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L’ouvrage « La régente de Carthage », publié en 2009, accablait déjà le régime tunisien

Dans « La régente de Carthage », un ouvrage fort bien documenté, Nicolas Beau et Catherine Graciet, alors journalistes au site « Backchich.info », s’intéressent tout spécialement aux familles qui se sont accaparées les secteurs économiques les plus juteux de la Tunisie. À commencer par les Trabelsi, et plus spécialement Leila, l’épouse de Ben Ali, la femme la plus détestée du pays du jasmin. Mais que la presse occidentale continue à porter aux nues pour son combat supposé en faveur de la libération des femmes.

Leila Trabelsi est née en 1957 dans une famille modeste, forte de onze enfants, à Khazenadar, près du Bardo à Tunis. Son père vendait des fruits secs. Elle est d’abord coiffeuse, avant d’épouser le patron d’une agence Avis, et de divorcer trois ans plus tard. Elle sort beaucoup et hérite du surnom de « Leila Gin », en raison d’un goût supposé pour cette boisson alcoolisée. « La régente de Carthage » révèle qu’elle se livre parfois à de petits trafics douaniers entre Paris et Rome. Prise la main dans le sac, Leila Trabelsi se voit confisquer son passeport. Pour le récupérer, elle fait intervenir une relation au ministère de l’Intérieur.

Rien n’échappe aux Trabelsi

« Serait-ce à cette occasion que Leila aurait été reçue par Ben Ali, directeur de la Sûreté de décembre 1977 à avril 1980 ? Selon plusieurs témoignages que nous avons recueillis, ce serait le cas », écrivent Nicolas Beau et Catherine Graciet. Toutefois, la véritable liaison entre Leila et le futur président tunisien ne date que de 1984. Ben Ali, un temps ambassadeur de Tunisie en Pologne, est devenu ministre de l’Intérieur. Déjà marié, Zine el-Abidine Ben Ali divorce en 1988 et épouse Leila Trabelsi en 1992.

Très rapidement, plus un secteur ne va échapper à la famille Trabelsi. « Pas une transaction avec un groupe étranger dont ils ne sont parties prenantes ; pas un beau terrain, ou presque, sur lequel ils n’ont des vues. Et personne, dans le clan, n’est oublié ! », raconte « La régente de Carthage ». L’affaire du gang des voleurs de yachts mérite d’être contée car elle met en cause deux neveux de Leila, Moez et Imed. Ils sont tout simplement soupçonnés d’avoir chargé des hommes de mains de voler des bateaux de luxe en France…

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Neveux du président et receleurs

Entre la fin 2005 et début 2006, des voyous écument les ports de plaisance, et s’emparent du « Sando » au Lavandou (Var), du « Blue-Dolphin » à Cannes (Alpes-Maritimes) et du « Beru-Ma » à Bonifacio (Corse-du-Sud), direction Sidi Bou Saïd, non loin de Tunis. Le problème, c’est que le « Beru-Ma », un yacht estimé à un million d’euros, appartient à Bruno Roger, le patron de la banque d’affaires Lazard Frères, à la fois ami de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy. Les voleurs sont rapidement arrêtés. Ils mettent en cause leurs commanditaires, Moez et Imed Trabelsi.

Un détective privée envoyé en Tunisie révèle que Imed, « un voyou de grande envergure qui bénéficie d’une totale impunité », n’est pas à son premier coup d’essai en matière de recel. Il utiliserait plusieurs voitures volées, Porsche Cayenne, un Hummer, une Mercedes 500 volée à Marseille en novembre 2005 à un joueur de l’OM… Les sous-fifres ont été condamnés le 30 septembre 2009 à des peines allant de six mois avec sursis à deux ans de prison ferme par le tribunal correctionnel d’Ajaccio. En revanche, les deux neveux de Ben Ali n’ont pas été jugés. On murmure que le téléphone a souvent sonné entre le palais de Carthage et l’Elysée.

(*) Nicolas Beau et Catherine Gracier, « La régente de Carthage. Main basse sur la Tunisie », La Découverte, 174 pages.

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