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À quoi ressemblerait une théologie musulmane revivifiée au 21ième siècle ? (2)

Je me souviens, lorsque je cherchais à mieux comprendre la religion de nos aïeux, toutes les peines du monde que j’avais pour savoir par quoi commencer. Ce n’est que bien après avoir connu de multiples périples, que je compris que c’est principalement la vie intérieure que l’Islam cherche à façonner, et que cette religion nous invite à faire et, « en faisant notre travail d’homme », de construire notre être moral. Le but essentiel de cette tradition est bien de libérer notre âme de ses mensonges qui l’empêchent de reconnaître sa vraie nature et de retrouver son Origine.

Sur la croyance, qui est un élément fondamental de mon être intime, nos imams ne nous expliquent presque rien, ils répètent des formules qu’ils ne comprennent pas parfois eux-mêmes, et ils nous posent la croyance comme un fait. Quant à la foi, on nous répète que c’est la simple application du rite et qu’elle se confond tout simplement avec lui, alors qu’en réalité, la pratique cultuelle n’est qu’un moyen afin d’atteindre un univers bien plus grand ; une des grandes méprises de notre temps aura été de confondre la fin avec les moyens. Et à côté de cela, nous avons tous cette étrange intuition que la vérité est proche et simple à la fois, si proche que nous finissons par ne plus la voir ; elle serait comme cette matière noire qui compose l’univers, mais dont nous ne savons pas grand-chose sur ce qu’elle est ; comme elle, la Vérité est partout et insaisissable à la fois.

Voilà pourquoi, nous avons un si grand besoin de connaître et de comprendre l’armature de l’Islam, qui reste en France, faut-il le rappeler, difficile d’accès. Cet accès difficile est dû, notamment, à la présence d’usurpateurs du sens, d’hommes d’affaires qui se font de l’argent sur la crédulité des musulmans, mais il est également lié à la présence d’hommes politiques préoccupés par leurs petites affaires. En effet, ce sont eux, d’abord, les véritables fossoyeurs de l’Islam qui parasitent le message et détournent l’attention de gens de bonne volonté d’une compréhension saine de cette tradition spirituelle ; ce phénomène touche tous les courants idéologiques qui prétendent représenter les musulmans, allant du wahabbo-salafisme (nos fossoyeurs du sens) au « confrérisme » (nos hommes d’affaires), en passant par l’islam consulaire (nos hommes politiques).

Le travail de revivification théologique s’en trouve altéré, car le but de ces falsificateurs n’est pas de penser et de vivre les principes métaphysiques et moraux de l’Islam ; c’est bien connu, « au royaume des aveugles le borgne est roi ». Mais, comme le rappelle le Coran, « ils ne trompent qu’eux-mêmes s’ils savaient » ! 

Reprenons : dans le corpus musulman, nous avons cette parole attribuée au Prophète, qui rappelle que Dieu « est auprès de la pensée que se fait de Lui Son serviteur ». Cette parole a une très grande portée spirituelle, mais prenons là dans son sens premier : si l’homme voit un Dieu de majesté alors la divinité se révélera ainsi, mais s’il voit un Dieu « rapetissé » ayant une condition humaine, comme le voient et l’affirment les Wahabbo-Salafistes, un dieu qui a un poids, un corps, une taille, des cheveux et une limite, une sorte de Zeus islamique, alors Dieu ne se révélera pas tel qu’Il est dans leur esprit, disons-le franchement, « malade ».

Certains musulmans seront surpris, voire choqués, de lire cela ; si c’est le cas, c’est parce que beaucoup ne vont plus lire les sources de l’école anthropomorphiste du wahhabo-salafisme. Mais il y a des savants anthropomorphistes qui ont effectivement décrit ainsi, le Dieu de majesté, défini par le Coran comme étant « très haut dessus de ce qu’ils peuvent lui associer » ; mais la masse ne doit pas le savoir sinon elle serait offusquée ; d’ailleurs, il y a beaucoup de choses que la masse musulmane ne doit pas savoir selon Ibn Arabi.

Aujourd’hui on le voit, nous payons cette ignorance à travers une désertion de la pensée éthique musulmane du champ du débat d’idées. Cette parole du Prophète démontre qu’il faut s’assurer d’avoir une juste compréhension du caractère de Dieu (Sunnat’Allah), elle justifie en cela une métaphysique qui nous permette de nous accomplir. C’est pourquoi, il faut être pénétré par une grande humilité lorsqu’on traite cette question de la saisie de Dieu. On peut déjà dire d’emblée, que le Coran confirme que les hommes « n’ont pas évalué Dieu au vrai de Sa valeur » (C. 22, 74) et que très peu le pourront. Il n’est donc pas impossible de saisir Dieu Lui-même ou en tout cas « Sa vraie valeur ».

