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Vers un calendrier islamique universel

Suivons la Sunnah, le chemin le moins pénible

Cela fait déjà plus de dix ans que le Dr. Khalid Shaukat (1), et le comité d’observation du croissant lunaire coordonné par le Dr. Mohib Durrani (2) pour les principales sociétés islamiques en Amérique du Nord, dont l’ISNA et l’ICNA, nous livrent des données astronomiques pour guider les musulmans dans la détermination du début et de la fin du mois du jeûne.

Et voilà que le Conseil du Fiqh de l’Amérique du Nord décide (3), vers la fin de cet été, de déterminer le début et fin du mois de Ramadan par le calcul seul, sans recourir à l’observation.

Après tout, nous accomplissons tous nos prières sur la base des horaires de nos calendriers, sans recourir à l’observation de l’ombre solaire ainsi que le faisait le Prophète (SAS) et ses compagnons. Des calendriers accrochés aux murs de nos mosquées, une année à l’avance.

L’observation du croissant lunaire représente, cependant, une toute autre histoire. Une histoire aux incertitudes multiples.

Bien que la conjonction lunaire (Nouvelle Lune) qui marque la fin du dernier cycle ou mois lunaire, correspondant à l’alignement, sur un même plan, du Soleil, la Lune et la Terre (dans cet ordre), soit un fait scientifique précis à la minute près (almanachs utilisés par le public), à la seconde près (astronomes amateurs), et même au millième de seconde près (astronomes professionnels), le moment où le croissant lunaire peut être observé dépend de plusieurs facteurs imprécis. La Nouvelle Lune étant souvent confondue, à tort, avec la naissance du croissant lunaire.

Parmi ces facteurs, on peut citer la limite de Danjon, un astronome français qui, dans les années 1930, s’était basé sur des données expérimentales pour extrapoler et déduire que la longueur angulaire du croissant lunaire, d’une valeur de 180 degrés (dans le cas, par exemple, du dernier quartier de la phase lunaire, c’est-à -dire, quand la moitié gauche de la Lune est éclairée), diminue à mesure que la lune se rapproche du plan de conjonction et tombe à zéro degrés lorsque la Lune atteint 7 degrés d’éloignement (élongation) de ce plan.

Bien que cette limite de 7 degrés soit le résultat d’une extrapolation d’une courbe géométrique, au sens mathématique du terme, c’est la condition d’observabilité la plus largement acceptée dans la communauté des astronomes. Tout se passe comme si, lorsque la Lune est trop proche du plan de conjonction, la lumière émise par le soleil ne se réfléchissait plus sur la Lune pour atteindre les observateurs sur Terre, mais elle était plutôt dispersée et perdue dans l’espace.

Quelles conséquences pour les terriens que nous sommes ?

Etant donné que la Lune parcourt 2 degrés autour de la Terre par heure, la limite de Danjon prévoit qu’il faut attendre environ 14 heures après la Nouvelle Lune (conjonction) avant d’espérer apercevoir le croissant de Lune. Le record du monde du plus jeune croissant lunaire jamais observé (4) est de 15h07min à l’oeil nu (O’Meara, 1990) et de 11h56min à l’aide d’un télescope (J. Stamm, 1996), deux records réalisés aux Etats-Unis d’Amérique. Le record à l’aide du télescope semble, a priori, violer la limite de Danjon, mais il n’en est rien, en réalité. La règle des 14 heures n’est qu’une moyenne liée à la vitesse variable de la Lune autour de la Terre.

Le record de J.Stamm est survenu à un moment de l’année où la Lune est plus proche de la Terre que d’habitude, c’est- à -dire, un moment ou l’accélération gravitationnelle est plus grande. Raison de plus pour ne pas se fier aux chiffres magiques qui circulent, ici et l à, dans le but de vulgariser l’astronomie auprès du grand public.

Il ne suffit pas d’attendre que la Lune franchisse les 7 degrés de la limite de Danjon sur son orbite, pour avoir une chance d’observer le croissant lunaire après la Nouvelle Lune. Aussi faudrait-il que l’orbite lunaire ne soit pas trop basse à l’horizon du lieu d’observation. C’est le cas des hautes latitudes, loin de l’Equateur. Au moment où la Lune franchit la limite de Danjon sur son orbite (élongation), l’altitude du croissant lunaire, pour un lieu d’observation au coucher du Soleil, est de 5.7 degrés2. Voilà une seconde condition angulaire pour que l’observation soit possible.

