ? », tel est par exemple le titre du deuxième chapitre de l’ouvrage. Un ouvrage qui vient donc enrichir la sociologie des sciences, puisque la réflexion (ontologique, introspective) sur le rôle de l’intellectuel religieux dans la production du discours est quasi-absente.

Les analyses de cet ouvrage inaugural sont en effet mises en perspective par rapport à des ouvrages relatifs à la figure de l’intellectuel (mais non religieux), comme celui de E. Saïd (Images de l’intellectuel, 1996) avec des intellectuels plutôt occidentaux et laïques, M. A. Al-Jâbirî (Les intellectuels dans la civilisation arabe : l’épreuve d’Ibn Hanbal et la Nakba d’Ibn Rushd, 1995) avec des intellectuels plutôt arabes et libéraux, A. Harb (Critique de l’intellectuel, 1996), avec des intellectuels plutôt arabes et socialistes, etc., de même qu’elles sont mises en perspective avec les débats sur les intellectuels dans nos sociétés occidentales, françaises, britanniques et américaines. 

L’expérience de l’intellectuel religieux est-elle encore possible ?

Toutefois, quelques intellectuels se sont vus déconcertés face à l’usage dudit concept lors de son apparition, un embarras qui s’explique probablement par leur rapport spécifique à la religion ou bien par l’absence de culture théologique dans la culture intellectuelle en général, puisque la pensée musulmane constate elle-même la disparition de l’intellectuel religieux. Songeons à ces figures intellectuelles devenues historiquement exceptionnelles comme M. Iqbal (mort en 1938), M. B. Nabi (1973), M. B. Sadr (1980) et M. Motahhari (1980), tous les quatre engagés sur le terrain de la lutte idéologique et en phase avec leur modernité. Dès lors l’expression d’intellectuel religieux peut sembler désormais incongrue aux yeux de certains.  Incongruité d’autant plus marquée que la représentation de l’intellectuel diffère selon que l’on se trouve dans la civilisation musulmane ou occidentale.

Dans la première, l’intellectuel est religieux « par nature », la religion est son référentiel et source de ses représentations, songeons à Al-Kindî, Al-Farâbî, Ibn Sînâ, Ibn Rushd, Al-Beirûnî, Ibn Tufeil, Ibn Khaldûn, et beaucoup d’autres qui se réfèrent à la religion au cours de l’élaboration de leur pensée indépendante et ouverte sur les autres pensées de leur temps ; cependant que dans la deuxième, l’intellectuel est « par nature » non religieux, même si certaines figures peuvent parfois se rapprocher de ce que l’on entend par « intellectuel religieux », comme le critique anglais Thomas Eliot, mais sans que ce rapprochement lui soit parfaitement fidèle, du moins de façon durable, souligne Zakî Al-Mîlâd (ajoutons qu’en France, nous avons des intellectuels franchement chrétiens mais dont les écrits demeurent purement philosophiques et abstraits, songeons à R. Girard ou M. Henry). Cette scission entre la culture intellectuelle et la religion en occident s’explique notamment, selon Zakî Al-Mîlâd, par la séparation entre les sciences dites exactes et la culture intellectuelle en tant que science humaine ainsi que par le triomphe du cartésianisme (p. 58). Notons toutefois qu’il n’en fut pas toujours ainsi en occident puisque l’intellectuel au Moyen Âge était avant tout religieux, comme le constate J. Le Goff dans son ouvrage de référence Les intellectuels au Moyen Âge, 1957.

L’épreuve de l’intellectuel religieux face à l’hégémonie de l’intellectuel laïque

Force est de constater ensuite que c’est bien l’idéal-type occidental de l’intellectuel qui domine. Cette hégémonie s’étend jusqu’aux sociétés arabes et musulmanes, constate Zakî Al-Mîlâd, puisque le rapport de l’intellectuel à la religion va en se rétrécissant. D’où la problématique de « l’épreuve » de l’intellectuel religieux dans son temps, c’est-à-dire dans son époque et son contexte. Ce que l’auteur entend par « épreuve » (al-Mihnah) est qu’au fur et à mesure que l’intellectuel religieux se rapproche de son temps, interagit avec son environnement sociale, entend exercer son droit à la critique dans un environnement non habitué à cette grille d’analyse et tente d’influer sur son contexte…il éprouve par conséquent une étrangeté favorisée par la mise à l’écart de la religion par la civilisation occidentale. C’est cette étrangeté qui génère l’épreuve désagréable ressentie par l’intellectuel religieux.

La notion d’épreuve rappelle évidemment aux lecteurs avertis « l’épreuve » vécue par le théologien Ahmed Ibn Hanbal face au calif Abbassid Al-Mamoune à propos de la controverse « création du Coran ».  Si le chef de fil de l’école hanbalite avait résisté, nombreux de nos contemporains parmi les cultivés de confession musulmane ont choisi quant à eux de s’inscrire dans le paradigme de l’abdication, de la capitulation et de la soumission au point de retourner leurs armes contre leur propre religion. C’est aussi face à cette épreuve traversée par la communauté que Zakî Al-Mîlâd écrit cet ouvrage pour renouer avec la figure nostalgique de l’intellectuel religieux, l’une des principales conditions de la renaissance civilisationnelle.  

Les missions de l’intellectuel religieux

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En effet, au septième chapitre intitulé « Les missions de l’intellectuel religieux » (p. 111), l’auteur énumère sept missions majeures permettant cette renaissance. L’intellectuel ne doit pas attendre de la société qu’elle lui accorde son statut, mais le chercher et le mériter à travers ses propres activités. De plus, ces missions englobent la société dans laquelle il réside, la communauté à laquelle il appartient religieusement, le monde auquel il appartient humainement, l’époque à laquelle il appartient temporellement. Ces missions sont ainsi les suivantes :

  • Produire de la connaissance et contribuer au développement de la culture intellectuelle.
  • Participer à la lutte idéologique avec les autres courants de pensée.
  • Se soucier des grands problèmes concrets, des défis et intérêts de la communauté.
  • Faire évoluer la conscience des défis sociaux contemporains au sein de la communauté.
  • Penser l’articulation entre la pensée musulmane et les conditions de la modernité (c’est-à-dire de la contemporanéité).
  • L’intégration et la participation complète dans la société.
  • L’intellectuel religieux humaniste doit constituer un pont entre les communautés et les civilisations.

Un concept popularisé ensuite par les intellectuels

Comme souligné plus haut, la publication de cet ouvrage fondateur n’a pas laissé la communauté intellectuelle arabe insensible. Outre les nombreux comptes rendus et critiques de ce livre, des ouvrages et articles se proposent encore aujourd’hui de prolonger cette réflexion en s’appropriant le concept de l’ « intellectuel religieux ».

 A titre indicatif, citons quelques-uns : « La problématique de l’intellectuel religieux entre l’enclume de l’imitation et le marteau de la modernité » de Bâssim Al-Mâdhî Al-Hasnâwî, 2009, cet ouvrage écrit en contexte iraquien consacre tout le premier chapitre à la définition de l’intellectuel religieux ; ensuite il s’interroge sur les facteurs qui ont annihilé le rôle de l’intellectuel religieux ; le distingue et différentie de « l’intellectuel laïque et libéral » (p. 127) ; il présente également son rapport à la métaphysique, la relativité de la morale, la foi, les sciences expérimentales, la philosophie, les sciences humaines, la tradition, l’herméneutique, l’objectivité ; ainsi que « la position de l’intellectuel religieux envers la nouvelle science du Kalam » (p. 242) ; enfin son rapport à la « postmodernité », au « narcissisme » et à « l’élitisme » (p. 290-330).  

Le concept d’intellectuel religieux a par ailleurs fait l’objet de nombreuses publications dans des revues spécialisées sur la pensée musulmane. Tel est l’article de l’intellectuel et théologien Haydar Hobbollah, « L’intellectuel religieux dans le monde contemporain » (Revue Al-Minhâj, printemps 2004, n°33) dans lequel il aborde notamment la défiance des milieux théologiques à l’égard des intellectuels religieux, de même qu’il a publié en 2007 un article sur la même revue, n°44, intitulé « Le penseur musulman et la crise de la relation entre la religion et la modernité ».    

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35 commentaires

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  1. Salam notre frère Mouhib.

    J’ai lu avec intérêt votre brillant article “Le mu’tazilisme est-il un humanisme” via un autre site, je ne l’ai pas trouvé sur Oumma sauf s’il date de longtemps. Oui, c’est brillant et contre-intuittif. Je n’ai rien notez bien ni pour ni contre l’un ou l’autre des deux grands camps, mu’tazilites et Acharites, en plus je ne crois pas et je n’ai pas envie de croire que ce genre de querelle ne soit que la rencontre vivace des esprits, évidemment non. Vous avez citez des auteurs et des références qui comparaient cette vague de répression intellectuelle et physique surtout à l’Inquisition, on pouvait mieux la comparer aux répressions très matérielles et concrètes qui ont accompagné les nombreux conciles Chrétiens, enfin je veux dire que c’est plus pertinent, or, cette phase n’est pas à ma connaissance dénommée “inquisition”, c’était pourtant une première inquisition. Très drôle les néo-mu’tazilites donnent l’impression de ne pas savoir de quoi ils parlent. Oui, il y a des parti-pris conditionnés d’ignorants, il a suffi qu’ils entendent tel ou tel glauser sur la rationalité des mu’tazilites pour en faire des montagnes, sauf que c’est pas ça, on se prend parfois les pieds dans son propre tapis.

    Je ne sais pas si cet article est déjà paru sur Oumma, je n’en fournis pas le lien parce qu’il est d’un autre site, mais vous, mon frère Mouhib, ne pourriez-vous pas le publier ou le republier ici? Je ne suis pas de parti-pris dans ce dialogue ou querelle, d’autant qu’elle est probablement en partie dépassée et suranée, ou hors contexte, d’ailleurs les acharites auraient pris leur revanche quand leur temps est arrivé. Mais je trouve que ce serait parfait de remettre ici ce bel article qui déconstruit les idées reçues de ceux qui ne cessent croit-on de lutter contre les idées reçues. Sourire entendu.

    Croissant de lune.

  2. Merci Najib pour ta réponse , se transformer , évoluer fait partie de essence de l homme ,
    certains y adhèrent , d autres pas, mais je pense que ceux qui changent le monde on souvent développé une singularité, une différence, ou un talent face au normes ou à l ordre établi. Le prophète en est l illustre exemple !

    Cordialement.

