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Le rôle d’Al-Ghazâlî dans l’émergence de la science moderne (2/2)

Al-Ghazâlî est le rejet de l’aristotélisme, un point nodal de la révolution copernicienne et scientifique

C’est un philosophe musulman du haut moyen âge, Abû Hâmid Al-Ghazâlî, qui a jeté les germes d’un bouleversement de la théorie péripatéticienne du lieu unique naturel en rejetant les idées professées par les philosophes musulmans qui reprenaient les systèmes d’Aristote et de Platon, tels quels, mais dans le cadre de ce qu’on appelle le néo-platonisme arabe.

Al-Ghazâlî s’attaque d’abord au principe de causalité aristotélicien. Il affirme dans son fameux Tahâfut al-falasifa (Destructio philosophai)1 :

« De l’Un ne peut provenir qu’une seule chose. Or la cause première est une de toute manière, tandis que le Monde est composé de choses diverses. Donc, d’après leurs propres axiomes, on ne peut concevoir que le Monde résulte de l’action directe de Dieu. [Selon ces philosophes] le Monde, pris dans son universalité, n’émane pas immédiatement de Dieu. Ce qui émane de Dieu, c’est un Être unique, qui est le principe de toutes les créatures ; c’est une intelligence séparée, c’est-à-dire une substance qui existe pour soi, qui est exempte de toute multiplicité qui se connaît et connaît son principe…; de cet être émane un second être, de ce second un troisième, du troisième un quatrième, en sorte que la multiplication des êtres se fait d’une manière médiate… Sans doutes, il résulte de chacun de là que le Monde est une chose composée de divers êtres ; mais ces êtres seront tous de même sorte ; chacun d’eux sera causé par chacun des êtres qui lui est supérieur, et il sera la cause de chacun des êtres inférieurs, jusqu’à ce qu’on parvienne à l’être causé qui n’est plus cause de rien, de même qu’en remontant la série, on parvient à la Cause qui n’est pas causée. Or, il n’en est pas ainsi, car, au dire des philosophes, le corps est composé de matière et de forme, et la réunion de ces deux éléments donne une chose unique. Car l’homme est composé d’un corps et d’une âme ; et l’un ne vient pas de l’autre, mais tous deux, d’une autre cause, reçoivent, en même temps, l’existence. Et, selon leur opinion, il en est encore de même pour chaque orbe céleste ; car cet orbe est un corps animé, et le corps n’en est pas créé par l’âme ni l’âme par le corps, mais tous deux proviennent d’une cause unique, différente d’eux-mêmes… Comment donc ces êtres composés ont-ils été formés ? Est-ce par une cause une ? Dans ce cas, voilà la destruction de leur affirmation : D’une cause une, ne peut émaner qu’un effet unique. Est-ce d’une cause composée? Alors, au sujet de cette cause, revient la même question, jusqu’à ce qu’on parvienne nécessairement à un effet complexe et à une cause simple ; car le principe est simple, et cependant la complexité provient de lui2 ».

L’autre apport essentiel du plus grand théologien musulman du Moyen Âge, qui ruinera la philosophie péripatéticienne, est sa critique portée contre la
doctrine de l’éternité du monde, idée toute aristotélicienne. Elle prend sa substance d’une démonstration qui suppose que l’effet produit par une chose parfaite, et partant, immuable est nécessairement éternel. Alors, que d’un être absolument éternel, ne peut provenir une chose qui soit innovée
3.

« Pourquoi niez-vous cette proposition : Le Monde a été produit par une volonté éternelle qui en avait décrété l’existence ; qui avait également décrété que cette existence serait précédée par une non-existence, que cette non-existence durerait jusqu’au terme qu’elle en a enfin atteint ; qui avait enfin décrétée, que le Monde commencerait d’être au moment où il a commencé ?

Que le monde fut avant cet instant, ce n’était pas de la volonté du Créateur ; aussi le Monde ne fut-il pas avant cet instant. Et, cependant, à l’heure où le Monde fut produit, il le fut par la volonté du Créateur, mais par une volonté qui était éternelle, en sorte qu’il fut innové. Qu’y a-t-il donc qui empêche d’admettre cette opinion ? Qu’y a-t-il qui la rende fausse? »4.

Contre cette démonstration, les réfutations des philosophes ne réussissent pas. Ainsi, cette affirmation qui suppose que « le Monde a commencé » et « le premier instant de la création du Monde a été précédé par un certain temps » sont deux propositions équivalentes qui entraînent, disaient-ils, des absurdités manifestes5.

Pour s’y opposer, Al-Ghazâlî déclare que le temps n’existe pas séparément du monde ; il n’y a, pour lui, que deux substances, Dieu et le Monde. Avant le commencement du Monde, il n’y aurait donc pas eu de temps. De même, les philosophes se sont attachés à développer un autre argument : « Tout ce qui est innové est précédé par une matière, car l’innovation requière une matière ; la Matière même ne peut être innovée6 ».

Afin de compléter dans le sens d’un affermissement de cet axiome, la physique d’Aristote invente le concept d’existence en puissance avant l’existence en acte. Alors que la première pouvait avoir eu un commencement,
la deuxième n’en a point, elle est donc éternelle.

