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Belgique : le foulard entre émoi et intégration

Au coeur de tourmentes politiques, le foulard n’en finit pas de défrayer la chronique. Les querelles enclenchées sous l’égide d’une laïcité ou d’une neutralité belge aux femmes musulmanes, qui portent le « hijab » ou qui souhaitent s’en vêtir au sein de la sphère publique, est désormais explicitement instrumentalisée à des fins de politiques communautaires.

En effet, la récente allocution du ministre-président du Gouvernement flamand, Yves Leterme, attaché au parti chrétien démocrate flamand (CD&V), énonce clairement l’utilisation d’un cas indéniable de racisme et d’islamophobie qui avait ému l’opinion belge depuis novembre 2004 : « l’affaire Remmery ». Le patron de la compagnie Remmery à Ledegem, en Flandre, avait reçu des lettres de menaces de mort. Dans ces courriers était spécifié que Naïma Amzil, salariée marocaine dans cette entreprise, devait retirer son foulard.

En évoquant ce tragique épisode, Yves Leterme déclare que si Naïma Amzil a pu fournir un effort d’intégration en apprenant le néerlandais, il ne peut attribuer aucune raison valable à ce que les francophones de certaines communes périphériques de la région de Bruxelles-capitale ne s’accoutument pas avec le néerlandais. En profitant de cette malheureuse contingence, il alimente un peu plus l’interminable embrasement entre francophones et flamands en Belgique.

Certes, Yves Leterme érige Naïma en « un modèle d’intégration ». Mais en mettant en exergue le mérite de cette dernière, il ne fait que souligner les insuffisances du « multiculturalisme belge » et projeter en filigrane la difficulté extrême que rencontrent certaines Belges de confession musulmanes sur le marché de l’emploi.

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Soudainement la charge symbolique du foulard véhiculée dans les mentalités européennes présente une moindre importance. À écouter le ministre-président du Gouvernement flamand, la fixation caricaturale occidentale à propos de la femme musulmane n’existerait plus dans l’imaginaire européen. Or, force est de constater que la ségrégation professionnelle de certaines Belges de confession musulmane est flagrante. Cette discrimination basée sur l’appartenance religieuse résulte essentiellement d’une image faussée de l’islam et est véhiculée dans l’inconscient collectif occidental. Et pour cause, le fait islamique s’apparente à une croyance par essence violente et sanguinaire, à une religion amarrée au fondamentalisme et à la peur, mais le comble semble résider dans l’aliénation des femmes et dans leur asservissement. La revendication d’appartenance à cette religion fait, donc, mauvais genre et crée du désordre, surtout dans le secteur des services où le contact avec la clientèle est permanent.

Le droit à l’emploi de certaines Belges demeure le plus souvent lettre morte, bien que nous décelons une nette évolution de l’insertion effective de la population musulmane dans le paysage hétéroclite belge. Dans ce contexte, l’invitation du roi Albert II à son cabinet destinée à Naïma Amzil et au gérant de l’entreprise Remmery est un signe encourageant comme l’a été le soutien de milliers de personnes à l’occasion de cette affaire.

Mais, alors, quid de la scolarisation contribuant à l’émancipation de ces femmes et de la priorité accordée à l’emploi, principal vecteur d’intégration sociale et économique ? Quid de ces femmes exclues sans vergogne et taries dans leur évolution personnelle ? « Génération sacrifiée » nous dit-on, « de la patience et du temps » pour que les mentalités évoluent ! Aujourd’hui, plus que jamais, l’engagement citoyen nous incombe la réalisation d’un changement qui ne pourra se produire qu’en entrant en scène ou plutôt dans l’arène. L’espoir d’un monde meilleur et plus juste pour ces femmes – dont la féminité est littéralement récusée et l’existence placée entre parenthèse – réside dans leur tort de femmes : le courage d’allier leur identité islamique et leur réalité européenne en des termes humanistes et démocratiques. En définitive, elles en tirent une immense fierté, celle d’avoir décidé d’être fidèles à elles-mêmes. Ce choix librement consenti renverse irrémédiablement le stigmate et leur permet la réappropriation de leur image comme elles l’entendent. N’est-ce pas là les réflexes de Femmes Libérées

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