  3. @djeser
    C’est vrai que la philosophie est intéressante par sa méthode. Et tu as raison de le souligner. De plus, la phrase de Marx demeure insuffisante il me semble puisqu’elle reste, à mon sens, tributaire de la transformation de l’homme comme nous l’enseigne magistralement le Coran.
    Et Jaspers dans le même esprit : ” si l’homme veut vivre il doit changer.” Transformer le monde sans se changer soi-même est une solution cosmétique qui est aux antipodes du véritable changement. Cleui-ci touche les structures profondes de l’Homme contrairement aux approches cosmétiques qui relèvent du ” changement sans le changement “.
    Oui, ” si les hommes pouvaient changer, tout pourrait changer ” comme l’ a dit un grand psychologue suisse, Pierre Daco.
    Pour sauver le monde, il faut que nous changions profondément.
    Merci djeser.

  4. Merci a toi nadjib, pour ce retour . Je te rejoins assez, je me suis intéressé à la philosophie, un peu par curiosité et aussi pour mieux comprendre les systèmes de pensés qui régissent l occident.
    Elle peut aider à se poser de bonnes questions, mais assez souvent , il est vrai qu elles tournent un peu en rond. Je m aperçois qu elles expriment simplement , les difffentes tendances humaines, mais au fond n inventent rien. J aime bien la phrase de Marx qui dit : ” les philosophes ne font que d’ interpréter le monde, mais ce qui compte, c’est le transformer”. J ‘adhére a cet idée.

  5. @djeser

    J’ai lu ton texte avec toute l’attention dont je suis capable.
    Tu sais les systèmes philosophiques se suivent les uns les autres, se réfutent les uns les autres et s’excommunient les uns les autres. Chaque système s’inscrit en faux contre celui qui le précède. Ainsi chaque grand philosophe entend rétablir la philosophie dans le droit chemin au travers de sa pensée. Le “divin Platon” que beaucoup de philosophes modernes, pour les raisons que l”on peut facilement deviner n’aiment pas, avance que “l’essence précède l’existence” et construit son système sur la base de cette assertion. Sartre au XX siècle inverse les termes de cette “équation” qui devient ” l’existence précède l’essence” et a développé ainsi sa pensée. Quant à Marx il dit qu’avec Hegel la philosophie marchait sur la tête. Son rôle donc était de la remettre sur pied etc… Et je dis souvent en PLAISANTANT bien sûr qu’ à force d’avoir marché trop longtemps sur la tête, la philosophie a perdu la boule. C’est juste une plaisanterie. Les philosophes ont également l’habitude de recycler certains concepts en les redéfinissant et repartent à la quête des idées.
    De plus, avec ce qu’on appelait dans les années 70 les “nouveaux philosophes”, la philosophie a perdu de sa superbe. Effectivement aujourd’hui chez certains philosophes, elle est devenue tout bonnement “sophiacide”, c’est-à-dire sa mission ne consiste plus dans l’amour de la sagesse mais elle est devenue carrément destructrice de savoirs etc…
    Il suffit d’entendre ces nouveaux philosophes très médiatisés pour s’en rendre compte. Chez ces libres penseurs la pensée est en roues libres. Rien ne l’arrête désormais. Elle fonce droit dans le mur. Airbag oblige !

    N’empêche qu’il existe encore de grands philosophes qui sont encore vivant et qui ont rarement la parole tels Alain Badiou, Marcel Gaucher, Alain Deneault (philosophe canadien) auteur de “la médiocratie” et de “Gouvernance : le management totalitaire.” Sans oublier les philosophes de l’Esprit tels Renouvier, Blondel, Le Senne, Lavelle, Berger… La liste n’est pas close…

    Je t’invite à lire un beau livre qui s’intitule “Pourquoi des philosophes”. J.F. Revel (excellent philosophe) a écrit ce livre dans lequel il dénonce une certaine imposture de la part de certains intellectuels et autres philosophes. Quatre grands noms de la sphère intellectuels de l’époque ne l’ont pas épargné. Sartre a donné une conférence pour le réduire au silence en le disqualifiant. Lacan a piétiné son livre devant ses étudiants. Merleau-Ponty et Claude Lévi-Strauss n’étaient pas du reste… Revel évoque leurs réaction dans ses mémoires : “Le voleur dans la maison vide”.
    Je trouve Camus très sympathique. Il a, comme Sartre d’ailleurs, vulgarisé sa philosophie au travers de ses romans et autres pièces de théâtre. C’est pourquoi leurs idées sont plus diffuses dans l’air du temps.
    Franchement la philosophie n’est pas ma tâche favorite. Je m’y intéresse certes mais elle n’occupe pas le clair de mon temps.

    Merci djeser ! Et bonne continuation dans ta quête de la sagesse au travers de la philosophie.

  6. @Najib,

    Il n’est pas question de moi. Absolument pas. Je ne fais que faire des comptes rendus de lectures, je synthétise. Il n’est pas question de mes sentiments, mais de ceux de l’intellectuel religieux qui vit “l’épreuve” selon l’auteur du livre, al-mihna, le terme est fort, il n’est pas de moi.

    Donc, oui, je confirme cher Najib, l’argument d’autorité ne permet pas de remplir les 7 missions définies par Zaki al-Milad, l’intellectuel religieux selon Zaki al-Milad n’est pas un YouTubeur de France lol. C’est bien plus que ça. Et s’il lui arrive d’user d’arguments d’autorité c’est juste par accident, ou par faiblesse car ça reste un être humain, mais ça ne constitue pas l’essence de son discours.

    Quant à mon commentaire, vous avez oublié de retranscrire le “quand bien même”. La nuance est grande car j’ai montré le contraire en début du commentaire, ils ont bien traité ces questions.

    Mais puisque mes sentiments vous intéressent, je pense effectivement que nos sociétés contemporaines marginalisent le discours religieux en le renvoyant à l’univers de la superstition, à des chimères, à l’irrationalité, à la subjectivité, au sectarisme, à la faiblesse d’esprit, etc…à l’argument d’autorité 😉.
    Ainsi essentielisé, le discours religieux ne peut porter que sur la sphère privée, très intime, et n’a donc aucun droit de regard sur notre vie sociale, comme si notre foi ne devait avoir de sens qu’entre les 4 murs de notre foyer, après tout pourquoi pas car la foi reposerait sur des arguments d’autorité 😉. Et dès lors que ce discours souhaite porter des jugements sereins (objectifs et scientifiques pourtant) sur la société, on lui rétorque qu’il sort de sa sphère…comme si l’intellectuel religieux est par essence incapable de tenir un discours rigoureux et intelligible. C’est curieux non?

  7. @mouhib, le silence d Al ghalazi que tu mentionnes, est il survenu durant sa longue retraite spirituelle ? Ta réponse démontre que l intellectuel a souvent une pensée complexe, voir même parfois contradictoire. C est pour cela que j’ ai du mal à adhérer à cet idée de “définir les missions d un intellectuel”. La pensée est libre , et doit le démeurer, tant qu elle n offense personne. En revanche Comme tu le dit , la démonstration doit s appuyer d une méthodologie et d une argurmentation solide. si l imam est connu pour avoir été critique a l’égard des philosophes, je considère qu il a été lui même philosophe , en étudiant un peu sa vie, l introspection qu il a vécu a assez marqué mes idées , c est pour cela que je l ai intégré à mon texte, à mes idées, à ma vision du monde. Je pense qu il a quelque chose à apporter au monde, un monde qui court, sans plus trop savoir après quoi. Il me semble aussi intéressant , de de pencher sur les courants qui influencent le monde, je ne ne dirai pas que cela fait partie des missions du théologien ou du penseur musulman , mais s il veut saisir le monde actuel, je pense que cela est incontournable…

