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L’univers de Caroline

Dans l’univers de Caroline, il y a Paris et ses 75 mosquées. Un chiffre discutable. Les musulmans parisiens en connaissent une douzaine, toujours bondées, dont ils tentent de réchapper dès qu’ils le peuvent, pour aller en banlieue. Les autres salles de prière, en arrière cour, en appartement ou en foyer, sont loin de l’idée que l’on se fait de lieux de culte décents.

Faciès de rue

La Tribune de Caroline Fourest parue dans l’édition du 19/06/2010 du quotidien Le Monde, et intitulée “Prières et cochonnailles”, critique ces manifestations “pensées pour flatter le rejet des musulmans” et, ce faisant, évoque à juste titre les “dérives ultra-laïques” d’une certaine gauche qui les rapprochent de l’extrême-droite – le tout sur arrière-fond de campagne “contre l’islamisation” menée au nom de “l’identité nationale”. On ne peut que se réjouir de cette clairvoyance… Si seulement elle avait vu que le portrait qu’elle brosse de la communauté musulmane est du pain béni pour les partis politiques de plus en plus nombreux en Europe qui « exploitent et attisent la peur de l’islam en menant des campagnes politiques qui privilégient une vision simpliste et des clichés négatifs à propos des musulmans ».

Ces musulmans, dans l’univers de Caroline, prosternés dehors en dépit de l’espace suffisant des 75 mosquées, sacrifient les deniers de la construction mais se maintiennent dans l’inconfort, sur la voie publique ! Sont-ils stupides ? D’autant qu’à ce jeu ils perdent la confiance du contribuable agacé que les interdits préfectoraux ne valent que pour les apéros géants saucisson et pinard tandis que le bien public gaspillé, part dans la construction d’un centre des cultures de l’Islam.

Dans l’univers de Caroline, les croyants, particulièrement ceux de la rue Myrha ou du centre Tawhid à Saint Denis, qui prient ostensiblement ainsi sont donc de dangereux provocateurs. C’est une stratégie nous dit-on, le FIS algérien lui aussi, marquait son territoire en priant dans la rue ! On peut comprendre le sentiment d’invasion et de rejet qu’ont les honnêtes citoyens.

Nonobstant les affirmations diffamatoires de l’article, les fidèles fréquentant le centre Tawhid ne prient pas dans la rue. Leurs locaux sont certes bondés mais suffisent à contenir l’affluence de la prière du vendredi. Il faut croire que dans l’univers de Caroline, même ceux qui ne prient pas dans la rue ont le faciès de ceux qui prient dans la rue.

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Cachez ce culte …

Les peuples ont été créés différents pour qu’ils s’entre-connaissent, c’est une vérité coranique. Fidèles à leurs principes et aux droits humains, les responsables du centre Tawhid , préconisent le dialogue et l’éducation inter- religieuse car l’ignorance est décidément la pierre angulaire des univers cloisonnés. Il suffit pour s’en convaincre de mettre un pied dans la réalité des croyants pratiquants pour prendre la mesure qu’occupe l’obligation de réformer les cœurs et les comportements, de rechercher la science, de construire du lien social et de développer l’effort sur soi. C’est le rôle obligé d’une Mosquée ouverte sur le quartier face à des citoyens égaux en devoirs et en droits. Mais l’égalité de traitements des citoyens dans la république ne semble pas un souci prioritaire dans l’univers de Caroline.

Parmi les valeurs et les idéaux de la République laïque figure en bonne place la fraternité entre tous, quelles que soient la classe sociale, les origines ou les convictions, et la solidarité grâce à laquelle chacun a sa place dans l’espace partagé. Ces idéaux sont aujourd’hui menacés par le climat xénophobe qui se développe à l’ombre d’un ultralibéralisme prédateur. Dans l’univers économique contemporain les plus faibles doivent s’adapter à la loi de la jungle ou disparaître, dans l’univers de Caroline les musulmans doivent prendre conscience qu’ils n’ont pas les moyens d’avoir des mosquées dignes à Paris et disparaître, en banlieue.

Au moment ou le politique semble de plus en plus désarmé face à l’explosion des inégalités, de la précarité et de l’exclusion, il est temps de se rappeler du conseil de Jaurès : il faut apaiser la question religieuse pour pouvoir poser la question sociale.

Simple réflexe de lecteur, le début et la fin de l’article de Caroline Fourest fonctionne ainsi : « l’extrême droite est ravie…le populisme anti -musulman se portera mieux que jamais ». Qui peut croire que seuls les musulmans doivent se préoccuper de cela ?

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