A l’occasion de la journée mondiale de lutte contre le sida, Oumma vous propose de découvrir les diverses manières de combattre l’épidémie au sein du monde musulman. Si la loi du silence et la stigmatisation à l’encontre des séropositifs demeurent encore la règle, de timides avancées se font jour, illustrant la prise de conscience nécessaire face à la propagation du virus dans la plupart des communautés musulmanes. Ainsi, sur les 33 millions de personnes infectées dans le monde, 460000 résident en Afrique du nord et au Moyen-Orient. La proportion de personnes contaminées est encore plus importante en Afrique subsaharienne et devient alarmante parmi les migrants installés en Europe occidentale. Tour d’horizon :
· Maroc : dans un pays où figurent quelques 5000 cas de sida déclarés et 25000 personnes porteuses du virus sans le savoir, les associations se mobilisent pour encourager davantage le dépistage, et ce, à l’approche de la 3ème édition du Sidaction local qui se tiendra le 17 décembre. Lors de sa première diffusion en 2005, les organisateurs avaient conçu un spot publicitaire pour inciter les Marocains à ne pas rejeter les personnes contaminées.
· Algérie : lors d’un forum consacré au HIV qui s’est tenu à Alger le 24 novembre, le docteur Skander Abdelkader Soufi, directeur de « Anis » -ONG pour la prévention du sida-, a signalé l’augmentation de la population vivant avec le virus pour un ensemble « entre 21000 et 30000 personnes », précise-t-il. Son organisation, qui lance aujourd’hui une nouvelle campagne à destination des femmes et des enfants, a également préconisé au gouvernement de classer le sida comme une maladie chronique, ce qui permettrait aux personnes atteintes par le virus de bénéficier de la prise en charge de la sécurité sociale.
· Yémen : dans une société réputée pour son conservatisme, les séropositifs doivent encore lutter pour accéder à des soins décents (dans le seul centre de traitement de la capitale, ouvert en 2007) comme l’illustre ce reportage d’Al Jazeera English.
· Iran : contrairement aux préjugés, les Iraniens se mobilisent de plus en plus sur le tabou social du sida, notamment celui qui affecte les toxicomanes. Des centres médicaux se sont ainsi développés à Téhéran ces dernières années dans le but explicite de prévenir le développement de la maladie.
· Bahrein : dans les pays du Golfe persique, l’expulsion du pays est courante pour les migrants déclarés porteurs du virus. Un homme, surnommé Hamad, a eu le courage de témoigner à visage découvert de son infection, découverte en prison, et de la manière dont il survit socialement à sa mise à l’écart.
· Indonésie : dans le plus grand Etat musulman au monde, la campagne de prévention démarre dès l’école, entre leçons scientifiques et récitations du Coran. A la différence de leurs homologues arabes, les religieux se sont eux-mêmes emparés du problème.
· Grande-Bretagne : la propagation du fléau a incité les autorités britanniques à missionner certains clercs musulmans afin qu’ils puissent sensibiliser davantage les fidèles sur le risque devenu de plus en plus croissant de contamination.
· Afrique du sud : depuis dix ans, une association iconoclaste, dénommée « Positive Muslims », s’est donnée comme mission de venir en aide, psychologiquement et matériellement, aux musulmans séropositifs rejetés par leur famille. Après le décès de son mari, mort du sida, la directrice de la structure, Faghmeda Miller, elle-même contaminée, a décidé de combattre sur la place publique le tabou social qui perdure à l’encontre des malades et des porteurs du virus. Par la même occasion, elle veut aussi démontrer à ses concitoyens qu’il est possible de conjuguer un militantisme sur les questions de société liées au sida avec un attachement explicite à la foi islamique.
« Briser le silence » : tel est le nom d’un documentaire, réalisé sous l’égide de l’ONU et consacré aux perceptions singulières du fléau dans le monde arabo-musulman. Différents intervenants, parmi lesquels l’ancien président de la Ligue arabe, Amr Moussa, expriment la nécessité de mettre fin aux fantasmes obscurantistes qui accompagnent le plus souvent la maladie. Deux versions de ce film de 18mn, la première en arabe et la seconde en anglais, sont désormais consultables en ligne.
Break the Silence from Oliver Wilkins on Vimeo.
Si la prise de conscience à l’égard du problème de santé publique est vitale, et pas seulement un jour dans l’année, les méthodes afin de sensibiliser l’opinion publique, particulièrement musulmane, peuvent être diverses et variées selon l’auditoire. Qui aurait ainsi parié que le chanteur Yusuf Islam, ex- Cat Stevens, considéré un moment comme un paria crypto-intégriste aux Etats-Unis, puisse participer à un concert contre le sida, reprenant pour l’occasion, dans son look inimitable de baba-pieux, son célèbre tube de 1970 ? C’est toujours, quarante ans plus tard, le même « monde sauvage ».
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