Avicenne a repris cet argument philosophique en supposant qu’avant l’existence d’une chose, elle est possible.

Face à cette philosophie compliquée et surdéterminée, le philosophe converti en théologien acharite, affirme que ces propositions ne sont données qu’à l’état psychologique et non pas réel :

« La possibilité que considèrent les Philosophes se réduit à un jugement de l’esprit. Lorsque l’esprit considère l’existence de quelque chose, et que rien ne l’empêche de considérer cette existence, nous nommons cette chose : possible….Si, au contraire, l’esprit rencontre un empêchement dans cette considération, nous disons que cette chose est fausse et contradictoire. Enfin, si nous ne pouvons pas considérer la non-existence de cette chose, nous disons qu’elle est nécessaire. Ce sont là de purs jugements intellectuels ; ils n’ont aucunement besoin d’un objet qu’atteindrait la dénomination qu’ils confèrent7».

À partir du moment où les fondements du péripatétisme ne sont plus infaillibles, le concept de la pluralité des mondes pouvait voir le jour. Mais ce concept fécond a été attaqué, puis oublié, en raison d’un regain d’intérêt pour l’aristotélisme en pays d’Islam. Le péripatétisme, tout d’abord, pris son essor en Andalousie.

La pluralité des mondes est illogique selon l’aristotélisme parce que ce dernier prétend décrire un monde réel. Le plus grand commentateur d’Aristote, Ibn Rushd, expose longuement dans le Commentarii in Aristotelis qua quatuor libros de Cælo el Mundo l’argumentation du Stagirite contre ce concept en démontrant l’existence d’un seul centre du Monde. En fait, il remet en cause la pluralité des mondes en reprenant l’affirmation cruciale sur le lieu naturel unique occupé par la Terre. Il examine ce problème en ces termes:

« Aristote examine ensuite une objection… On pourrait dire, en effet, que la terre de l’autre monde ne se meut pas vers le centre de ce monde-ci ni inversement, bien que la terre soit de même nature dans les deux mondes ; on pourrait dire qu’il en est de même des deux autres éléments. Si l’on prend en effet un corps formé de l’un de ces éléments, il n’est pas à égale distance des lieux naturels semblables qui lui conviennent au sein de ces deux mondes, et, bien qu’il demeure toujours le même, il se meut vers celui de ces deux lieux naturels dont il est le plus voisin.

Par exemple, la terre de notre monde est plus voisine de ce même monde que du centre de l’autre univers ; aussi se meut-elle vers le premier centre et non vers le second ; mais si elle se trouvait dans l’autre monde, elle se dirigerait vers le centre de ce monde-là, ainsi donc, bien que sa nature demeura toujours la même, cette terre serait susceptible de deux mouvements contraires selon sa proximité ou son éloignement de deux lieux spécifiquement semblables, mais situés différemment ; elle pourrait se mouvoir [naturellement] soit dans le sens qui va du premier centre vers le second, soit dans le même sens qui va du second centre vers le premier, bien que ces deux mouvements fussent opposés l’un à l’autre. Sans doute, l’élément, en tant qu’il est simple, ne peut se mouvoir de deux mouvements contraires ; mais cela devient possible, par l’effet de la proximité ou de l’éloignement, car la proximité et l’éloignement surajoutent quelque chose à la simplicité de sa nature ; en vertu de la complexité qui en résulte, ce même corps, peut, à deux époques différentes, se mouvoir naturellement de deux mouvements opposés. Aristote répond que ce discours n’est pas raisonnable. Les mouvements naturels des corps ne différent les uns aux autres que par suite des différences qui existent entre les formes substantielles. […] Aussi, est-il opportun de prouver ici que les mouvements des éléments n’ont point leur cause hors de ces éléments. Cette proposition peut sembler évidente par elle-même. Aristote, toutefois l’appuie de considérations destinées à contredire ce que les anciens philosophes disaient du repos et du mouvement des éléments, de la terre en particulier ; en effet, au repos et au mouvement de la Terre, ces philosophes assignaient pour cause une attraction mutuelle entre la terre entière et son lieu naturel. Or il est manifeste qu’une masse de terre ne se meut vers la terre entière, quelle que soit la position du globe terrestre. […] Dès lors que le mouvement de la Terre vers le centre n’est point l’effet d’une attraction produite soit par la nature du lieu lui-même, soit par la nature du corps qui occupe ce lieu, qu’il n’est point non plus de l’effet d’une impulsion provenant du mouvement du ciel, il est clair que le raisonnement d’Aristote est concluant8».

Dans d’autres pages du Cælo, on trouve :

« La nature des corps élémentaires, lorsque ces corps sont situés dans des mondes différents, se trouve modifiée par suite de la distance plus ou moins grande qui les sépare de leurs lieux naturels ; par exemple, de la terre placée hors de notre Monde, est éloignée du centre de ce Monde et rapprochée du centre de l’autre ; elle est donc influencée par la nature de ce dernier centre et non par la nature du premier, en sorte qu’elle se meut vers le dernier centre et non vers le premier ; ainsi voyons-nous que l’aimant attire un morceau de fer voisin, parce que celui-ci acquiert une certaine propriété provenant de la pierre attirante ; mais l’aimant n’attire pas un morceau de fer éloigné, car la vertu de la pierre ne parvient pas jusqu’à ce morceau de fer9»

L’idée de pluralité des mondes ne pouvait rester intacte dans sa traduction initiale après cette attaque philosophique en bonne règle du commentateur d’Aristote qui justifierait l’existence d’un lieu terrestre unique et naturel vers lequel, les corps sont attirés par la nature même de leur substance, par une sorte de légalité physique et non par une force attractive comme celle connue dans le magnétisme, à laquelle Averroès destinait, d’ailleurs, une partie de ces commentaires.

