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« Pornographie » + « affaire Dreyfus » + « invasion de l’Irak » : c’est l’affaire DSK vue par BHL

Cour des miracles. Alors que l’enquête judiciaire n’est pas encore terminée, Bernard-Henri Lévy fait déjà connaître, jusqu’aux Etats-Unis, sa satisfaction de voir la « baudruche de l’accusation » contre son « ami » Dominique Strauss-Kahn « commencer à se dégonfler ». Florilège.

« Tout ça s’est effondré comme un château de cartes » : depuis la libération de Dominique Strauss-Kahn , Bernard-Henri Lévy exprime sa « grande joie » et salue au passage « la noblesse muette et profonde de cet homme qu’on a essayé de briser mais qui n’a jamais plié » face au « lynchage compatissant des prétendus amis des minorités ». Quant à Nafissatou Diallo, plaignante réduite à son appartenance à une « minorité », elle est à peine évoquée, même si BHL ne semble pas loin de la dépeindre entre les lignes –et sous prétexte de la divulgation de plusieurs mensonges de la jeune femme- comme l’incarnation du mal absolu. Face, évidemment, au martyr DSK, tombé, presque malgré lui, dans un irrésistible guet-apens à caractère sexuel. L’éditorialiste Maureen Dowd du New York Times est plus nuancée : « Quand un prédateur chronique affronte une menteuse chronique, la menteuse sera probablement perdante, même s’il s’agit de la rare fois où elle dit la vérité ». En attendant l’élucidation de l’affaire du Sofitel, un fait, rappelé par la journaliste du Monde Sylvie Kauffmann, sera probablement présent à l’esprit de nombreux électeurs à la prochaine présidentielle : « Il reste le type qui a eu une rencontre sexuelle avec une femme de ménage à midi dans une suite de luxe avant de déjeuner avec sa fille et de prendre l’avion pour rejoindre son épouse. »

Pravda du Flore

Dans sa propre revue -intitulée La Règle du Jeu, BHL se voit rendre un hommage appuyé par l’écrivain Yann Moix  : « J’aimerais que pour une fois, une fois, une seule, alors qu’on cherche à le détruire avec des histoires de philosophe imaginaire dignes des blagues de Carambar, on reconnaisse à Bernard-Henri Lévy le courage intellectuel totalement exceptionnel dont il a fait preuve, tout seul au milieu des “évidences” et de la tornade, pour défendre son ami DSK, non pas au nom de l’amitié, mais au nom de cette présomption d’innocence que la revue La Règle du Jeu a su conserver comme on conserve à l’institut Pasteur les souches les plus rares, comme on préserve dans certaines réserves naturelles, les espèces les plus menacées. Oui, il existe quelque part à Paris un petit laboratoire exigu, indépendant, presque isolé où l’on sait que la dignité humaine est préservée ; que les valeurs sont conservées ; que les droits fondamentaux de l’humanité sont à l’abri. Cette cellule, cette enclave, sans se mettre en avant dans les victoires, a su défendre avant tout le monde des damnés officiels blanchis par tous quelques temps après ».

Et comme si cela ne suffisait pas, l’auteur qui fut également en première ligne pour défendre le cinéaste Roman Polanski –alors détenu en Suisse pour une affaire antérieure de crimes sexuels- conclut sa prose à hauteur des sphères célestes : « Les humiliés, les condamnés d’avance, les supposés ceci, les présumés cela, les innocents, les coupables obligatoires, les salauds évidents, les exclus universels, les bannis instantanés, les victimes qui vont de soi et les suppliciés qui coulent de source doivent savoir qu’il existe cette petite parcelle arrachée au réflexe de la meute et à l’immonde, cette minuscule extraction d’intelligence soustraite à la bêtise du nombre. Cette parcelle, ce noyau, cette petite planète étrange et solide, totalement incorruptible au boucan et aux divers vomis (boucan des juges et vomis des accusateurs) s’appelle La Règle du jeu ». En résumé : loué soit notre seigneur germanopratin Bernard-Henri Lévy.

« Rira bien qui rira le dernier »

Samedi, interrogé sur RTL par Harry Roselmack, BHL a continué son opération de communication, dénonçant les commentateurs –qualifiés de « tricoteurs »- et comparant la plaidoirie de l’avocat de la plaignante– déclamée la veille, à la sortie de l’audience et devant la presse- à un « viol symbolique ». Selon lui, Kenneth Thompson aurait eu tort d’ « évoquer de la manière la plus crue les parties les plus intimes de sa cliente. S’il y a peut-être un viol –symbolique, je vous l’accorde-, il est là », affirme-t-il. Goguenard, BHL entrevoit déjà la conclusion de la saga américaine de DSK : « Rira bien qui rira le dernier ».

