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Israël entretient une longue tradition de captivité d’enfants palestiniens

Un enfant palestinien arrêté à Jérusalem par des policiers israéliens masqués. (Photo : Addameer)

Israël a une longue tradition de captivité d’enfants palestiniens, les maltraitant et les marquant au passage. Cette incarcération massive d’enfants vivant sous l’occupation se résume à une chose : le contrôle et la privation de liberté.

Ces derniers jours, des dizaines de femmes et d’enfants palestiniens ont été libéré-e-s des prisons israéliennes dans le cadre de l’échange d’otages entre Israël et le Hamas.

Depuis jeudi, 180 femmes et enfants palestiniens ont été libéré-e-s des prisons israéliennes en échange de 99 femmes et enfants israéliens, ainsi que de ressortissant-e-s étranger-e-s, principalement des travailleurs-euses thaïlandais-es, qui ont été libéré-e-s de leur captivité à Gaza.

Au fur et à mesure que défilent les images d’enfants palestiniens, pour la plupart de jeunes adolescent-e-s, pleurant et serrant leur mère dans leurs bras après leur libération des prisons israéliennes, de plus en plus de gens se demandent : pourquoi Israël a-t-il retenu autant d’enfants palestiniens en premier lieu ?

À l’heure actuelle, certains groupes de défense des droits estiment que quelque 8 000 Palestinien-ne-s sont détenu-e-s dans les prisons israéliennes. Mais ce nombre augmente chaque jour, car Israël continue de mener des campagnes d’arrestations massives dans toute la Cisjordanie occupée et à Jérusalem. En fait, au moment où Israël a libéré des prisonnier-e-s palestinien-ne-s, les groupes de défense des droits des Palestinien-ne-s estiment que les forces israéliennes ont arrêté et emprisonné près de 300 Palestinien-ne-s, soit près du double du nombre de prisonnier-e-s libéré-e-s dans le cadre de l’échange.

Parmi les milliers de Palestinien-ne-s détenu-e-s dans les prisons et les centres de détention israéliens, on estime qu’avant l’échange d’otages, il y avait environ 80 femmes et au moins 250 enfants dans les prisons israéliennes.

Les groupes de défense des droits ont déclaré à Mondoweiss que de nombreux chiffres rapportés ces dernières semaines sont des estimations, les documentalistes ayant du mal à suivre le nombre écrasant de détentions et d’arrestations.

Après l’échange d’otages et la libération de dizaines d’enfants palestiniens, on ne sait pas exactement combien d’autres enfants restent en captivité en Israël.

Alors, pourquoi Israël emprisonne-t-il des centaines d’enfants palestiniens ?

Arrestation et interrogatoire : abus, coercition et torture généralisés

 

Chaque année, des centaines d’enfants palestiniens sont arrêtés par les forces israéliennes. Selon Defense for Children International – Palestine, on estime que 500 à 700 enfants palestiniens sont arrêtés chaque année par l’armée israélienne.

Bien que ces détentions soient communément appelées « arrestations », ce qui implique une autorité légale ou une suspicion d’activité criminelle, il est important de noter avant tout que les enfants sont arrêtés, inculpés et poursuivis dans le cadre d’un système militaire – une occupation militaire qui a été condamnée internationalement comme une occupation illégale.

En vertu du cadre juridique militaire israélien, tout-e soldat-e ou officier-e de police peut procéder à une arrestation sans mandat, même à l’encontre d’un enfant. En fait, selon la DCIP, la plupart des enfants palestiniens sont arrêtés sur la base de simples soupçons, sans mandat d’arrêt.

La plupart des enfants, environ 55% de tous les enfants détenus, sont enlevés à leur domicile au milieu de la nuit par des soldat-e-s israélien-ne-s masqué-e-s et armé-e-s et par des agents de la police des frontières. Ces enfants sont arrachés à leur famille, ont les yeux bandés, sont ligotés, battus et emmenés dans des centres d’interrogatoire israéliens.

Selon la DCIP, lorsque les enfants palestiniens arrivent dans les centres d’interrogatoire, 80 % d’entre eux sont déshabillés et fouillés par un soldat israélien adulte. Ils sont ensuite soumis à des interrogatoires qui peuvent durer des jours et qui, dans la plupart des cas, se déroulent sans la présence d’un parent ou d’un avocat.