Mais elle devait survivre et trouver sa place légitime dans l’univers copernicien. C’est cette idée de pluralité des mondes qui entrait pleinement en contradiction avec l’idée aristotélicienne de la terre comme lieu naturel unique.

Pierre Duhem affirme que la réfutation par Aristote de cette idée allait à l’encontre des opinions que les Coperniciens devaient un jour reprendre. Ceci revient à affirmer que l’idée de pluralité des mondes est une composante immanente de la théorie copernicienne, reprise d’une proposition forte ancienne, à laquelle prétendaient les philosophies pythagoricienne, néo-platonicienne, voire même l’orphisme grec. La preuve que cette idée préexiste et en somme devient inséparable de la conception copernicienne est l’affirmation du savant polonais à propos de ce qu’il pense de la forme exacte de l’Univers.

« L’univers est sphérique, en partie parce que cette forme, devenant le tout englobé, n’ayant point besoin de raccords, est la plus parfaite de tous ; en partie parce qu’elle constitue la plus spacieuse forme, laquelle est la plus appropriée à contenir et à retenir toutes choses ; et parce que les parties discrètes du Monde, je veux dire le Soleil, la Lune ainsi que les Planètes, apparaissent comme des sphères10».

Si la dernière partie de cette proposition suggère l’identité sphérique, sans doute pas plus utile à sa démonstration que l’affirmation philosophique sur la pluralité des mondes derrière l’apparente multiplicité des astres de l’univers, la première laisse, par contre, suggérer un rapprochement étrange avec la doctrine d’Aristote, reprise par Al-Ghazâlî et qui a été cependant enseignée par les Néoplatoniciens arabes comme Avicenne :

« Le Monde est de grandeur bornée ; il est enfermé dans une surface sphérique de rayon déterminé, et cette surface ne pourrait être ni plus grande ni plus petite qu’elle n’est. Au-delà de cette surface, il n’y a, il ne peut y avoir aucun corps ; il n’y a pas non plus le vide, car le vide est un lieu où il n’y a pas de corps, mais où il pourrait y en avoir un ; au-delà de cette surface, il n’y a pas de lieu ; il n’y a rien11».

La vision de Copernic sur l’Univers, n’est pas vraiment une révolution qui rompt et rejette la doctrine aristotélicienne parce qu’on aurait trouvé « vraiment
étrange que quelque chose pourrait être enfermé par rien
12. »

Comme l’a évoqué Duhem, « Aristote ne défendait aucunement aux géomètres d’imaginer des droites qui fussent plus grandes que le diamètre du Monde, des sphères qui fussent plus volumineuses que l’orbe suprême ; il ne pensait pas que ces imaginations prouvassent la possibilité des êtres qu’elles représentaient à l’esprit du géomètre, ni qu’elles valussent contre sa doctrine »13.

La vision d’Aristote, reprise par les Néoplatoniciens arabes ne suppose rien sur les limites exactes de l’Univers. On ne peut comprendre l’affirmation d’Aristote sur les limites de l’Univers sans voir que le Stagirite énonçait, en même temps, l’éternité du Monde, et Duhem a fait bien comprendre qu’il existe un parallèle méconnu par la Physique d’Aristote entre l’étendue de l’Univers et sa durée. Si on admet que le Monde est éternel, on ne peut qu’admettre également que le Monde s’étend à l’infini14.

De même, si le Monde est fini alors sa durée ne pourrait être que limitée. De cette manière, le concept sur la finitude du Monde, contenu dans la Physique d’Aristote, est contradictoire avec la doctrine aristotélicienne sur l’éternité du Monde. Un paradoxe, une contradiction.

C’est contre cette doctrine qu’Al-Ghazâlî s’est vu attaché le nom de destructeur des philosophies. Il aborde le problème en ces termes :

« De même, pouvons-nous dire que Dieu pouvait créer le premier orbe plus haut qu’il ne l’a fait. Si les philosophes disent que non, c’est donc que Dieu manque de puissance ; s’ils disent que oui, il le pourra créer plus haut que la longueur d’un bras, de deux bras, de trois bras, et l’on pourrait ainsi procéder à l’infini. Par-là, donc, on affirme qu’il existe hors du Monde, une dimension susceptible de mesure quantitative. D’après cela, hors du Monde, il y a une mesure capable de déterminer ce qui a quantité, partant il y a soit un corps, soit le vide. Ce qui est au-delà du Monde est, dès lors, plein ou vide, etc. Lorsque nous répondions qu’en estimant certains temps comme possibles avant l’existence du Monde, on faisait simplement œuvre d’imagination, notre réponse était semblable à celle que vous faites lorsque vous regardez comme imaginaires ces lieux qu’on juge possibles hors du Monde… De même, que vous prétendez qu’on peut considérer un corps fini, que termine une surface, et qu’il est impossible de le considérer comme contenu dans un volume, à la façon du plus petit dans le plus grand, ainsi en est-il de la possibilité de l’innovation du Monde ; le début de l’existence du Monde ne requiert point deux temps dont l’un précède et l’autre suive15».