Le sérieux, pour ne pas dire, la gravité de notre vie, provient et prend tout son sens dans cette reconnaissance du Dieu Unique, non pas celui du grand Plotin, mais Celui qui se révèle aux hommes dans le Livre et le monde qui nous entoure. Il est impossible au 21ième siècle d’aborder tout une part de la connaissance de Dieu (théo-logos) avec la pensée d’un Junayd, d’un Ghazali ou d’un Juwayni, et encore moins celle d’un Razi (tous ces immenses théologiens appartiennent à l’Islam majoritaire dit « sunnite »).

Ce sont, non seulement, des œuvres très difficiles pour une génération musulmane française de plus en plus consumériste et, théologiquement, toujours un peu plus analphabètes, mais surtout, leur vision du monde n’est plus comparable au nôtre, et leur œuvre par certains côtés, est devenue obsolète et nous allons le voir. Mais il faut bien, malgré tout, donner une connaissance efficace à nos enfants, empêtrés dans une crise des idées et de la modernité, une crise qu’ils vivent péniblement.

Iqbal nous a donné, au début du 20ème siècle, quelques pistes pour reconstruire une vivifiante théologie, rompant ainsi, avec la théologie gréco-classique. Cette rupture initiée par Iqbal, doit nous permettre de faire face sereinement aux défis du monde moderne ou comme l’avait dit notre cheikh Draz d’essayer de « vivre au milieu du feu sans se faire brûler » ? Un de ses élèves avait dit de lui: « Iqbal est venu à nous comme le messie  ressuscitant les morts ; il nous a ramenés à la vie quand nous étions morts en répétant une pensée morte ». Il est vrai que son livre « Reconstruire la pensée religieuse de l’Islam » a eu l’effet d’un coup de tonnerre, c’est une œuvre majeure et sa pensée fait école encore aujourd’hui, malheureusement elle est trop méconnue en France, et reste souvent mal comprise par nos ‘oulémas (savants).

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On l’a vu plus haut, dans la tradition musulmane lorsque nous avons une mauvaise idée de Dieu cela peut altérer directement notre nature humaine et désorganiser notre vie psychique. C’est pourquoi l’Islam insiste pour avoir une métaphysique traditionnelle, c’est-à-dire fidèle aux données révélées et efficace. Selon Iqbal, et reprenant les affirmations du Coran, Dieu est Éternel et Vivant à la fois, rappelant qu’Il n’est pas soumis aux vicissitudes du temps, autrement dit, qu’il n’y a rien qui ajoute ou enlève quelque chose à sa perfection. Cela signifie également, que ce n’est pas non plus un Dieu immobile qui regarde le monde de loin comme le dieu d’Aristote ; le Coran le répète à plusieurs endroits « Dieu ajoute ce qu’Il veut à sa création ; Il est Omnipotent » (C. 35, 1) et « qu’Il est chaque jour à la tâche » (C. 55, 29).

Ces versets contredisent clairement l’image d’un Dieu qui impose un mektoub, c’est-à-dire un destin qui déroule un scénario où les hommes ne font que rencontrer leur vie sans la faire réellement. Et ce qui m’a toujours surpris, c’est que nous affirmons cela sans jamais nous poser la question de savoir si nous n’emprisonnons pas l’Action de Dieu elle-même ? En effet, si tout est déjà écrit et que Dieu n’est plus qu’un spectateur observant des marionnettes, Il ne peut plus intervenir Lui-même ; cette vision annule la Liberté de Dieu et pas seulement celle de l’Homme. À aucun moment, le musulman se pose une telle question ? Et à aucun moment, un imam sérieux dans nos quartiers ne se lèvera pour nous dire avec courage que le « mektoubisme » est un vestige de la pensée grecque dissimulée sous l’habit de Mohamed et qui s’est glissée dans notre patrimoine religieux ; que c’est le dieu d’Aristote et non le Dieu de Muhammad que nous percevons et prions.