    Cordialement

  8. @ Croissant de lune

    Il est vrai, et tu as mille fois raison de le souligner, que personne n’est en mesure d’engrammer tous les savoirs générés par l’intelligence humaine d’autant plus qu’à l’intérieur de chaque spécialité, il existe des sous-spécialités.
    Mais la foi n’est pas tributaire des savoirs en tout genre. Cela ne fait point de la foi une démarche irrationnelle. Tant s’en faut ! La foi est une démarche de l’esprit. Elle est ainsi quête de « l’intelligence de la foi ». Autrement dit elle est n’est pas un discours mais une conversion selon des impératifs éthiques. Elle est donc une pratique. Ce qui fait de la religion une discipline qui exige beaucoup de discipline. J’avoue que nous manquons un peu de discipline quand même. Je ne sais pas ce que tu en penses.
    La foi n’est pas de l’ordre de la démonstration (aucun Homme de foi ne peut prouver à un athée que Dieu existe et aucun athée n’est en mesure de démontrer à un croyant que Dieu n’existe pas). La foi se vit dans le respect le plus total de la personne humaine et des libertés individuelles. Aujourd’hui, elle est devenue bavardage et verbiage. Car certains veulent en faire un discours. La maîtrise des discours théologiques n’aidera personne à avoir la foi. Les discours théologiques étaient au début une nécessité pour répondre aux attaques des adeptes des autres religions. Après la théologie est devenue une discipline à part entière. Et il existe plusieurs écoles théologiques (kalam) ainsi que plusieurs écoles de jurisprudence (fiqh) et plusieurs voies spirituelles (toroq). C’est-à-dire beaucoup de littérature religieuse. Autrement dit, tout discours sur la religion produit par un individu donné demeure est sujet à caution, c’est-à-dire qu’il n’a rien d’absolu. Aucun commentaire du Coran, par exemple, quelque pertinent qu’il soit n’équivaut au Coran etc… Les hommes parlent et se trompent. En revanche, la parole de Dieu et celle authentifiée du Prophète (ç) restent égales à elles-mêmes ! Si nous comprenons que tout discours sur la religion (Coran et Sounna) est relatif. Les littéralistes en rabattraient ainsi que certains islamologues et autres coranlogues patentés… sans oublier bien sûr les rationalistes qui croient penser alors qu’ils calculent, qui croient cogiter alors qu’ils computent. Car la logique, n’est qu’un « ensemble de règles de calcul » comme disent certains et même le poète est d’accord puisqu’il dit que « la logique s’occupe des cadavres de la pensée. » Qu’en pense-tu ?
    A l’époque du Prophète (ç) et de ses compagnons (r), tous les musulmans savaient, par exemple, ce que c’est qu’un visage, ce que c’est que la foi, ce qu’est-ce que la purification de l’ego etc… Et ils pratiquaient leur religion du mieux qu’ils pouvaient. Mais les foqaha des générations suivantes avaient du temps à perdre. Alors ils se sont posé la question suivante : qu’est-ce que le visage ? Tu trouveras la définition qu’ils en ont donné dans les manuels du fiqh. A l’instar des foqaha, les théologiens s’y sont mis eux-aussi et se sont interrogés à propos de la foi alors qu’elle a été définie par le Prophète (ç) de façon limpide. Les spirituelles ont écrit des manuels à propos de la purification de l’ego. Les intellectuels aujourd’hui se posent des questions de type : l’Islam est-il compatible avec la liberté, la laïcité, la démocratie, la république… La Révélation est-elle compatible avec la raison ? Ainsi de suite… L’accumulation des discours religieux nous a fait oublier la fraîcheur de la source alors que la démarche religieuse consiste à remonter à la source. Mais certains préfèrent la littérature religieuse à la Révélation (voir 25/30). Ils sont ainsi en aval de la source pendant que l’Islam est la culture de l’amont. Il faut donc nager à contre-courant. Cette démarche exige bien des efforts. Mais par facilité certains prônent de surfer sur la vague rationaliste à « contre-Coran ».
    Mais, depuis quand l’éthique, qui est praxis, c’est-à-dire purement pratique, relève-t-elle de l’argumentation et de la démonstration ? Le témoignage véridique (vivre sa foi dans le respect d’autrui) vaut toutes les explications et toutes les démonstrations. Une foi qui ne serait pas témoignage vivant est presque une imposture. Le témoignage vivant suppose, à n’en pas douter, l’intériorisation du référentiel éthique islamique qui permet d’évoluer et d’évaluer, non pas à partir d’intérêts et d’ambitions personnels ou d’obsessions compulsionnelles mais en fonction d’impératifs catégoriques qui transcendent « l’ici et maintenant » en nous inscrivant dans le don de soi. Et le don de soi n’est jamais un discours. Effectivement « quelle est la place de Dieu dans mon plan de carrière ? » s’interroge à juste titre un homme. Il n’est pas interdit d’avoir un plan de carrière. C’est une évidence. Qui en doute ? Mais il ne faut pas que le centre soit expulsé vers la périphérie et que l’éthique soit subordonnée à des visées purement et simplement domestiques. « Prenez garde aux passions (hawa), elles rendent sourd et aveugle », énonce le Prophète (ç). L’inversion des valeurs est à l’œuvre ! Prenons garde.
    C’est vrai qu’il existe un décalage entre ce que nous disons, faisons et les impératifs catégoriques du référentiel islamique. Le musulman ne peut avoir la tête hors de l’eau qu’en réintégrant les « catégories explicatives » islamiques qui étoffent la relation au monde sous peine d’étouffement. Mais le problème des intellectuels et autres islamologues patentés c’est qu’ils « partent de prémisses étrangères à l’Islam et tirent des conclusion sur l’Islam », a dit en substance et à juste titre un homme.
    Si tu veux plomber une bonne cause confie-la à un mauvais avocat.
    C’est tout ce que je peux dire croissant de lune. Tu n’es pas obligé d’être d’accord !
    « Quittez avec les autres voluptés celles qui vient de l’approbation d’autrui », a dit un moraliste.
    Cordialement

  9. @ Croissant de lune
    Il est vrai, et tu as mille fois raison de le souligner, que personne n’est en mesure d’engrammer tous les savoirs générés par l’intelligence humaine d’autant plus qu’à l’intérieur de chaque spécialité, il existe des sous-spécialités.
    Mais la foi n’est pas tributaire des savoirs en tout genre. Cela ne fait point de la foi une démarche irrationnelle. Tant s’en faut ! La foi est une démarche de l’esprit. Elle est ainsi quête de « l’intelligence de la foi ». Autrement dit elle est n’est pas un discours mais une conversion selon des impératifs éthiques. Elle est donc une pratique. Ce qui fait de la religion une discipline qui exige beaucoup de discipline. J’avoue que nous manquons un peu de discipline quand même. Je ne sais pas ce que tu en penses.
    La foi n’est pas de l’ordre de la démonstration (aucun Homme de foi ne peut prouver à un athée que Dieu existe et aucun athée n’est en mesure de démontrer à un croyant que Dieu n’existe pas). La foi se vit dans le respect le plus total de la personne humaine et des libertés individuelles. Aujourd’hui, elle est devenue bavardage et verbiage. Car certains veulent en faire un discours. La maîtrise des discours théologiques n’aidera personne à avoir la foi. Les discours théologiques étaient au début une nécessité pour répondre aux attaques des adeptes des autres religions. Après la théologie est devenue une discipline à part entière. Et il existe plusieurs écoles théologiques (kalam) ainsi que plusieurs écoles de jurisprudence (fiqh) et plusieurs voies spirituelles (toroq). C’est-à-dire beaucoup de littérature religieuse. Autrement dit, tout discours sur la religion produit par un individu donné demeure est sujet à caution, c’est-à-dire qu’il n’a rien d’absolu. Aucun commentaire du Coran, par exemple, quelque pertinent qu’il soit n’équivaut au Coran etc… Les hommes parlent et se trompent. En revanche, la parole de Dieu et celle authentifiée du Prophète (ç) restent égales à elles-mêmes ! Si nous comprenons que tout discours sur la religion (Coran et Sounna) est relatif. Les littéralistes en rabattraient ainsi que certains islamologues et autres coranlogues patentés… sans oublier bien sûr les rationalistes qui croient penser alors qu’ils calculent, qui croient cogiter alors qu’ils computent. Car la logique, n’est qu’un « ensemble de règles de calcul » comme disent certains et même le poète est d’accord puisqu’il dit que « la logique s’occupe des cadavres de la pensée. » Qu’en pense-tu ?
    A l’époque du Prophète (ç) et de ses compagnons (r), tous les musulmans savaient, par exemple, ce que c’est qu’un visage, ce que c’est que la foi, ce qu’est-ce que la purification de l’ego etc… Et ils pratiquaient leur religion du mieux qu’ils pouvaient. Mais les foqaha des générations suivantes avaient du temps à perdre. Alors ils se sont posé la question suivante : qu’est-ce que le visage ? Tu trouveras la définition qu’ils en ont donné dans les manuels du fiqh. A l’instar des foqaha, les théologiens s’y sont mis eux-aussi et se sont interrogés à propos de la foi alors qu’elle a été définie par le Prophète (ç) de façon limpide. Les spirituelles ont écrit des manuels à propos de la purification de l’ego. Les intellectuels aujourd’hui se posent des questions de type : l’Islam est-il compatible avec la liberté, la laïcité, la démocratie, la république… La Révélation est-elle compatible avec la raison ? Ainsi de suite… L’accumulation des discours religieux nous a fait oublier la fraîcheur de la source alors que la démarche religieuse consiste à remonter à la source. Mais certains préfèrent la littérature religieuse à la Révélation (voir 25/30). Ils sont ainsi en aval de la source pendant que l’Islam est la culture de l’amont. Il faut donc nager à contre-courant. Cette démarche exige bien des efforts. Mais par facilité certains prônent de surfer sur la vague rationaliste à « contre-Coran ».
    Mais, depuis quand l’éthique, qui est praxis, c’est-à-dire purement pratique, relève-t-elle de l’argumentation et de la démonstration ? Le témoignage véridique (vivre sa foi dans le respect d’autrui) vaut toutes les explications et toutes les démonstrations. Une foi qui ne serait pas témoignage vivant est presque une imposture. Le témoignage vivant suppose, à n’en pas douter, l’intériorisation du référentiel éthique islamique qui permet d’évoluer et d’évaluer, non pas à partir d’intérêts et d’ambitions personnels ou d’obsessions compulsionnelles mais en fonction d’impératifs catégoriques qui transcendent « l’ici et maintenant » en nous inscrivant dans le don de soi. Et le don de soi n’est jamais un discours. Effectivement « quelle est la place de Dieu dans mon plan de carrière ? » s’interroge à juste titre un homme. Il n’est pas interdit d’avoir un plan de carrière. C’est une évidence. Qui en doute ? Mais il ne faut pas que le centre soit expulsé vers la périphérie et que l’éthique soit subordonnée à des visées purement et simplement domestiques. « Prenez garde aux passions (hawa), elles rendent sourd et aveugle », énonce le Prophète (ç). L’inversion des valeurs est à l’œuvre ! Prenons garde.
    C’est vrai qu’il existe un décalage entre ce que nous disons, faisons et les impératifs catégoriques du référentiel islamique. Le musulman ne peut avoir la tête hors de l’eau qu’en réintégrant les « catégories explicatives » islamiques qui étoffent la relation au monde sous peine d’étouffement. Mais le problème des intellectuels et autres islamologues patentés c’est qu’ils « partent de prémisses étrangères à l’Islam et tirent des conclusion sur l’Islam », a dit en substance et à juste titre un homme.
    Si tu veux plomber une bonne cause confie-la à un mauvais avocat.
    C’est tout ce que je peux dire croissant de lune. Tu n’es pas obligé d’être d’accord !
    « Quittez avec les autres voluptés celles qui vient de l’approbation d’autrui », a dit un moraliste.
    Cordialement