À vrai dire, c’est dans la critique de ce théologien arabe, qu’on découvre les limites de l’aristotélisme. La pensée d’Al-Ghazâlî est donc très féconde et elle est féconde plus précisément pour la conception copernicienne. Cette fécondité se déploie pleinement, lorsque par exemple, Al-Ghazâlî s’attaque à la manière illimitée de penser les débuts de l’Univers.

« Aux philosophes, que vous pouviez imaginer que Dieu ait créé un Monde avant celui-ci, et un autre Monde avant ce Monde, et ainsi de suite indéfiniment 16».

Une telle façon de voir est nettement caractéristique dans les théories cosmogoniques modernes sur les débuts de l’Univers, dignes héritières de la révolution copernicienne, comme la théorie de l’Univers inflatoire17.

Alors qu’Al-Ghazâlî restitua le concept de pluralité des mondes dans une vision logique très vive et ce, avec une leçon philosophique assez instructive : l’idée de pluralité des mondes impliquait nécessairement un rejet de quelques fondements de l’aristotélisme (le parallèle entre l’idée de l’éternité du monde et l’idée d’un univers infini), Ibn Rushd perpétua cette doctrine avec beaucoup de hardiesse, lui qui a été le plus grand commentateur du Stagirite.

À partir de là, la scolastique latine, marquant un regain d’intérêt assez réactionnaire pour l’aristotélisme, rejeta l’idée de la pluralité des mondes qui, de surcroît, était assez dangereuse pour le théocentrisme. À partir de là, elle sommeilla durant le Moyen Âge. Les grands philosophes de cette époque à l’instar de Michel Scot, Guillaume d’Auvergne, Saint Thomas d’Aquin et Roger Bacon n’ont pu la ressusciter et à ce titre ils ne sont pas les dignes précurseurs de Copernic et de Galilée.

Ces derniers ont même ajouté aux arguments péripatéticiens contre la pluralité des mondes, de nouvelles impossibilités, de nouvelles superstitions.
Bacon conclut à l’inexistence de mondes multiples à cause de l’impossibilité du vide (la pensée de Bacon fut généralement un obstacle au développement de la science). Pour Saint Thomas, le recourt à la toute-puissance divine est le meilleur argument contre
la pluralité des mondes.

Cet argument est le pire héritage de la scolastique chrétienne et représente une régression par rapport à la pensée lucide d’Al-Ghazâlî.

Le point de non-retour de cette controverse fut l’interdiction par l’Église en 1277 de professer des doctrines contraires aux enseignements de l’aristotélisme. La seule raison qui est sous-jacente à ce rejet par les penseurs de la scolastique latine est la contradiction rédhibitoire entre l’aristotélisme et le concept de pluralité des mondes, lequel se place fondamentalement en rupture avec l’une des doctrines les plus solides du péripatétisme – l’attraction des corps vers un lieu unique – qui a été maintenue et perpétuée par Ibn Rushd, le plus illustre commentateur du Stagirite.

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À cause d’Ibn Rushd, le débat sur la pluralité des mondes prendra une tournure complexe qui la relégua à l’oubli. C’est donc par la destruction définitive de l’aristotélisme – chose faite durant la Renaissance – que l’idée de pluralité des mondes retrouva la place qui est la sienne dans la pensée astronomique moderne.

Aristote rejette l’existence de mondes semblables au nôtre dès lors que son système repose entièrement sur l’existence de deux entités : la région céleste et la Terre.

Mais cette idée à été reprise par Copernic et surtout par Galilée lorsque ce dernier braqua sa lunette sur la Lune avec les débuts de la science moderne. C’est ainsi que les idées de Plutarque, d’Héraclide du Pont et des adeptes de l’orphisme ont pu parvenir jusqu’à eux. Mais pour que cela advienne, il a fallu qu’Al-Ghazâlî détruise l’aristotélisme qui est le pire ennemi de cette idée.

Conclusion

Au-delà de l’héliocentrisme, l’essence même de la transformation radicale de la vision de l’univers que Copernic entama est inséparable de la conception épistémologique autant que scientifique faisant de la Terre une planète de même nature que Jupiter, Vénus ou Mars.

Cette conception se situe en continuité avec les idées professées par Héraclide du Pont durant l’Antiquité. Copernic consulta les ouvrages grecs traduits par les Latins et les Arabes, il découvrit ainsi ce concept. Nous pouvons même lancer des conjectures plus audacieuses: le savant polonais aurait pu consulter des textes musulmans d’Ibn Yûnus, Albertagius, Al Battânî et peut-être même, ce qui est plus important encore, le Caelo d’Ibn Rushd et le Tahâfut d’Al-Ghazâlî. On sait que ces livres ont été traduits en latin.