Soixante-six pour cent des enfants ne sont pas informés de leurs droits lors de l’arrestation et de l’interrogatoire, tandis qu’environ 25 % des enfants sont placés dans des positions de stress afin de leur arracher des aveux.

Environ un enfant palestinien détenu sur quatre est également placé à l’isolement comme méthode de coercition. D’autres sont battus, privés de sommeil et soumis à d’autres formes de torture physique et psychologique.

En ce qui concerne la politique d’isolement cellulaire, la DCIP a déclaré que les forces israéliennes y ont recours contre des enfants, principalement en détention préventive, dans le but de leur extorquer des aveux.

« Les preuves et les documents recueillis par la DCIP indiquent de manière écrasante que l’isolement des enfants palestiniens dans le système de détention militaire israélien est pratiqué dans le seul but d’obtenir des aveux pour un délit spécifique ou de recueillir des renseignements lors de l’interrogatoire », a déclaré la DCIP dans un rapport.

Le groupe a ajouté qu’il n’avait trouvé « aucune preuve démontrant un usage légalement justifiable de l’isolement des enfants palestiniens détenus, par exemple pour des raisons disciplinaires, de protection ou médicales. L’isolement a été utilisé, presque exclusivement, au cours de la détention avant inculpation et de la détention provisoire ».

Après avoir été torturés et interrogés, la majorité des enfants palestiniens détenus se voient montrer ou forcer à signer des documents en hébreu, une langue que la plupart des enfants palestiniens ne comprennent pas. Dans de nombreux cas, après avoir subi des violences physiques et psychologiques, les enfants sont contraints de faire de faux aveux.

Alors que les pratiques énumérées ci-dessus sont documentées depuis longtemps par les groupes de défense des droits, Addameer affirme que depuis le 7 octobre, la pratique s’est accrue, avec environ 200 enfants arrêtés depuis cette seule date.

« Les enfants sont interdits de visites et de communication avec le monde extérieur. En outre, ils sont privés de la possibilité de préparer leur propre nourriture et ne reçoivent que deux repas insuffisants par jour dans le cadre d’une politique délibérée de privation de nourriture… Les enfants sont également soumis à des agressions physiques et à des coups à l’intérieur des prisons », a déclaré Addameer dans un rapport sur les conditions de détention des enfants depuis le 7 octobre.

Une autre politique a vu le jour depuis le 7 octobre ? Les forces israéliennes prennent en otage des enfants palestiniens « pour faire pression sur leurs parents afin qu’ils se rendent aux forces d’occupation dans le cadre des campagnes d’arrestation en cours ».

Inculpés et jugés dans des « tribunaux kangourous »

 

Après leur arrestation et leur détention, des enfants palestiniens âgés d’à peine 12 ans sont généralement maintenus en détention préventive pendant de longues périodes dans l’attente de leur procès et de leur condamnation.

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Les enfants palestiniens sont poursuivis, jugés et condamnés par des tribunaux militaires israéliens, par des procureurs et des juges militaires – ces mêmes militaires qui occupent illégalement le territoire palestinien. À titre de référence, les colons israéliens vivant illégalement en Cisjordanie sont régis par le droit civil et pénal israélien et sont jugés par des tribunaux civils israéliens.

Dans le traitement qu’il réserve aux enfants palestiniens, Israël est vraiment unique : c’est le seul pays au monde qui poursuit les mineur-e-s devant des tribunaux militaires. Les tribunaux militaires israéliens ont un taux de condamnation de plus de 99 % et ont été considérés par les groupes de défense des droits comme des « tribunaux kangourous » (parodies de procès).

Dans le système judiciaire militaire israélien, l’un des chefs d’accusation les plus courants contre les enfants palestiniens est le jet de pierres. Les enfants palestiniens qui lancent des pierres sur les forces militaires israéliennes ou les colons peuvent être emprisonnés pour une durée allant de quelques mois à 20 ans.

Tous les enfants palestiniens emmenés en captivité par Israël ne sont pas jugés, ni même accusés d’un crime.

Dans le cadre de sa politique de détention administrative, largement pratiquée, Israël emprisonne des milliers de Palestinien-ne-s, y compris des enfants, pour une durée indéterminée, sans jamais les inculper ni les juger.

On estime qu’avant l’échange d’otages qui a commencé le week-end dernier, plus de deux douzaines d’enfants palestiniens détenus dans les prisons israéliennes étaient en détention administrative.

