Jamais l’humanité n’a, de son histoire, atteint un tel niveau de progrès, mais jamais elle ne s’est créé autant de problèmes, ni s’est fait autant de tort qu’aujourd’hui. Rien d’étonnant dès lors que l’on sait, comme Rabelais, que « sciences sans conscience n’est que ruine de l’âme ».
Des conflits éclatent partout, comme autrefois, sans trop savoir pourquoi. Le pouvoir continue à opposer les hommes, l’argent les déshumanise et la religion, censée leur rappeler qu’ils sont tous issus du même moule, continue à être une source de haine et de détestation. C’est ce triste tableau que nous offre, hélas, le monde d’aujourd’hui.
Pourtant, on aurait pu penser que grâce à la mondialisation – avec le rapprochement des hommes via les autoroutes de l’information et la disparition des frontières – les guerres allaient sinon disparaître, du moins sensiblement diminuer. On aurait pu penser qu’après les expériences désastreuses des deux conflits mondiaux et les multiples autres différends territoriaux et politiques qui ont parcouru le siècle dernier, ce nouveau siècle serait celui d’une paix totale et durable.
Le génie maléfique de l’homme et ses démons ont créé une nouvelle façon de se faire la guerre, encore plus impitoyable, car très destructrice et incalculablement inhumaine. On guerroie aujourd’hui contre son voisin, son frère, son père, son ami, ses enfants.
Ce qui se passe actuellement en Irak et à Gaza en est une triste preuve, comme le furent les massacres des Khmers, la guerre au Kosovo, ou encore il y a vingt ans, à peine, le génocide ruandais. Comment expliquer que l’on en vienne à tuer son oncle, son voisin, sa sœur, son frère autrement que par folie ? Quelle religion appelle à l’élimination de l’autre ?
Certainement pas l’islam dont le prophète dit : « L’homme est une construction divine ; est maudit celui qui détruit la construction divine ».
Certainement pas l’islam qui dit dans son livre saint : « Et vous trouverez chez ceux qui se disent nazaréens beaucoup d’amour pour les croyants », (c’est-à-dire les musulmans).
Certainement pas l’islam dont le prophète interdit formellement que l’on s’en prenne en temps de guerre aux femmes, aux vieillards, aux enfants, aux églises. D’ailleurs, en parlant d’église, savez-vous, Mesdames et Messieurs les humains, comment le coran l’appelle-t-elle ? Une prière.
Certainement pas l’islam dont le prophète, de retour en triomphateur à la Mecque, une fois maître de cette cité, va démolir toutes les statues qui entouraient la Kaaba, et il y en avait 360, et épargner celle de la mère de son frère Jésus, comme il l’aurait dit lui-même.
Certainement pas l’islam dont le premier exil va s’effectuer en terre chrétienne, l’Abyssinie, au sujet de laquelle le prophète dit à ses compagnons persécutés, chez eux, à la Mecque : « Rendez-vous en Abyssinie car il s’y trouve un monarque devant lequel nul ne peut être victime d’injustice».
Certainement pas l’islam dont le livre saint, le Coran, dit : «Pour cela nous avons prescrit aux enfants d’Israël que quiconque tue une âme, sans que ce soit dans le cadre de l’exécution d’une peine contre un meurtrier ou un coupeur de route (la peine dite d’alharâbat, en droit musulman), est considéré comme ayant tué toute l’humanité, et quiconque sauve une âme est considéré comme ayant fait vivre toute l’humanité ».
Certainement pas l’islam qui, même en temps de guerre, interdit que l’on mutile les corps, qu’on les brûle. L’islam interdit formellement que l’on brûle le corps humain. Or, c’est ce à quoi se livreraient Daesh, en Irâk, les huthi, au Yémen, Boko Haram, au Nigéria, etc.
Certainement pas l’islam qui, bien que majoritaire en Irak, en Syrie, en Egypte, en Palestine, au Sénégal et dans bien d’autres contrées du monde, a, depuis plus d’un millénaire, laissé prospérer le christianisme, au point même d’aider à la conservation d’églises et de temples. N’oublions pas, Mesdames et Messieurs les terriens, qu’au moment où l’on persécutait les juifs en Occident, c’est en terre musulmane que ces derniers trouvaient refuge. Comment aujourd’hui en souhaiteraient-ils la disparition ? N’ayons pas la mémoire courte. La shoah n’a pas été perpétrée en terre d’islam, ni par un musulman, ni au nom de l’islam !
Certainement pas l’islam qui accorde aux chrétiens et aux juifs le statut de frères avec lesquels dans bien des pans de la vie le musulman entretient les mêmes rapports qu’avec un autre musulman. Il est, en effet, rapporté que quand Rome, chrétienne, combattit la Perse, alors païenne, les Mecquois, païens comme les persans, se gaussaient des compagnons du prophète, car la première bataille fut remportée par la Perse. Ils leur disaient : « N’avez-vous pas un livre ? « Si » leur répondaient-ils. – Les chrétiens n’en reçurent-ils pas un ? – Si. -Alors, nos frères ont vaincu les vôtres. Dieu révéla, alors, ce verset afin de rassurer le camp des croyants : « Les romains ont certes essuyé une défaite, mais après cette défaite, ils triompheront ». Le premier successeur au prophète, Abu Bacri, sortit après la révélation de ce verset et dit aux païens : « Vous êtes ravis de la victoire de vos frères sur nos frères! Je jure au nom de Dieu que Rome triomphera de la Perse ».