  10. @Mouhib
    Le passage que vous citez et qui est de ma plume ou de mon clavier je le revendique à mille pour cent. C’est mon référentiel. Je ne suis pas libre penseur (qui se dévergonde plus qu’il ne pense), ni un littéraliste qui cultive la lettre sans le souffle de l’esprit, ni un spiritualiste qui prône l’esprit sans l’ancrage de la lettre. Comme beaucoup de musulmans, j’aimerais que L’Islam recouvre « sa raison ». Mais sa rationalité n’est pas celle des littéralistes, ni celle des rationalistes, ni celle de ceux qui sont assis entre deux chaises…
    Ceci étant dit, votre commentaire se constitue de deux parties.
    Vous essayez dans la première partie de prouver une évidence (qui n’a pas besoin de preuve) à savoir que les théologiens et autres foqaha utilisaient la raison et la logique dans leurs argumentaires, je vous l’accorde, mais avec cette différence de taille que le raisonnement rationnel reste, chez eux, soumis aux impératifs de la Révélation (voir le premier verset de la sourate « Les appartements »).Les théologiens anciens étaient effectivement d’excellents logiciens et savaient raisonner tout en restant dans le cadre éthico-légal qui était le leur. Ils ne faisaient pas feu de tout bois, ni arguments de tout boniment. Chez eux la raison et la logique s’inscrivaient dans une relation ancillaire au donné révélé. N’étaient-ce pas eux qui avaient traduit et commenté Aristote ?
    Mais « les nouveaux penseurs » inversent l’équation en soumettant la révélation aux impératifs de la « raison raisonnante ». Il y a donc une inversion grave des termes de l’équation. Je ne dis pas que vous en faites partie. Mon propos est général. Je crois que mon propos est clair. Comprenez avant de critiquer. D’ailleurs, « la raison est un principe de compréhension et de critique ». Mais ceux qui critiquent souvent la religion en général et l’Islam en particulier ne disposent d’aucune compréhension du fait religieux. Et ils ne maîtrisent même pas les fondamentaux de la religion.
    Oui les théologiens musulmans et autres foqaha utilisaient la raison et la logique héritée d’Aristote dans leurs démonstrations mais en les subordonnant aux impératifs éthiques religieux de leur référentiel.
    Quant à la deuxième partie, vous n’avez rien démontré encore une fois. Vous ne faîtes qu’exprimer des humeurs : « l’alarme tiré par Almilad » et « la menace que constitue l’intellectuel religieux ». Croyez-vous que ce sont des arguments ? Les vocables « alarme et menace » évoquent la peur qui n’est point un argument mais bel et bien une émotion. Et c’est votre droit le plus strict d’exprimer vos émotions. Vous sentez-vous menacé ? On ne fait que débattre. Ce n’est point un combat de coq.
    Ce qui fait que votre « cqfd » est inutile pour ne pas dire autre chose. Les émotions quand elles ne sont pas reconnues mènent souvent à la contradiction : la preuve vous écrivez dans un commentaire adressé à djeser : « Qui sont-ils, eux, pour que je sois prisonnier de leurs catégories de pensée ? » en parlant des savants anciens. Mais libre à vous de rester l’otage de la pensée de Zaki Almilad que vous convoquez comme un esprit ou que vous invoquez comme un maître à penser. Vous êtes libre de penser ce que vous voulez, Mouhib, mais, de grâce, n’essayez surtout pas d’exercer la censure en évoquant à tout bout de champ le magistère de Zaki Almilad (et dire que vous critiquez l’argument d’autorité). Je ne sais vraiment pas si vous lui rendez service.
    Et je conclus par cette phrase de Nietzsche :
    « Certains croient nous réfuter en répétant leurs opinions sans faire cas de la nôtre. »
    Je ne cherche à convaincre personne ! Si votre pensée vous donne satisfaction, vous n’avez pas à vous sentir menacé. Et si vous avez des choses intéressantes à partager, c’est toujours avec un grand plaisir. Personne ne doit bouder le vrai, le beau et le juste.
    Soyez heureux dans/par votre pensée. Mais ne me dictez pas la mienne. Merci !
    Cordialement

  11. @Mouhib
    J’espère que mon commentaire ne sera pas mis à l’isolement comme le premier. Que vous le publiiez ou pas ne me fait ni chaud ni froid.
    Le passage que vous citez et qui est de ma plume ou de mon clavier je le revendique à mille pour cent. C’est mon référentiel. Je ne suis pas libre penseur (qui se dévergonde plus qu’il ne pense), ni un littéraliste qui cultive la lettre sans le souffle de l’esprit, ni un spiritualiste qui prône l’esprit sans l’ancrage de la lettre. Comme beaucoup de musulmans, j’aimerais que L’Islam recouvre « sa raison ». Mais sa rationalité n’est pas celle des littéralistes, ni celle des rationalistes, ni celle de ceux qui sont assis entre deux chaises…
    Ceci étant dit, votre commentaire se constitue de deux parties.
    Vous essayez dans la première partie de prouver une évidence (qui n’a pas besoin de preuve) à savoir que les théologiens et autres foqaha utilisaient la raison et la logique dans leurs argumentaires, je vous l’accorde, mais avec cette différence de taille que le raisonnement rationnel reste, chez eux, soumis aux impératifs de la Révélation (voir le premier verset de la sourate « Les appartements »).Les théologiens anciens étaient effectivement d’excellents logiciens et savaient raisonner tout en restant dans le cadre éthico-légal qui était le leur. Ils ne faisaient pas feu de tout bois, ni arguments de tout boniment. Chez eux la raison et la logique s’inscrivaient dans une relation ancillaire au donné révélé. N’étaient-ce pas eux qui avaient traduit et commenté Aristote ?
    Mais « les nouveaux penseurs » inversent l’équation en soumettant la révélation aux impératifs de la « raison raisonnante ». Il y a donc une inversion grave des termes de l’équation. Je ne dis pas que vous en faites partie. Mon propos est général. Je crois que mon propos est clair. Comprenez avant de critiquer. D’ailleurs, « la raison est un principe de compréhension et de critique ». Mais ceux qui critiquent souvent la religion en général et l’Islam en particulier ne disposent d’aucune compréhension du fait religieux. Et ils ne maîtrisent même pas les fondamentaux de la religion.
    Oui les théologiens musulmans et autres foqaha utilisaient la raison et la logique héritée d’Aristote dans leurs démonstrations mais en les subordonnant aux impératifs éthiques religieux de leur référentiel.
    Quant à la deuxième partie, vous n’avez rien démontré encore une fois. Vous ne faîtes qu’exprimer des humeurs : « l’alarme tiré par Almilad » et « la menace que constitue l’intellectuel religieux ». Croyez-vous que ce sont des arguments ? Les vocables « alarme et menace » évoquent la peur qui n’est point un argument mais bel et bien une émotion. Et c’est votre droit le plus strict d’exprimer vos émotions. Vous sentez-vous menacé ? On ne fait que débattre. Ce n’est point un combat de coq.
    Ce qui fait que votre « cqfd » est inutile pour ne pas dire autre chose. Les émotions quand elles ne sont pas reconnues mènent souvent à la contradiction : la preuve vous écrivez dans un commentaire adressé à djeser : « Qui sont-ils, eux, pour que je sois prisonnier de leurs catégories de pensée ? » en parlant des savants anciens. Mais libre à vous de rester l’otage de la pensée de Zaki Almilad que vous convoquez comme un esprit ou que vous invoquez comme un maître à penser. Vous êtes libre de penser ce que vous voulez, Mouhib, mais, de grâce, n’essayez surtout pas d’exercer la censure en évoquant à tout bout de champ le magistère de Zaki Almilad (et dire que vous critiquez l’argument d’autorité). Je ne sais vraiment pas si vous lui rendez service.
    Et je conclus par cette phrase de Nietzsche :
    « Certains croient nous réfuter en répétant leurs opinions sans faire cas de la nôtre. »
    Je ne cherche à convaincre personne ! Si votre pensée vous donne satisfaction, vous n’avez pas à vous sentir menacé. Et si vous avez des choses intéressantes à partager, c’est toujours avec un grand plaisir. Personne ne doit bouder le vrai, le beau et le juste.
    Soyez heureux dans/par votre pensée. Mais ne me dictez pas la mienne. Merci !
    Cordialement

  12. @Djeser,

    J’ai bien lu votre premier commentaire. Le seul nom qui attire mon attention dans votre commentaire est celui d’Al-Ghazali, encore méconnu malgré les publications incessantes sur lui.
    Il a articulé la philosophie (le langage savant et profane de son époque) avec la théologie. Et les spécialistes de la philosophie arabe nous disent que c’est lui qui a contribué à l’introduction de la logique grecque dans les sciences théologiques pures (ironie du sort, ce n’est pas ibn rushd mais Al-Ghazali). On le voit dans son Mi’yâr al-‘ilm par exemple ou bien dans son introduction à son livre des fondements du droit musulman al-mustasfâ où il écrit noir sur blanc que celui qui n’a pas étudié la logique ne peut s’atteler aux fondements du droit musulman (uçûl al-fiqh), c’est curieux pour quelqu’un qu’on dit hostile à la philosophie.
    Quant à sa controverse sur la causalité, il était soucieux de lier le monde visible au divin par crainte que le principe de causalité nous éloigne de Dieu, il ne voulait pas que la causalité s’explique par elle même, mais par Dieu. L’originalité de son discours est qu’il est démonstratif, argumentatif (ou pour faire le pédant ,”apodictique”) tout en se fondant sur la Révélation. C’est normal, car la Révélation use d’un appareil argumentaire très solide, il est question de “preuves”, “raisonnement”, “observation”, un champ lexical scientifique qui a formé les esprits à la démarche scientifique. Et le discours de ces théologiens et de ces intellectuels religieux était tellement démonstratif et universel que les chrétiens, malgré leur hostilité aux “mahometans”, n’y ont pas vu de mal à s’approprier leurs pensées 😉

    PS: le seul grief qu’on trouve à Ghazali chez les intellectuels arabes contemporains c’est qu’il n’aurait pas dit un seul mot en tant qu’intellectuel religieux sur masjid al-aqsa quand il était attaqué, un mystère pour eux…

  13. Najib, mouhib,. merci pour vos réponses, je vous invite à lire mon texte en début de commentaires qui tente justement de réconcilier quelques grands courants philosophiques, qui à mon sens s’opposent un peu entre eux , comme les différents disciplines que nous venons d aborder. Suis je peut-être en avance sur mon temps ? est ce peut être pour cette raison que certains ne m ont pas compris…

  14. @ Najib,

    Il est regrettable de devoir répéter la même chose. Mais si c’est pour gagner en précision, pourquoi pas. Alors je vous cite :

    “Effectivement le religieux, quant à lui, accorde la primauté méthodologique et épistémologique à la Révélation (sa source est transcendante) et use d’arguments d’autorité (autant de principes initiaux organisateurs)”

    Vous avez dit LE religieux, sans aucune nuance. Or d’après mes modestes lectures de la pensée musulmane, je constate que l’approche expérimentale et rationnelle est présente dans leurs argumentaires. Si dans les faits des arguments d’autorité sont effectivement présents dans leurs discours (d’où mon “en principe”), ils prétendent tous, au moins théoriquement, à un discours scientifique, démonstratif. Les priver de facto de cette qualité me semble injuste. Surtout que c’est la Révélation elle-même qui leur enseigne cette posture scientifique. Elle transmet en effet un esprit scientifique.

