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« Non » au caractère illégitime et antidémocratique de la « Constitution » !

Caractère illégitime de la « Constitution ».

En raison du fort taux d’abstention aux élections parlementaires européennes (+ de 50%), un bilan a été dressé, lors de la déclaration de Lacken, en 1999, afin de remobiliser les électeurs. Ainsi, ont été établis, le « livre vert » proposant une simplification des Traités et Institutions et le « livre blanc », contenant la mise en application du bilan, contenu dans le livre vert. A la suite de ces travaux « savants », il a été décidé de convoquer une « Convention », qui a travaillé, durant 18 mois, sur la rédaction du projet « Constitutionnel », achevé en juin 2003. Interrogeons-nous sur la composition et le rôle de la dite « Convention » ? Elle est composée de 105 membres cooptés, provenant des gouvernements européens, du Parlement et de la Commission européenne, l’UNICE qui est l’équivalent du MEDEF européen. A sa tête, le Présidium (13 membres), le président de la Convention, Giscard D’Estain, nommé par les chefs d’Etat européens, ainsi que le secrétariat (3 membres), ont joué le rôle principal dans l’élaboration du projet « Constitutionnel ». Et, pour masquer ce coup de force, ils ont sollicité l’avis de la « société civile », représentée par un agrégat de personnalités et d’organismes. C’est le cas par exemple de la « Confédération européenne des syndicats (CES) », qui a déclenché la méfiance de la plupart des syndicats français et européens, y compris l’ancien responsable de la « CES » qui vient de se prononcer contre ce projet. Cependant, historiquement, l’élaboration d’une Constitution passe par un processus démocratique et un débat public où le peuple élit ses propres mandataires, au suffrage universel, appelés les Constituants, qui vont travailler à l’élaboration du projet constitutionnel. Or, la Convention qui s’est arrogé le pouvoir constituant, sans mandat public, a enfreint le principe de souveraineté populaire, acquis lors des Révolutions du 18ème siècle, au lendemain de l’abolition de la royauté dont les intérêts se confondaient avec ceux d’une aristocratie. Ce principe est d’ailleurs inscrit dans les préambules de la Constitution française de 1946 et 1958.

Statut de la « Constitution »

Elle accorde une prééminence du droit européen sur le droit national (I-6). C’est la norme juridique suprême. Nous sommes en présence d’un Traité international (448 articles, 36 Protocoles, 2 Annexes et 30 Déclarations) puisqu’il a été signé par des gouvernements, fin juin 2004, à Rome. La partie I contient les définitions, objectifs, compétences de l’UE, les finances, la vie démocratique…, la partie II est constituée par la Charte des droits fondamentaux, la partie III traite les politiques et fonctionnements de l’Union et regroupe les Traités de Rome(1957), Maastricht(1992), Amsterdam(1997), Nice(2000). Remarque : le Traité de Nice, régit l’Union européenne depuis le 1er mai 2004.

Nous pouvons remarquer, par ailleurs qu’Olivier Duhamel, député européen, a publié le livre de la « Constitution » en oubliant volontairement de mettre la partie III, qui est l’une des plus importantes car elle comporte 321 articles économiques !

On appelle aussi cette « Constitution » un « Traité économique d’orientation libérale » ou « Traité économique », qui n’a rien d’une « Constitution » puisque le processus démocratique d’élaboration d’une constitution n’existe pas (pas d’Assemblée constituante) et en plus, la norme supérieure de ce Traité est « la libre circulation des marchandises, des capitaux, des services et des personnes (art I 4, II 51, II 52) », « la concurrence libre et non faussée (art I-3,2,III-69 et III-70) », « une économie sociale de marché hautement compétitive (I-3,3) » : quant aux modalités d’application, elles se trouvent dans la partie (III-18 à III-65) .Ce qui signifie que les droits et libertés fondamentales ne sont garanties que dans la mesure où ils sont soumis à cette règle suprême, c’est-à-dire la « libre circulation ». Historiquement, la Constitution de 1789 instituait comme valeur suprême, les droits et libertés individuels et politiques (première génération de droits comme par exemple la liberté d’expression, de pensée, de culte, de conscience, le droit à la vie…), celle de 1946, les droits économiques et sociaux (deuxième génération, c’est-à-dire le droit à l’éducation, droit au logement, au travail, à la protection sociale, à une pension retraite…).

