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La vie de Malek Bennabi (23)

Les Editions du Seuil, en possession du manuscrit de « Vocation de l’islam » depuis près de trois ans, le publient en septembre 1954 (1). C’est, de tous les livres de Bennabi, celui qui sera le plus traduit et le plus cité dans les travaux sur l’islam.  Les connaisseurs de l’œuvre de Bennabi ont plus ou moins entendu parler d’inédits s’intitulant le « PAS algérien », « Pourritures » ou le « Problème Juif », mais pas d’une suite à « Vocation de l’islam ». 

C’est pourtant le manuscrit que j’ai trouvé dans les archives de Bennabi. Il s’agit d’un texte de 136 pages écrites à la main recto-verso sur des feuilles jaunes ou jaunies par le temps, commencé au Luat-clairet le 5 décembre 1951 et achevé le 22 janvier 1952 (2). Il comporte une introduction raturée de 11 pages, deux parties principales (« Esotérisme du monde moderne » et « Le monde nouveau ») et une conclusion de deux pages. 

Bennabi explique en introduction à cet inédit que si « « Vocation de l’islam » est une étude interne du monde musulman sous l’angle de la colonisabilité, une vue rétrospective de sa ligne d’évolution, « Vocation de l’islam II » est une étude externe pour situer le problème musulman dans le problème général du monde qui vient ». 

Il précise que ce nouveau travail est indépendant du premier : « Pour cette raison, j’ai cru même un moment devoir le mettre sous un titre particulier comme « Les tables modernes de l’islam ». Mais outre qu’un pareil titre m’eût paru impropre pour désigner une œuvre humaine, il eût par ailleurs masqué l’unité fondamentale de l’étude ». 

Le livre a été composé dans une ambiance particulièrement tendue. Aussi le conçoit-il comme un « Testament ». Bennabi en est à penser que la troisième guerre mondiale est imminente. Les dernières lignes de « Vocation de l’islam », rappelons-nous, ont trait à « l’hypothèse d’une guerre mondiale où risqueraient d’être au moins transformés tous les aspects connus de l’existence humaine ». 

Sans perdre de temps, il veut profiler le nouveau monde qui devra naître des ruines de l’ancien, condamné à cesser d’être car partagé en deux blocs opposés détenant chacun le moyen de le détruire en totalité. Il prophétise qu’« à l’issue de la prochaine guerre, il n’y aura pas des alternatives : le monde nouveau sera grosso modo ou communiste ou capitaliste. L’un des deux régimes doit disparaître.» 

Il estime que les facteurs qui ont conduit le monde à cette situation ne sont pas tous connus des hommes. Les facteurs « ésotériques » doivent être révélés aux générations futures afin qu’elles édifient le monde nouveau sur des bases saines : « Pour comprendre un monde, il ne s’agit pas de le saisir dans ses apparences, mais dans son âme. Ses manifestations apparentes ne sont le plus souvent que les effets d’une lampe magique qui projette sur l’écran de l’histoire des scènes apprêtées. Ce qui importe, c’est l’intelligence et la main qui font cette histoire factice. Ce qui importe, c’est la force créatrice qui est derrière ces manifestations, la cause de ces effets : la force qui ramène la multiplicité apparente que nous constatons à une unité fondamentale imperceptible au regard commun, invisible à l’œil intelligent, inaccessible à la pensée qui ne sait pas penser. » 

Bennabi est de ceux pour qui l’histoire « officielle » n’est souvent qu’un maquillage de la réalité et de la vérité. Il plaint les « innocents historiens – à la Maurras – qui ne voient dans le monde que ce qui est visible, luisant et bruyant, c’est-à-dire toutes ses apparences, mais rien de sa réalité qui est plutôt ombre et silence… L’histoire réelle du monde moderne reste à faire car on n’a fait jusqu’ici que son histoire apparente. »  

Devant ce qui lui paraît être inéluctable, une troisième guerre mondiale qui pourrait durer cent ans, toute sa pensée est tendue vers le sort des musulmans et de l’islam. Il voit trois issues à cette guerre : la victoire du capitalisme, la victoire du communisme ou la disparition des deux antagonistes, puis ajoute : « Il y a en réalité une quatrième éventualité : celle d’une réconciliation entre l’Est et l’Ouest. » 

Après l’avoir envisagée, il s’empresse d’écarter cette éventualité qui est pourtant celle qui s’est réalisée un demi-siècle après. Il recommande le neutralisme pour le monde musulman, ce qui lui éviterait la destruction et lui offrirait les chances d’un développement rapide. Cette option le rapprocherait de l’Inde dont c’est déjà la politique. 

