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Antoine Menusier : « L’antisémitisme arabo-musulman ? Il existe mais il ne progresse pas »

« Le livre des indésirés », que publie Antoine Menusier, ancien du Bondy Blog, vient remettre les pendules à l’heure après l’agression verbale dont a été victime Alain Finkielkraut. La majorité des musulmans ne sont pas antisémites.  
Les images sont passées en boucle sur toutes les chaînes de télévision. Alain Finkielkraut insulté dans la rue par des gilets jaunes. « T’es un haineux et tu vas mourir. Tu vas aller en enfer », « Barre-toi, sale sioniste de merde », « Rentre chez toi à Tel Aviv ». Des invectives lancées par des militants de la cause palestinienne qui amalgament antisionisme et antisémitisme. Cette scène désolante n’atteste-t-elle pas de la poussée de l’antisémitisme chez les musulmans en France, portée par l’islam politique ? Des musulmans qui ne sont pas Charlie, qui ne seraient pas insensibles au Parti des indigènes de la République, qui applaudissent Alain Soral et Dieudonné.   
Hasard du calendrier, « Le livre des indésirés », d’Antoine Menusier, sorti en février, évoque dans ses premières pages « Maître Dieudo », sa fameuse « quenelle », et les musulmans qui le plébiscitent. Pour eux son discours « recoupait opportunément celui de la lutte contre les inégalités et la domination “americano-sioniste“ incarnée par Israël et sa grande sœur new-yorkaise » (*). L’auteur reconnaît qu’entre la fin des années 1990 et janvier 2015, « il était impossible de quitter certaines mosquées en ayant une bonne opinion des juifs. Des pics d’antisémitisme avaient été atteints lors de la seconde Intifada, puis é la suite de l’opération militaire israélienne “Plomb durci“ à Gaza, fin 2008, début 2009 », écrit l’ancien rédacteur en chef du Bondy Blog, ce média en ligne créé en 2005 pour être la voix des quartiers sensibles.  
Le genou de Nabil Fekir                  
« On ne peut pas nier l’impact “dieudo-soraliste“ sur certains musulmans. L’islamiste qui a insulté Finkielkraut est apparemment dans cette mouvance. Mais il n’est pas pour autant représentatif de la communauté. Pour la majorité des musulmans en France, le curseur, c’est la paix civile. J’ai constaté un net changement après les attentats de 2015. Ils ont refroidi les ardeurs de certains. Au printemps dernier, Nabil Ennasri a tenté de mobiliser sur la Palestine avec la commémoration sanglante de la Nakba, mais ça n’a pas pris », constate Antoine Menusier. Comme son titre l’indique, « Le livre des indésirés » ne dit surtout pas que tout va bien. Mais il tente, à l’aide de multiples petits portraits, de de description de situations, d’anecdotes, de montrer que la grande majorité des musulmans, même s’ils ne se sont pas forcément sentis désirés en France, s’intègre, s’adapte, et souhaite que les choses s’améliorent. En clair, ils ne jettent pas d’huile sur le feu. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’ils se résignent, qu’ils deviendraient “moins“ musulmans.  
Le sujet n’est pas facile à traiter. C’est un ouvrage courageux, original, publié au Cerf, une maison d’éditions chrétienne. Il doit se lire par petites doses. Comme l’histoire de Nabil Fekir, jeune attaquant vedette de l’OL et binational. Il devait choisir sous quel drapeau il jouerait à l’avenir, la France ou l’Algérie ? Nabil penchait pour la France, mais sa famille en Algérie rappelait que trois de ses parents avaient donné leur vie durant la guerre… Pouvait-il trahir le pays de ses ancêtres ? Finalement, le joueur est appelé par Didier Deschamps pour un match à Lisbonne contre le Portugal. Mais à la treizième minute, il se blesse gravement au genou. Un acte manqué ? La pression était sans doute trop forte.      
Houria Bouteldja comparée à Sartre et Beauvoir    
Dans une tout autre genre, on peut savourer le portrait de Farid Abdelkrim, passé d’abord de Jean Gabin et d’Elvis Presley aux Frères musulmans. Fondateur des Jeunes musulmans de France, il apprend l’arabe « en saignant de la cervelle tant il y mit du sien » pour être reconnu par les dirigeants de l’UOIF « qui tiraient leur légitimité de la pratique courante de l’arabe, la langue du Coran ». Finalement, Farid Abdelkrim publie « Pourquoi j’ai cessé d’être islamiste » et devient comédien de théâtre, sa vocation, sa passion, « Il décolla le papier islamiste dont il avait recouvert les posters de sa jeunesse », s’amuse Antoine Menusier.  
Le texte consacrée à Houria Bouteldja, égérie du Parti des indigènes de la République, est d’une toute autre nature. L’auteur écrit qu’elle était « à la banlieue militante ce que Sartre et Beauvoir avaient été à la France de l’après-guerre : une figure d’autorité, sinon autoritaire. Sa dialectique renouvelée du maître et de l’esclave en imposait. Il y avait en elle de l’intelligence et du souffle ». C’est pour le moins exagéré. L’auteur du livre « Les Blancs, les Juifs et nous » n’est-elle pas d’abord une création des médias, fréquentant davantage les plateaux de télévision que les quartiers difficiles ? Mais peu importe, Antoine Menusier connaît bien son sujet. Il a travaillé de 2007 à 2011 au Bondy Blog, dont deux ans comme rédacteur en chef. Les lecteurs ne manqueront pas de lire avec intérêt les pages qu’il consacre à Tariq Ramadan et à son frère Hani, directeur du Centre islamique de Genève. « Comment, à Genève, malgré la montée de l’islamisme, la gauche tiers-mondiste a-t-elle soutenu l’essor de Tariq Ramadan ? », s’interroge-t-il en quatrième de couverture.   
(*) Antoine Menusier, Le livre des indésirés, Editions du Cerf, février 2019.
 

   

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