Cependant, une Constitution n’a pas pour vocation d’établir une politique économique orientée vers le libéralisme avec toute une série de règles à respecter et d’inscrire des choix politiques auxquels on confère une valeur constitutionnelle comme par exemple celui d’arrêter le détail d’une coopération judiciaire et policière (art III-170 à178) qui ne peut resté figée ou celui d’empêcher une limitation du transport routier en croissance exponentielle (III-137). Ainsi, des dizaines d’articles sont figés et ne tiennent pas compte du contexte économique et social, changeant ! Les mots « banque » apparaît 176 fois, « marché » 88 fois, « libéralisation » ou « libéral » 9 fois, « concurrence » ou « concurrentiel » 29 fois, « capitaux » 23 fois, « commerce » 38 fois, « marchandises » 11 fois, « terrorisme » 10 fois, « religion » ou « religieux » 13 fois. Aucun de ces termes, excepté « commerce » 2 fois et « religion » 1 fois ne figurent dans la Constitution française.

Une Constitution ne doit pas prendre partie pour une politique économique. Elle doit se contenter de fixer les règles de fonctionnement des pouvoirs publics.

Elle ne détermine pas les frontières de l’Union européenne.

Une Constitution classique définit le territoire sur lequel elle s’applique. La « Constitution » proposée ne définit pas les frontières de l’Union européenne : « l’Union européenne est ouverte à tous les Etats européens » (art I-1,2 et I-57). Mais, aucune définition n’est donnée de ce qu’est un « Etat européen » ?

Elle n’accorde pas de citoyenneté de résidence.

Dans la continuité du Traité de Maastricht, la « Constitution » crée une Union européenne fonctionnant sur la discrimination, en matière de citoyenneté art (I-10,1). La citoyenneté de résidence est exclue car il faut avoir la citoyenneté d’un Etat membre. Le droit d’asile demeure mais il est défini de manière restrictive. L’immigration, inscrite dans le préambule de la « Constitution », est mise en avant pour ses apports à la civilisation européenne, mais absente du corps du texte ! Elle est abordée sous l’angle de l’utilitarisme libéral : de la main d’œuvre triée en cas de besoin !

Ce transfert de nouvelles attributions des Etats membres à l’UE, aura pour conséquence que les résidents étrangers qui ont obtenus le droit de vote dans certains pays de l’UE, ne pourront plus voter, dans le cadre de l’UE, lors de l’entrée en vigueur du Traité ! Cette décision constitue un véritable mépris à l’égard des tirailleurs algériens, marocains, tunisiens, sénégalais, africains…, qui ont pourtant participé à la libération de l’Europe du joug nazi, pendant la première ou la deuxième guerre mondiale. De plus, ils participent à l’enrichissement économique de leur pays, ils payent leurs impôts et sont tout aussi concernés qu’un autre citoyen par rapport aux politiques sociales, économiques, sanitaires…, mises en place, dans les pays membres où ils résident. C’est scandaleux ! Ce droit qui n’existe pas non plus, en France et, absent de la « Constitution », constitue une raison supplémentaire de ne pas soutenir ce projet.

Il faut se référer également à la partie II sur « le droit de travailler »II-75, alinéas 3, qui constitue une véritable discrimination par rapport aux conditions de travail des citoyens ressortissant européens. Voilà, un sujet de débat lors des prochaines « Assises de l’anticolonialisme », qui aura lieu, en juin 05, à Paris !

Caractère antidémocratique de la « Constitution ».

La Convention européenne des droits de l’homme ne doit pas être opposable à la Charte !

Les acquis sociaux sont constitués par la Déclaration universelle des droits de l’Homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels adoptée en 1966 et rentrée en vigueur en 1976 et les textes de l’Organisation Internationale du Travail (ratifiée par les Etats de l’Union avant élargissement qui a eu lieu le 1er mai 2004 où l’UE est passé de 15 à 25).