    En fait, votre commentaire ne fait en réalité que confirmer le signal d’alarme tiré par Zaki Al-Milad, c’est à dire que l’intellectuel religieux est assimilé à tort à des arguments d’autorité, donc non scientifiques, subjectifs, non démonstratifs et “dogmatiques”…..et donc son discours n’aurait aucune légitimité à se prononcer sur les projets de société. Laïcité et sécularisation oblige. D’où l’épreuve vécue par l’intellectuel religieux, notamment (notamment), à cause de ces préjugés à son encontre et la mal compréhension de la philosophie de la religion de façon générale.
    C’est pourquoi j’ai écrit ailleurs que l’intellectuel religieux constitue une menace pour la laïcité et la sécularisation. CQFD 😉

  15. Le site Oumma.com favorise certes une liberté d’expression favorable à la recommandation coranique insistante de réfléchir et de raisonner. Le rapport entre foi, raison et passion est aussi épineux chez les musulmans que leurs prédécesseurs chrétiens et israélites. La fâcheuse tendance d’étendre la sacralité de la Révélation aux traditions mortifie le religieux.

    Une critique du salafisme publié sur http://www.academia.edu/45356696/Critique_du_salafisme tente de réhabiliter l’intellectualisme religieux/musulman si nécessaire pour proposer des solutions réalistes face aux défis inédits de notre monde actuel.

  16. Salam notre frère Najib, merci pour ce commentaire long et pertinent. Oui, les penseurs d’antan embrassaient toutes les matières sans les séparer, nous sommes d’accord, mais en ce temps-là, il y avait des savants dits omniscients, qui étaient sensés savoir tout ce qui était mis dans les sciences en leur temps. Mais les connaissances recensées en ces époques lointaines pouvaient, enfin le suggère-t-on se contenir dans une seule poitrine. Est-ce que la somme, le cumul, l’étendue des connaissances aujourd’hui n’imposent pas la spécialisation croissante? Une chose est de nier cette séparation qui est artificielle et peu vivante, autre chose est de convenir de cette spécialisation que nous ne pouvons empêcher, vous-mêmes vous êtes obligé de nommer différents éléments et matières, sinon les séparer au moins vous les distinguez puisque vous les nommez. C’est une distinction ou séparation didactique oui, mais vous y êtes contraint en dépit de votre bel hollisme. Le conscept d’intellectuel religieux ne s’impose-t-il pas à nous quoi que nous fassions? Qu’il soit vivant donc s’occupant de choses diverses certes, pas comme ces fameux savants du palais d’Arabie élevés et entretenus hors-sol, certes, mais s’il s’occupe beaucoup des choses du dine, ne dira-t-on pas qu’il est intellectuel religieux? L’intellectuel religieux fait partie de cette distinction inévitable des savoirs trop nombreux pour se renfermer en une personne, ne trouvez-vous pas?

    Croissant de lune.

  17. » Cette question, à mon sens, n’effleurait même pas leur cerveau bien fait et bien rempli. Qui plus est ils seraient outrés si on les traitait d’« intellectuel religieux ».

    @najib , merci pour cette réponse plus que pertinente, comme tu le fait remarquer nous vivons un antagonisme étrange : l occident a écarté de sa réflexion les questions spirituelles et d’éthique, en même temps le monde musulman , du moins jusqu à une période récente a écarté de sa pensée les questions sociales.
    Cette diversification des disciplines en Europe s’est faites pour des raisons pratiques, mais les failles commencent à apparaître : quelques voix commencent à dénoncer que s est une aberration de penser l économie sans intégrer l environnement ou le social, de penser l éducation, sans aborder une certaine éthique,…

    Donc la pensée universelle et pluridisciplinaire a t elle peut être un avenir devant elle, la pensée religieuse également ne doit pas être mise à l écart , mais doit intégrer certaines notions comme les libertés individuelles , qui sont réclamées également dans les pays musulmans. Voila à mon sens l’avenir de l intellectuel , religieux ou pas.

  18. ” Cette question, à mon sens, n’effleurait même pas leur cerveau bien fait et bien rempli. Qui plus est ils seraient outrés si on les traitait d’« intellectuel religieux ».

    @najib , merci pour cette réponse plus que pertinente, comme tu le fait remarquer nous vivons un antagonisme étrange : l occident a écarté de sa réflexion les questions spirituelles et d’éthique, en même temps le monde musulman , du moins jusqu à une période récente a écarté de sa pensée les question sociales.
    Cette diversification des discplines s’est faites pour des raisons pratiques, mais les failles commencent à appara

  19. @djeser
    Ta question est plus que pertinente et tu as raison de la poser.
    Pour les savants d’autrefois, la distinction entre sacré et profane n’existait pas, en tous cas de la façon dont nous la subissons aujourd’hui. Cette démarcation est un travers des temps modernes qui parcellarisent tout et qui distinguent et opposent au lieu d’unifier et de clarifier. Elle est donc une séparation. Ce dualisme, au sens philosophique, dommageable à l’homme et à sa pensée, ne date pas d’hier. On le fait remonter à Descartes selon les manuels de philosophies. Je laisse au philosophe le soin d’en faire la genèse. Car je n’ai aucune envie de donner l’impression que je maîtrise quelque chose alors que je suis au stade du balbutiement. D’autant plus qu’un hadith énonce : « celui qui prétend posséder ce qui lui fait défaut devient comme une personne qui porte de faux habits. » Autrement dit, cette personne est complètement nue. Quel triste spectacle !
    Je vais continuer en disant ce que tout le monde sait en laissant la place à ceux qui se sentent les moyens de la pertinence. Pour les anciens donc, ce dualisme serait une aberration et un crime de lèse-humanité et de lèse-pensée comme il l’est pour nous. Il restera à jamais une anomalie dans le fonctionnement de la pensée ; surtout depuis l’essor du concept de complexité. Les cloisons commencent à tomber. L’interdisciplinarité investit timidement l’université. Et l’Homme sait désormais que son esprit ou son âme fait partie intégrante de son corps. Et que l’un ou l’une ne va pas sans l’autre. Ils sont tissés ensemble. Quand l’un se défait, l’autre subit des dommages plus que collatéraux.
    C’est donc juste pour des raisons didactiques et pédagogiques que la plupart d’entre-nous recourt à cette typologie sacré/laïc. Mais au fond elle n’est pas pertinente. Aujourd’hui, la pensée dominante se caractérise ainsi. Nous sommes obligés de partir de ce que nos interlocuteurs et/ou contradicteurs savent pour leur faire prendre conscience de l’originalité de notre perspective. C’est donc juste un compromis didactique sans plus. En tout cas en ce qui me concerne.
    Oui, et tu as raison de le souligner, les grands noms que tu as cités ne se posaient pas cette question à ma connaissance. Et s’ils se la sont posée je ne pense pas que ça soit dans les mêmes termes que le discours moderne. Cette question, à mon sens, n’effleurait même pas leur cerveau bien fait et bien rempli. Qui plus est ils seraient outrés si on les traitait d’« intellectuel religieux ».

    Cordialement

  20. @ Mouhib

    Au travers de mon texte j’ai voulu démontré que la pensée n’est pas étrangère au religieux puisqu’il existe une rationalité religieuse qui dispose de ses propres catégories de compréhension de communication.

    Par ailleurs, vous écrivez : “Au regard des missions de l’intellectuel religieux identifiées par l’auteur de l’ouvrage, « l’argument d’autorité » n’a absolument pas sa place…en principe.”

    D’abord “l’argument d’autorité” n’est pas une mission. Il est ce qui fonde, de façon paradigmatique, l’appareil méthodologique et épistémologique du religieux. Il organise ainsi l’argumentaire et le structure. Car il n’existe pas de pensée ex-nihilo. On pense tous à partir d’un référentiel donné qu’il soit religieux ou laïc. Encore faut-il l’utiliser avec science et conscience. Et un intellectuel religieux qui n’origine pas sa réflexion à partir et au tour de son référentiel (Révélation + Sunna authentifiée…) serait un religieux qui joue à l’intellectuel ou un intellectuel qui joue au religieux.
    Ensuite l’expression “l’argument d’autorité n’a absolument pas sa place… en principe”. Je trouve dans un premier temps que “absolument et en principe” sont un peu discordants. l’adverbe “absolument” absolutise et l’adv “en principe” émet des réserves.

    En revanche si je me base sur “en principe” qui veut dire dans votre énoncé théoriquement ou techniquement, je peux avancer que, dans les faits ou dans la pratique, l’argument d’autorité est présent ne serait-ce que de façon implicite, tacite. Autrement le discours du religieux serait de la littérature et de la mauvaise en plus.

    Par ailleurs, vous avez raison de souligner que l’argument d’autorité est présent chez les intellectuels laïcs. Il l’est davantage chez l’intellectuel religieux. A moins qu’il ne change de référentiel et il cesse ainsi d’être religieux pour devenir un piètre intellectuel.

    cordialement

  21. @Djeser,

    Bien sûr que ces questions étaient traitées par les classiques. Lisez mon article “La controverse sur le principe de causalité entre Al-Ghazâlî et Ibn Rushd”, la question au fond tourne autour du “profane” et du sacré, tous les deux discutent sur la relation entre ce monde visible et le divin.
    Ibn Sina a bien intégré dans la philosophie grecque la notion de création jusque là absente dans le système philosophique, sans oublier “l’être nécessaire” dans une philosophie jusque là polythéiste. Au risque de vous choquer (par provocation), ils ont tant bien que mal essayé d’islamiser la philosophie grecque.

    Et puis quand bien même ils n’auraient pas traité ces questions, leur horizon de pensée doit-il limiter le nôtre?
    Qui sont-ils, eux, pour que je reste prisonnier de leurs catégories de pensée?

  22. Mouhib, najib je vous pose la question , car vous avez l’air de la maitriser un peu : Pensez vous que les anciens savants musulmans, comme averoess, avicenne, ou bien d’autres , ce sont ils vraiment posés ce genre de question ? distinguer le le champ religieux, laïc, ou profane ? Pourtant ils sont connus pour avoir été des esprits universels , maitrisant la théologie, la médecine, la sociologie, … ibn rushd n’est il pas connu pour avoir proposé une pensée hybride conciliant le profane et le sacré ? C’est d’ailleurs dans cette esprit que je m’inscrit, en profitant de cette liberté de pensée qui s’offre à nous , j’ignore quel souffrance et quel prix ont payé ceux qui se sont battu pour elle , mais je la savoure chaque jour et j’en profite pour la mettre à profit.

  23. @Najib,

    Au regard des missions de l’intellectuel religieux identifiées par l’auteur de l’ouvrage, “l’argument d’autorité” n’a absolument pas sa place…en principe.
    L’intellectuel religieux est un Homme qui s’adresse aux doués d’intelligence, donc il n’use pas d’argument d’autorité. Et l’histoire de la pensée musulmane, y compris dans la théologie pure, la raison, l’argumentation et la démonstration ont toutes leur place, comme vous l’avez rappelé.
    Ceci pour vous dire que l’argument d’autorité est étranger en principe au champ de l’intellectuel religieux. Et à y regarder de plus près, l’argument d’autorité est loin d’être absent chez les intellectuels laïques, hélas.

