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La droite xénophobe remporte les élections en Suisse

L’Union démocratique du centre (UDC) de Christoph Blocher, qui avait choisi comme affiche électorale trois moutons blancs chassant un mouton noir, a gagné les élections fédérales, avec 28,8 % des voix. Elle disposera dorénavant de 62 députés sur 200. En face, les socialistes, particulièrement inexistants durant cette campagne, dégringolent à 19 %.

« Certains groupes ethniques dominent la statistique criminelle. Le trafic de drogues est contrôlé par des Albanais et des Noirs africains ». Ce texte n’a pas été écrit par un groupuscule néo-nazi mais par le plus important parti politique de Suisse, l’UDC. Dans un gouvernement composé de sept membres, cette formation compte deux ministres, et pas des moindres : Christoph Blocher, responsable de la justice et de la police. Et Samuel Schmid, à la tête du Département fédéral (ministère) de la défense, de la protection de la population, et des sports.

Depuis 1999, cette ancienne formation conservatrice, surtout implantée dans les cantons alémaniques et protestants, a plus que doublé sa représentation. Son programme électoral ? Tout est de la faute des étrangers, et plus particulièrement des musulmans, qui ne sont pourtant que 350 000 dans la Confédération. Dans une campagne précédente, l’UDC prétendait que les musulmans risquaient de devenir rapidement majoritaires ! Et pour affoler l’électorat, elle placardait sur les murs une carte d’identité ornée d’un portrait d’Oussama Ben Laden.

Le parti de Christoph Blocher, 67 ans, un fils de pasteur devenu milliardaire, ne fait pas dans la nuance. En 1999, il n’hésitait pas à dessiner un homme au faciès oriental en train de déchirer un drapeau suisse. Cette année, ce sont trois jolis moutons blancs qui expulsent des vertes prairies helvétiques un vilain mouton noir. Mais pour Christoph Blocher, ce n’est pas du racisme. Ce n’est pas du racisme non plus quand son bras droit, Ueli Maurer affirme que « Soutenir l’égalité des chances signifie actuellement ramener les élèves doués au niveau de requérants d’asile angolais ». Dans une interview, Ueli Maurer a même lâché : « Aussi longtemps que j’emploierai le mot “nègre“, je sais que la caméra restera braquée sur moi ».

Bref, à côté des propositions de l’UDC, le programme du Front national pourrait presque apparaître modéré. Ainsi, l’Union démocratique du centre veut lancer un référendum pour faire interdire les minarets en Suisse. Le texte n’évoque même pas les autres religions, ne parle pas d’église orthodoxe ou de temple dédié à Bouddha. Non, il ne s’en prend qu’aux minarets. « Ils ne sont rien d’autre que le symbole de la conquête d’un pouvoir politico-religieux qui veut supplanter le droit étatique », martèle Ulrich Schlüer, député UDC, « ces constructions islamiques ont une vocation impérialiste ».

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Autre projet de loi que Christoph Blocher et ses troupes souhaitent faire passer rapidement : l’expulsion de Suisse des familles d’immigrés dont un mineur de moins de 18 ans a été condamné pour un crime. « La provocation, c’est important, ça permet de faire avancer les choses », sourit Christoph Blocher. Pourtant, la Suisse se porte fort bien. Le taux de chômage n’est qu’à 2,5 %. Les étrangers (un million) ne prennent donc pas le pain des Helvètes. Quant au PIB par habitant, la Suisse arrive en deuxième position, juste derrière les Etats-Unis, mais loin devant l’Allemagne et la France.

Alors, pourquoi un tel déchaînement de haine ? Pour Pascal Sciarini et Sarah Nicolet, du Département de science politique de l’université de Genève, le clivage déterminant n’est plus entre la gauche et la droite, mais entre les partisans de l’ouverture et les partisans de la fermeture. Les ouvriers, l’ancienne classe moyenne des commerçants et artisans, les agriculteurs, redoutent l’Union européenne et tout ce qui vient de l’extérieur. « Ce sont eux qui font le succès de l’UDC », d’autant que cette formation xénophobe agite les thèmes de « l’identité en péril, de la peur du brassage culturel, religieux ».

Face à la montée de l’UDC, les socialistes et la droite modérée (radicaux et démocrates-chrétiens) ont mené des campagnes sans relief, se contentant de comparer Christoph Blocher à Mussolini, ou répétant que l’UDC « puait ». Le résultat est là : l’UDC grimpe à près de 30 % des suffrages (28,8 %). Le PS, chute sous la barre des 20 %. Seule petite consolation, les Verts progressent fortement. Ils disposent maintenant de 18 sièges de députés (9,5% des voix).

Jusqu’à présent, l’UDC réalisait ses meilleurs scores en Suisse alémanique. Dimanche, la Suisse francophone a, à son tour, cédé à son charme vénéneux. Pierre Ruetschi, le rédacteur en chef de « La Tribune de Genève », déplore dans son éditorial que « Genève internationale, Genève l’européenne, ville ouverte aux accents de gauche », vient de propulser l’Union démocratique du centre comme premier parti du canton, avec plus de 20% des voix. « Partis, réveillez-vous ! S’opposer à Blocher ne suffit pas », prévient Pierre Ruetschi.

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