La « Constitution » précise que l’UE adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (établie en 1950 par le Conseil de l’Europe et ratifiée par la France en 1974) qui ne crée aucun droit collectif ou social et qui ne doit pas être opposable à la Charte ! Mais, il n’est pas indiqué qu’elle adhère à tous les documents cités ci-dessus ! Le traité n’adhère pas non plus à la Charte sociale européenne, signée à Turin en 1961 et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989. Il ne fait que mentionner ces textes !

D’autre part, le droit au travail, ainsi que l’existence des services d’intérêts généraux, qui étaient reconnus lors de l’adoption de la Charte à Nice, en décembre 2000, ne sont plus reconnus lors de l’intégration de la Charte à la partie 2, en 2004. Remarque : dans le livre blanc, lors de la Déclaration de Lacken, il est précisé que les « services d’intérêts économique généraux » ne peuvent être considérés comme des services publics.

La Charte des droits fondamentaux est donc en retrait par rapport à tous ces textes, ce qui constitue un véritable recul démocratique.

Fonctionnement des Institutions européennes.

La raison d’être d’une constitution réside dans l’organisation des pouvoirs ? C’est l’application du principe de la séparation des pouvoirs (Montesquieu), selon la formule célèbre, « il faut que le pouvoir arrête le pouvoir », afin de lutter contre l’arbitraire du Roi qui détenait le pouvoir législatif, exécutif et judiciaire.

Les Assemblées parlementaires issues du suffrage universel, votent les budgets nationaux, élaborent et votent les lois et contrôlent l’exécutif, représenté par les gouvernements, qui doivent les mettre en œuvre. Le pouvoir judiciaire, indépendant des autres pouvoirs, fait respecter la loi et rend une justice égale pour tous.

L’Europe, c’est une énorme concentration bureaucratique des pouvoirs. C’est un pouvoir quasi absolu que les exécutifs nationaux délèguent pour l’essentiel à une technocratie omnipotente, sans mandat de leurs peuples. La plupart des négociations se déroulent lors des 4 grands Sommets européens qui ont lieu, chaque année.

Au sommet, se trouve le Conseil Européen : il réunit les chefs d’Etat et de gouvernement des 25 pays membres. Il définit, sans mandat des Parlements nationaux, les orientations de l’Union.

En dessous, le Conseil (des Ministres) : 25 ministres issus des gouvernements nationaux. Avant le Traité d’Amsterdam, il était législateur. Aujourd’hui, Il adopte les Directives européennes qui sont des lois supérieures qui doivent s’appliquer à tous les Etats membres (Réformes de le Sécurité sociale et des Retraites (juin 2003 en France), projet Fillon sur l’éducation, la nouvelle Convention médicale de Douste-Blazy, Pacte de Stabilité, Directive Bolkenstein…).

Les délibérations sont secrètes. Le Conseil des Ministres décide et la Commission propose. Ils ne peuvent décider que lorsqu’ils sont ensemble .Ce collège (C.Ministres +Commission) n’est responsable ni devant le Parlement européen ni devant les parlements nationaux. Il sera donc impossible de le sanctionner collectivement.

Le véritable pouvoir est détenu par la Commission. Elle possède seule l’initiative d’élaborer des projets de lois-directives. Elle est le centre du pouvoir technocratique. Elle détient le pouvoir exécutif, législatif et dans certains cas, le pouvoir judiciaire. Elle est donc irresponsable. A titre d’exemple, le Commissaire au commerce est le négociateur unique au nom des 25 Etats dans les négociations à l’OMC et dans toutes les négociations commerciales internationales, le Commissaire à la concurrence qui dispose à la fois des pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires et le Commissaire au marché intérieur (ex Bolkenstein) qui met tout en œuvre pour supprimer les services publics dans toute l’Europe et libéraliser les services. Elle n’est pas soumise au contrôle parlementaire. Elle contrôle le budget des Etats et contrôle les erreurs (c’était déjà dans le Traité de Maastricht), (III,184-2). D’autre part, lorsque les Commissaires parlent de leur pouvoir, ils évitent les mots démocratie et souveraineté populaire, qu’ils considèrent comme dépassées, archaïques. Ils préfèrent utiliser les mots « bonne gouvernance », « partenariat », concertation. Enfin, le président de la Commission sera élu pour un mandat de 2 ans ½.