Ainsi le coran célébra-t-il la victoire des romains sur les persans, parce qu’ils étaient chrétiens. Comment pourrait-il être en même temps le livre au nom duquel on va tuer ceux-là mêmes dont il célèbre pour toujours la victoire, avec un chapitre entier qui porte le nom de Rome?
Chers amis terriens, il en est du coran, comme d’une pluie. La coquille marine qui fait les perles en boit, comme le serpent qui fait du venin en boit. Doit-on accuser l’eau de crime lorsqu’un serpent tue par le venin ? Il serait autant injuste d’accuser, ici, l’eau de crime qu’il est injuste d’accuser l’islam de violences commises, prétendument, en son nom.
L’islam condamne les exactions attribuées à Daesh, à Boko Haram, à l’armée de résistance du seigneur, groupe chrétien qui sévit en Ouganda, au Congo et dans la sous-région, dans le but d’instaurer un état chrétien en Ouganda, les milices shiites qui sévissent et tuent
leurs frères sunnites en Irâk et en Syrie, au nom des principes sus-énumérés. Il le combat, avec le texte au nom duquel certains de ces groupes prétendent agir. Sa condamnation est – et doit être – sans ambages.
Mais, en même temps qu’il appelle à la condamnation de tous les crimes, notamment ceux dont sont victimes les minorités religieuses irakiennes, car il ne s’agit pas que de chrétiens, les Yazidis en font les frais, comme les civils irakiens en général, sunnites et shiites confondus, au cas où on l’aurait oublié, il demande que toutes les religions condamnent, sans détour, ni complaisance, toutes les injustices commises en leur nom aujourd’hui. Finissons-en avec l’émotion à géométrie variable.
Rendons à l’humain la noblesse que lui a donnée son Créateur. Nul ne doit avoir ni le droit, ni les moyens d’enlever la vie à ses semblables. Faisons-nous entendre, car l’humus de ces groupes terroristes est le traitement de deux poids deux mesures par lequel les conflits mondiaux sont traités. Le rabbin, le prêtre, l’imam et le moine doivent condamner d’une seule voix toute agression.
Il est regrettable et inacceptable que l’on donne un blanc seing à Tsahal pour tuer des civils, sous -prétexte de défendre son territoire. Depuis quand se défendre est synonyme de massacrer ? Ce que fait Tsahal à Gaza et Daesh en Irâk relèvent d’une même maladie : la haine de l’autre et un excès de suffisance. Ne taisons pas un crime au profit d’un autre. Agir ainsi, c’est donner des prétextes à ces inhumains !
Le courageux, Mesdames et Messieurs, n’est pas celui qui s’expose au danger. Le courageux est celui qui dénonce le mal, surtout quand les siens en sont les auteurs et quel qu’en soit le prix. C’est l’impartial. Je dois autant critiquer ma mosquée que doivent le faire le rabbin et le prêtre lorsque leurs temples et leurs églises s’éloignent des principes. C’est le courage dont nous avons besoin. Taire un crime, que nous pouvons au moins dénoncer, est moralement aussi grave que le commettre. En droit positif, cela s’appelle non assistance à personne en danger, c’est un délit.
Le traitement de deux poids et deux mesures – qui fait que l’homme d’une nationalité X en vaut cent voire mille d’une nationalité Y – pousse certains terriens, musulmans et non musulmans d’ailleurs, à la haine.
Mais, à eux l’islam dit que c’est faire la même chose que l’auteur de cette injustice que d’abhorrer ceux qui en sont bénéficiaires. La preuve est qu’à chaque fois que la victime arrive à mettre à terre son bourreau, il lui fait subir soit la même chose, soit pire que ce qu’il lui fit subir. C’est donc remplacer une injustice par une autre.
Luttons contre toutes les injustices, condamnons-les, quelles qu’elles fussent et de qui qu’elles viennent, même d’un musulman. N’oublions pas que Dieu, dans le coran, a révélé une dizaine de versets pour disculper un juif accusé, à tort, de vol, désigné le vrai coupable, qui était dans les rangs des musulmans, et sermonné le prophète pour s’être au départ prononcé, comme juge, en faveur de l’accusateur, arabe musulman.
Apprenons à distinguer les comportements des gens de leurs auteurs. Maudire la personne du diable ne change rien à la vie de l’homme. Maudire ses actions nous en éloigne, donc nous fait gagner en humanité. Luttons contre toutes les injustices, mais gardons-nous de devenir plus injustes que ceux que nous combattons car il n’est permis à personne d’être injuste, pas même la victime. C’est une fois forte de cette valeur que la communauté musulmane trouvera et remplira pleinement la fonction de témoin que Dieu lui a assignée dans le coran, vis-à-vis des autres communautés humaines.
Enfin, à ceux, musulmans et non musulmans, qui pensent que le coran appelle à la violence, je dis que jamais il n’autorise le combat dans un autre but que celui soit du rétablissement de l’ordre, soit de la résistance. Or, dans aucun des deux cas, le combat ne peut être la règle. C’est totalement le contraire. Par ailleurs, combattre ne signifie pas tuer. Pourtant, on traduit insidieusement, ici et là, qitâl (combat en arabe) comme tuerie.
C’est pourquoi, au risque de passer pour un utopiste, j’en appelle à plus d’ouverture à l’autre, quel qu’il soit. Le monde d’aujourd’hui ressemble plus à un village qu’à une mégalopole. A défaut de nous aimer, adoptons une coexistence pacifique. Il en va de la survie de l’espèce humaine, menacée de toutes parts à la fois par les catastrophes naturelles et, surtout, par l’homme lui-même.
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