En écrivant ces lignes, Bennabi pose en fait les fondements doctrinaux de l’afro-asiatisme en pariant sur les avantages d’un rapprochement entre l’islam, le bouddhisme et le brahmanisme. Il invite le monde musulman en cette année 1952 à « posséder la technique, dompter l’énergie atomique, exprimer ou incarner le mondialisme, avoir le sens de la planification… C’est à cette condition qu’il pourra être en harmonie avec les dominantes et les tendances, les besoins et l’esprit de l’époque prochaine. C’est aussi à cette condition qu’il pourra corriger le capitalisme et le communisme, supprimer le racisme et le colonialisme, sans laisser au Juif la direction du monde ».

Il estime que le choc en retour de la guerre a des chances de ramener, sur le plan moral, le monde à l’islam et écrit : « C’est un déluge qui vient… Mais quand les éléments déchaînés se seront de nouveau apaisés, quel limon, quelle boue, quel dégoût auront-ils laissés dans les consciences, dans les esprits des pays civilisés ?» 

Il faudra au monde une « idée consolatrice » que ni le christianisme ni le communisme ne pourra lui proposer : « C’est essentiellement à cette recherche des hommes rescapés d’un déluge de feu et de fer que devrait répondre la vocation de l’islam dans le monde qui vient… Le mondialisme réclame une unité morale qui s’identifie avec la pensée coranique renforcée par le cours même des évènements… L’islam s’identifie désormais à la finalité du monde. » 

Bennabi cherche dans ce climat de guerre froide à percer le brouillard pour tracer le chemin que doit suivre le monde musulman. Il n’exclut pas cependant « qu’une coalition d’intérêts et d’idées se forme contre le monde musulman », hypothèse qui est en train de prendre corps en ce début de troisième millénaire où les USA, Israël, la Russie, l’Europe, l’Inde et même, redoute-on, la Chine, semblent chercher une alliance contre l’islam, stimulés en cela par « la lutte contre le terrorisme ».  

Les Carnets secrets de Bennabi nous apprennent qu’en juillet 1954, à l’occasion de son premier voyage en Egypte, il s’est rendu à l’ambassade de l’Inde au Caire pour exposer à l’ambassadeur le projet d’un livre portant sur l’ « afro-asiatisme » et écrit : « Il fut d’accord pour que son gouvernement prenne sous son égide la publication du livre une fois qu’il sera rédigé. » Il en commence effectivement la rédaction le 11 octobre 1955 et prévoit de l’intituler « L’Afro-Asiatisme : ébauche d’une doctrine ». La préface est datée du 03 décembre 1955 et comprend une citation de Nietzsche : « Ecris avec le sang et tu apprendras que le sang est esprit. » 

Dans la version française inédite de « La lutte idéologique dans les pays colonisés », Bennabi confirme cette révélation : «L’idée de ce travail (« L’Afro-Asiatisme ») était née dans mon esprit avant la conférence de Bandoeng. J’en avais entretenu un an auparavant le représentant diplomatique d’une grande nation asiatique, exactement en juillet 1954. Cet entretien avait pour sujet l’étude que je me proposais de faire sur les conditions générales d’un front neutraliste indépendant des deux Blocs » (3). 

L’ouvrage, qui est de la même veine que « Vocation de l’islam » sort finalement au Caire en novembre 1956 avec une dédicace au président Nasser, « l’homme en qui s’incarne une double révolution, politique et psychologique, marquant dans le monde musulman l’avènement de la direction technique qui saisit des mains des directions démagogiques la barre de l’Histoire ». La version arabe sort en décembre et est préfacée par l’ancien président égyptien Anouar Sadate. 

C’est en découvrant les évènements qui ont jalonné la vie de Bennabi qu’on arrive à saisir l’unité et la continuité de sa pensée, à dater ses idées, à comprendre la relation entre les positions qu’il a prises et les faits de l’histoire.  Le point de départ de sa réflexion sur la civilisation remonte comme on l’a vu à l’enfance. 