Le Parlement européen : seule instance issue du suffrage universel, il ne revêt en réalité qu’une apparence démocratique. Les 732 députés qui le composent ne tirent leur légitimité que d’1/3 de l’ensemble de la population européenne (150 millions d’électeurs ont voté, en 2004, sur 350 millions d’inscrits alors que l’UE en comprend 450). Il n’émet que des avis, ne possède pas le pouvoir d’élaborer et voter des lois. Il ne vote pas le Budget de l’Union. De plus, Il n’a aucun pouvoir de contrôle des politiques comme c’est le cas en France avec la possibilité pour le Parlement de renverser le gouvernement et la possibilité du gouvernement de dissoudre le parlement. « Malgré tout », le docteur Abdallah Thomas Milcent qui affirme, dans une tribune du site « Oumma.com », le 20 mai 05 que « le Parlement européen obtient enfin un réel pouvoir » tout en osant qualifier ce « compromis pragmatique ! » de « légère avancée », se trompe littéralement, même s’il reconnaît, paradoxalement que « les aspects démocratiques ne sont venus dans un deuxième temps, comme une sorte de vernis pour repeindre les accords technocratiques préalablement conçus ».

Enfin, son Ministre des affaires étrangères sera élu pour 5 ans.

La source des pouvoirs de l’Union économique et monétaire ne réside pas dans les peuples européens mais sont détenus par les Etats membres qui délèguent à la Commission.

70% des lois-Directives qui s’imposent aux peuples, proviennent de ce monstre bureaucratique ! Cela s’appelle transcrire les directives européennes en lois nationales.

Les pseudos avancées démocratiques.

Le droit de pétition.

Appelé aussi « droit d’initiative citoyenne » (art. I-47,4). Ce « nouveau » droit existe déjà depuis le Traité de Rome. Il a été confirmé dans le Traité de Maastricht. Une commission des pétitions a traité en 2004, 9OO pétitions. Jusqu’à présent, deux signataires suffisaient, seule l’exigence d’un million de signatures est une « avancée ». Mais, recueillir « un million de signatures » en provenance des pays de l’Union n’est qu’une illusion. Il est déjà difficile de réunir un million de signatures et si on y parvient, la requête contenue dans cette pétition devra être conforme à la politique libérale inscrite dans la « Constitution » donc toute initiative est désormais presque impossible ! Nous devons en effet « soumettre une proposition appropriée » pour laquelle « un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins d’application de la Constitution ». Prenons un exemple : Si les pétitionnaires réclament que l’eau ne doit pas être considérée comme une marchandise mais comme un bien commun de l’humanité et qu’en conséquence sa distribution devrait être socialisée et organisée par un service public, une telle démarche serait anticonstitutionnelle car non conforme à la règle suprême de la « Constitution », « libre concurrence sans entrave », dogme intangible et vérité « biblique », sauf pour les missions régaliennes de l’Etat (Armée, Police, Justice).

Enfin, ce droit de pétition sera soumis au « bon plaisir » de la Commission qui en examinera le bien fondé, si elle le veut bien car elle n’a en la matière aucune obligation.

Le militant UMP, Mourad Ghazli, qui affirme, dans une tribune du site « Oumma.com », le 24 avril 05, que « la pétition pour défendre ses idées est une chance extraordinaire vers encore plus de démocratie », se trompe. Même s’il a l’honnêteté de citer l’article I-47,4, ce qui n’est malheureusement pas le cas de la plupart des partisans du « oui », il oublie, en revanche, de commenter l’article qui soumet cette démarche à une conditionnalité quasi-irréalisable.

