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Le doute à l’épreuve de l’actualité

Nous avons tous dû faire face, au moins une fois dans notre vie, au doute asséné à tort par autrui sur nos intentions. Et nous avons forcément éprouvé un sentiment d’incompréhension, voire de révolte dans les cas les plus lourds.Pourtant, c’est bien le doute du tous contre tous qui est la condition sine qua non de la mise au jour de la sincérité des uns et des autres. Il force en effet celui qui en est la « victime » à préciser sa pensée ou à se noyer dans ses propres contradictions et à révéler ainsi sa vraie nature.

Le cas Zemmour

Premier exemple pour illustrer ce propos introductif, le cas Zemmour est éclairant. Bien que ses idées possèdent une portée funeste qu’il faut défaire, Éric Zemmour, chantre de l’idée qu’il existe un « Grand remplacement » à l’œuvre, donne cette impression déroutante de livrer ses pensées en toute sincérité.
L’auteur du Suicide français a cependant semé le doute sur ses intentions en révélant récemment qu’il éprouvait du respect pour les djihadistes, car n’hésitant pas à mourir pour leurs idées. 

Puis, devant les commentaires l’accusant d’apologie du terrorisme, il s’expliqua en disant qu’il s’agissait pour lui de savoir respecter l’adversaire pour mieux le combattre.
Ainsi, lorsqu’un doute sérieux a été émis après sa première sortie, Éric Zemmour a dû préciser sa pensée dans un sens qui, objectivement, heurte moins les sensibilités.

Le doute de l’anonyme    

Quelles que soient les situations, la méconnaissance d’autrui dans son intimité ou dans sa quotidienneté, que nous assimilerons ici à de l’anonymat, amène à se poser des questions légitimes sur son intention. Or, à l’heure de la médiatisation à outrance, de la multiplication des réseaux sociaux et de nos existences urbanisées à l’excès, l’anonymat devient la règle. 

Bien qu’il soit régulièrement écouté par des millions de personnes, Éric Zemmour est lui-même un anonyme pour eux, car ne faisant pas partie de leur cercle intime. Et rien que pour cela, le doute est nécessaire.

C’est la même chose lorsque l’on passe, avant d’attraper son avion, les obligatoires contrôles de sécurité. Même si cela prend du temps et implique de se rendre plus tôt à l’aéroport, nous comprenons la nécessité de ces opérations. C’est que nous savons tous, au moins intuitivement, et vu le contexte des attentats, qu’il est au-delà de nos capacités de connaître autrui dans sa totalité et que, peut-être, il pourrait vouloir notre mort. Pourquoi quelqu’un d’autre ne serait-il pas autorisé à penser la même chose sur nous ? Nous acceptons donc de nous plier à ces vérifications. 

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Le doute en justice 

Au début de ce mois, l’Etat a été définitivement condamné par la Cour de cassation pour des contrôles d’identité jugés discriminatoires. Ce qui constitua une première.
Pour rappel, des hommes d’origine nord-africaine ou subsaharienne, s’étant plaint de continuellement subir des contrôles d’identité à cause de leur apparence physique, ont poursuivi l’Etat et, pour certains d’entre eux, ont finalement obtenu justice. 

Cette condamnation a fait voler en éclat la jurisprudence qui avait cours. Le bénéfice du doute est désormais accordé en priorité aux plaignants disposant d’éléments démontrant le caractère discriminatoire des contrôles d’identité, l’Etat devant prouver le contraire pour ne pas être condamné. Ainsi, renversement des perspectives dans ce cas précis, le doute vise l'Etat et c’est à lui de s’en défaire, ce qui marque une nette victoire dans la lutte contre les discriminations. 

Autre analyse tirée de cette affaire, l’aboutissement de cette procédure n’eut lieu qu’après une procédure de plus de trois années. Bien que le temps pris pour que justice soit faite constitue le principal défaut de notre appareil judiciaire, il permet idéalement l’accouchement de la stricte vérité légale grâce aux multiples recours autorisés par la législation. Car différentes personnes, toujours neuves au regard des affaires jugées, doivent reprendre, selon des optiques changeantes liées aux attributions et rôles assignés par la loi, les dossiers à zéro. Ils doivent le faire en se forçant à douter des conclusions des précédents intervenants. C’est ainsi le cas du juge d’instruction qui instruit à charge et à décharge après que le procureur de la République, au vu des éléments à sa disposition, décide l’ouverture d’une information judiciaire.

Conclusion
Sur tout un tas de sujets, le doute, véritable aiguilleur, permet la mise en place d’une nécessaire dialectique. Même s’il n’a pas le pouvoir suprême d’effacer les méfiances nées de son utilisation à l’excès, lorsqu’il efface de l’esprit de celui qui le porte la recherche de la sincérité chez autrui.  Pourtant, il est heureux qu’il fasse partie de la nature humaine. Car adossé à l’éducation, il rend l’être humain capable de discernement, y compris lors d’élections majeures, comme, en écho à l’actualité, dans le choix à faire ce dimanche entre Alain Juppé et François Fillon…

Adel Taamalli
 

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