Le bain de sang tant redouté est en train de tourner au carnage en Egypte, où l’état d’urgence a été décrété ce mercredi par la junte militaire au pouvoir qui, après avoir poussé Mohamed Morsi vers la sortie, a retrouvé ses vieux réflexes : faire parler les armes contre les sympathisants du président destitué par la force, parmi lesquels plus de 300 ont péri sous les balles aujourd’hui.
Cet assaut meurtrier qui n’a pas fait de quartier, tuant une journaliste d’Al Jazeera, abattue par un Sniper d’une balle dans la tête et le cou, pour avoir filmé quelques images d’un théâtre de heurts sanglants aux airs de guerre civile, a provoqué des violences à travers toute l'Égypte, les Frères musulmans appelant à serrer les rangs et à manifester pour "mettre fin au massacre".
Encerclés de toutes parts, les partisans pacifiques pro-Morsi, qui étaient des milliers à camper en famille, avec femmes et enfants, depuis plus d’un mois, sur les places Rabaa al-Adawiya et Nahda du Caire, ont subi, à l’aube, une attaque surprise par les bulldozers des forces de l'ordre qui n’avait rien de l’opération de délogement "graduelle" promise par les autorités, à coups de "sommations" répétées et non de machines infernales écrasant tout sur leur passage et de tirs en rafale.
Des corps carbonisés ont été découverts gisant sur le sol, tandis que les bulldozers achevaient leur sale besogne en détruisant tous les points de rassemblement dans les rues. Le danger venait aussi du ciel puisque des hélicoptères ont dégagé du gaz hautement toxique sur la foule en colère. Outre l'état d'urgence décrété dans le pays à partir de 14 heures, le gouvernement a annoncé que le trafic ferroviaire vers et depuis Le Caire était interrompu pour prévenir de nouveaux rassemblements.
Parmi les nombreuses victimes, les Frères musulmans déplorent le décès de la fille de 17 ans d'un de leurs principaux leaders, Mohammed al-Beltagui, qui a été mortellement touchée par une fusillade. La guerre des chiffres et de la communication fait rage également : sans grande surprise, les autorités minimisent leur responsabilité dans ce chaos mortifère, ne parlant que de 95 morts, alors que les Frères musulmans font une compatibilité autrement plus macabre, recensant au total 2 200 morts et plus de 10 000 blessés depuis le début des manifestations.
L'imam d'Al-Azhar, plus haute autorité de l'islam sunnite, s'est désolidarisé de l'opération meurtrière en affirmant à la télévision tout ignorer des méthodes que les forces de l'ordre comptaient employer, après avoir pourtant cautionné le coup de force militaire contre Mohamed Morsi, le 3 juillet.
Aux salves de tirs sur les partisans pro-Morsi a succédé la salve de condamnations internationales contre les autorités égyptiennes, allant du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui a "condamné dans les termes les plus fermes les violences", à la Turquie, hostile à à la destitution de Mohamed Morsi, qui exhorte aujourd'hui la communauté internationale à agir urgemment pour faire cesser le "massacre", l'Iran se joignant à cette indignation dans les mêmes termes outrés, en passant par Londres qui a "condamné l'utilisation de la force", et sans oublier la Suède qui a fait clairement endosser aux artisans de la répression implacable la "principale responsabilité" des violences. Le Qatar, principal soutien des Frères musulmans, a dénoncé "la méthode utilisée contre des manifestants pacifiques", tandis que Paris et Berlin lançaient des appels au calme.
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