Il se trompe également en osant affirmer, dans le préambule de son texte, que la « Constitution » proposée, « offre plusieurs garanties, en matière de démocratie et de liberté religieuse ». Cet argument est doublement faux puisque en matière de démocratie, tout est verrouillé et sur le plan religieux, la liberté religieuse remet en question la neutralité de la sphère publique et la liberté de conscience, seul cadre garantissant la paix sociale et le vivre ensemble entre croyants et non croyants. Les citoyens de confession musulmane n’ont pas intérêt, à mon sens à se retrancher derrière ce genre d’argumentaires communautaristes, mais sont plutôt attachés aux principes universels qui régissent la société, et au respect du principe de laïcité, c’est-à-dire la séparation de l’Etat et de la religion.

La transparence du Conseil des Ministres.

La seule véritable nouveauté, c’est que le Conseil des Ministres doit prôner la publicité des séances. Mais, il n’est pas question de permettre au public d’assister aux séances de ce cénacle, où la confusion de l’exécutif et du législatif est à son comble ! En d’autres termes, quand les jeux sont faits, les arrangements conclus, cette instance suprême a l’obligation de publicité, sous condition : « lorsqu’elle agit comme législateur », c’est-à-dire uniquement lorsque la Commission lui soumet des projets de lois qu’elle seule a concocté mais à condition que « l’ordre du jour soit consacré à l’adoption d’une loi » ! Cette obligation de marketing politique n’est en réalité qu’une fausse transparence.

Trois dispositifs renforceraient le pouvoir des parlementaires :

La pseudo-désignation de la Commission, la procédure dite de co-décision entre la Commission et le Parlement européen et la possibilité d’associer les Parlements européens aux décisions de la Commission ?

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La Commission serait sous contrôle ? L’élection du président de la Commission n’est qu’une parodie de démocratie : seule habilitée, la Commission présente un candidat, le Parlement est prié d’entériner. S’il refuse, la Commission peut présenter un autre candidat. Pourtant, il est inscrit (artI-20,1) que « le Parlement élit le président de la Commission » alors que dans l’artI-27,1, ce sont les gouvernements qui choisissent le candidat à la présidence (Une chose et son contraire !). Le président de la Commission, une fois nommée, présente une liste de candidats que les parlementaires peuvent auditionner mais pas choisir ! Ces Commissaires européens ne sont pas issus du suffrage universel. Pourtant, une possibilité existe avec le Parlement européen, issu du S.U., qui aurait pu nommer les Commissaires.

Le Parlement européen disposerait d’un véritable pouvoir de blocage avec la procédure de codécision ? .En réalité, c’est un leurre. Ainsi, le Budget est toujours préparé par la Commission, puis adopté par le Conseil des Ministres, reste au Parlement le droit d’émettre un avis. La Commission possède seule l’initiative des lois (art I26) : « Un acte législatif ne peut être adoptée que sur proposition de la Commission ».

D’autre part, les modifications à apporter à un acte législatif doivent faire l’objet d’un accord entre le Conseil des Ministres et le Parlement. Autrement dit, en cas de désaccord, c’est la crise et la dissolution du Parlement peut être prononcée.

Historiquement, les Assemblées parlementaires ont été crées pour voter les recettes et dépenses, contrôler et limiter le pouvoir éxécutif puis, plus tard, elles ont exercé le pouvoir législatif.

Les parlements nationaux seraient associés aux décisions de la Commission si 1/3 de ces parlements votent, de manière identique, soit 9 pays sur 25 : ils peuvent, en conséquence, obliger la Commission à réexaminer une de ses propositions, lorsque celle-ci concerne une matière pour laquelle s’applique le principe de subsidiarité (art I-11,3), c’est-à-dire les pouvoirs qui sont encore du domaine des parlements nationaux. Si la Commission est obligée de réexaminer un texte, en revanche, elle peut maintenir sa proposition et la faire entériner par le Conseil des Ministres. Finalement, les parlements qui ne peuvent proposer un nouveau texte, n’ont plus qu’à introduire une action en justice devant la Cour de Justice Européenne et on tomberait alors dans un enlisement procédural.