D’ailleurs, les penseurs occidentaux avant Copernic ont bien étudié les écrits d’Ibn Rushd qui reflètent une critique acerbe de la réflexion du penseur acharite. Ils ont certainement découvert toute la fécondité des idées d’Al-Ghazâli pour la nouvelle astronomie et la nouvelle physique qu’ils étaient en train de développer ou d’en jeter juste les germes.

Rafik Hiahemzizou

Références

Duhem Pierre, Le Système du Monde t.I, Librairie Scientifique A. Hermann  et Fils Paris 1913

Le Système du Monde t.II, Librairie Scientifique A. Hermann et Fils 1914 Paris

Le Système du Monde t.III, Librairie Scientifique A. Hermann et Fils 1914 Paris.

Goldziher, Ignaz Sur l’islam : Origines de la théologie musulmane, Paris, Desclée de Brouwer, 2003.

Kambouchner Denis , Notions de philosophie, I, sous la direction de, éditions Gallimard, Paris, 1995.

Koyré Alexandre, Etudes Newtoniennes, Editions Gallimard, Paris. 86. Koyré

Galileo and Plato, in Journal of the History of Ideas (Vol. IV, n° 4, oct. 1943.

The Copernican Revolution, Harvard University Press, 1985.

Du monde clos à l’univers infini,Traduit de l’anglais par Raissa Tarr, Gallimard, Paris, 1993.

The Astronomical Revolution, CopernicusKepler-Borelli, Dovers Publication Inc. New York, 1992, traduction de la version française Hermann, Paris 1973

Renan Ernest,  Averroès et l’Averroïsme : essai historique, 1882, Paris : Calmann Lévy.

Russel Bertrand, History of Western Philosophy, Routledge Classics, Nouvelle édition, 2004.

1 Pour les philosophes musulmans comme Al-Kindî, Al-Fârâbi, Ibn-Sinâ et au tout début de sa carrière intellectuelle et philosophique, Al-Ghazâlî, les concepts péripatéticiens et platoniciens étaient confondus. Ceci est reflété par exemple, par la Théologie de Platon, qui était en fait un ouvrage d’Aristote.

2 Pierre Duhem, le Système du Monde, t. IV, p. 502-503.

3Ibid., p. 505.

4 Ibid., p. 506.

5 Ibid., p. 508.

6 Ibid., p. 510.

7 Ibid., p. 511.

8 Ibid., p. 238.

9 Ibid., p. 610.

10 Alexandre Koyré, op. cit., p. 31.

11 Ibid., p. 509.

12 Ibid., p. 31.

13 Pierre Duhem, (vol. IV), op. cit., p.510.

14 Ibid., p. 510.

15 Ibid., 509.

16 Ibid.

17 Voir Alain Guth et Paul Steinhardt, « L’Univers inflatoire », Scientific American pour la traduction française, juillet 1984, p. 86.

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11 commentaires

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  1. Nous savons que les Grecs étaient longtemps les disciples des Egyptiens (Egypte actuelle + Ethiopie + Libye approximativement). La stèle du décret de Ptolmis (= Ptolémée V, pierre de Rosette) qui a permis à Champollion (+ Lepsius et Young) de déchiffrer les hyéroglyphes était à ce titre écrite en hyéroglyphe (langue du sacré uniquement, pas des sciences), démotique (langue du peuple, des sciences, ressemblant fortement à l’écriture arabe) et grec ancien (qui a certainement donné l’hébreu en mixant avec l’arabe car il n’y a acune trace archéologique d’un hébreu antérieur au Grec ancien ou arabe ancien). Le fait qu’un Pharaon qui serait d’origine Grecque eut dirigé l’Egypte grâce aux prêtres égyptiens (suite à Alexandre = Skander) démontre bel et bien que les religions (très liés aux sciences à l’époque) des Grecs étaient celles des Egyptiens voire celles des Perses et Babyloniens. Nous savons par exemple que les signes du zodiaques sont d’origine égyptienne. Toute leur science et philosophie viennent de là. Il n’y a plus aucun doute là dessus. Platon, Pythagore, Thalès etc créérent des écoles une fois devenus des prêtres et des scientifiques égyptiens. Je pense à ce titre qu’ils sont les pères de la naissance de la culture Grecque. Merci aux Ethiopiens, aux Egyptiens et aux Lybiens d’avoir instruit les Grecs et aux arabes d’avoir préservé ce savoir. Est-ce que les Syriaques faisaient parler les Grecs au nom des arabes dans ce qu’ils appelaient traduction? Question intéressante.
    En tout cas, il y a bien eu non seulement des échanges mais encore plus, il y a eu des relations, des liens évidents. Les premiers habitants de la Grèce étaient des arabes. Tout le savoir, l’art et religion (signes du zodiaques, dieux, magie, sciences etc) Grecs venaient soit de Perse (Ibn Khaldoun) soit d’Egypte (Champollion) soit de Babylone (archéologie, Rome, Byzance). A ce titre, c’est surtout suite au déclin des Egyptiens et à l’invasion d’Alexandre ou Skander que la Grèce a commencé à rayonner avant de se faire à son tour envahir par les Romains. Les disciples s’étaient retournés contre leurs maîtres. Les Grecs contre les Egyptiens et les Romains contre les Grecs. Il s’agit bien d’une transmission-éducation suivie d’une possession-innovation et ceci sur des siècles durant, bien que beaucoup de savoir avait été perdu à cause de la violence des invasions et des pillages.
    Nous savons que les Babyloniens ne sont pas étrangers aux Egyptiens ainsi qu’aux Sumériens et Akkadiens. Ils forment une seule et même peuplade arabe en réalité qui a divergé en une multitude de peuples, de langues (une langue évolue très vite et se différencie tout autant, rien que le Français sur une courte période évolue très vite) et de bannières au fur et à mesure des siècles. Les études linguistiques démontrent bel et bien que l’arabe est la langue la plus anciennement conservée et la plus proche de l’Egyptien, de l’Akkadien, du Sumérien et du Babylonien. Les plus anciennes zones civilisationnelles actuelles écrivent en arabe. Personnellement, je parle d’une seule civilisation avec zones civilisationnelles différenciées.
    Par ailleurs, nous savons très bien que l’alphabet grec est hérité de l’Egyptien, voir l’animation vers la fin de cette vidéo :
    Hyéroglyphe, Hiératique, Démotique ont donné le Grec et le Copte par innovation (voir vers fin de la vidéo) :
    https://www.youtube.com/watch?v=VfB6vTZIAS0
    Le out of Africa démontre que l’homo sapiens est né en pénincule arabique et la génétique dévoile notre origine commune qui vient d’Arabie. L’Adam arabe dont la première ville (la plus ancienne au monde) fut à la Kaaba. Le savoir de la taille des pierre vient des fils de Nuh (Aad et Thamud) de la péninsule Arabique et alentours.
    Nous devons tout à Allah swt : science, écriture, langues, chiffres, civilisation. Et tout ceci grâce aux arabes, à l’arabe par la Miséricorde d’Allah swt.

