Dans un communiqué publié le 26 novembre, l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP) analyse les implications des mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale à l’encontre de Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense.
Face à ces mandats, suite à la requête du procureur Khan de mai 2024, les réactions des autorités israéliennes ont été immédiates. Le Premier ministre a notamment établi un parallèle avec l’affaire Dreyfus, une comparaison que l’association considère comme une insulte à la mémoire du capitaine français, victime d’une véritable machination antisémite.
L’UJFP affirme que la rhétorique de Netanyahu, inversant bourreaux et victimes, vise à masquer des actes qualifiés par la CPI de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Le communiqué analyse également l’impact de cette situation sur la perception de l’antisémitisme. Pour l’UJFP, l’utilisation politique de cette accusation dans le contexte actuel pourrait avoir des effets contre-productifs sur la lutte contre ce phénomène.
Communiqué de l’UJFP
Les juges de la Cour pénale internationale ont délivré, jeudi 21 novembre 2024, les mandats d’arrêt requis en mai 2024 par le procureur Karim Khan contre le premier ministre israélien et son ex-ministre de la Défense.
Les plus hautes autorités israéliennes n’ont rien trouvé de mieux que d’accuser les trois juges de la CPI qui ont pris cette décision d’« antisémitisme » : le premier ministre israélien a immédiatement réagi en considérant cette décision « antisémite », s’estimant victime d’un nouveau « procès Dreyfus ». M. Gallant, de son côté, a dénoncé un « dangereux précédent » qui « encourage le terrorisme ». En Israël, une forme d’union nationale s’est aussitôt constituée autour des deux mis en cause.« C’est un jour noir pour la justice. Un jour noir pour l’humanité », a écrit sur X le président israélien, Isaac Herzog, tandis que le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a estimé que « ces mandats d’arrêt sont une prime au terrorisme ». A l’inverse, l’Autorité palestinienne y a vu un « signe d’espoir », et le Hamas une « étape importante vers la justice ».
Que Netanyahou ose se comparer au Capitaine Dreyfus, c’est une insulte à la mémoire de ce dernier. Dreyfus a été arrêté et condamné au bagne à perpétuité pour espionnage parce que Juif dans le cadre d’une machination antisémite. C’était un officier français, parfaitement loyal à l’armée française : aucun rapport avec le politicien juif israélien d’extrême droite, poursuivi pour corruption et criminel de guerre qu’est Nétanyahou. T. Herzl, le fondateur du sionisme politique, qui a couvert le procès Dreyfus pour un journal autrichien, « la Neue Frei Press » croyait le capitaine coupable, tout au moins dans les premiers temps1. N’oublions pas que Herzl était proche de Drumont2, qui a fait une recension de son livre « l’État des juifs » dans son journal « la Libre Parole ». Au début du 20e siècle, la droite française était très antisémite et leurs buts étaient commun : chasser les Juifs d’Europe.
Le combat victorieux pour exonérer Dreyfus de toute culpabilité a montré que Herzl a eu tort de considérer qu’il était vain de lutter contre l’antisémitisme européen, comme de penser que la seule solution était le départ des Juifs en Palestine.
Netanyahou, utilisant sa rhétorique habituelle, inverse bourreaux et victimes —lui qui commet depuis plus d’un an à tout le moins des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité—, comme le précisent les juges de la CPI, voire un génocide, comme le suggère la Cour internationale de justice.
Netanyahou doit être jugé pour les actes qu’il commet. Il est l’ami le plus proche des vrais antisémites de ce monde et il espère qu’ils ne suivront pas la CPI. La lutte réelle contre l’antisémitisme ne peut pas être entre les mains d’un tel homme et de ses alliés extrémistes de droite de tout bord, au service d’un agenda politique de destruction du droit international et d’une éradication du peuple palestinien.
Une grande partie du droit international a été mise en place après la seconde guerre mondiale, pour qu’un génocide tel que celui perpétré par les Nazis ne se reproduise plus. C’est un autre des paradoxes de la politique israélienne. Elle veut détruire ce qui a été construit pour la protéger et le reste du monde avec !
La lutte contre l’antisémitisme n’est, pour ces individus, qu’un alibi ; leurs actions criminelles, commises prétendument au nom des Juif.ves, alimentent paradoxalement les préjugés antisémites.
On ne lutte pas contre l’antisémitisme en légitimant un nettoyage ethnique et un génocide.
L’État sioniste n’est une solution ni pour la sécurité des Juifs et Juives, ni pour la justice en Palestine. Seul son remplacement par une véritable démocratie en Palestine-Israël permettra d’aboutir à une paix juste et durable. Ici comme là-bas, partout, il n’y a pas d’autre solution que l’égalité, ce qui implique l’engagement dans le combat contre toutes les formes de racisme et d’oppression.
- Il écrit le 1er novembre au journal viennois : « La vilaine histoire du capitaine Dreyfus tient la vedette de l’actualité. Il n’est pas encore établi que Dreyfus soit réellement coupable, mais du fait que son arrestation ait été officiellement confirmée et l’affaire présentée au Conseil des ministres par le ministre de la Guerre, on peut supposer que Dreyfus a vraiment commis cette action déshonorante depuis son affectation au premier bureau de l’État-major général. »[↩]
- Fondateur de la Ligue nationale antisémitique de France[↩]
La Coordination nationale de l’UJFP
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