Le soleil d’été darde ses premiers rayons brûlants sur l’Hexagone, et alors que les esprits sont plus enclins à s’échauffer autour de la revalorisation du pouvoir d’achat que d’une combinaison aquatique, même la plus honnie, le Conseil d’Etat a tranché, mardi 21 juin : condamné à rester dans les armoires, le burkini ne sera pas la parure de bain la plus tendance du moment à Grenoble… Et c’est rien de le dire !
Tombée comme un couperet sur Eric Piolle, le maire de la cité phare de l’Isère, qui s’était prononcé en faveur de son port dans les bassins municipaux, au nom du respect d’une liberté individuelle fondamentale, niant toute reddition devant des « revendications religieuses », la décision de la plus haute juridiction administrative du pays semble, elle, capituler devant la doxa dominante et sa nouvelle obsession française…
C’est « une décision guidée par une instrumentalisation politique », a vivement déploré l’avocat Patrice Sponsori, avant de préciser : « C’est évidemment une déception », car « le Conseil d’État confirme la décision du tribunal administratif en considérant qu’il y a eu une volonté de la part de la ville de Grenoble d’explicitement autoriser le burkini contre la règle générale qui est d’interdire des vêtements qui ne sont pas moulants ».
Au même moment, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur encore pour quelques heures, criait victoire toute honte bue. Lui qui serait mieux avisé de faire profil bas, tant son nom est conspué jusque de l’autre côté de la Manche, par des Anglais qui ne décolèrent pas depuis le terrible fiasco du Stade de France, a plastronné sans vergogne : « C’est une victoire pour la loi « séparatisme», pour la laïcité et au-delà, pour toute la République ! Le communautarisme d’Éric Piolle, maire de Grenoble, est définitivement sanctionné par le Conseil d’Etat ».
Brandi en repoussoir absolu du littoral français et de ses plages de sable fin, alors qu’ailleurs, il surfe sur la vague du succès, le maillot intégral conçu par une femme musulmane, la styliste australienne Aheda Zanetti, pour les femmes musulmanes, mais pas seulement, ne pourra même pas faire trempette dans les piscines grenobloises.
Et ce, au mépris de « la liberté des femmes de disposer de leur corps comme elles l’entendent, de s’habiller comme elles le veulent », ainsi que s’en sont offusquées les représentantes de l’association Alliance citoyenne, à l’origine de la requête émise auprès de la mairie, dans un entretien à l’agence de presse Anadolu.
Si prompte à sommer de cacher ces voiles qu’elle ne saurait voir, la République obligera-t-elle à cacher ces seins nus que le maire de Grenoble avait également autorisés dans les piscines de sa bonne ville, au risque d’offrir un contraste visuel des plus saisissants ? Il y a fort à parier que non. De là à dire que la morale et la laïcité sont sauves, il y a un pas ou plutôt un saut dans le grand bassin que l’on ne fera pas…
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