La majorité des prisonnier-e-s libéré-e-s n’ont pas été inculpé-e-s

 

Alors que des dizaines d’enfants ont été libérés de la captivité israélienne au cours de la trêve d’une semaine, de nouvelles informations sont apparues sur les enfants prisonniers qui ont été récemment libérés.

Outre les nombreux témoignages de détenu-e-s palestinien-ne-s libéré-e-s faisant état de tortures, d’abus physiques et psychologiques et de privations de sommeil et de nourriture dans les prisons israéliennes, il a été rapporté que la majorité des prisonnier-e-s libéré-e-s n’étaient en fait pas accusé-e-s d’un crime.

Selon un rapport de The Intercept, l’analyse des données fournies par l’administration pénitentiaire israélienne (IPS) a montré que parmi les prisonnier-e-s palestinien-ne-s qu’Israël a proposé de libérer dans le cadre de l’accord d’échange, 233 sur 300 n’ont été condamnés pour aucun crime et ont simplement été classés dans la catégorie « en état d’arrestation ».

Selon Al Jazeera, le plus jeune détenu administratif figurant sur la liste de libération d’Israël était un enfant de 14 ans.

Les groupes de défense des droits estiment qu’à la fin du mois de novembre, il y avait environ 2 300 détenu-e-s administratifs-ves dans les prisons israéliennes, la majorité d’entre eux ayant été arrêtés après le 7 octobre.

Alors, pourquoi cibler les enfants ?

 

Même si l’on dispose d’une documentation écrasante sur les abus et les violations des droits commis par Israël à l’encontre des enfants et que l’on sait que tant d’enfants sont soumis à un système militaire exténuant sans jamais être accusés d’un crime, pour beaucoup, la principale question demeure : pourquoi ?

Bien qu’il emprisonne des dizaines et des dizaines d’enfants sans inculpation, Israël maintient qu’il emprisonne des « terroristes » et des « criminels ». En réalité, l’incarcération et la détention massives d’enfants s’expliquent par une seule chose : le contrôle. Pour reprendre les termes de la DCIP, il s’agit d’une « privation arbitraire de liberté ».

L’une des meilleures tactiques que l’occupation israélienne puisse utiliser pour soumettre les Palestinien-ne-s est de les priver de leurs droits et libertés fondamentaux – dans ce cas, par le biais d’arrestations et d’incarcérations massives.

Sous l’occupation, chaque aspect de la vie des Palestinien-ne-s est contrôlé par Israël. Qu’il s’agisse de l’endroit où l’on peut vivre ou des libertés civiles fondamentales dont on jouit. Les enfants palestiniens grandissent dans un système où ils sont quotidiennement témoins d’arrestations, de meurtres et de punitions collectives à l’encontre de leur famille, de leurs ami-e-s et de leur communauté.

Lorsqu’un enfant grandit en sachant que jeter une pierre, aller à une manifestation, devenir politiquement actif ou même hisser un drapeau palestinien peut le conduire en prison ou, pire, le faire tuer, il peut y réfléchir à deux fois avant d’oser s’opposer à l’occupation violente et au régime d’apartheid qui le contrôlent.

Si la menace réelle d’arrestation n’atteint pas son objectif d’assujettissement et de contrôle, alors peut-être que la déshumanisation supplémentaire de l’emprisonnement réel le fera.

Lorsqu’ils quittent la prison israélienne, les enfants palestiniens abandonnent régulièrement l’école, et beaucoup tombent dans un schéma tragique de réincarcération alors que leur famille et leurs ami-e-s luttent pour réparer les relations qui ont été affectées pendant l’isolement de l’enfant. Ceux qui s’en sortent vivants sont confrontés à de nouveaux défis, notamment à une « pléthore de symptômes psychologiques tels que la dépression, l’anxiété, la difficulté à se concentrer, l’introversion ou un comportement agressif ».

La privation de la liberté, de l’humanité, de la dignité et des droits civils de la population locale comme méthode de contrôle n’est pas une tactique nouvelle. Elle remonte très loin dans l’histoire de l’apartheid et du colonialisme. Lorsqu’il s’agit d’enfants palestiniens, Israël n’est pas différent.

Yumna Patel est directrice de l’information sur la Palestine pour Mondoweiss.

Source: Mondoweiss

Traduction ED pour l’Agence Média Palestine

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