  2. Merci de votre réponse qui semble s’adresser à la fois à moi et Mouhib Majoui. Pour ma part, je ne suis pas un spécialiste de Al-Ghazali mais j’ai plutôt entendu dire qu’il critiquait le système aristotélicien comme vous le dites. Ça ne me gêne pas que vous le réhabilitiez. Ce que je ne vois pas c’est le lien avec Copernic. Pour les raisons que vous évoquez l’absence de rayonnement de l’œuvre d’al-Ghazali en Occident et la filiation revendiquée par Copernic avec Héraclide du Pont. Par ailleurs en tant que philosophe et historien des sciences, vous savez que certaines découvertes majeures peuvent éclore simultanément en plusieurs endroits du globe. Enfin quelqu’un comme Djebbar conteste la notion de transmission au profit de celle d’appropriation : celui qui fait circuler les sources n’est pas celui qui les possède mais les veut. Ainsi les arabo musulmans ont délibérément recherché les sources grecques mais également l’Occident et la liaison dans les 2 cas s’est faite via l’empire byzantin notamment les chrétiens d’orient hellénisés. Par ailleurs, la théorie géocentrique prévalait chez les arabo musulmans aussi bien d’un point de vue religieux que scientifique il me semble. Je pense notamment à l’Amalgeste de Ptolémée qui faisait référence pour le calcul astronomique. Pouvez vous me confirmer cela ?