Or, le Coran montre que Dieu « est chaque jour à l’œuvre ». Bref ! C’est la preuve que nous répétons des formules consacrées sans une réelle intelligence. Mais notre penseur et poète n’en reste pas là, et affirme qu’en plus d’être Éternel et Vivant, Il est aussi Omnipotent (Houwa bi kouli chay’ïne qadir) et Omniscient (Houwa bi kouli chay’ïne alim). Pour lui, le Dieu de Muhammad, est tout à la fois Éternel, Vivant, Omnipotent, Omniscient et on peut rajouter Unique. C’est ici que je tiens à préciser que Muhammad Iqbal a fait pour la théologie ce que l’imam Al Chatibi a fait pour le fiqh (le droit musulman).

Il a, en effet, ramassé l’ensemble des propositions des théologiens classiques pour ne faire ressortir que les éléments régénérants nécessaires à notre époque. Il a dénoncé cette vision statique du monde qu’a développé la théologie musulmane classique héritée de la pensée grecque que n’a pas connue la première génération de musulmans et qui était plus conforme à l’esprit du Coran. Notre grand penseur indo-pakistanais a écrit dans « Reconstruire la pensée religieuse de l’Islam » que « la principale responsabilité de la décadence orientale est le résultat de ces systèmes philosophiques néoplatoniciens qui inculquent la négation de soi, le relâchement et l’oubli de soi » (p.87).

Allons plus loin encore. Qui sont ceux à l’époque du Prophète qui étaient les plus fatalistes ? Les Arabes polythéistes qui ne voulaient surtout pas remettre en cause l’ordre établi ; c’est eux qui disaient à Muhammad, quand il leur demandait d’aider les nécessiteux : « Quoi ! nous donnerions à manger à ceux que Dieu, s’il voulait, nourrirait ? Vous êtes dans un égarement manifeste » (C. 36, 47).

D’ailleurs, il est impossible que la vision « mektoubiste » ait concerné les premiers compagnons sinon ils n’auraient jamais pu connaître cette fulgurante épopée et conquérir de grands empires en moins de 100 ans. Ils avaient en revanche une forme de « fatalisme supérieur » comme le disait Iqbal, à savoir que rien ne pouvait leur arriver à moins que Dieu ne l’ait voulu mais jamais ils n’ont pensé n’être que des ombres chinoises et que tout était déjà joué par avance. Ce sont les Arabes polythéistes qui avaient cette compréhension, et le Coran l’atteste. Nous savons que le plus grand problème théologique en Islam a toujours été de concilier la Liberté de Dieu avec la liberté humaine. Mais toutes les solutions ont abouti à un échec.

On sait qu’il y a une collaboration entre l’Action de Dieu et l’action de l’homme car « Dieu ne modifie pas l’état d’un peuple, qu’ils ne l’aient modifié de leur propre chef » (C. 13, 11) et que « tandis que ceux qui en Nous firent effort, oui, guidons-les sur Nos chemins » (C. 29, 69). Mais comment cette alchimie se fait-elle sans limiter la Liberté de Dieu et celle de l’Homme ? À la vérité, sur le plan des modalités, on ne le saura jamais vraiment. Mais iqbal a eu la bonne intuition : c’est le  la compréhension du temps pyschologique (et non spatial) qui peut nous offrir de nouvelles clefs de compréhension.

L’influence de Bergson sur la pensée de Sir iqbal se jouera autour de la notion de temps ou de durée. C’est une réelle complexité que de saisir cette rencontre entre l’éternité et le temps, entre Dieu et l’Homme, et tout théologien qui dirait, de manière péremptoire et définitive, que la réponse à cette question est ceci ou cela, est un menteur infatué par son ignorance inavouée et malheureusement, au sein de notre communauté religieuse, il y en a beaucoup trop. Nous n’avons que des hypothèses et Iqbal en a avancées quelques-unes, mais elles sont si nouvelles, que beaucoup l’ont attaqué à défaut de l’avoir réellement compris. Mais les dernières données scientifiques de la physique actuelle lui donneraient raison. Dans la 3ième partie qui suit, nous chercherons à savoir comment rester sur le sentier nous menant à la divinité et que Iqbal identifie comme l’Ego ultime, et après quoi, dans une 4ième et dernière partie, nous ouvrirons nos propres pistes.

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11 commentaires

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  1. On aime s inventer des histoires , comme les Grecs.
    Il est évident que la prédestination a une origine prophétique , l’un des 6 piliers de la foi, l un des 40 hadiths nawawi . D ailleurs la renier équivaut à de la mécréance en islam. Alors la relier au grecs et au recit d Homère me paraît burlesque. C est surtout la philosophie et les sciences grecs qui ont intéressé les arabes. Beaucoup moins leur mythologie et leur littérature. Jusqu’à preuve du contraire.

