Néologisme aquatique, né de la fusion de deux vocables « burqa » et « bikini », le burkini, un maillot de bain spécialement conçu pour la femme musulmane, déferle en Allemagne, et notamment à Berlin, où son port a été autorisé par la municipalité dans deux piscines de la ville jusqu’à cet été.
Si cette grande première fait montre d’une certaine ouverture d’esprit et, à tout le moins, de la prise en considération de la valeur de pudeur intrinsèque à l’islam, la polémique, que cette décision politique n’a pas manqué de susciter, divise l’opinion allemande, jouant sur les mêmes ressorts idéologiques que lors de la controverse passionnelle sur le port du voile : l’obscurantisme religieux, le poids du patriarcat et la condition de la femme.
Opportunité ou frein à l’intégration ? Tolérance envers l’islam ou incitation inconsciente au fondamentalisme religieux ? Les partisans du pour et du contre s’opposent farouchement.
Ville pilote en la matière, les autorités de Berlin ont accepté d’expérimenter pendant six mois le maillot intégral, offrant ainsi aux allemandes de confession musulmane un loisir aquatique familial et une pratique sportive auxquels certaines avaient été contraintes de renoncer.
Capitale pluri-ethnique par excellence, rien d’étonnant à ce que Berlin ouvre la voie, même si cette initiative plonge toutefois son principal instigateur, Ehrhardt Körting, le ministre SPD de l’Intérieur de la ville-Etat, dans la plus grande perplexité : « D’un côté, je suis pour que le sport soit pratiqué par un maximum de personnes, et pour certaines femmes de cette croyance, il est inconcevable de nager en maillot normal. De l’autre, je crains que ça soit un obstacle à l’intégration ».
Se voulant rassurante, Nele Abdallah, une allemande convertie a l’islam, qui commercialise les burkinis dans son pays, y voit un vrai facteur de lien social, consolidant qui plus est les relations familiales : « ce maillot permet à mes deux familles de se réunir à la piscine comme elles le font dans la vie normale, sans que personne ne soit dérangé. Et donc d’apprendre à mieux se connaître ».
Aux antipodes de cette interprétation, Bilkay Öney, musulmane et sénatrice Verte, oppose sa plus vive désapprobation, redoutant que la légalisation du maillot intégral au nom de la liberté religieuse soit un tremplin inespéré pour les intégristes.
De nombreuses piscines d’Allemagne ont rejeté les requêtes formulées par des associations musulmanes, à l’image de la ville de Dortmund où 200 femmes prennent chaque semaine des cours sans revêtir de burkini, mais dont l’accès est formellement interdit aux hommes.
En dépit de tous les détracteurs du burkini, ou des doutes qui tiraillent les élus berlinois, si ce test s’avère concluant, son usage pourra être étendu dès cet été dans tous les bassins de la capitale.
On imagine déjà la mine d’or qu’une telle autorisation représentera pour la presse, dont les directeurs de rédaction doivent se frotter les mains à la perspective des prochains gros titres, à l’emphase sensationnaliste, qui alimenteront leurs colonnes et augmenteront leur tirage…
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