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En finir avec les pauvres !

Une fuite en avant à visage découvert. C’est ainsi qu’on peut qualifier l’attitude du gouvernement et du grand patronat français qui annoncent de plus en plus clairement la couleur : il faut liquider les pauvres. Ces dernières semaines, ceux qu’on définit sociologiquement comme les classes précaires, ont été plus que jamais la cible de la haute bourgeoisie française décomplexée par quatre années de sarkozysme présidentiel.

Les déclarations de Wauqiez sur le « cancer de l’assistanat » qui rongerait la France et sa proposition de faire travailler gratuitement les bénéficiaires du RSA « 5 à 10 heures » par semaine constituaient le premier round. La grève actuelle des employés de Carrefour market, payés en dessous du Smic par l’un des fleurons du capitalisme français qui affichait l’an dernier un CA de 101 millions d’euros, représente le second round. Quand certains enseignants du supérieur sont confortablement payés sans travailler, d’autres, au RSA, s’efforcent de survivre, exclus du monde du travail par une concurrence trop lourde ou disqualifiés par un manque de formation professionnelle que l’Etat ne leur financent plus.

D’autres encore, mi-smicards, restent condamnés à l’exploitation économique et à la dépossession à la fois juridique et social de leur propre personne. Après tout, payer au minimum syndical ses employés n’est qu’une question d’interprétation de la loi et la batterie d’avocats de Carrefour aura sans doute la sienne après la première condamnation de leur client à 3,66 millions d’euros d’amendes pour non-respect du Smic auprès de 1 200 salariés.

Un privilège de classe fondé juridiquement

Certains jugeront superflu cette critique car, finalement, Carrefour a bien été condamné, en première instance du moins. Mais ce qui doit interpeller notre conscience est ailleurs : que des entreprises puissent violer, en 2011, la loi salariale (smic) la plus basique du monde professionnelle est dangereusement révélateur de l’institutionnalisation des rapports de forces socio-économiques. La domination de la haute bourgeoisie française ne fut jamais aussi éclatante qu’en s’incarnant légalement.

La recette est rodée : restreindre toujours plus les frontières du droit, subvertir les acquis sociaux, voire les suspendre au nom d’un intérêt de classe maquillé en intérêt général. La « réforme » sur les retraites avait déjà illustré cette réalité nauséabonde d’une corporation légiférant pour protéger ses intérêts. Les députés, caste produisant les lois, nichée au-dessus des lois, n’hésitèrent pas à intégrer un article fondant juridiquement le privilège de classe et protégeant un régime scandaleusement avantageux.

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« La retraite parlementaire est particulièrement favorable. Ici pas de départ à 65 ou 67 ans. Jusqu’à récemment, le parlementaire pouvait toucher sa retraite dès 55 ans, à 60 ans désormais (et) bénéficier du « taux plein » (plus de 5 000 euros) après seulement 22 ans de (double) cotisation. Mais ce n’est pas tout. L’élu sexagénaire a en effet le droit de toucher sa retraite tout en travaillant à temps plein. Les ministres les plus âgés du gouvernement Fillon cumulaient, jusqu’à ce que le scandale les pousse à y renoncer, leur salaire ministériel (14 000 euros) et leur retraite de député » avait révélé le bloggeur

Vincent Quivy.

Où sont les « Indignés » français ?

Non satisfait, le gouvernement de la droite libérale et conservatrice, porte-parole d’un capitalisme français qui a su tirer les marrons du feu (recapitalisation bancaire de l’Etat, nouvel allègement de l’ISF, poursuite de la privatisation des secteurs régaliens sur fond de dégraissage salarial…), prolonge sa chasse aux gueux. En face, rien. La disparition des contre-pouvoirs économiques (syndicats), progressivement ralliés au patronat et convertis à la social-démocratie du « compromis », ajouté à la reddition idéologique des partis de gauche, ravalés au rang de commentateurs de questions sociétales très éloignées des vrais enjeux de pouvoir économiques et politiques, n’augurent rien de bon.

La révolte des « Indignés » européens, inspirés par les peuples arabes, a pourtant soulevé un espoir. Et deux questions. Faudra-t-il atteindre et attendre le stade ultime d’une extrême précarité déterminé par un vampirisme néo-libéral globalisé, pour obtenir un sursaut français ? A quand une refondation radicale des fantômatiques contre-pouvoirs économiques et politiques, condition matérielle indispensable d’une transformation sociale qui soit profonde et réelle ? Il faudra vite trouver une réponse. 2012, c’est demain.

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