  24. L’intellectuel religieux est certes un concept curieux, mais il est loin d’être absurde. En apparence, c’est une contradiction dans les termes. Mais c’est seulement en apparence. Car la religion ne s’oppose point à la pensée vraie qui est respectueuse des valeurs universelles et qui n’est pas, surtout, le prolongement de nos passions ou l’expression de nos illusions ou la traduction de nos frustrations ou le tremplin de nos idéologies ou l’alibi de nos trahisons ou la justification de nos manquements… Penser, dans le champ religieux, n’est point une sinécure, un exercice livré aux caprices et au lubies de l’ego. Penser relève de l’ascèse ! Quant au véritable intellectuel (celui dont la pensée transcende les fluctuations et les contorsions d’un ego infatué de lui-même), il n’a pas d’esprit de corps encore mois de parti pris à part, bien sûr, celui de la vérité et de l’objectivité. Car le véritable intellectuel est un être libre. Libre de tout ce qui entrave la quête de la vérité et sa proclamation. Il reste de la sorte toujours ouvert à “l’inconnu et à l’inconçu”. Ainsi de prime abord, le concept d’intellectuel religieux ne doit ni nous choquer, ni nous interloquer puisque l’intellectuel et le religieux, déliés de leur narcissisme, partagent la même passion pour la vérité et n’hésitent pas à la clamer haut et fort quitte à subir l’ire des imposteurs et autres promoteurs du chaos.
    Analysons donc, dans les moyens du possible, les deux éléments qui composent ce concept : intellectuel et religieux.

    De prime abord, l’activité intellectuelle laïque accorde la précellence à la pensée sur la religion, à la raison (plus raisonnante que raisonnable) sur la Révélation et à l’opinion personnelle sur l’argument d’autorité. Elle privilégie l’esprit critique et le libre examen. Autrement dit, un intellectuel prétend penser par lui-même en exerçant son droit à l’expression. Il court ainsi, à perdre haleine, après l’objectivité qui ne devient possible que s’il fait preuve d’honnêteté et de rigueur intellectuelles et que s’il reconnaît les limites de son esprit, donc les limites de son propre appareil méthodologique. Mais parfois les enjeux sont tellement nombreux et impérieux que certains intellectuels immolent souvent, sans état d’âme, la vérité et l’objectivité sur l’autel des intérêts personnels, voire catégoriels en versant dans la doxa. Lorsqu’on entend effectivement certains intellectuels patentés, en France et ailleurs, parler de l’Islam, au mieux on sourit et au pire on est en droit de douter de leur intégrité psychologique. Certains religieux également sont loin d’être honnêtes et sont au service des forces de l’oppression et de la répression. Ils tordent, à l’occasion, le coup à la vérité et lui font dire ce qu’elle ne dit pas.

    Penser par soi-même signifie ne rien accepter sans examen préalable, c’est-à-dire sans faire passer au peigne fin de l’analyse et de la critique toute assertion. Certains intellectuels qui ont pignon sur rue discourent sur la religion en général et l’Islam en particulier en débitant, hélas, des âneries sur un ton doctoral sous prétexte de penser par eux-mêmes. D’autres pensent selon les fondamentaux de leur propre discipline. Ainsi le philosophe pense en philosophe, le sociologue en sociologue, le psychologue en psychologue, le politique en politique etc… dans ces conditions on est loin de l’objectivité qu’ils clament tous puisque la réalité est complexe et ne peut être appréhendée suivant un seul angle d’attaque. Loin de tout esprit critique, chaque protagoniste prêche pour sa paroisse dans un esprit de clocher. Il réduit la vérité à son jargon et l’objectivité à son point de vue. Car chaque intellectuel ne jure que par son jargon et les présupposés de sa discipline à l’aune de laquelle il jauge et juge les autres disciplines y compris la religion (quand bien même on peut la considérer comme une discipline). C’est pourquoi un philosophe, à titre d’exemple, trouve le religieux borné et aliéné. C’est pourquoi le psychologue taxe le religieux de névrosé et la religion d’illusion. Le sociologue, lui, réduit la religion a un fait social comme gratter ou jouer au PMU etc.. Quant au politique, il la relègue à la sphère privée… ainsi de suite. Toute vision partielle finit par devenir partiale puisque la réalité ne peut être réduite à un seul de ses aspects, ou à un seul point de vue. De plus, l’intellectuel ne dispose d’aucun “méta-point de vue” en vue de complexifier son approche un tantinet simpliste. La réalité est loin d’être manichéenne. Le religieux en a conscience et vise à l’unifier au nom du principe du “Tawhid” qui est loin d’être une simple croyance mais plutôt et surtout un paradigme efficient qui réduit tout à l’unité qui clarifie et pacifie.

    Effectivement le religieux, quant à lui, accorde la primauté méthodologique et épistémologique à la Révélation (sa source est transcendante) et use d’arguments d’autorité (autant de principes initiaux organisateurs). Il relègue l’opinion personnelle, productrice de points de vue, à l’arrière plan de ses préoccupations. Cela ne fait pas de lui un être irrationnel au cerveau lobotomisé. Tant s’en faut ! Alghazal (m. 1111), à titre d’exemple, fut un théologien brillant doublé d’un philosophe redoutable. La Révélation agit désormais sur le religieux comme une “supra-raison”. Car elle est antérieure à lui et supérieure à lui. Elle est donc perçue et agréée par le religieux comme une “raison extérieure” (Alghazali) qu’il faut intérioriser et en faire siennes les catégories. C’est pourquoi le Prophète (ç) ainsi que ses Compagnons furent des “Corans ambulants”. Ainsi la foi qui est une démarche de l’esprit à part entière consiste dans l’adhésion sans conditions à cette supra-raison et à vivre, penser, réfléchir, méditer selon son magistère et ses impératifs. En contexte religieux, la raison devient une démarche dépassionnée, objectivée. Cette démarche s’appelle “العقل” dans le champ religieux islamique et se plie aux exigences et à l’excellence de la Révélation. C’est ce que Alghazali appelle “une révélation intérieure”. L’on ne saurait mieux définir la raison en contexte islamique. Ainsi “al’âql” devient la raison moins les passions. Ce qui fait du religieux imprégné des préceptes de sa religion un être davantage raisonnable, c’est-à-dire davantage objectif parce qu’il dispose d’un méta-point de vue qui n’est autre que la Révélation ou raison extérieure qui fait écho à la révélation intérieure. Le religieux devient ainsi capable de penser contre soi ou de témoigner contre soi… C’est le fameux hadith qui énonce : “… dis la vérité même à tes dépens.”

    La plupart des intellectuels laïcs sont loin de ce niveau de compétence et de pertinence. Ils sont pour la plupart sous le joug de leurs passions ou de leur tempérament. D’ailleurs, on dit que si tu veux comprendre la pensée d’un philosophe, il suffit de connaître son tempérament. Alors qu’il est demandé, en contexte islamique, au musulman selon un hadith bien connu de tous de “rendre ses passions compatibles avec les enseignements prodigués par le Prophète ç”. Donc le religieux qui se respecte fait un effort colossal en vue de se rendre compatible avec la Révélation qui est une raison extérieure à nous et supérieure à nous et qui rend l’objectivité qui est un préalable à la vérité plus que possible. Un intellectuel qui ne serait pas capable de penser contre soi autrement dit qui ne serait pas apte à dire la vérité à ses dépens serait un imposteur et un menteur. Et ce genre d’intellectuels (sic) sont légion. Ils perdent toute rigueur intellectuelle quand il s’agit de la religion en général et de l’Islam en particulier.

    Être un intellectuel est loin d’être un statut que certains peuvent arborer telle une étiquette mais une éthique qui s’assume et qui consume. Ce qui rend, il me semble, le concept d’intellectuel religieux pertinent et vrai. Car il n’y a point de pensée sans ascèse. Et la religion est la meilleure des ascèses. Il s’ensuit que le monde n’est pas dénué de religieux et d’intellectuels ascétiques, c’est-à-dire mettant les exigences de l’objectivité et de la vérité au-dessus des préoccupations de la vie mondaine. Gloire leur soit rendue !

  25. @Djeser,

    Oui, il faut s’interroger sur les causes du recul de la figure de l’intellectuel religieux (c’est plus précis que l’intellectuel musulman qui lui peut être laïque).
    L’intellectuel religieux à mon avis constitue forcément une menace pour l’ordre laïque, à l’inverse de l’intellectuel musulman qui peut très bien accepter et même promouvoir la laïcité.
    Et connaissant très bien l’œuvre de
    Zaki Al-Milad, je ne pense pas qu’il accepterait qu’on intègre l’intellectuel musulman laïque dans la notion de l’intellectuel religieux.

  26. croissant de lune, penses tu vraiment que je sois hors sujet ? voila quelques finalité du débat intellectuel abordé par mouhib :

    Produire de la connaissance et contribuer au développement de la culture intellectuelle.
    Participer à la lutte idéologique avec les autres courants de pensée.
    Se soucier des grands problèmes concrets, des défis et intérêts de la communauté.
    Faire évoluer la conscience des défis sociaux contemporains au sein de la communauté.
    Penser l’articulation entre la pensée musulmane et les conditions de la modernité (c’est-à-dire de la contemporanéité).
    L’intégration et la participation complète dans la société.
    L’intellectuel religieux humaniste doit constituer un pont entre les communautés et les civilisations.

    Ma réponse essaie simplement d’apporter un peu d objectivité et surtout remettre notre contexte occidentale au centre du débat. En effet l auteur a simplement retenu que al mamoun a voulu imposer sa doctrine religieuse à l imam mais il oublie de dire que ce calife a été un grand mécène des sciences et la philosophie en générale. Tiens donc philosophie ?. suis je vraiment hors contexte ? mais cette approche unilatérale ne représente t elle pas un peu le repli intellectuelle des musulmans ?

    J avoue ne pas m’intéresser à ces débats ennuyeux et cycliques qui tournent un peu en boucle comme la nature du coran, fêter noël ou pas , ou le mawlid….

    Je te lance à mon tour un défi : produire un texte, qui présente tes idées, tes propositions, tes positions et tes valeurs ( la copie demain soir sur mon bureau ). Utilise si possible un vocabulaire clair et simple et non des formules alambiqués qui ne veulent rien dire pour personne ( cosmologie mécaniste ???) un peu ce que tu reproches à Hakim. et la peut être cela pourra m intéresser.