Ce n’est pas fini. L’humidité, l’éclat de lumière au crépuscule, une vision faible ou mal entraînée et la météo peuvent empêcher l’observation du croissant lunaire même si les conditions angulaires de Danjon sont respectées.

Sur le plan juridique, d’après le Conseil de Fiqh d’Amérique du Nord, présidé par le Dr. Taha Jaber al-Alawani, ancien diplômé de l’Université d’Al-Azhar, dans une fetwa rendue publique le 28 aout 2006, le calcul et l’observation sont deux méthodes tout aussi valables l’une que l’autre. En effet, de plus en plus de juristes musulmans contemporains (5) proposent le recours au calcul scientifique, non seulement pour éliminer les fausses observations mais aussi pour déterminer les mois lunaires par le calcul, en raison du niveau de précision inégalé, atteint, aujourd’hui, par la science.

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En phase avec l’opinion juridique du tawhid al-matali (unification des horizons), le Conseil propose un calendrier lunaire global où le nouveau mois lunaire commence au coucher du Soleil du jour où la nouvelle Lune survient avant 12:00 (midi) GMT, ce qui procure environ 18 heures, avant le coucher du Soleil, aux pays situés à l’Est de la ligne internationale de changement de date (IDL), située dans le Pacifique. C’est- à -dire, suffisamment pour que les conditions angulaires de Danjon soient respectées.

Adopter cette fatwa, c’est contribuer à unir la communauté, selon un critère à la fois scientifiquement précis et juridiquement légal, tout en choisissant le chemin le moins pénible, facilitant ainsi la vie à beaucoup de nos frères et soeurs, ne serait-ce qu’ à cause de la nécessité de demander, à l’avance, des congés de travail à son employeur, sachant la difficulté de trouver et de garder un emploi, en Occident, pour les membres d’une minorité comme la nôtre. C’est permettre une planification plus efficace de la fête du jeûne. C’est s’appuyer sur un critère précis et scientifiquement prouvé pour éviter le climat de confusion qui règne au sein des communautés musulmanes en Occident, déchirées, jusqu’à des heures tardives de la nuit, entre les observations locales et celles provenant de leurs nombreux pays d’origine. Entre une observation effectuée ici et là.

Voil à une occasion d’unir la communauté à l’échelle de l’Amérique du Nord en ce qui a trait au Ramadan et la fête du jeûne. C’est aussi suivre la Sunnah du Prophète (SAS), c’est- à -dire, ne pas se compliquer la vie sans nécessité. En effet, comme nous l’avons montré dans ce texte, contrairement au calcul de la Nouvelle Lune, l’observation du croissant lunaire est sujette à plusieurs facteurs imprécis conduisant à une incertitude et des différences importantes entre les observateurs. Voilà aussi une occasion de suivre les Sunan (lois immuables) du Créateur de l’Univers qui ne sauraient être en contradiction avec la Sunnah (tradition) de notre Prophète (SAS), à l’image de l’enseignement coranique, à savoir, qu’Allah (SWT) a conçu la Lune en phases et qu’Il détaille ainsi les Signes pour les gens qui savent, et que la Lune et le Soleil sont selon un calcul.

La Société Islamique d’Amérique du Nord (2006)3 ouvre ainsi la voie du leadership politique. A nous tous de contribuer à ce que cette unité se concrétise à plus grande échelle. Dans l’ensemble du monde islamique. Pourquoi pas ?

 

Notes

1. Site Web de Dr. Khalid Shaukat http://www.moonsighting.com

2. Site Web de Dr. Mohib Durrani http://www.hilal-sighting.com

3. Fetwa du Conseil de Fiqh d’Ame é rique du Nord, Virginie, Etats-Unis, aout 2006 http://www.isna.net/index.php ?id=35&backPID=1&tt_news=764

4. Records des plus jeunes croissants jamais observe é s http://www.hilal-sighting.com/CriticalSightings.html

5. Fetwa du Cheikh Youssef al-Qaradawi http://www.islamonline.net/Arabic/contemporary/2004/10/article01b.shtml

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