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« Par son comportement, Israël commet des crimes de guerre »

Grand, mince, le cheveu gris, un kéfié autour du cou, un curieux personnage a d’abord manifesté seul devant le Palais des Nations, le siège de l’ONU à Genève, pour dénoncer l’intervention israélienne dans la bande de Gaza. Abraham Weizfeld, juif canadien, anime l’Alliance of Concerned Jewish Canadians (ACJW) à Montréal, créée en 2005. Un sigle qu’il préfère traduire en français par l’Alliance de Canadiens juifs « consternés », plutôt que « concernés » ! Abraham Weizfeld ne cache ni son hostilité vis-à-vis de la politique israélienne, ni sa sympathie pour le peuple palestinien. Il a d’ailleurs publié en 1984 un ouvrage sur le massacre de Sabra et Chatila.

En Suisse, ce Juif dissident a rejoint le Collectif Urgence Palestine. Abraham Weizfeld, qui est reparti cette semaine au Canada, a reçu le soutien de la Fondation de l’Entre-Connaissance. Cette fondation, animée par Hafid Ouardiri, ancien porte-parole de la grande mosquée de Genève, entend « tisser des liens entre la civilisation islamique et le reste du monde ».

Comment le Collectif Urgence Palestine a-t-il interprété votre démarche ?

J’ai été très bien accueilli. C’est la preuve que ceux qui manifestent, qui se battent en faveur des Palestiniens, n’ont pas de haine contre le peuple juif.

Dans vos tracts, vous n’hésitez pas à parler d’« agression d’Israël », de « crimes de guerre dans la bande de Gaza ». Comment êtes-vous perçu par la communauté juive ?

Je suis considéré comme un traître. J’ai été exclu de ma propre famille. Je n’ai plus de contact avec la communauté juive. Toutefois, je peux vous dire que je ne suis pas seul. Il existe dans 17 pays des organisations de Juifs dissidents. Avec le soutien de la Fondation de l’Entre-Connaissance, j’espère bien pouvoir créer une antenne en Suisse.

Reconnaissez-vous l’Etat d’Israël ?

Je ne mets pas en cause l’Etat d’Israël. Je demande la création d’un Etat palestinien, même si, bien évidemment, ce n’est pas satisfaisant. Les Palestiniens ne disposent plus que d’un tout petit territoire. Malgré tout, ce serait un premier pas. Il faudra ensuite saisir le dossier des réfugiés, celui de Jérusalem, et proposer des échanges de territoires.

– C’est-à-dire ?

80 % des Juifs israéliens vivent entre Tel-Aviv et Jérusalem. Il est très possible de rétrocéder des territoires pris aux Palestiniens. Je crois même à une vraie Confédération entre les deux peuples, qui mettraient en commun leurs ressources naturelles.

Que demandez-vous maintenant ?

Un cessez-le-feu immédiat et la levée du blocus sur la bande de Gaza. Par son comportement, Israël, commet des crimes de guerre. Je ne dis pas que les Israéliens sont fascistes, mais j’affirme que les fascistes gagnent du terrain parmi les partis de la droite israélienne.

Avez-vous toujours été antisioniste ?

La majorité des Juifs d’Europe, notamment d’Allemagne et de Pologne, n’étaient pas sionistes au début du XXème siècle. Ils se battaient pour que les Juifs aient les mêmes droits que les autres citoyens dans leurs pays de résidence, pas pour s’installer en Israël. Ma famille vient de Pologne, elle a pratiquement été exterminée. Quatre personnes sur 400 ont pu se sauver. Etant moi-même un réfugié au Canada, j’ai de la sympathie pour les autres réfugiés, notamment palestiniens.

Quelle est votre profession ?

J’étais enseignant. Je suis diplômé de sciences politiques à Montréal. Mais en raison de mes convictions politiques, j’ai perdu mon poste. Je suis secrétaire administratif de l’Alliance Of Concerned Jewish Canadians.

Propos recueillis par Ian Hamel

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