  27. Mouhib, j ai répondu à ton article par une réflexion personnelle,. Il semble intéressant d évoquer la figure et l évolution de l intellectuel musulman , mais ce qui m’importe surtout ce n est pas tant de définir un archétype ou pas mais de savoir pourquoi il y a une carence d’intellectuel musulman, et comment y remedier. Qui à Mon sens , est la raison pour laquelle nous sommes flagellé, sous représenté, ou même un peu perdu intellectuellement pour faire simple.

    Donc plutôt que de polémiquer sur la nature du Coran , qui malheureusement est un vieux débat musulman si ce n est le seul. Je m efforce a mon niveau, avec mes modestes connaissances , de proposer quelques pistes de réflexion.

    Merci au soutien de croissant , lol.

  28. @ Croissant de lune,

    En fait, c’est intéressant de questionner la différence entre l’intellectuel religieux et le théologien.

    Ma question rhétorique est la suivante : et si la notion d’intellectuel religieux était venue pour remédier aux lacunes du théologien à l’époque contemporaine?
    Et si cette notion dévoilait les manquements du théologien? Et si cette notion était venue dénoncer le silence du théologien sur des questions pourtant cruciales? La preuve en est que l’intellectuel religieux fait face aux mêmes obstacles vécus par le théologien, c’est à dire sa mise en marge des questions sociales, politiques (c’est à dire non “spirituelles” stricto sensu)?

    En bref, et si cette notion était venue demander indirectement au théologien de s’ouvrir aux défis contemporains, politiques et sociaux?

    PS: vous pouvez si vous voulez lire l’intervention de M. Arkoun dans un colloque dans les années 80 intitulé “quelques tâches de l’intellectuel musulman aujourd’hui”, il est je crois le premier à avoir employé la notion d’intellectuel musulman. Mais je n’apprécie pas son discours, il est trop superficiel à mes yeux, tous ses écrits je les trouve trop superficiels. Je sais apprécier pourtant certains “libéraux”, mais je ne trouve aucune profondeur dans ses écrits. Cela dit lisez son texte quand même, vous pouvez lire avec un autre œil…plus clément.

  29. Croissant de lune , qui porte bien son nom , il ne vit qu a l ombre des autres , a simplement commenter, applaudir , ou a huer, comme un vil spectateur. Tu ne comprend pas que tu est hors course .. on ne joue pas dans la même cour mon petit.

  30. @ Djéser, je commente pas ton long et touffu commentaire plutôt hors sujet. Mais, “Le cœur a ses raisons que la raison ignore”, ce n’est pas la version initiale de Pascal Blaise, on trouve ce vers dans Paul Verlaine. Initialement, Pascal écrivait,

    “Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point.” C’est presque pareille, enfin pas tout-à-fait, pourrais-tu disserter sur les nuances entre ces deux phrases? Devoir sur table, je ramasse la copie demain soir quand j’aurai terminé ma journée de travail, tu as du temps devant toi, je termine tard.

    En fait les deux propositions sont discutables, Pascal était donc dans la cosmologie mécaniste, il séparait le cœur et la raison sensés ne pas se connaître, je vas réfléchir là-dessus mais je le sens pas comme ça. Demandes à ton maître ce qu’il pense de tout ça, moi je trouve que Pascal Blaise alors, les choses ainsi entendues devait se soucier peu de l’écossystème général, loin de sa propre vie et des gens qui l’entouraient, ses amis et proches. Contrairement aux suggestions de ton maître, je trouve moi le Musulman plutôt holliste, le serait-il moins, il séparerait plus les divers ordres de pensée, préalable à la laïcité, mais ton maître est-il en fait pour ou contre la laïcité? Je t’embête. Il devrait tenir contre la laîcité plutôt mécaniste, non? Questionnes-le donc parce que par les temps qui courent, avec les valeurs de la république, moi ça m’inquiète lol.

    Croissant de lune.

  31. Salam frère Mouhib, cet article de compte-rendu est republié? Il vaut de l’être et encore d’autres fois, la clarification de certains vocables et conscepts nous fait le plus grand bien en ces temps de confusion enfumée. Je souhaite de bons commentaires de correspondants du site, des commentaires pertinents, vous êtes courageux et patient, vous pourriez avoir des commentateurs plus ou moins volontairement sophistes ou mal comprenants, parce que le sophisme volontaire est probablement plus rare qu’on croit. Ce sont principalement les auteurs réguliers d’articles sur Oumma dont je souhaite ici des commentaires, puisque le conscept les concerne en premier, eux qui égrènent beaucoup de conscepts.

    Notre frère Mouhib, peut-on pas afin d’isoler le conscept d’intellectuel et d’intellectuel religieux, définir l’intellectuel, comment se distingue-t-il du penseur, le théologien ou sapiteur Musulman est-il penseur, savant ou intellectuel? Quid du polémiste, est-il encore intellectuel, l’orateur de propagande?

    De l’intellectuel Musulman en France, alors-là, voilà une grande question, où sont-ils? Certains répondraient plus ou moins à cette qualité qui publient sur ce site, avec parfois tant de liens de renvoi qu’on s’en fatigue. Je ne peux même pas vérifier s’ils font du sophisme plus ou moins volontaire, mais la sophistication de leurs développements plaide dans ce sens, ils ont oublié que ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, les mots pour le dire venant aisément. Certains orateurs simples de YouTube ont souligné d’eux qu’ils sont, trop, trop, trop intelligents, comprenne qui a des oreilles et un cerveau. Non, franchement, le Musulman en France, je dis pas que c’est mieux ailleurs, entend beaucoup de discours plus ou moins anti-Musulman, voire les reprend lui-même en conversation particulière, ça laisse à penser, proche de la schyzophrénie, on ne s’habite pas bien soi-même.

    Quant à la laïcité, en vrai, on en parle de moins en moins après l’avoir beaucoup déformée, rendue méconnaissable. Donc le rapport avec quelle laïcité, si on ne définit pas le vocable, on risque de taper à côté de la plaque. Comme ailleurs, certainement, les discours de Musulmans sont agréés ou pas des grands médias, ainsi tel ou tel sera désigné comme le théologien controversé, enfin depuis on a eu droit aux infectio-virologues controversés. Entendre “suspects” quand j’écris “controversés”, parce que la controverse est saine et ordinaire, n’est-e pas, vous, le controversé Jaroui Mouhib? Mais l’emploi de cette expression suggère beaucoup d’une France dont les médias de masse se sont mis à ne plus aimer la controverse.

    Je suis le controversé Croissant de lune.

  32. @Croissant de lune,

    C’est un compte rendu qui date de 4ans je crois. Oui c’est contre intuitif pour Ahmed Ibn Hanbal. Pour plus d’information lisez l’article “Le mu’tazilisme est il un humanisme?” Et vous allez peut être comprendre ce qu’il s’est passé.
    C’est un vaste sujet, nombreux sont les ouvrages qui ont été publiés récemment sur la relation entre l’intellectuel et le pouvoir en contexte musulman, une relation qui est à creuser sur le plan académique. Sans oublier l’ouvrage de Abdelilah Belqziz “La fin du prédicateur”, etc.

    Pour le passage sur la capitulation des cultivés de France et les prolongements, c’est de moi, oui. Comme celui sur le livre de J. Le Goff et les deux autres philosophes M. Henri et R. Girard, comme j’aurais pu citer E. Levinas ou le célèbre chrétien Jean Luc Marion. Le reste vient du livre.

    Oui, Croissant de lune, je confirme avec amertume que le ciel n’est plus clément sur nos têtes en France, pour paraphraser ceux qui sous la contrainte répètent inlassablement que le “ciel est plus clément sur nos têtes qu’ailleurs”, d’autres sous la même terreur répètent que la France est plus proche de l’islam que les pays à majorité musulmane 😉. Regardez autour de vous, c’est la terreur qui règne. Avons nous encore le droit, nous musulmans, de dire “on n’est pas d’accord”?
    Les musulmans n’ont le droit de s’exprimer dans ce pays que pour cracher sur leurs coreligionnaires! On ne leur donne la parole que pour pointer du doigt soit les “salafistes”, soit les “frères musulmans”, soit les “islamistes”, soit le “méchant fiqh”, soit le “méchant voile”, soit la “méchante pratique religieuse”. C’est ça l’islam?! Avez vous lu ces derniers temps un article de fond ou une vidéo de fond en contexte français sur la pensée musulmane, sans que l’islam soit synonyme de “terrorisme” ou de virus, ou de “radicalisation” ou de cataclysme? C’est du harcèlement, c’est du terrorisme intellectuel!

    Il est temps que la France se réconcilie de façon générale avec la foi. Sinon, les musulmans n’auront plus qu’à chanter mon poème :

    إذا في فرنسا إماني مبادٌ *** فعارٌ علىّ المكوث الدوامُ

    حفاظا على الدين راح الرسول***نزوحا إلى العزِّ سنَّ الإمامُ
     
    !فأنوي الرحيل اقتداءً وإلاّ *** إذا ما بقاءٌ فأنت الملامُ

    Comprenne qui pourra…

  33. La solution est peut-être philosophique..

    On oublie assez souvent que de nombreux courant de pensées
    ont façonné notre manière de voir le monde, les partis politiques n’en sont pas épargné, si le capitalisme ou même le communisme n’étaient que de simples simples thèses philosophiques au départ, elles furent pourtant politisées respectivement par les États-Unis et l ‘URSS à leur époque de développement.

    Ces nombreux courants ont parfois été instrumentalisées, mais ont pu également évoluer au cours du temps, en effet, le parti de gauche ou même le communisme d’aujourd’hui, ne ressemblent plus vraiment à la vision de Carl Marx ou de Lénine. De nombreux philosophes, depuis l’antiquité ont élaboré des écoles de pensées bien connu jusqu’à aujourd’hui et ont malgré tout conservé leur credo.

    Ces idéologies, qu’elles soient philosophiques ou mêmes religieuses ont toujours accompagné les sociétés et les civilisations dans leur essor et dans leur régression, mais aujourd’hui quelle vision accompagnent notre société moderne ? Il y a peut-être une pénurie de philosophes autant que d’ d’agriculteurs.