    • Merci pour cette question.
      Pour ma part, je pense que le progrès scientifique évolue grâce à la migration des concepts de théories anciennes vers les théories nouvelles. C’est exactement ce qui s’est passé avec la théorie copernicienne. Au sein de cette théorie, il y a des propositions comme l’héliocentrisme qui provient des Grecs incontestablement. Mais il y a aussi des concepts qui sont moins perceptibles comme celui de la pluralité des mondes (selon lequel la lune, les planètes sont des astres semblables à la terre). C’est ça finalement qui est fondamental pour la science astronomique. Sur la longue durée, le concept de pluralité des mondes est le plus beau et le plus fondamental. La pensée de Giordano Bruno à cet égard est quelque chose d’unique pour l’histoire de l’astronomie. Ce concept ne pouvait survivre avec le système aristotélicien qui faisant une distinction nette entre la matière astrale et la matière terrestre en plus de l’affirmation sur la position centrale de la terre dans l’Univers. Ibn Rushd puis les penseurs européens qui se sont inspiré de ses travaux ont joué un rôle réactionnaire en tenant de détruire ce concept. J’ose croire que la lecture d’Al-Ghazâlî directement ou à travers la lecture d’Ibn Rushd qui a consacré un livre pour le critiquer a inspiré les Occidentaux et leur a montré qu’Aristote n’a été qu’un obstacle à l’astronomie.
      Il est vrai qu’il n’y a pas que cela dans l’histoire de l’astronomie. Il y a également la critique de Ptolémée. C’est là un sujet un peu plus complexe. Comme le dit à juste titre Alexandre Koyré, Copernic ne se situe pas nécessairement en rupture avec le système de Ptolémée.
      Toutefois, le long cheminement de la critique de l’Almageste hormis les beaux systèmes d’Aristarque et d’Héraclide comprend des travaux de scientifiques musulmans durant le Moyen Age comme ceux de l’École de Maragha en Iran mais aussi et surtout ceux d’Al-Haytham qui sont édifiants. Dans un livre intitulé Doutes sur Ptolémée, Ibn al-Haytham évoque des anomalies géométriques (comme aurait dit Thomas Kuhn) au sein de ce système (orientation à partir du centre du monde, problème de l’équant, mouvement de la latitude). Il va plus loin et comme ce fut l’inventeur de la méthode expérimentale en physique, il lui ajoute la création d’un modèle basé sur la physique céleste. C’est-à-dire sauver les phénomènes en décrivant le mouvement réel des astres et non pas sauver les apparences à travers des artifices géométriques comme l’équant et l’épicycle.
      En reprenant votre thèse sur la transmission et non la possession, il est clair que ces contributions scientifiques des Musulmans durant le Moyen Age sont des possessions et appartiennent à l’histoire de l’astronomie. Les idées ont migré d’une théorie à une autre. Mais cette distinction entre transmission et possession est un peu artificielle. Ces travaux comme ceux d’Héraclide dont le livre a été offert par l’empereur byzantin au roi de France et d’Al-Haytham appartiennent au savoir humain et ils sont en même temps utilisés par les Modernes si j’ose dire. Il n’y a pas de distinction entre les deux processus. C’est comme dire que le travail de Galilée n’a été qu’une transmission du savoir d’Archimède. Al-Haytham a contribué au savoir universel au même titre qu’Héraclide et que Copernic.
      Le savoir scientifique est apparu en Égypte et en Mésopotamie. On en a aucun souvenir hormis le voyage de Pythagore en Égypte et les liens entre Thalès et les échanges entre Millet et la Mésopotamie. Le Moyen Age chrétien a souffert d’une faiblesse scientifique en raison de la rupture durant l’Empire Romain entre l’Orient et l’Occident et la perte de la culture hellénistique. Les Musulmans ont rétabli ce lien et ont découvert les chiffres indiens, la science et la philosophie grecque. Mais leurs découvertes et leurs travaux (chimie de Jaber In Hayyan, algèbre de Khawarizmi et optique plus la méthode expérimentale d’Ibn Al-Haytham) bien que pleinement transmises à l’Occident par l’entremise de l’Espagne appartiennent au savoir universel au même titre que la théorie de la relativité générale d’Einstein ou la mécanique quantique de Bohr. Après des siècles, on pourrait dire qu’Einstein n’a rafistolé que la théorie de Newton, peut-être mais se serait en injuste illusion.
      Merci encore

      • Bonjour et merci de poursuivre le dialogue.
        Pour ma part, je suis davantage convaincu par la notion non pas de possession mais d’appropriation que A Djebbar différencie de la transmission. Etant de formation scientifique, je pense que c’est la curiosité scientifique qui prime dans la circulation des sources et des idées. Ainsi les musulmans ont recherché activement les sources grecques et ont investi pour les faire traduire. Et on oublie une tierce partie essentielle dans ce processus : les chrétiens d’orient hellénisés qui ont préservé le savoir grec, l’ont traduit en syriaque.
        C’est vrai aussi de l’Occident chrétien par rapport au savoir musulman. C’est sans doute aussi vrai des grecs par rapport au savoir égyptien.
        En revanche, la thèse du savoir grec qui n’aurait transité que par les musulmans pour atteindre l’Occident chrétien est contestée. Il y a eu non seulement des échanges entre l’Occident et l’Orient durant le moyen âge, à travers la circulation de sources mais également de personnes. Mais on parle aussi aujourd’hui de renaissances médiévales, notamment de renaissance carolingienne : les élites occidentales (carolingiens, ottoniens) ont également recherché le savoir grec. Il se pourrait ainsi que ce que l’on a appelé Renaissance résulte d’un phénomène bien plus continu qu’on ne l’imaginait.
        Je crois donc surtout à une recherche active du savoir et à une production tout aussi active du savoir. Ça permet justement de réhabiliter chaque civilisation (mésopotamienne, égyptienne, grecque, musulmane, …) dans ses apports originaux à la science sans même nécessairement avoir à imaginer de filiation au sens d’une transmission active de maître à disciple. Ça conduit aussi à nuancer votre thèse sur le recyclage des idées anciennes si je vous ai bien compris. Si on la pousse, elle suggère en effet la notion d’une source ultime où toutes les idées auraient préexisté, une sorte d’idéal platonicien qu’il s’agirait de redécouvrir ou de se remémorer. Il y a sans aucun doute recyclage de l’ancien mais également création de nouveau. Vous avez donc raison : Einstein n’a pas fait que reprendre Newton. Il a bien innové.