    J ai du mal à croire qu une idée grec aussi marginale se soit glissé dans les fondements de l islam….

  2. La culture Grecque est fortement marquée par le “destin”, si on en doute, qu’on relise seulement Homère, à qui on ajoutera les historiens Grecs. C’est d’ailleurs cohérent avec le rationalisme initial, apparemment ces gens cherchaient à expliquer le plus de choses qu’ils pouvaient ou à leur trouver leur place. Rien d’inattendu, l’homme premier essayait de résoudre les énigmes. Toutes ces divinités aux rôles bien circonscrits, ces forces qui se conjuguent, on dirait un ou des systèmes d’explication au moyen desquels on tentait d’éliminer le doute, de lutter contre les peurs, l’angoisse. Chaque épreuve avait un sens, et si on était perdu, on allait consulter l’oracle de Delphe. Les destinées, elles sont nommées au pluriel à ma connaissance, sont des forces ou des divinités qui n’étaient pas nommées, au-dessus de l’Olympe. C’est dire la force de ces destinées, justement le peu qui en est dit.

    Sinon, Aristote qui nous intéresse laisse peu ou pas de place à un quelconque libre arbitre humain, les intelligibles nous viendrait d’un agent général des intelligibles, au point que Thomas d’Aquin a reproché à notre Ibnou-Rouschd, commentateur d’Aristote, lui a objecté qu’ainsi, il n’y a plus de responsabilités individuelles et donc plus de jugement de chacun.

    Le Destin est plus rationel ou plus rationaliste qu’on croit, l’homme lutte contre l’angoisse, quoi de surprenant à ce que toute chose soit d’avance prévue et à ce qu’il y ait réponse à tout.

    Autre moyen plus sûr de contenir l’angoisse, c’est de s’appuyer et de se fortifier par Dieu.

    Le destin est nécessaire à la pensée mécaniste. Le destin c’est quand on veut tout expliquer, chose normalement impossible, si on admet des limites à la raison humaine, alors on n’est plus dans le destin, on est plus dans la providence.

    Les Européens et gens dits de la modernité croient au destin, par exemple, “On n’arrête pas le progrès”.

    Efforts du Croissant de lune.

  3. Bonjour Hakim, cette idée de mektoub est certes à revoir, mais je suis assez surpris de lire que la faute en revient à l’influence grecque . Question , les Européens sont aussi largement influencé par cette pensée grecque , sans aborder le déterminisme de Spinoza . Pourquoi ceux la ne sont pas tomber dans le piège du mektoub alors ? La pensée grecque me semble pourtant encourager la recherche de la vérité par ses propres moyens .

    Voila pourquoi j ai tendance a m indigner , vous évoquez l’esprit vainqueur des anciens arabes , mais , il y a toujours un mais , ça reste encore la faute des occidentaux. Ou des modernistes
    En ce qui concerne nos représentants ( imam et autres) le constat est accablant , je suis d accord , mais les accuser tous , de malhonnêtes et de non sincères , me paraît excessif.

    Donc tout cela pour en venir à Iqbal , qui aurait la bonne formule , disons que ce regard me paraît assez manichéen , le mauvais contre le bien , c est
    la tout notre problème….
    Alors je fait comme les Grecs , je cherche et je pense par moi même….

  4. Bonjour Najib, merci pour votre réponse. Ma réflexion peut sembler subjective , mais elle tente modestement de répondre à des besoins, des attentes d’aujourd’hui. En fréquentant les mosquées , j ai trop souvent vu et entendu des discours purement théologique.et dogmatique, des discours qui aurait pu être exprimé hier où il y a 200 ans sans voir la différence , mais pour un équilibre un apaisement , nous devons penser religieusement certes, mais pas seulement ..intégrer davantage la dimension sociale, culturelle , identitaire, historique aussi, répondrons a bon nombre des problèmes que nous rencontrons. C est une vision que je défend ,

    Penser contre soi même , je suis d accord.

    J ignore vraiment si l influence grec a été néfaste a l’islam,. Mais l Histoire est ainsi. Nous sommes tous les produits de notre époque et de notre région. Et j y trouve d ailleurs un certain charme que les cultures voisines ( grecs ou autres ) ai leur mot à dire. J aimerais aussi , que l on soit moins opaques à notre environnement
    Ceci n est pas une subjectivité. Mais va dans l ordre naturel des choses !