Mieux encore : dans une longue tribune publiée samedi par le site américain The Daily Beast, Bernard-Henri Lévy enchaîne les métaphores, comparant les images d’un DSK menotté, ou plus exactement « enchaîné », à de la « pornographie ». Les médias se seraient également rendus coupables de « robespierrisme » à l’encontre du présumé innocent, odieusement traîné vers la « guillotine ». Poussant plus loin la surenchère, BHL n’hésite pas à évoquer aussi l’affaire Dreyfus, non pas pour suggérer que DSK ait été la victime d’un « antisémitisme mondial » mais plus précisément la cible d’une sorte -toute aussi scandaleuse- de racisme social. Enfin, le penseur indigné a recours au peuple irakien dont la souffrance est finalement comparable, estime-t-il, à celle endurée par son ami : « Après l’invention par George Bush du concept de guerre préventive, l’Amérique, sous Cyrus Vance Jr, a peut-être commencé à forger le concept, à peine moins horrible, de la sanction préventive  ». Les millions d’Irakiens blessés, traumatisés ou endeuillés apprécieront leur position, « à peine » au-dessus de DSK, dans l’échelle BHL de l’horreur.

« Vous semblez…avoir cautionné… le viol »

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L’analogie avec l’invasion sans fondement de l’Irak a déjà été employée par le philosophe sous le regard amusé d’une interlocutrice particulière. C’était le 2 juin dernier à Tel Aviv. Invité par une université israélienne à débattre des révolutions arabes avec l’ancien ministre des Affaires étrangères Tzipi Livni, le pourfendeur de Kadhafi –tout droit venu de Libye pour porter à Netanyahu un message présenté comme bienveillant de la part des insurgés– s’est retrouvé soudainement en mauvaise posture. Alors que l’animateur du débat, le journaliste Ethan Bronner du New York Times, s’apprêtait à poser la première question, Tzipi Livni, figure montante de l’opposition à la Knesset, l’a interrompu afin d’interpeller au préalable BHL sur un point visiblement litigieux : son soutien envers DSK. Gênée mais persévérante dans sa volonté de poser le problème, la parlementaire du camp centriste lui a demandé d’éclaircir sa position qui pouvait s’apparenter, selon elle, à une défense tacite du viol. L’intellectuel l’a aussitôt interrompu avant de dérouler une longue tirade : sa seule préoccupation, explique-t-il, serait, au-delà de son amitié pour le couple Strauss-Kahn, le respect de la présomption d’innocence.

Oumma a été le premier média en ligne à dévoiler la bourde à succès de BHL à propos de Pierre/Bernard Cassen, sa métaphore so chic au sujet des « fellations des gouvernants européens aux dictateurs arabes » et la bronca des journalistes américains lors de sa manifestation en faveur de DSK. Aujourd’hui, pour conclure cette saison riche en botulades, nous vous proposons en exclusivité les images de cette séquence édifiante, passée jusqu’alors inaperçue : BHL obligé –en Israël et face au leader de l’opposition- de se justifier de ne pas avoir cautionné, en aucune manière, la pratique du viol.

Un épisode embarrassant pour Bernard-Henri Lévy, l’homme qui s’est toujours vanté de combattre pour « l’égalité des sexes ». Ce fut le cas notamment en 2009 à l’occasion d’un colloque organisé par le Cercle Léon Blum au sujet du « populisme de gauche » : après avoir visé, en le nommant, le géopolitologue et ex-membre du PS Pascal Boniface-récemment l’auteur d’un essai critique à l’endroit du philosophe, BHL a fustigé la « fraction déshonorée » de la gauche qui défend, par exemple, le droit au port du voile. Une pratique religieuse qu’il assimile
 dans une même condamnation- à celui de la burqa.

2011 est d’ores et déjà l’année au cours de laquelle la réputation de Bernard-Henri Lévy a été profondément écornée au niveau mondial. Tourné en dérision chez les Américains, interpellé à Tel Aviv par une figure pourtant modérée de la vie politique : qui l’aurait cru six mois auparavant ? Après la virulence des éditorialistes outre-Atlantique, cet accueil israélien, également inattendu en terrain d’ordinaire favorable au chantre de l’Etat hébreu, esquisse une nouvelle donne : désormais, à l’image des bulles spéculatives, la valeur BHL -même auprès de ses anciens sympathisants- n’est plus à l’abri d’un krach boursier. Il est encore temps de parier à la baisse.

Bernard-Henri Lévy à la « Conférence israélienne du Président », Jérusalem, 21 juin 2011

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