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Le cessez-le-feu à Gaza est une victoire de la résistance palestinienne

L’entrée en vigueur de l’Accord de cessez-le-feu entre le gouvernement israélien et le mouvement palestinien Jihad islamique à Gaza soulagera avant tout la population civile, qui vient de vivre ces trois derniers jours les affres d’une agression sauvage.

Et même s’il reste précaire et ne règle en rien le fond du problème, qui réside dans la perpétuation d’un blocus qui dure depuis 15 ans, lequel représente l’autre face de l’occupation à laquelle fait face le peuple palestinien depuis plus de 70 ans, ce cessez-le-feu constitue une victoire pour la résistance palestinienne, si on le met en perspective avec les conditions de la lutte de libération nationale du peuple palestinien dans une conjoncture géostratégique défavorable.

Commentant à chaud l’entrée en vigueur du cessez-le-feu à Gaza sur la chaîne Al Jazeera, Mustapha Berghouti, secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne à Ramallah, a expliqué pourquoi, selon lui, il s’agit indiscutablement d’une victoire de la résistance palestinienne et d’un échec de l’agresseur israélien. Il se fonde sur cinq arguments :

1) – le gouvernement israélien a échoué dans son entreprise de diviser et séparer la Cisjordanie en partie occupée de la bande de Gaza sous blocus ;

2) – le gouvernement israélien a échoué dans son projet perfide visant à diviser les différentes fractions de la résistance à Gaza, en feignant de cibler exclusivement le Jihad islamique ;

3) – le gouvernement israélien a échoué dans son effort en vue d’arriver à une victoire militaire qui ferait oublier la défaite de la bataille d’Al Qods de l’année dernière ;

4) – le gouvernement israélien a échoué dans sa guerre de communication, puisqu’il n’est pas arrivé à cacher aux yeux de l’opinion internationale ses crimes de guerre (la majorité des 44 martyrs tombés à Gaza étaient des civils et la moitié est constituée de femmes et d’enfants) ;

5) – le gouvernement israélien a échoué dans son plan visant à exploiter sa guerre contre Gaza dans le cadre de la prochaine bataille électorale, dans la mesure où il faut s’attendre à un retournement des médias israéliens contre un gouvernement incapable d’assurer la sécurité des colonies dans le périmètre avoisinant la bande de Gaza.

Le diagnostic du leader palestinien paraît optimiste à bien des égards et, pourtant, il est d’une lucidité imparable. Pour s’en convaincre, il suffit de reposer la question sous un autre angle. Pourquoi Israël s’est lancé dans cette agression préméditée qu’il appelle « guerre préventive » et pourquoi a-t-il décidé d’accepter de l’arrêter après trois jours, alors que le Ministère de la Défense nationale israélien a bien précisé qu’elle pourrait durer au moins une semaine ?

L’argument fallacieux auquel recourt la propagande de guerre israélienne, suivant lequel l’armée israélienne a réussi à neutraliser les chefs militaires du mouvement Jihad islamique, ne tient pas la route pour la simple et bonne raison que l’élimination de Al Jaabari et Khaled Mansour ne signifie pas que l’appareil militaire des Brigades d’Al Qods (la branche militaire du Jihad islamique) soit neutralisé.

Pour comprendre l’importance de la victoire enregistrée par la résistance palestinienne, il faut revenir aux paramètres politiques et diplomatiques qui dictaient aussi bien le déclenchement de l’agression israélienne que sa fin. L’agression israélienne n’a pas commencé le premier jour des bombardements, c’est-à-dire le vendredi 5 août, mais bien le 1er août, le jour où les services de sécurité israéliens ont arrêté au cours d’un raid meurtrier le dirigeant du Jihad islamique à Jenine, Bassam Al Saadi.

Ce dernier était connu essentiellement pour son attachement à une ligne politique unitaire, fondée notamment sur l’unité d’action de l’ensemble des fractions palestiniennes sur le terrain, par-delà leurs différences idéologiques et politiques. Concrètement, cette ligne signifiait l’attachement primordial à l’unité entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, malgré la division politico-administrative encouragée par l’occupant et l’unité d’action entre les différentes fractions de la résistance palestinienne, en particulier entre le Fatah d’un côté, et les deux principales organisations islamiques (le Hamas et le Jihad) de l’autre.

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L’unité de ces fractions ne saurait se réaliser sans un travail diplomatique patient et intelligent en direction des différentes puissances régionales, qui soutiennent chacune une ou plusieurs fractions à l’exclusion d’autres, en vue de rapprocher leurs positions et de sortir avec une plateforme minimale capable de préserver de manière réaliste ce qui est essentiel à préserver dans la conjoncture internationale et régionale actuelle, sans compromettre la perspective d’avenir qui doit rester axée sur le recouvrement des droits nationaux inaliénables du peuple palestinien.

En décidant de frapper le Jihad islamique et en menaçant d’élargir la guerre si le Hamas se mêlait de cette guerre, Israël voulait faire d’une pierre plusieurs coups. D’une part, affaiblir le mouvement considéré, à tort ou à raison, comme le bras de l’Iran en Palestine et se positionner ainsi anticipativement dans une éventuelle guerre contre l’adversaire régional par excellence, ce qui pourrait permettre à Israël d’engranger des dividendes stratégiques non négligeables à la fois auprès de son allié américain et auprès de ses nouveaux alliés du Golfe.