Le vernis démocratique de la gouvernance technocratique ne sert, en réalité qu’à masquer le pouvoir omnipotent de la Commission et ses liens étroits avec les milieux d’affaire. Conclusion : cette « Constitution » n’apporte rien de nouveau par rapport aux Traités antérieurs.

La dictature de la BCE (Banque centrale européenne)

A la différence de la Banque fédérale américaine qui est soumis à un contrôle, la « BCE est indépendante » art.(I-30-3). Elle ne peut recevoir d’instruction de personne et n’a de compte à rendre à personne art.(III-188). Elle dirige la politique monétaire de l’Union. Elle a institué l’Euro (Traité de Maastricht). Théoriquement, elle a pour but de lutter contre l’inflation, mais en réalité, elle maintient volontairement des taux d’inflation faibles afin de favoriser le capital financier et rentier des actions, qui sont subordonnées aux intérêts du capital financier américain  ! D’autre part, l’objectif principal de cette Institution est la politique monétaire et financière tandis que la relance de la croissance et de l’emploi, reste un objectif secondaire !

La « Constitution » sera-t-elle révisable ?

La « Constitution » pourra être modifiée dans l’avenir, nous affirme-t-on, ce qui est bien entendu impossible car sa modification doit requérir l’unanimité (art.IV-443,3) : « les amendements entrent en vigueur après avoir été ratifiés par tous les Etats membres » au terme d’une procédure très lourde faisant appel à la réunion d’une Convention suivie des travaux d’une conférence intergouvernementale !

Enfin, retenons la sagesse des fondateurs de la République, qui, dans le préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen de 1793 ont inscrit : « un peuple a toujours le droit de revoir, de réformer, de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures ».

 

La consanguinité entre les Commissaires et les milieux d’affaires

La Commission est omnipotente et irresponsable et les gouvernements ont abdiqué leur pouvoir. Elle élabore les Directives européennes (« elle a seule l’initiative des lois ») qui s’imposent aux Etats membres, le Conseil des Ministres adopte ces Directives, tandis que le Parlement ne peut émettre que des avis. Remarque : s’il est vrai que la Directive européenne de 1993, appelée OPT-Out, proposant un allongement du temps de travail à 65h au lieu de 48h, vient d’être maintenue à 48 h, après le vote du Parlement européen, le 10 mai 05, en revanche, la Commission qui possède seule l’initiative des lois, n’a aucune obligation de prendre en compte l’avis du Parlement. Cette initiative du Parlement européen, n’aura aucun impact dans l’avenir. Sa seule stratégie consiste à tromper les futurs électeurs européens qui seront amené à voter lors des prochains référendums, par un effet d’annonce, dans le but rassurer les partisans du « non ».

L’autre exemple significatif de l’impuissance des gouvernements européens et du Parlement est celui de la Directive Bolkenstein qui aurait été retirée, nous dit-on, face à la mobilisation du « non » dans l’opinion publique ! Au contraire, un communiqué officiel du Conseil Européen (22/03/05) affirme que « la Directive ne sera pas retirée. C’est la seule Commission qui pourrait le faire…Si la Directive était retirée, nous donnerions l’impression que l’ouverture des services aurait disparu de l’agenda européen » ! Par conséquent, les Politiques nous trompent, d’autant plus qu’elle est inscrite dans le projet de Constitution qui prône « la liberté d’établissement des services », permettant, par exemple à des sociétés françaises de s’installer en Pologne pour envoyer, en France des salariés polonais régis par le droit social polonais (prestations sociales inexistantes…) !!!

 

Concernant le Conseil de l’Europe, voici ce que Philippe Schouthee a déclaré dans le journal, Le Soir (Bruxelles le 29/07/00) : « Nous sommes arrivés à un stade où il adopte des documents qu’il (le Conseil européen) n’a même pas lus. Il faut trouver autre chose… ».

