Les Palestiniens des territoires occupés ont salué la décision de leurs frères vivant en Israël, de former une liste commune pour les élections prévues en mars.
Les caricaturistes talentueux peuvent résumer des questions majeures dans un dessin simple. Comme le caricaturiste palestinien Khalil Abou Arafeh, qui a résumé l’accueil chaleureux réservé par les Palestiniens à la liste commune des citoyens palestiniens d’Israël dans le cadre des élections législatives israéliennes prévues le 17 mars. Dans une caricature datée du 24 janvier, le dessinateur représente Ayman Odeh, tête de la liste commune arabe, qui déclare : « Nous restons ici ». À côté de lui, trois candidats israéliens (Isaac Herzog, Tzipi Livni et Benjamin Netanyahou) s’interrogent au sujet de cette liste arabe : « D’où sont-ils venus ? ».
Le succès sans précédent qu’est l’approbation d’une liste commune par les Palestiniens d’Israël pourrait en fait aboutir à la formation du quatrième plus grand bloc parmi les 120 membres de la Knesset si l’opinion publique se reflète dans les votes. Les Palestiniens des territoires occupés ont en général salué l’unité de leurs compatriotes d’Israël et certains dirigeants de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) se sont même arrogé en partie le mérite de la formation de cette liste. Au cours d’un entretien téléphonique avec Al-Monitor, Yasser Abd Rabbo, secrétaire général du comité exécutif de l’OLP, a exprimé sa fierté quant à la participation de l’OLP à la constitution de la liste commune.
« Nous ne cachons pas le fait que nous avons soutenu cette démarche vers l’unité depuis le début, a-t-il commenté. Nous sommes toujours en faveur de l’unité sur la base de l’identité nationale commune du peuple palestinien et face au racisme dont est victime la population arabe en Israël. » Yasser Abd Rabbo a expliqué que l’OLP soutient l’unité des Palestiniens partout pour les mêmes raisons objectives et nationales et comprend la nature spécifique et les défis des différentes communautés.
Il a rejeté l’idée selon laquelle le fait que l’OLP encourage la formation d’une liste commune serait motivé par les négociations israélo-palestiniennes à venir. Selon lui, c’est une « simplification superficielle » d’une situation compliquée. « Nous soutenons bien évidemment leur unité contre les racistes de droite, mais ce désir ne provient pas d’un point de vue égoïste », a indiqué Yasser Abd Rabbo. Le responsable de l’OLP a néanmoins souligné que les Palestiniens aspirent à la paix et seraient heureux qu’« un véritable partenaire pour la paix » émerge des élections.
Mohammed Masharqa, attaché culturel à la mission palestinienne à Londres, considère la liste commune comme étant le reflet du « génie » de l’esprit palestinien. Selon lui, la décision de quatre partis d’idéologies différentes de s’unir sur une liste unique reflète l’ampleur de l’actuelle « folie » idéologique en Israël envers les citoyens arabes palestiniens.
Masharqa a expliqué à Al-Monitor qu’un certain nombre de hauts responsables palestiniens avaient encouragé l’effort d’unification. Il a souligné en exemple le rôle qu’a joué Tawfik Tirawi, ancien chef des services de renseignement palestiniens, pour convaincre Ahmed Tibi, ancien conseiller du chef de l’OLP Yasser Arafat, d’accepter la liste commune malgré les inconvénients possibles pour son parti.
La liste commune arabe n’a bien sûr pas été accueillie avec enthousiasme. Ali Qaraqe, comédien et satiriste de la région de Bethléem, a indiqué à Al-Monitor qu’il s’oppose aux politiques destinées à essayer d’embellir les pratiques d’occupation israéliennes. Abdallah Awad, militant politique, s’est dit inquiet du fait qu’en marquant l’unité des Arabes, la liste commune arabe ne fasse qu’exacerber la situation en poussant les Israéliens à réagir et à chercher à renforcer le caractère juif d’Israël.
Jamal Zakout, porte-parole de l’ancien Premier ministre palestinien Salam Fayyad, a déclaré à Al-Monitor que la nouvelle liste aura des rôles multiples. « Il est vrai que l’unité est le fruit de craintes existentielles des racistes de droite en Israël, mais cela ne doit pas stopper les efforts pour créer des impacts positifs sur le public israélien en général. »
Selon Jamal Zakout, qui dirige désormais le Centre Al-Ard pour les politiques publiques, « Ayman Odeh [candidat n° 1 de la liste commune] fait face à un défi difficile, à savoir sortir de l’isolement et s’engager avec le public israélien ». Zakout estime que même si les citoyens palestiniens d’Israël veulent renverser les politiques de droite, ils doivent en même temps afficher leur soutien pour l’égalité des citoyens et pour le processus de paix.
Le soutien à la liste arabe commune est né de divers cercles. Le révérend Mitri Raheb, pasteur à l’Église luthérienne de Bethléem, a indiqué à Al-Monitor qu’il se félicite de la formation de cette liste. « Il est peut-être impossible pour un grand bloc arabe unifié d’entrer dans un futur gouvernement ; toutefois, celui-ci sera au moins en mesure de bloquer la formation rapide d’une coalition au pouvoir. »
La plupart des Palestiniens considèrent cet accord pour une liste commune comme une percée née des dangers qui menacent la minorité arabe en Israël. Ceux qui ont été contactés par Al-Monitor espèrent que les bonnes nouvelles en provenance de Nazareth pourront se propager à travers les communautés palestiniennes. Selon eux, les dangers auxquels le peuple palestinien fait face sont similaires ; la réponse à ces défis devrait ainsi passer par l’unité.
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