Depuis qu’elle a retrouvé sa liberté de parole, il y a cinq mois de cela, en démissionnant du gouvernement de David Cameron, Lady Sayeeda Warsi, la première musulmane à avoir été promue secrétaire d’Etat, en fait bon usage, sans mâcher ses mots, ni tourner autour du pot.
Finie la langue de bois qui parle pour ne rien dire, révolues les circonlocutions qui éludent les sujets qui fâchent, place au franc parler sans fioritures qui, après avoir fustigé la politique menée envers la Palestine en la qualifiant de "moralement indéfendable", reproche à présent vertement au Premier ministre britannique, mais aussi à ses prédécesseurs, d’avoir opté pour une « politique de non-engagement » auprès des sujets musulmans de Sa Gracieuse Majesté.
Une politique jugée calamiteuse, riche en faux-fuyants et faux-semblants, et mâtinée d’immobilisme pour corser le tout, qui a conduit tout droit dans l’impasse dont on ne ressort pas indemne : l’exacerbation d’un profond malaise et du ressentiment anti-islam parmi la population du royaume.
"Depuis près de six ans … les gouvernements ont adopté une politique de non-engagement auprès d’un large éventail d'organisations et de militants de la communauté musulmane", a-t-elle dénoncé dans une tribune publiée, le 25 janvier, sur l’Observer, avant de critiquer "le dangereux engagement auprès seulement d’une douzaine de personnes sur une communauté musulmane qui compte plus de trois millions d’individus en son sein."
Si la baronne Warsi, qui n’a pas fait vœu de silence en rendant son tablier de ministre, a décidé d’appeler un chat un chat, c’est en réaction à la lettre jugée pleine de condescendance qui a été adressée récemment à plus de 1 000 responsables musulmans par Eric Pickles, ministre des Communautés et des Collectivités territoriales, dans laquelle ce dernier enjoint les imams à redoubler d’efforts pour chasser les brebis galeuses « extrémistes « de leurs rangs, et expliquer aux fidèles en quoi l’islam peut être compatible avec l’identité britannique, avec force et conviction cela va sans dire…
Dans le tollé bruyant qui a accueilli cette missive officielle, la plupart de ses destinataires musulmans s’offusquant en effet de cette manière sournoise de les associer aux radicaux que le gouvernement britannique leur demande instamment de combattre, Sayeeda Warsi a enfoncé le clou en révélant des amitiés sélectives et leurs effets pervers : "La réalité, c’est que si vous n’avez pas cultivé une amitié en haut lieu, si vous n’avez pas d’entregent et favorisé la confiance des hautes sphères, alors, le jour où une circulaire ministérielle arrive inopinément dans une mosquée avec laquelle le gouvernement a toujours refusé de nouer le dialogue, eh bien, cette correspondance ne peut être que très mal perçue et s’avérer au final particulièrement toxique", a-t-elle vivement déploré en pointant un doigt accusateur vers des arcanes du pouvoir dont elle connaît à la fois les méandres et les stratagèmes…
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