  5. Salam, voilà qui pour l’instant confirme que la théologie reste inaccessible à la plupart des gens, qu’il vaut mieux ne pas s’emmêler si on n’est pas sûr de s’égarer. Mais alors, que reprochez-vous aux imans de quartier? Vous voulez plus d’imans du tout ou à peine quelques-uns? Qu’ils soient et nous avec de culture Aristotéticienne et Grecque imprégnée d’Israïlismes à notre su ou insu, il faut que nous fassions quoi? Répéter des formules écrivez-vous avec mépris, alors descendez de votre hauteur et proposez votre théologie si elle est soutenable et accessible aux masses, sinon laissez les peuples en paix, épargnez-leur vos critiques à travers lesquelles perce malgré vous de la violence certes maîtrisée. Vous êtes iman bon sang, est-ce à vous de servir les fidèles ou quoi? Qui vous force à vous occuper de gens dont on sent bien que vous les aimez peu? Pourquoi pensez-vous qu’ils dissocient les gestes de la foi, qu’est-ce qui vous autorise à écrire ça? Gardez-vous de haïr ou critiquer des gens peut-être de bon fond, Allah est clairvoyant. Si en gros vous n’aimez pas de pauvres bougres, si vous n’aimez pas assez ce que vous n’osez pas encore nommer racaille, vous n’avez rien à faire avec eux, désolé.

    Croissant de lune.

  6. J’espère que mon texte n’a pas eté envoyé incomplet.
    Ce qui suit annule et remplace le premier dans le cas où celui-ci aurait été envoyé. Je vais recommencer donc.

    Vous allez trop vite en besogne Djeser. Vous semblez penser avec les aspérités de votre tempérament. Autrement dit, vous pensez selon ce que vous aimez. Vous voulez trouver dans les textes d’autrui vos propres réflexions. Mais, “comprendre est au-delà d’aimer”. Nous devons tous plus ou moins raboter les aspérités de nos inclinations en vue de mieux penser. Je le répéterai autant de foi qu’il le faudra : la pensée est une ascèse. Car on pense souvent contre soi. Et il faut éviter de chercher le reflet de ses préoccupations intellectuelles chez autrui.

    Ceci étant dit, l’influence grecque sur la théologie islamique est une donnée objective. Cette influence, qui plus est, a été néfaste pour les musulmans. Elle a biaisé la compréhension des textes scripturaires. Ceci est une évidence.
    Mais il est des influences qui sont bénéfiques et l’architecture est un bon exemple. Donc habite où tu veux, mais pense selon les catégories de la religion qui s’accomode mal des catégories grecques. On a le devoir désormais de penser religieusement. Car la religion est une discipline qui exige beaucoup de discipline. Elle ne souffre guère le mélange des genres. Toute greffe suppose la compatibilité. Frankenstein n’est qu’une fiction. De plus, il est monstrueux.
    Je ne peux être plus clair.
    Mais si tu as envie de raser les mosquées, libre à vous. Elles sont dejà de plus en plus profanées.

  7. Bonjour Najib , vous donnez la un exemple qui illustre ma remarque précédente : appelons cela comme on veut ( théologie ou dogme ), mais vous affirmez. la qu il faudrait épurer, du moins vous dénoncez les influences grecs et israélites du canon musulman . Très bien . Moi je vous propose de raser toutes les mosquées du monde. Pourquoi ? Parcque leur architecture a été influencé par les motifs romains , . Byzantins , catholique et sassanide. Cela aussi les crèvent les yeux.

  8. Salam Najib,

    Toute critique est la bienvenue surtout lorsqu’elle est bienveillante et argumentée…

    Iqbal ne se reconnaît, pour l’avoir dit et écrit, qu’une seule influence : celle de Rumi…

    Il a repris la notion de temps psychologique qu’il a réadaptée selon la perspective islamique … il a critiqué à juste titre, l’élan vital de Bergson dans son livre de reconstruction de la pensée musulmane en affirmant que cette notion niait l’aspect téléologique de la vie humaine …

    Mais véritablement s’il faut chercher l’influence d’un penseur dans la pensée d’Iqbal c’est bien celle de Rumi (la pensée d’Iqbal se trouve essentiellement dans ses poèmes).