Mais en s’attaquant au Jihad islamique sans toucher au potentiel de son allié sur le terrain, le Hamas, Israël cherche à la fois à diviser ces deux mouvements, comme il tente de le faire depuis des années entre le Fatah et le Hamas, et à gagner les faveurs des sponsors régionaux du Hamas (Turquie, Qatar). L’intelligence des dirigeants des différentes fractions palestiniennes, qui vient s’ajouter aux pressions de la rue palestinienne en faveur de l’unité, a fait voler en éclats la perfidie des dirigeants israéliens.

En apparence, seules les brigades d’Al Qods ont participé à la riposte palestinienne à l’agression israélienne, mais dans les faits, cette résistance solitaire s’avère, si on regarde les choses de plus près, une option tactique intelligente choisie en connaissance de cause par les dirigeants des différentes fractions présentes au sein de la chambre d’opérations commune mise en place depuis plusieurs années à Gaza.

La principale victoire à mettre à l’actif de la résistance multiforme et admirable du peuple palestinien est la suivante : aucune fraction palestinienne ne peut aujourd’hui se dédouaner de la résistance d’une autre fraction, ni même de l’Iran, dans sa confrontation internationale et régionale contre l’impérialisme américain et ses alliés régionaux, avec à leur tête Israël, sans risquer un discrédit total auprès de l’opinion publique palestinienne.

Mieux, Israël a été obligé de négocier un cessez-le-feu avec une organisation qu’il taxe de « terroriste » et ce, par l’intermédiaire d’un Etat auquel il ne fait pas confiance, quoiqu’en disent les apparences (l’Egypte) et d’un autre Etat qui refuse jusqu’à aujourd’hui la normalisation, même s’il a des contacts avec Israël et qui soutient ouvertement le Hamas (le Qatar).

Ce qui est souligné pour Israël est aussi valable pour l’Administration américaine qui n’est pas à une contradiction près. Elle soutient publiquement « le droit d’Israël à se défendre contre les organisations terroristes qui tuent les civils », mais se croit obligé d’inviter son allié à enquêter le moment voulu sur les causes qui sont derrière les victimes civiles innocentes.

Il est clair que le cessez-le-feu à Gaza, signé avec une organisation « terroriste », n’aurait pas été possible sans le soutien tacite des Américains qui ont fait pression dans ce sens sur leurs trois alliés régionaux (Israël, Egypte, Qatar). Il ne serait pas étonnant,  même si cela reste improbable, que même un pays comme l’Iran ait pu être sollicité en vue d’éviter un embrasement généralisé que, visiblement, aucun des protagonistes ne souhaite pour le moment.

Mais au-delà de tous ces éléments politiques et diplomatiques, qui se mêlent au fil inextricable du Grand Jeu auquel fait face la région du Moyen-Orient pour des raisons géopolitiques évidentes que la nouvelle guerre énergétique ne fait que renforcer, Israël pèche et continuera de pécher par un aveuglement congénital inséparable de sa nature profondément colonialiste et raciste.

Seul un aveuglement sans limites peut expliquer qu’un Etat bénéficiant de tant d’intelligences et de ressources locales et internationales reste néanmoins incapable d’entrer dans un processus de paix sérieux, et de comprendre qu’aucun peuple ne pourrait accepter indéfiniment la domination.

A plus forte raison lorsqu’il s’agit d’un peuple dont l’imaginaire plonge ses racines dans une histoire millénaire, dans laquelle les défaites momentanées ont appris aux générations qui se succèdent non pas la résignation, mais la patience, la résistance et l’espérance qui se nourrissent de la foi qui soulève les montagnes (y compris les montagnes d’argent sale accumulé dans les bourses de New York, Londres et d’ailleurs), surtout quand il s’agit de la foi en en un Dieu synonyme d’Al Haq (Justice).

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Un commentaire

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  1. Salam, à la place de ce titre qui contient le mot “victoire”, j’eus mieux aimé le vocable “succès”. Alors c’est vrai que la compréhension Islamique de la “victoire” commence au seul fait de ne pas fléchir dans sa volonté, le prophète fut qualifié de “victorieux” alors qu’il fuyait la Mekke, fugitif mais victorieux, non pour avoir échappé au meurtre qu’on préparait, mais plus profondément pour n’avoir pas fléchi dans sa volonté.

    Mais cette compréhension Islamique ne va pas avec un article en fait d’actualité. Les considérations diplômatiques qu’on peut y lire suggèrent tout juste que les Etats-Unis ne veulent pas enflammer le Moyen-Orient en un temps où ils ont d’autres occupations et d’autres fronts, ce qui laisse augurer qu’ils laisseront l’état Sioniste faire ce que bon lui semble des pays et peuples de la région s’ils sortaient de leurs situations extérieures et intérieures également et retrouvaient meilleure confiance en eux-mêmes. Ceci est peut-être une circonstance provisoire de succès, mais pas de victoire. S’il y a un élément de victoire, c’est la grande difficulté qu’éprouve l’entité Sioniste dans ses tentatives de détruire et anéantir le chétif potentiel militaire des gens de Filastine. Cet échec, peut-être durable, empêche l’entité Sioniste de procéder aux déportations contractées avec certains gouvernements Arabes, vers l’égypte et la Jordanie, les fameux accords dits d’Abraham le prévoient, c’est sur cette base que le premier vizir de l’entité Sioniste a menacé les gens de Filastine d’une nouvelle nakba, d’une nouvelle déportation, massive. Cet élément purement militaire est le seul élément de victoire, et bien sûr, les gens de Filastine ne fléchissent pas dans leur désir de résistance pour vivre sur leurs terres dans la liberté et la dignité.

    Mais on doit parler de défaite s’agissant du chancre Saoudiste, enfin, les monarchies qui ont contracté et disposé et agréé une nouvelle nakba, que la honte les engloutisse.

    Croissant de lune.

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