    Tout le monde a entendu parler de l’épicurisme, du rationalisme, de l’idéalisme ou de l’existentialisme, du déterminisme ou bien de l’absurde, quelques principaux courants de pensées défendus par d’illustres philosophes tel que Platon, Aristote, Descartes, Sartre, Spinoza ou Albert Camus. En s’intéressant aux arguments de chaque penseurs, ils ressortent deux éléments intéressants :

    Ils apparaissent que ces courants reflètent souvent l’expression des différents groupes d’individus que compose l’humanité, ces savants ont eu suffisamment de génie pour vulgariser et élaborer une philosophie distincte qui habite en chacun de nous, mais que nous ignorons parfois. On peut en effet observer que certaines personnes sont plus idéalistes que d’autres, certains n’attendent rien du monde comme le décrit camus dans ses romans, d’autres encore sont plus rationalistes, alors que celle-ci est plus émotionnelle, ou même matérialiste.

    Ce bref argument ne représente bien sûr pas totalement la pensée complexe des ces brillants intellectuels. Mais la pensée qu’ils ont laissées à la postérité semble avoir une certaine faille, c’est qu’elle se place toujours en opposition à une autre philosophie, donc à une autre franche de l’humanité. Si ces écoles de pensées ont su élever intellectuellement les femmes et hommes, ne les ont-elles pas en même temps diviser ? C’est une simple interrogation.

    La pensée matérialiste qui domine par exemple aujourd’hui dans notre société moderne semble être en opposition aux valeurs humaines ou au monde des idées tel que la défendu par exemple Platon. Nous le voyons dans les débats politiques et médiatiques qui ne traitent souvent que de « l’apparent » mais ont souvent du mal à aller au fond et à la racines des problèmes qui nécessitent plus de réflexion.

    Le rationalisme et le libre-arbitre de l’esprit que rené Descartes a brillamment défendu et qui a largement influencé toute l’Europe, semble un peu ignorer l’intelligence du cœur et des émotions, car comme l’a dit Blaise pascale « le cœur à ses raisons, que la raison ignore ».

    Jean-Paul Sartre a aussi défini une pensée pleine d’espoir, l’existentialisme, qui explique que chacun est maître de son destin, et cela, malgré la condition sociale de chaque personne, grâce à sa célèbre citation « l’existence précède l’essence ». Selon lui les objets qui sont crées ont une fonction prédéfinie mais pas l’être humain qui peut choisir sa nature et le rôle qu’il veut jouer. Mais derrière cette belle citation, il y un problème, car l’inverse est aussi valable : les objets peuvent aussi avoir différents fonctions, un véhicule par exemple peut servir de transport, mais peut servir aussi à une course sportive, elle peut rejoindre une collection, un couteau également peut servir à se nourrir mais aussi à se defendre ou à tuer… à l’inverse également, on peut considérer que l être humain possède une nature et une fonction, pour quelle raison ? C’est qu’il est le produit de la nature et de son environnement, hors nous savons que notre écosystème possède son équilibre et ses nombreux acteurs, nous compris, nous avons donc forcement un rôle dans cet écosystème, c’est à chacun de le trouver.

    Le philosophe Spinoza nous a démontré que ce n’est pas la raison qui prend une décision mais que celle-ci n’est que le fruit d’une succession d’événement antérieur qui a conditionnée cette action, pensée très subtile. Mais comme le dit Sartre et Descartes, malgré un environnement ou une situation défavorable, nous pouvons prendre la bonne décision, et changer le cours de notre vie. Le déterminisme que défend Spinoza ne serait qu’un simple facteur mais pas l’élément déterminent dans nos décisions.

    Nous voyons là que la plupart des philosophies entre en collision un moment ou un autre avec un autre aspect de notre personnalité, alors pourquoi ne pas essayer de réfléchir à un syncrétisme philosophique, une hybridation d’idées qui tente de réconcilier toutes ces écoles de pensées ?

    J’ai pour ma part choisi une philosophie hybride, qui concile émotions, convictions et intentions, car il me semble que ces 3 éléments orientent principalement la pensée de la femme et de l’homme.

    Notre état émotionnelle, comme l’explique par exemple Pascal, nous en apprend beaucoup sur nous-mêmes, scruter cette état en permanence, peut énormément nous aider dans nos relations sociales et dans notre bien-être mentale : mettre des mots sur une colère, une mélancolie, une tristesse ou même une joie, c’est prendre conscience de notre complexité et de notre état d’âme, qui change constamment, et que l’on ne peut enfermer dans une simple pensée.

    Nos convictions également, qui se résume souvent à nos valeurs, à notre histoire, à nos points de vues et mêmes nos rêves, nécessitent aussi une introspection permanente, un doute ou un questionnement, pour mieux les définir ou les redéfinir.

    La force de l’intention est une pensée qui a été peu traitée par les grands philosophes, mais cette simple idée peut nous interroger sur le sens de nos actes quotidiens, devenus souvent banales. Un théologien musulman du nom d’al Ghalazi qui a vécu au XIe siècle de notre ère, avait abandonné ses grandes fonctions et ses privilèges pour se concentrer sur ces intentions profondes, qu’il jugeait pervertis par son nouveau mode de vie.

    Les grands sportifs également s’illustre grâce à cette force mentale qu’est l’intention et la volonté de réussir, de faire la différence.

    Émotions, convictions et intentions, voila peut-être nos meilleurs alliés, pour le meilleur et pour le pire…

    http://jonasdjeser.unblog.fr/

  34. Salam notre frère Mouhib Jaroui, je vous lis toujours avec plaisir. Vous présentez et commentez un livre consacré aux intellectuels religieux, donc aux intellectuels tout court, en un temps où n’importe qui s’en prévaudrait, à cause d’une certaine liberté d’expression qui m’autoriserait à dire n’importe quoi hors des limites légales, parce que c’est ma liberté et que j’ai le droit de le dire. Ainsi par exemple, Michel Onfray qu’on classera comme intellectuel a dit en substance s’adressant à des écologistes, qu’ils sont des Islamo-gauchistes, je le dis parce que j’ai le droit de le dire etc.

    Il y a beaucoup d’intellectuels ou ayant ce titre ou cette étiquette parmi les auteurs qui produisent des articles sur le site Oumma.com, j’ignore si certains d’entre eux réagiront à votre présentation de la question, mais ils devraient, enfin ils devraient aller à l’expérience d’une grande rigueur dialectique et intellectuelle s’ils sont sûrs de quelque chose, et ils sont sûrs d’un peu de chose sinon à quoi bon publier des articles? Nous verrons, je ne vous le souhaite qu’à peine, c’est une épreuve aussi, pour vous comme pour eux, patience du débat ou de la conversation, de l’échange, bref. Je ne dis pas que vous leur lancez un défi, que vous les invitez au vif débat, quoi que, ça ressemble un peu à ça, enfin si ça arrive, vous êtes de taille, je me fais pas de souci sauf pour votre temps compté et court, mais pour le reste,…

    Oui, la liberté a un prix, la liberté se paie parfois cher. Je vous cites mon frère.

    Début de citation. “La notion d’épreuve rappelle évidemment aux lecteurs avertis « l’épreuve » vécue par le théologien Ahmed Ibn Hanbal face au calif Abbassid Al-Mamoune à propos de la controverse « création du Coran ». Si le chef de fil de l’école hanbalite avait résisté, nombreux de nos contemporains parmi les cultivés de confession musulmane ont choisi quant à eux de s’inscrire dans le paradigme de l’abdication, de la capitulation et de la soumission au point de retourner leurs armes contre leur propre religion.” Fin de citation.

    Et oui, en plus c’est contre-intuittif, Ahmed Ibnou Hanbal souvent présenté de façon lapidaire comme très très orthodoxe, normativiste, il s’est probablement révélé au monde et aux Musulmans via cette épreuve, donc c’est le très très conservateur qui a reçu le fouet opposant sa résistance on va dire d’intellectuel. Je ne dis pas pour ça qu’il avait raison dans cette affaire de Coran créé ou incréé, je ne la comprends pas assez pour décider mon opinion, il pourrait avoir tort, mais le Calife avait tort de contraindre le savant par flagellations successives selon les récits jusqu’aux limites de sa résistance physique. Si le calife avait raison dans le fond, chose que j’ignore, il a ruiné ses arguments par ce vil recours à la force de la main de flagelleur. La Liberté vivait dans le savant résistant Ahmed Ibn Anbal, souvent cité lui et ses successeurs comme partisans de grande normativité, le calife philosophe a perdu quant à lui la bataille du verbe, donc si Ahmed Ibn Anball eut beaucoup d’influence, on le doit beaucoup au calife irréfléchi, trop rationel ou rationaliste sans doute.

    Bon, je tempèrerais un peu vos propos si vous le permettez, enfin si ce sont les vôtres à vous, si la citation que je fais ne vient pas du livre que vous présentez. Les intellectuels Musulmans ou catégorisés ainsi aujourd’hui, je crois que certains capitulent, retournent leurs armes contre leur religion délibérément et consciemment, mais pas tous, je crains que certains ne le font pas délibérément en totale connaissance de cause, l’homme est faible et faillible, son intelligence aussi, fut-il nommé intellectuel, ses connaissances sont limitées, il arrive qu’il fléchisse, il arrive qu’on le croit fléchissant tandis qu’il est convaincu. Mais oui, hélas, pauvre contingeance.

    Récemment j’en ai flagellé un qui perdu dans ses démonstrations sophistiquées a trouvé que oui, le Musulman moderne nuit à l’écossystème du fait de son héritage Acharite, pour le moment il n’a rien dit mais il a un fan infatigable qui le défend sans le comprendre. Peut-être que tous deux croient avoir raison lol.

    Plaise à Oumma augmenter la diffusion d’articles de qualité comme les vôtres, plaise à Oumma élargir encore les échanges et les débats tout en accroissant l’exigence de qualité et de rigueur intellectuelle.

    Mouhib, qu’Allah vous comble de tout bienfait, merci d’exister, continuez votre travail malgré les contraintes, n’allez quand-même pas jusqu’à tâter du fouet, enfin ça dépend pourquoi mais le risque de la liberté, le prix qu’on paie, encore faut-il l’apprécier selon les enjeux précis du moment. La liberté des idées bien claires, ça vaut beaucoup de peine, vous faites du bien à autrui je vous assure.

    Croissant de lune.

  35. Merci à Oumma pour la republication de ce compte rendu capital.
    Il faudrait prolonger la réflexion en contexte français, qu’est ce qu’un intellectuel musulman? Y a t-il des intellectuels musulmans en France? Si oui, en quoi consiste leur discours? Etc.
    Quel lien fait-on entre l’activité intellectuelle et la religion musulmane? Quelle relation entre le champ théologique pur et l’intellectuel religieux?
    Quelle place donne la laïcité à l’intellectuel religieux?
    Autant de questions qu’il faudrait se poser.

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