in ,

La gestion des rapports de domination

Ce samedi 28 mai 2005, le CMF organise une conférence avec Tariq Ramadan, Bernard Dreano et Karim azouz sur la thématique « la gestion des rapports de domination – De la compréhension du Tawhid à un Projet de Société égalitaire », dont les renseignements vous sont communiqués ci-après. En attendant de pouvoir échanger tous ensemble, voici une contribution au débat.

1/ La théorie de la domination

Depuis toujours l’Homme exerce une volonté de domination sur son prochain, l’exemple d’Abel et de Caïn, pères de l’humanité en est la parfaite illustration. Tous les moyens ont été utilisés en tout temps et en toutes contrées afin de réaliser cette idée de superpuissance. Des plus simples complots aux puissantes hiérarchies, tout fut mis en place pour une simple chose : Prendre le pouvoir et le garder en asservissant les pauvres et autres « classes » inférieurs. D’où vient cette détermination et pour quelles raisons ?

Les mystiques musulmans de la première génération rappelaient que l’une des raisons de cette volonté de pouvoir s’explique par ce sentiment inhérent à chaque créature, ce sentiment d’amour propre qui pousse chaque être à se concentrer instinctivement sur ses intérêts. Cet égocentrisme engendre chez l’humain une volonté de dominer tout ce qui l’entoure, comme si cela lui permettait de garantir son émancipation, sa centralité, ou simplement sa survie.

L’objectif de ce texte n’étant pas d’analyser les natures de chacune des postures, mais davantage de démontrer que ces attitudes sont intrinsèques à l’humanité et qu’elles engendrent nécessairement des luttes. L’idée de domination détermine les relations de certaines créatures par rapports à d’autres, l’une des parties tentera indubitablement d’imposer son point de vue, sa pensée, sa force…. C’est ainsi que la contrainte permettant d’assujettir l’autre est devenu un outil « normal » qui prit des formes très diverses allant parfois jusqu’à l’acceptation de l’idée d’une certaine violence.

L’histoire démontre d’ailleurs que l’Homme a utilisé les moyens les plus abjects et les plus inattendus pour asseoir sa maîtrise. Il ira jusqu’à légaliser sa posture comme l’illustre la terminologie du droit romain qui révèle parfaitement cette volonté d’institutionnaliser la domination en qualifiant la propriété du sol de « dominium » et celle de l’esclave de « potestas dominica ».

L’Europe, en particulier, produisit et continue de produire ces luttes. Dès, le début du XVIème siècle, les invasions coloniales de l’Espagne et du Portugal émanaient d’une volonté de suprématie qui engendra sur son propre sol la Reconquista. N’oublions jamais, que cette dernière fut construite sur une idée de classification des races, où juifs et musulmans étaient considérés comme des castes inférieures.

Le phénomène se perpétua sous diverses formes ; des conquêtes africaines et asiatiques avec l’instauration de l’indigénat, au massacre de populations indiennes en Amériques du Sud, en passant par les multiples guerres et autres subterfuges politico-religieux opérés par les dictats européen leurs permettant de maîtriser les populations en leur faisant croire que les rois et autres dirigeants pouvaient posséder une vérité absolue et solennelle.

Ainsi, s’imposaient sur les peuples une culture et une vision du monde permettant à une minorité de contrôler la majorité.

Toutes ces relations se sont perpétuées jusqu’à produire en ce XXème siècle, les pires génocides gravés dans l’histoire, des guerres mondiales aux évènements bosniaques.

2/ L’idée de résistance ou de séparation des pouvoirs

Ce processus de supériorité a continuellement produit des regroupements par caste, race, classe… de ceux qui pouvaient se reconnaître au travers d’une identité commune. Hérodote déjà appelait à combattre les « barbares » qui ne parlaient pas le grec. La volonté humaine de domination se traduit aussi par des positions politique et sociale.

La réalisation de cette domination culturelle, économique, sociale et politique produit très logiquement une contre identité ou une « contre-culture » pour reprendre la définition d’Edouard Saïd, dont l’objectif est avant tout de se libérer et de résister à cette volonté de mise sous tutelle.

Hors, d’un point de vue islamique cette problématique est très clairement définie. En effet, le sens premier de « Il n’est d’autre divinité qu’Allah » nous enseigne avant même la reconnaissance d’Allah, la libération de toute emprise et de toute domination par les Hommes. C’est ainsi qu’un des principes en Islam est la répartition des pouvoirs afin qu’aucun être humain (ou être de cœur qui reste limiter par ses passions et qui pourrait abuser de son autorité) ne puisse exercer un pouvoir absolu et exclusif. D’où la recommandation coranique « Et il leur est ordonné la concertation (shura) entre eux » qui fut parfaitement interprétée par les savants musulmans des 1ère générations (à l’exemple de l’Imam Malik…) qui ont tout fait pour séparer les ordres exécutifs et législatifs parfois au détriment de leur vie.