Elle prend forme durant son séjour en France où son mariage, ses études, ses lectures et ses fréquentations lui révèlent la civilisation dans laquelle il s’est trouvé immergé. Sa vie et sa pensée s’emmêlent pour donner son profil définitif à l’homme. Il s’ensuit une riche moisson de 1946 à 1956, période pendant laquelle il construit le socle de sa pensée sur la base d’une trilogie formée par « Les conditions de la renaissance », « Vocation de l’islam » et « L’Afro-Asiatisme ». 

En Egypte, il va le consolider avec une autre trilogie constituée de « La lutte idéologique dans les pays colonisés », du « Problème de la culture » et de « Naissance d’une société ». On aurait pu y inclure « Le problème des idées dans la société musulmane » commencé au Caire en décembre 1959, mais interrompu après le cinquième chapitre. 

Bennabi est maintenant un homme de cinquante ans, au sommet de la lucidité et de la maitrise de sa pensée. Il se veut moins un intellectuel passionné d’idées qu’un militant à la recherche de moyens d’action. Il est conscient de l’effet de ses analyses sur ses compatriotes et de leur impact sur leur sensibilité. Il y a du Céline en lui. 

Parlant de lui à la troisième personne, comme cela lui arrive parfois, il écrit dans un texte inédit : « C’est à grands coups de fourche qu’il remue la vieille litière où le monde musulman a passé la nuit de sa décadence. Ce nettoyage des « Ecuries d’Augias » ne manquera pas de choquer les goûts délicats qui, de peur de renifler une mauvaise odeur, préfèreraient, tout compte fait, le statut quo que l’auteur appellerait l’état post-almmohadien. » 

Deux expériences complètement nouvelles l’attendent : la Révolution algérienne et la plongée au cœur de l’Orient.  Son départ pour Le Caire constituera en outre un tournant important dans sa vie privée. Il va en effet se séparer de sa femme (Paulette devenue Khadidja après sa conversion à l’islam ) malade et quasiment impotente qui a passé à ses côtés vingt-cinq ans pendant lesquels elle lui a été d’un secours illimité sur tous les plans : affectif, moral, intellectuel, social et matériel.    

Bennabi nous l’a présentée dès 1931 dans ses Mémoires inédits en ces termes : « Elle m’apportait sur les choses que je voyais le témoignage de celui qui les voit du dedans, qui les incarne. En effet, elle incarnait les valeurs de civilisation qui étaient, plus ou moins consciemment encore, l’objet du plus vif intérêt de ma part. En fait, j’étais à bonne école : ma femme devenait pour moi une précieuse source d’information et de formation de mon caractère en me mettant intellectuellement et moralement en confrontation directe avec les vertus et les défauts de sa race, de sa civilisation. Que de choses n’ai-je pas apprises à cette école ! »  

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Il lui témoigne sa reconnaissance et son admiration en maints endroits de ses Mémoires et de ses Carnets. Des pages entières sont consacrées à son portrait moral où on peut lire des lignes comme celles-ci : « Khadija avait un sens de la vie intérieure qui se manifestait dans le moindre détail… J’appris à mettre mes semelles sur des bouts de flanelle disposés à la porte pour ne pas ternir un parquet frotté comme un miroir. Dès le repas terminé et la toile cirée retirée, la petite table sur laquelle nous mangions devenait un petit meuble de garniture avec, au centre, le petit bouquet de fleurs que Khadija renouvelait chaque fois qu’elle allait au marché… J’allais connaître avec elle les ressources décoratives que des doigts de fée et du cretonne bon marché mettent à la disposition de la plus modeste bourse… En arrangeant ma vie matérielle d’une certaine façon, elle m’a permis de mieux percevoir de la civilisation ce côté qu’on n’enseigne dans aucun manuel. » 

On possède même un portrait physique d’elle, brossé dans un manuscrit de huit pages daté de 1936 et intitulé : « Les problèmes du ménage Bennabi ». Dans un style balzacien, notre portraitiste décrit ainsi sa femme et les liens qui l’attachent à elle : « Visage reflétant un mélange de sensibilité et de sérénité qui lui donnait parfois l’image de la Consolation penchée sur la Douleur. Ses cheveux, de la même couleur que ses yeux châtains, lui retombaient sur le cou et les épaules. Le teint mat répandait sur la figure qui était ronde, pleine et soulignée légèrement par la ligne d’un double menton, une expression de sérieux cadrant fort bien avec quelques fils d’argent qui couraient parmi ses nattes drues et longues, indice d’une femme qui ne devait pas sacrifier à la mode. Ses traits réguliers respiraient la douceur et la bonté ». Portrait plus moral que physique, dû à la plume d’un musulman pudique. 

