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New York : la vie d’un chauffeur de taxi musulman à l’heure du Coronavirus

Fidèle au poste, malgré la pandémie de Covid-19 qui s’est abattue sur New York et rôde à présent dans chacune de ses artères, Hassan Iqbal, 52 ans, contemple derrière le pare-brise de sa voiture le paysage irréel qui s’offre à ses yeux. Celui, presque fantomatique, d’une métropole désertée par ses millions d’habitants, d’une cité trépidante plongée subitement dans une profonde torpeur.

Bravant le virus planétaire qui, tel le plus grand des périls, plane désormais sur Big Apple et le guette à chaque coin de rue, ce chauffeur de taxi pakistanais se désole de voir la ville dont il connaît les moindres recoins transformée en no man’s land.

« Il n’y a pratiquement plus de travail. Les seules personnes que je transporte vont soit chez le médecin, soit dans une grande surface. Elles se font rares. La ville est vide », soupire-t-il, en laissant transparaître son inquiétude face à l’avenir. Une inquiétude que les sombres prédictions du maire de New York, Bill de Blasio, pour les mois d’avril-mai, ont récemment accentuée. « La situation ne va qu’empirer », a averti avec gravité le premier magistrat de la cité, en fustigeant au passage la gestion de la crise sanitaire par Donald Trump.

Doublement accablé, devant l’effrayante propagation du Coronavirus et sous le poids des factures qui ne connaissent aucune trêve, Hassan Iqbal ne peut pas se permettre le luxe de rester chez lui, auprès de son épouse qu’il sait pourtant transie de peur. Alors, tous les matins, après avoir tenté de rassurer sa moitié et sans rien montrer de sa propre anxiété, il n’a d’autre choix que de monter à bord de son véhicule en quête de clients qui se font de plus en plus rares.

« Je suis terrifiée. Il y a tellement de types de personnes différentes qui prennent place dans son taxi. Et si elles étaient porteuses du virus ? », se tourmente son épouse, renchérissant : « Je sais qu’il n’a pas peur de tomber malade et qu’il prend toutes les précautions nécessaires pour qu’on ne le soit pas non plus. Il dit toujours qu’il fera tout pour ses enfants ».

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Arrivé de son Pakistan natal sur le sol américain en 1991, Hassan Iqbal sillonne depuis plus de 23 ans, 7 jours sur 7, l’une des cités les plus cosmopolites au monde, sans jamais avoir lâché son volant, même après le 11 septembre, quand il ne faisait pas bon être musulman sous l’ère Bush de triste mémoire. Il n’a jamais jeté l’éponge, même quand les insultes, les menaces ou les crachats pleuvaient sur lui. Lui qui rêvait d’être ingénieur avant de s’exiler loin de son pays, de sa capitale Lahore et des siens, il n’a jamais pu se résoudre à rentrer sa voiture au garage, même au paroxysme de la haine anti-musulmans.

Alors, comment pourrait-il renoncer aujourd’hui, ne serait-ce que temporairement, à exercer un métier qui s’est imposé à lui par obligation, et qui s’avère toujours aussi nécessaire pour assurer la subsistance de sa famille ?

Bien sûr, Hassan Iqbal se conforme rigoureusement aux nouvelles règles de sécurité édictées par la municipalité. Il est également pleinement conscient des risques qu’il court en s’aventurant dehors, dans une cité new-yorkaise où le Covid-19 redouble de virulence. Mais il doit absolument gagner son pain. « Les factures ne vont pas s’arrêter. Nous devrons toujours payer le loyer. Je ne sais pas comment je vais faire. Les chauffeurs de taxi ont besoin d’aide et la ville doit faire quelque chose pour nous », exhorte-t-il, en poussant un cri du cœur.

Avant de remonter dans son taxi et de traverser une métropole méconnaissable, sa confiance indéfectible en la miséricorde divine a heureusement repris le dessus : « Je suis vraiment très inquiet. Mais je m’en remets totalement à Allah, l’Omniscient et le Très-Miséricordieux ».

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