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La première batteuse de Gaza s’accroche à son rêve, envers et contre tout

Si vous demandez à la jeune gazouie, Nana Ashour, où elle se sent vraiment à son aise dans la plus grande prison à ciel ouvert du monde, elle vous répondra sans hésiter que c’est assise derrière sa batterie, là où son talent inné pour les percussions s’est épanoui malgré l’injustice, le malheur et la souffrance qui l’entourent, au cœur d’une société conservatrice où son apparence et sa passion musicale détonnent.
Le pouce levé en signe de victoire, sur elle-même, sur les mentalités, mais aussi sur les dangers permanents qui guettent et font de Gaza, placée sous le joug de la tyrannie israélienne, une ville martyre, la première batteuse de l’enclave palestinienne affiche sa volonté de braver tous les obstacles qui jalonneront sa route.
Sur le chemin qui la mène vers l’école de musique Sayed Darwish et qu’elle emprunte quotidiennement avec un enthousiasme à toute épreuve, cette instrumentiste très prometteuse tente de faire abstraction des jugements à l’emporte-pièce qui lui reprochent de ne pas respecter les traditions, de s’adonner à une activité transgressive, voire « Haram », d’autant plus choquante pour certains que la bande de Gaza subit les affres d’une occupation cruelle et mortifère.
L’oreille musicale de Nana Ashour n’est pas sourde aux critiques qui fusent. Elle perçoit distinctement la forte dissonance que peut générer son goût pour la musique en général, et la batterie en particulier, chez une grande partie de la population.
Soutenue par ses parents qui, impressionnés par sa dextérité et son sens artistique, l’ont toujours encouragée à poursuivre dans cette voie, ainsi que par Ibrahil al-Najjar, 70 ans, le directeur du Conservatoire national Edward Saïd de Gaza qui voit en elle un véritable phénomène, tant l’art de la batterie n’est pas celui qu’affectionnent habituellement les jeunes musiciennes en herbe, Nana Ashour réalise d’autant mieux la chance qu’elle a de jouir de la confiance des siens.
« Je suis très chanceuse que mes parents et d’autres personnes proches croient en mon talent », a-t-elle confié dans un entretien à Middleasteye, pleine de gratitude. « J’ai conscience qu’il est très inhabituel pour des parents à Gaza de permettre à leur fille d’apprendre à jouer de la batterie ou de se rendre seule à une école de musique, mais mes parents me font confiance et j’apprécie leur façon unique de m’élever », a-t-elle ajouté, en précisant que l’autre écueil, et non des moindres, auquel elle se heurte est la pénurie d’instruments de musique et le coût onéreux des équipements de batterie.
Mais qu’à cela ne tienne ! Dès qu’elle se saisit de ses baguettes et commence à taper, en rythme, sur la batterie usagée du Conservatoire national de Gaza, la seule et unique mise à sa disposition pour se perfectionner, tous ses problèmes disparaissent comme par magie. Elle s’accroche alors de plus belle, avec toute la fougue de la jeunesse, à son rêve le plus cher : se produire devant un public.
« Jouer dans un concert, c’est un rêve pour moi », s’est-elle exclamée avec des étoiles plein les yeux, renchérissant : « J’imagine constamment le moment où je me tiendrai sur scène et où je verrai la réaction des gens en me découvrant derrière mon instrument ».
Le doux rêve qui berce les nuits de Nana Achour n’est plus inaccessible, puisque la jeune virtuose de la batterie a entamé ses premières répétitions en vue de se distinguer sur la scène du Centre culturel Al-Mishal, lors du grand événement organisé prochainement par son école de musique.
Alors que les projecteurs seront braqués sur elle pour la première fois de sa vie, nul doute que la seule et unique batteuse de Gaza fera sensation et, qui sait, créera peut-être des vocations. « Je ferai de mon mieux pour rendre mes proches et les habitants de Gaza fiers de moi. J’aimerais également que mon exemple inspire d’autres jeunes filles qui ont, elles aussi, des rêves mais qui y ont renoncé », insiste-t-elle, avant de se remettre à son art musical exigeant qui ne supporte aucune fausse note.

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