    Hakim FEDAOUI

  9. Bonjour,

    Ce qui suit n’est point une critique. C’est juste un point de vue. Et le propre du point de vue est d’être révisable.

    De même que la pensée islamique a été dévoyée par les catégories grecques, de même la culture islamique a été frelatée par les récits israélites. Cette évidence crève les yeux. Mais certains regardent sans voir et écoutent sans entendre. “Certes ce ne sont point les yeux qui sont aveugles. Ce sont les cœurs qui sont dans les poitrines qui s’aveuglent”, nous apprend magistralement le Coran (22/46).

    Il va sans dire que beaucoup de savants musulmans parmi les anciens étaient sous l’influence de la philosophie grecque qu’ils venaient de découvrir. Ils avaient passé le clair de leur temps dans la traduction en arabe des textes grecs ainsi que dans leur compréhension et leur commentaire. Et on ne sort jamais indemne d’une telle opération. Ça laisse des traces, voire des taches. L’air du temps de l’époque était justement entaché par la philosophie grecque et les récits israélites qui conditionnaient l’approche et la compréhension du Coran et de la Sounna. Et comme la transmission de l’Islam se faisait de bouche à oreille du fait que les livres étaient rares, la religion aurorale, inaugurale fut, hélas, submergée par des influences extérieures plus ou moins compatibles avec le Coran et la sounna. Ce phénomène fut dénoncé sans succès puisque sa gangue empêche encore aujourd’hui l’accès direct aux textes scripturaires. Cet accès devient de plus en plus difficile puisque d’autres influences se sont ajoutées aux premières : le positivisme et le scientisme (Mohamed Abdou), les sciences humaines et leur approche herméneutique (Mohamed Arkoun), que sais-je encore ?

    Sir Iqbal met en exergue, à juste titre, cette influence malencontreuse tout en étant lui-même sous l’influence de Bergson en particulier et la philosophie occidentale en général. L’empreinte de Bergson, par ailleurs, se trouve plus du côté des poètes et autres littérateurs que du côté des philosophes qui comptent. Et Iqbal est surtout un poète génial ! Sa vision de la religion est plutôt consignée dans ses poèmes. Ainsi, il me semble qu’il serait judicieux de se frotter à sa poésie dans laquelle il a investi sa compréhension de la religion. On nous dit donc qu’il admirait Bergson et était influencé par sa “philosophie” pendant que d’autres adulaient Platon ou Aristote ou Plotin… Ainsi tombe-t-il sous les coups de sa propre critique.

    Les textes scripturaires (Coran et Sounna), par ailleurs, croulent sous des tonnes de commentaires. Certains ne sont que les commentaires des commentaires… Ces commentaires sont des productions humaines donc sujettes à l’erreur. Il faut les passer au tamis du Coran et de la Sounna authentifiée en vue de garder ce qui est pertinent et de se débarrasser de ce qui ne l’est pas. Mais le formatage a fait son œuvre. Et l’on s’abreuve à l’eau croupie de toute une littérature qui fausse le rapport aux sources scripturaires. On n’a plus le choix. Il faut remonter à la source si l’on veut étancher sa soif d’Absolu. De plus, les musulmans, il faut le dire sans complexe aucun, ont déjà vécu leur modernité. Ils ont rayonné pendant plusieurs siècles. Et L’arabe était la langue de la science. Mais aujourd’hui nous vivons notre moyen âge. Il faudrait, me semble-t-il, renouer avec les textes originaux sans faire bien sûr passer par pertes et profits l’intégralité de notre patrimoine. Il faut désormais inverser la démarche : au lieu de lire le Coran et la Sounna authentifiée à la lumière des commentaires des commentaires, il serait judicieux et profitable de lire toute cette littérature, religieuse qui est très abondante, à la Lumière du Coran et de la Sounna authentifiée en séparant le bon grain de l’ivraie. Car le seul magistère qui existe, dans le champ religieux, est le Coran et la Sounna authentifiée. On a le devoir de ne pas troquer ce qui ne se trompe pas pour ce qui se trompe.

    L’Islam étant la culture de l’amont, nous sommes obligés de renoncer aux lectures de seconde main. Cela ne veut en aucun cas dire qu’il ne faut rien lire d’autre. Tant s’en faut ! “La sagesse est le bien perdu du croyant, où qu’elle soit elle le concerne en premier.” Mais avant de se mettre à butiner, il faut apprendre à penser religieusement. Car la religion dispose de ses propres catégories de compréhension et de communication.

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