Résumant l’union qu’ils forment, il écrit en parlant d’eux à la troisième personne du pluriel : « Ils représentaient dans son indissociable unité sentimentale et morale le couple éternel depuis Eve et Adam. » Paulette devait être alors âgée de 38 ans. Bennabi partageait avec elle, comme on  a eu l’occasion de le voir, une grande connivence intellectuelle, morale et politique. 

Revenant sur les débuts de leur union, il note : « La vie du logis commençait pour nous quand je rentrais le soir. Je prenais une détente en prenant une tasse de thé avec Khadija et en devisant avec elle des choses d’Algérie ou des choses de la religion. Elle aimait à me voir lire le Coran à haute voix après ma prière du « maghrib ». Elle posait ses questions et faisait ses remarques de néophyte… Après le repas, cependant qu’elle remettait de l’ordre pour livrer la table à mes cahiers et à mes livres, je me mettais à faire la prière de l’ « îcha ». Et puis je me remettais à mon travail. » 

Elle ne l’a pas seulement épousé, lui, elle a aussi épousé ses idées et son engagement : « Khadija était devenue wahhabite comme moi » nous révèle-t-il dans ses Mémoires inédits.  Le couple va donc se séparer pour ne se revoir pour quelques jours que quinze ans plus tard. Durant son séjour au Caire, ils s’écrivent assez régulièrement et il lui envoie l’argent nécessaire à sa survie. 

Dans une lettre du 07 mars 1961, elle lui donne son avis sur un sujet à propos duquel il l’a consultée : « Pour ce qui est de l’envoi possible de « L’Afro-Asiatisme » au Seuil, je suis de ton avis. Tu ne dois rien retrancher. Un écrivain de ton genre ne doit pas amputer sa pensée. Tel que tu vois et sens les évènements, tels ils doivent rester dans ton livre… Tes livres sont au-dessus de l’opinion de petits esprits ou des sectaires… » (4)

Dans ses Carnets, Bennabi a régulièrement pointé ses échanges épistolaires avec sa femme, s’inquiétant d’un courrier perdu ou d’une réponse tardive. La correspondance était perturbée par la censure et la surveillance policière qui s’exerçaient sur eux deux tant en France qu’en Egypte. Outre qu’il lui envoyait assez souvent de l’argent, il avait mis à son nom les droits d’auteur que lui servaient les Editions du Seuil pour « Vocation de l’islam » (5).

La dernière lettre que nous avons de Paulette-Khadidja  Philippon est datée du 04 août 1962, soit juste après la libération de l’Algérie. Son nom disparaît des Carnets de Bennabi en 1962 pour ne réapparaître qu’en 1971 où on trouve enfin une note la concernant datée du 15 septembre. Il est dans un avion et survole le territoire français sur son chemin pour les Etats-Unis. Il a une pensée pour elle, ramenée peut-être à son esprit par l’idée qu’ils n’en avaient plus pour longtemps l’un et l’autre : « Je pense à la recluse, perdue, abandonnée. J’implore le ciel, surtout ces derniers temps, de nous permettre de nous revoir avant le grand voyage de l’un et de l’autre. Je n’ai pas eu le plaisir de lui faire lire le deuxième volume de « Mémoires d’un témoin du siècle » qui nous concerne tous les deux. »

Dans une note du 2 octobre 1971, il écrit : « Depuis mon arrivée en Amérique, je pense à mon retour faire un crochet par le Luat. J’ai besoin de revoir Khadija avant de quitter ce monde » A son retour, il fait effectivement une halte à Paris : « J’ai besoin de revoir Khadija avant de quitter ce monde. » se répète-t-il. Dans l’après-midi du 06 octobre 1971, il est au Luat-clairet où il la trouve « malade et vieillie ». Il passe cinq jours avec elle. 

Dans une note du 11 octobre, il donne un émouvant compte-rendu de leur séparation définitive à laquelle assistent en témoins muets des créatures qu’on dirait sorties de l’Arche de Noé ou d’une scène de la vie du roi Salomon : « Dans sa robe de chambre rose, Khadija me regardait m’éloigner. Elle n’avait pas, comme d’habitude quand je la quittais naguère, versé l’eau du retour sur mon pas. La reverrai-je ? Je la laisse bien malade et moi-même je rentre avec une petite déchirure sur la couture de mon opération. Khadija me l’avait soignée tant que je suis resté avec elle et encore ce matin. 