Ce principe universel de la séparation des pouvoirs est d’ailleurs prévu dans la majorité des constitutions aujourd’hui.

Toutefois, malgré ces avancées légales, que nous trouvons déjà dans la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 et en particuliers dans l’article 2 « Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression », le colonialisme et les dictatures persistent.

La position d’Israël face aux Palestiniens, des Etats-Unis face à l’Irak, de la Russie face aux tchétchènes ou de l’OTAN face aux tiers-monde démontre que ce que nous vivons au quotidien au travers des relations hommes femmes, employeurs salariés, institutions étatiques sociétés civiles n’est finalement que le prolongement de toutes ces luttes sous d’autres formes.

Ainsi, la liberté et les droits ne suffisent pas à créer un équilibre. Les rapports de résistance ou de contre pouvoirs sont donc nécessaires mais insuffisants. D’autres principes conditionnent la réalisation de cette égalité fondamentale. Habermas affirmait d’ailleurs ce principe lorsqu’il écrivait “La libération de la faim et de la misère ne coïncide pas nécessairement avec la libération de la servitude et de l’humiliation, car l’évolution du travail et celle de l’interaction ne sont pas automatiquement liées”. Autrement exprimé, il ne peut y avoir de contrôle des rapports de domination sans justice sociale.

3/ L’Universalisme

L’objectif est donc de maîtriser collectivement ces rapports de domination par le biais de contre pouvoirs et par la réalisation d’une justice sociale. Toutefois, les concepts de contre culture ou de contre identité peuvent engendrer d’autres luttes s’ils ne s’insèrent pas dans une logique universaliste.

Publicité
Publicité
Publicité

En effet, nul ne peut contester historiquement et idéologiquement la nécessité pour les communautés dominées de procéder à un repli leur permettant de tirer la force nécessaire à la préservation de leurs cultures, voire de leurs vies. Lorsque Bourdieu explique les mécanismes du colonialisme, il démontre parfaitement qu’assimilation et intégration peuvent apparaître comme opposées, mais que les deux sont un danger d’ordre identitaire que ce soit sur le plan légal comme sur le plan culturel.

Mohamed Iqbal clarifia cette posture par une analyse d’ordre spirituelle, lorsqu’il analysa la quête de sens entrepris par l’Homme. Ce processus se traduit en islam par trois phases :

La première étant représentée par la pratique des cinq piliers qui symbolise la nécessaire rigueur dans cette recherche de la vérité. Phase de simple suivisme et d’apprentissage de l’exigence par l’amour.

Puis l’Homme entreprend un voyage par lequel il se concentre sur lui-même, sur son intimité, sur la compréhension de cette nécessaire rigueur. Il développe une intelligence d’ordre psychologique lui permettant de se lire et de lire différemment le monde.

Enfin, il finira par y trouver ce que le Prophète (PBSL) appelle al fitra, cette part de vérité que Dieu a mis en chaque être. Cette vérité étant un dépôt confié par Dieu à l’Homme, ce repli face aux humains va se transformer en une responsabilité désintéressée face à ces derniers.

Il ne s’agit donc plus de maîtriser l’autre, mais plutôt de se maîtriser soi-même par le biais d’une éducation conduisant l’homme à se réapproprier la Vérité et la connaissance accordées par Dieu à chaque être humain, afin de servir les hommes pour Dieu.

Certes ce repli doit s’opérer, mais il doit se construire à travers un projet universaliste et non de renversement des rapports de pouvoir. Sans quoi, le dominé en devenant dominant, ne remporterait pas son combat, mais finirait simplement par devenir dominé de son propre ego. Hors, nous savons tous combien il est plus difficile d’être clairvoyant et critique face à sa propre personne ou communauté que face à une autorité extérieure.

 

Le Collectif des musulmans de France
vous invite à une rencontre autour du thème,
« La gestion des rapports de domination »
De la compréhension du Tawhid à un Projet de Société égalitaire

avec la participation de

Bernard Dreano, Karim Azouz
et Tariq Ramadan

 

Le samedi 28 mai 2005 dès 14H00

Salle LSC Scandinavie

144 ave Président Wilson 93210 Saint Denis La Plaine

( RER D ou B : Stade de France – Bus 153 ou 302 Eglise de la Plaine)

P.A.F : 5 euros

Pour toutes informations,

vous pouvez nous contacter au 06 22 58 36 81

Ou par email [email protected]

Publicité
Publicité
Publicité

Laisser un commentaire

Chargement…

0

Assez de mensonges israéliens ! Retrait de tous les territoires occupés

Musulmane, citoyenne et européenne, je voterai NON