Le principal laboratoire de Gaza effectuant les tests du Covid a cessé d’opérer dimanche, après avoir épuisé ses stocks de réactifs, a annoncé le ministère palestinien de la santé. Cette nouvelle potentiellement catastrophique intervient alors que les signes d’une détérioration de la situation sanitaire au regard du virus se multiplient dans le territoire enclavé, soumis à un blocus inhumain par l’occupant israélien.
Ainsi, selon des informations recueillies par le quotidien Haaretz, jusqu’à 30% des tests PCR réalisés dans le territoire, se sont révélés positifs. Ce taux très élevé, dans un territoire privé des moyens de faire face à un afflux en nombre de patients développant des symptômes graves de l’infection, doit toutefois être tempéré par le fait que seul un petit nombre de tests sont réalisés, de 2.000 à 2.500 par jour, pour une population totale de 2 millions d’habitants, et qu’ils ne sont donc pas forcément représentatifs de l’incidence de l’épidémie.
Mais en termes absolus, la situation est manifestement dramatique. Ainsi, on comptait dimanche 375 personnes hospitalisées pour symptômes liés au Covid-19, dont 175 nécessitant une assistance respiratoire.
Sachant que le nombre de lits disponibles pour les malades Covid n’est que de 170, on a désormais atteint le seuil de saturation des capacités hospitalières dans ce domaine. Là plus qu’ailleurs, les moyens alloués à la prise en charge du Covid se font au détriment des patients souffrant d’autres maladies.
L’ONG israélienne Physicians for Human Rights (PHR, «Médecins pour les Droits Humains ») a été autorisée par les forces d’occupation du régime d’apartheid, pour la première fois, à pénétrer ce week-end dans l’enclave, avec 10 praticiens.
Ces derniers ont apporté un renfort à leurs collègues palestiniens, en réalisant une douzaine d’opérations dans les hôpitaux Nasser (sud de la bande) et Shifa (à Gaza-ville).
Interrogé par Haaretz, le médecin palestinien israélien Iyad Khamaysi, de l’hôpital Rambam à Haïfa (Israël), souligne que si l’attention est actuellement centrée sur la pandémie virale, cette dernière n’est qu’un des volets de la catastrophe sanitaire en cours dans le territoire. « De nombreux patients atteints de maladies chroniques, des cancers par exemple, se voient refuser l’admission dans les hôpitaux, à cause du virus », déclare-t-il.
« Les hôpitaux ont des capacités très limités, les ressources en soignants disponibles sont elles aussi limitées, Gaza manque cruellement de médicaments, et la pandémie n’a fait qu’aggraver un phénomène pré-existant. Au cours de notre présence de 48 heures, nous avons vu beaucoup de patients ayant des besoins urgents de traitements, qui ne pouvaient être pris en charge faute de moyens », ajoute-t-il.
« L’hôpital Européen de Gaza à Khan Younes est ainsi devenu un hôpital exclusivement dédié au coronavirus. Les autres malades ont été dispersés dans d’autres établissements, ce qui fait peser une charge supplémentaire sur l’ensemble du système sanitaire. J’ai vu notamment des patients transplantés laissés à eux-mêmes », déclare encore le Professeur Khamaysi.
Le Dr Jamal Dakdoudi, lui aussi palestinien israélien de la délégation PHR, a animé un atelier avec des professionnels de la santé mentale de Gaza. Il a été impressionné par l’ampleur de la détresse psychologique qui frappe la population locale. « Tous les maux s’additionnent ; le Covid a aggravé une situation économique déjà catastrophique, et cela, à son tour, a un retentissement considérable sur l’angoisse de la population ; j’ai vu des gens faire la queue pendant des heures devant les rares distributeurs de billets, pour retirer une poignée de shekels ; entre santé et survie tout court, on voit clairement où va la priorité », commente-t-il.
Dans ces conditions, le gouvernement du Hamas évalue ces jours-ci l’option d’un recours au confinement total, en lieu et place du seul couvre-feu nocturne entré en vigueur la semaine dernière. Avec l’arrivé de la saison grippale, le ministère de la santé craint un afflux de nouveaux patients, et envisage donc un confinement généralisé de deux semaines à compter du 15 décembre, selon les informations recueillies par la délégation israélienne, indique encore Haaretz.
Cette dernière avait apporté quelques lots de médicaments, servant à différentes pathologies, qui ont été distribués dans les hôpitaux ainsi qu’à la pharmacie centrale du ministère.
« Notre déplacement n’était pas qu’une opération humanitaire. Nous voulions aussi témoigner du fait que Gaza souffre d’un blocus interminable, qui fait du mal aux malades, aux personnels soignants, et à toute la population », conclut Salah Hadj Yahye, coordinateur de PHR pour la bande de Gaza.
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