La Commission doit jouer le rôle de gardienne de l’intérêt général et le point culminant de toute l’ hypocrisie mensongère contenue dans ce Traité, réside dans l’article (I 25-1) qui prétend que « la Constitution promeut l’intérêt général » et « qu’elle exerce ses responsabilités en toute indépendance » !!!

Les gouvernements invisibles.

Les institutions financières et économiques internationales.

L’objectif de l’Union économique et monétaire est donc de soumettre les Etats et les peuples à la toute puissance des firmes privées, qui s’organisent, sous forme de groupes de pression pour les rendre plus serviles. D’ailleurs, le « socialiste » Pascal Lamy, désigné par Jacques Delors, confirmé par Strauss-kahn et Lionel Jospin, déclarait : « Nos » Commissaires sont les invités naturels de l’OCDE, l’OMC, la Banque Mondiale, du FMI », organes suprême de la libéralisation de l’économie, de la marchandisation du monde, sous la houlette de l’hyper puissance américaine. Les conséquences, nous les connaissons : casse du service public (décisions prises dans le cadre de l’AGCS au sein de l’OMC), restriction de l’aide public (Pacte de stabilité) dans le domaine économique et social, déréglementation dans tous les domaines, chômage de masse, augmentation de la précarité, de la flexibilité de l’emploi (emplois à bas salaires), hausse des délocalisations…

Les lobbies patronaux et la prétendue « autonomie » de la Commission.

Dans la Constitution, il n’y a aucune incompatibilité entre les fonctions de Commissaires européens et l’adhésion à des réseaux d’influence ou des groupes industriels et financiers de pression. En conséquence, la Commission européenne est le pouvoir exécutif le plus perméable aux milieux d’affaires et aux groupes patronaux avec qui elle entretient des liens incestueux.

Ainsi, on peut trouver : l’ERT, l’UNICE, l’ESF, le TABD, le Bilderberg, la Trilatérale…

L’ERT « table ronde européenne » est un club où les membres sont les dirigeants des 45 firmes européennes les plus importantes (Lafarge, St Gobain, Suez, Vivendi, Siemens, Nestlé, Thyssen Krupp, Volvo, La Lyonnaise des Eaux,…). Réunis, ils pèsent 950 milliards d’Euros de chiffre d’affaire. Leur cible, ce sont les grands décideurs politiques, auxquelles ils ont directement accès à Bruxelles.

1992 : Ils ont Inspirés l’Acte unique, façonné le traité de Maastricht. Ils furent la boîte à penser de Jacques Delors, ancien président de la Commission.

1993 : ils préconisent la destruction des systèmes d’éducation.

1997 : ils demandent la libéralisation des marchés des télécommunications, des transports, de l’énergie, le brevetage du vivant…

2000 : ils appellent à la destruction des systèmes de sécurité sociale, et font l’apologie des fonds de pension.

2002 : ils réclament une Commission forte, dégagée de la règle de l’unanimité pour toutes les matières relevant du commerce.

Ce groupe dit « consultatif » a noué des relations étroites avec l’UNICE et le TABD.

L’UNICE, c’est l’équivalent européen du MEDEF. Il a crée l’ESF qui regroupe 50 firmes transnationales et 36 fédérations européennes travaillant dans le secteur des services (DHL, IBM, Microsoft, Universal Music). Ce groupe veille à ce que « ses intérêts soient entendus, compris, et pris en compte » et veillent aux respects des règles fixées par l’AGCS et l’OMC, en collaboration avec leur équivalent américain.

Le TABD ou Transatlantic Business Dialogue, organe des transnationales, regroupe les PDG des 150 plus importantes entreprises américaines et européennes, formulent des recommandations à la Commission. Ce sont les véritables décideurs avec l’ERT, l’UNICE et l’ESF. Le 29/10 /99, à Berlin, Pascal Lamy, Commissaire européen au commerce de la Commission Prodi, invité à rendre compte, déclare à la tribune du TABD : « Nous ferons ce que nous avons à faire d’autant plus facilement, que de votre côté, vous nous indiquerez vos priorités…Je crois que le monde des affaires doit aussi parler franchement et convaincre que la libéralisation du commerce et en général, la globalisation sont de bonnes choses pour nos peuples ». Le 23 mai 2000 à Bruxelles, il persiste avec plus d’éloquences : « Nous consentons de grands efforts pour mettre en œuvre vos recommandations dans le cadre du partenariat économique transatlantique…Il y a eu des progrès substanciels dans les nombreux domaines sur lesquels vous avez attiré notre attention…En conclusion, nous allons faire notre travail sur la base de vos recommandations ». Ces propos sont presque toujours occultés par les Médias.

