Alors que loin de la Syrie, l’opposition au régime baasiste n’en finit pas de se déchirer, qu’ici et là des observateurs se laissent abuser par la propagande sectaire officielle, des témoignages convergents venus de l’intérieur confirment qu’entre laïques et islamistes, c’est une alchimie autrement plus constructive qui est en train de s’opérer.
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« Les barbus ? C’est peut-être la première fois que l’on se parle et que l’on se respecte : on a désormais quelque chose en commun »
« Alors que les médias occidentaux s’indignent d’un prétendu courant salafiste et du retour en force du mouvement des frères musulmans, la vie quotidienne à Damas change en réalité de visage.
L’épicier du coin, le menuisier au front marqué par sa ferveur religieuse, le boucher aux moustaches déployées, le marchand d’épices, tous ces hommes qui ne me saluaient que la tête baissée, le regard fuyant, l’air gêné, ont aujourd’hui des yeux vifs et des langues dénouées : ils m’accueillent pour me demander les dernières nouvelles de Homs ou encore des éclaircissements sur l’attitude des occidentaux vis à vis de « leur révolution ».
Cette révolution qui est si souvent désignée par les médias comme une guerre civile s’appelle en effet, dans le cœur de mes voisins syriens « leur révolution ». Telle voisine, parmi tant d’autres, qui autrefois tirait vivement sa porte au moindre passage, n’a plus peur aujourd’hui d’échanger quelques paroles avec mon époux ou moi-même. Telle autre passante lance un regard complice et commente les graffitis des manifestants de la nuit d’un « Que Dieu les protège » (« Allah yahmi-hun ») qui en dit long.
Face à la qualification de « guerre confessionnelle » trop systématiquement appliquée à la révolution syrienne, l’expérience d’un jeune militant marxiste résonne. Animateur des petites saynètes théâtrales jouées au cœur des manifestations du quartier de Khaldiyyé, il ne peut se déplacer sans protection. Or sa sécurité quotidienne et celle de ses amis activistes laïcs est assurée par des militants qu’un observateur désignerait comme… des « islamistes ». Au coude à coude, tout le monde lutte aujourd’hui en Syrie dans un seul et même but… !
Les barbus ? C’est peut-être la première fois que l’on se parle et que l’on se respecte : on a désormais quelque chose en commun.
Abîr
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