Mais alors que je prenais en face d’elle le café au lait en poudre qu’elle m’avait préparé et versé elle-même, elle a un moment de désespoir que j’aurais bien voulu lui éviter à cause de sa santé. Pourtant, j’ai passé cinq bons jours avec elle. Et même hier matin, alors que j’étais encore au lit, je l’ai entendue fredonner à la cuisine une vieille chanson, comme jadis quand nous étions jeunes tous les deux à Paris. 

Pendant cinq jours, elle m’a narré avec sérénité toute la tragédie de sa vie solitaire, surtout depuis la mort de sa mère, quelques mois après mon départ en Egypte en 1956. Elle n’a eu depuis de consolation que dans la nature, surtout les oiseaux qui lui tiennent compagnie toute la journée et qui viennent même près d’elle tant qu’elle n’avait pas le chat qui effraye même Fanfan, la petite perruche qu’elle élève en cage. Dans la journée, des colombes se posent sur une niche qu’elle a déposée derrière un arbre et qu’elle garnit régulièrement de grains à l’intention de tous les oiseaux du coin. 

Elle m’a raconté l’histoire de son Saturnin, le petit étourneau qu’elle avait trouvé un matin devant sa porte, transi de froid et qui serait mort si elle ne l’avait réchauffé et gardé chez elle, jusqu’au moment où il avait retrouvé et rejoint une bande d’étourneaux. Mais Saturnin lui est demeuré fidèle et il revenait voir sa maman adoptive. »     

Il est en séminaire chez lui, entouré de ses disciples (dont l’auteur de ces lignes) lorsque le 26 mai 1973 un facteur sonne à la porte vers 17h00 pour lui remettre un télégramme envoyé par l’hôpital où venait de décéder Paulette-Khadija. Bennabi suspend aussitôt la séance et se retire pour porter la nouvelle à ses filles à qui il demande de faire leurs ablutions en vue d’une prière commune pour l’âme de la défunte, « la grande sacrifiée pour la cause de l’islam. »

Il poursuit dans son Journal : « Moi-même je fais mes ablutions et fais une prière. Un sanglot m’étreint. Mais en même temps que je sens que la mort a délivré Khadija de sa solitude et de sa longue maladie, mon sanglot devient une imploration : « Dieu ! accorde-moi de la revoir en Ta Paix Eternelle ! »         

A suivre…                                                                                          

NOTES :

1 Salah Ben Saï écrit dans sa « Note » : « Le livre est publié par les Editions du Seuil après avoir été expurgé de nombre de paragraphes.».

2 Donc deux ans et demi avant la parution de « Vocation de l’islam ». C’est alors que le premier paragraphe de la conclusion de ce dernier s’éclaire : « Au terme de cette étude, il m’apparaît clairement qu’il y manque une seconde partie, dont le rôle eût été d’éclairer certains aspects essentiels que j’ai cru devoir laisser de côté ». 

3 Bennabi portait un grand intérêt à l’Inde depuis sa découverte de Tagore dans son adolescence. Cet intérêt grandit avec l’admiration suscitée en lui par l’œuvre morale et politique de Gandhi durant ses années parisiennes. Adulte, il consacre plusieurs écrits à l’Inde, avant et après la partition, et à ses figures intellectuelles et politiques. On peut citer parmi ces écrits les articles suivants : « Hommage à l’apôtre de la non-violence » (« Le Jeune Musulman » du 30 janvier 1953), « Romain Rolland et le message de l’Inde 1 et 2 » (le JM du 26 juin 1953 et du 22  janvier 1954) et « Universalité de la non-violence » (« La République Algérienne » du 18 décembre 1953). Dans les années cinquante, il se lie à un compagnon musulman de Gandhi qui fut ministre de l’éducation, Mawlana Abou-al-kalam Azad (1888-1958). Nous avons trouvé aussi copie d’une lettre adressée par Bennabi le 29 avril 1956 à Mr. Mehar Singh, ministre indien des affaires étrangères. 

4 Cette lettre infirme la thèse selon laquelle Bennabi aurait proposé en 1955 aux Editions du Seuil la publication de son livre, à quoi celles-ci auraient posé des conditions jugées inacceptables par lui. C’est donc d’une réédition qu’il se serait tout au plus agi. 

5 Selon un décompte arrêté par le Seuil en 1957, il se serait vendu à cette date près de 8000 exemplaires.

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