D’autres groupes très influents comme le groupe Bilderberg et la Trilatérale fondés successivement par David Rockfeller, qui déclarait le 1 février 99 dans Newsweek International : « Quelque chose doit remplacer les gouvernements et le pouvoir privé me semble l’entité adéquate pour le faire ». Ces clubs regroupent les hommes d’affaires les plus puissants, des banquiers, des décideurs politiques, des universitaires, des journalistes réputés pour leur influence sur l’opinion publique, le secrétaire général de l’OTAN, le directeur général de l’OMC…Le Président de la Commission européenne Romano Prodi a été membre du comité de direction du groupe Bilderberg, Lamy et Monti qui étaient membres de la Commision Prodi ont participé aux réunions du Bilderberg en 2001 et 2003, José Manuel Baroso, le nouveau président de la Commission, était un des invités du groupe Bilderberg en 2003…

Enfin, on peut citer le Comité 133 ou la société du Mont-Pèlerin. Prononcer ces noms dans les débats publics pour le « oui », c’est comme chanter l’Internationale au Parti socialiste ou c’est comme si des filles voilées prenaient la parole à un congrès de l’UFAL ou des Libres Penseurs.

Conclusion

Ce Traité est une gigantesque machine à verrouiller la démocratie et à enfermer la souveraineté populaire. Les stratégies électorales, les logiques d’alliance et les ambitions personnelles brouillent, souvent les débats, devenus trop passionnels.

Le slogan « une autre Europe est possible » suppose que les Etats et les peuples fassent table rase de l’Union économique et monétaire, qui injecte dans la gouvernance technocratique des doses de social, pour mieux nous berner. Les « altereuropéens », s’ils veulent arriver à la construction d’une Europe démocratique, sociale, laïque, une Europe de paix, qui promeut l’amitié entre les peuples, avec une mondialisation au service de l’homme, de l’environnement, et non au service de la performance, de la rentabilité financière ou de la superpuissance américaine, doivent remobiliser les forces sociales pour tenter de renverser ce rapport de force : une autre « Europe est possible » induit inévitablement « un autre monde est possible » et inversement.

Le Roi, « émanation de Dieu sur terre », avait les pouvoirs absolus. Il défendait ses intérêts et les privilèges d’une aristocratie. Nous étions ses sujets. Aujourd’hui, la Commission omnipotente, ne sert pas l’intérêt général, mais profite d’un Système, au service d’une oligarchie usurpatrice, agissant dans l’ombre et qui met sur le même plan, le respect de la dignité de la personne humaine, des critères éthiques, culturels…avec des principes et valeurs économiques (respect de la concurrence, arrêt des monopoles, libre circulation des personnes, des marchandises, des capitaux et des services). Finalement, dans cette vaste zone de libre échange, le « sujet européen » n’est ni plus ni moins qu’une marchandise humaine.

 

Source :

  • « Le grand bond en arrière. Comment l’ordre libéral s’est imposé au monde ». Serge Halimi-ed.Fayard.

  • « Europe, la trahison des élites ». Raoul Marc Jennar- ed.Fayard.

  • “Quand l’Union Européenne tue l’Europe”. 12 questions sur le Traité. R.M.Jennar-URFIG (unité de recherche, de formation et d’information sur la globalisation ». www.urfig.org.

  • « La Constitution européenne, illégitime et antidémocratique ». Gérard Deneux, Président de l’ AES (Amis de l’émancipation sociale) et membre des Amis du Monde Diplo. à Belfort.

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