  3. Je remercie la contribution de Mouhib Jaroui qui est éclairante.
    Et on est bien d’accord que l’aristotellisme et autres philosophes grecs ont été responsables de la dégradation de la pensée musulmane et de l’embargo sur les sciences en occident. Avec une philosophie pareille, je comprends pourquoi les Egyptiens s’en moquaient. Même de nos jours, c’est abondonné, rangé dans les tiroirs de l’histoire. Seul l’islam et son Véritable Savoir perdure de tout temps.
    Il y a eu à l’évidence un concordat grec de l’occident pour assimiler les connaissances de l’islam. La réécriture des textes grecs est prouvée!
    L’héliocentrisme des Grecs viendrait de celui des Egyptiens hypothétiquement (qu’est-ce qui n’est pas hypothétique avec les écrits grecs, bref), c’est quelques lignes par ci par là assez bizarrement placées. C’est très loin du livre entier d’Al Biruni qui en parle sur des pages et des pages sur la base de savants arabomusulmans et Indiens tout en complétant.
    Je suis pour l’abondan de l’apprentissage du Grec, langue morte qui n’apporte plus grand chose. En plus je ne parle pas de textes grecs personnellement mais plutôt de hadiths grecs. Untel aurait dit, aurait écrit etc mais quand on cherche les preuves… C’est le néant le plus souvent. Aucune chaîne de transmission solide.
    La pensée grecque de la terre plate était étudiée mais n’a jamais fait l’unanimité.
    « Lis ! car ton Seigneur est le Très Noble,
    Qui a enseigné par la plume,
    Qui a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. »
    Coran (sourate 96, versets 3 à 5)

  4. Suite:
    En fait, les musulmans ont pris la théologie de Plotin pour celle d’Aristote.
    Donc contrairement à ce qui est écrit en votre note de bas de page, la théologie est bien de Plotin et non pas d’Aristote comme les premiers philosophes musulmans le croyaient à tort.
    Mouhib Jaroui

  5. Salam,
    Très intéressant. Bravo.
    Juste un petit complément sur le sujet.
    Lire aussi l’ouvrage de référence sur la question de Sami Ali Annachar, sur les méthodes de recherche chez les musulmans. Il porte sur la place d’Aristote et de la philosophie grecque dans les sciences islamiques. Il y défend la thèse que c’est Al-Ghazali qui a contribué à faire installer confortablement la logique aristotellicienne dans les sciences islamiques, même s’il reconnaît que dans les derniers écrits de Ghazali, on observe effectivement un grande méfiance envers l’aristotellisme.
    Ali Sami Annachar est un grand philosophe et spécialiste de la philosophie musulmane, il a publié plusieurs volumes sur la naissance de la philosophie musulmane, il est l’élève du fameux Mostafa Abderazzaq, auteur de l’introduction à la philosophie musulmane. Il donne des preuves à cette thèse comme par exemple en début du livre de Ghazali sur les fondements du droit musulman “Al-mostasfa”, il dit texto que celui qui ne connaît pas la logique (d’Aristote) on ne peut prendre de lui la science. Et on a pris exemple sur lui jusqu’à nos jours, en début du livre “Uçul al-fiqh”, Mohammed Abou zahra compare cette science à la logique d’Aristote. Bref, lisez mi3yar al-ilm de Ghazali, c’est du aristotellisme pur. Bref.
    Ps: petite correction sur votre première note de bas de page c’est la métaphysique de Plotin et non de Platon.
    Mouhib Jaroui

  6. Intéressant. Mais encore une fois votre titre, voire votre accroche sont trompeurs. Vous expliquez que l’Occident connaissait d’abord les travaux d’Ibn Rushd et que ceux d’Al-Ghazali dont la traduction est postérieure étaient négligés, tout en suggérant qu’Al-Ghazali a contribué à la science moderne en Occident à travers sa remise en question du paradigme aristotélicien. Pour l’illustrer, vous expliquez que sans cette remise en question, Copernic n’aurait pu donner un tel développement à la théorie héliocentrique qui s’est finalement imposée, tout en rappelant que Heraclide du Pont l’a inspiré. Bref je ne comprends pas les liens que vous faites.
    Ok remise en question du paradigme aristotélicien pour que Copernic développe sa théorie héliocentrique mais en passant par Heraclide du Pont, pas par Al-Ghazali. Cette dernière influence vous la formulez comme une hypothèse que vous avez déjà affaiblie et rendue improbable en rappelant que les travaux de Ibn-Rushd, aristotélicien, prévalaient sur ceux d’Al-Ghazali plutôt méconnus en Occident.

    • En fait, ma théorie est la suivante : les systèmes d’Héraclide du Pont et d’Aristarque de Samos qui ont inspiré en partie Copernic ont été des systèmes mathématiques qui ne sauvent pas les phénomènes et qui n’étaient pas suffisants en raison du fait que la seule physique dominante à l’époque était celle d’Aristote. Or, dans le système aristotélicien, la terre est placée au centre de l’Univers. C’est pour cette raison que ces deux systèmes grecs ont été abandonnés. C’est là, qu’intervient Al-Ghazâlî. Il a été le seul philosophe du Moyen Age qui s’est attaqué aux fondements de la physique d’Aristote et à sa philosophie. Ce fut une étape fondamentale pour que les scientifiques élaborent une nouvelle physique compatible avec celle de l’héliocentrisme. Je développe bien entendu une autre idée sur la pluralité des mondes qui est l’essence même de la révolution astronomique (Copernic, Bruno, Galilée). Cette idée a été défendue par Al-Ghazâlî et combattue férocement par Ibn Rushd.
      Concernant l’oeuvre de Ali Annachar, j’ai été impressionné par sa vaste enquête. Mais je pense que dans le domaine philosophico-scientifique, ces conclusions sur Al-Ghazâlî et Aristote ne s’applique pas. Peut être pour le droit. Mais pour les sciences astronomiques et physique, pas du tout.

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