Le gouvernement israélien vient de donner l’ordre d’une reprise des bombardements aériens contre la bande de Gaza. Ces bombardements qui ont fait dans la nuit de lundi à mardi plus de 300 morts s’inscrivent dans un plan de guerre planifié d’avance et qui s’articule autour d’une guerre terrestre de grande ampleur en vue de réoccuper l’enclave et parquer les populations dans des camps dits « humanitaires » dans le but de s’en débarrasser. La perspective d’une expulsion massive des Palestiniens qui passe par un effroyable nettoyage ethnique risque de mettre le feu aux poudres dans la région.
Comme on le redoutait depuis qu’Israël a gelé l’accord de cessez-le-feu en refusant de négocier les termes de la seconde étape comme c’était stipulé dans l’accord du 19 janvier dernier, le gouvernement Netanyahou vient de donner l’ordre de reprendre les bombardements intensifs dans la bande de Gaza. L’attaque aérienne israélienne de la nuit de lundi à mardi a vu la participation de pas moins de 100 appareils et a fait plus de 300 morts.
Cette attaque aérienne particulièrement meurtrière annonce le début d’une guerre qui sera malheureusement plus dévastatrice que celle qui s’est abattue sur Gaza d’octobre 2023 à janvier 2025.
La propagande israélienne qui sera comme d’habitude relayée par les médias mainstream français va imputer la reprise de la guerre au Hamas qui a refusé les dernières propositions de l’envoyé de Trump au Moyen Orient, qui demandait au Hamas de libérer cinq otages israélo-américains contre une prolongation de la trêve d’une cinquantaine de jours.
Dans la réalité, les Américains savent très bien que le gouvernement israélien ne fait que gagner du temps avec sa proposition d’une prorogation de la première étape du cessez-le-feu en vue de libérer le maximum d’otages israéliens et pour avoir ensuite les mains libres dans son entreprise de nettoyage ethnique à Gaza.
La reprise de la guerre était dans les tablettes du gouvernement et de l’état-major israéliens. C’était une question de temps. Aujourd’hui ou dans un mois ou deux. Le refus du Hamas d’obéir aux injonctions de l’envoyé américain est un prétexte fallacieux pour une reprise de la guerre planifiée d’avance et dictée par plusieurs facteurs d’ordre politique, diplomatique et militaire.
Les facteurs d’ordre politique
Sur le plan politique, l’accord de cessez-le-feu du 19 janvier, s’il a permis la libération de plusieurs dizaines de prisonniers israéliens, a été rejeté par une partie des alliés de Netanyahou au sein du gouvernement et a donc affaibli la coalition gouvernementale. Pour sauver et consolider cette dernière, Netanyahou n’a pas trouvé mieux que de reprendre la guerre dont il espère tirer de nouvelles dividendes politiques.
Mais l’autre facteur d’ordre politique qui pousse les ultra du gouvernement israélien à reprendre la guerre se rapporte à une tendance structurelle qui travaille en profondeur depuis plusieurs la société israélienne : le recul de la gauche israélienne qui coïncide avec le départ de plusieurs centaines de milliers d’israéliens qui sont généralement hostiles au climat de guerre permanent et la montée en puissance de courants sionistes radicaux portés par une extrême-droite suprémaciste Juive qui ne cachent pas leur volonté de réaliser le rêve du Grand Israël lequel passe par l’expulsion massive des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.
Les facteurs d’ordre diplomatique
Sur le plan diplomatique, l’arrivée au pouvoir de Trump dont on connaît la proximité avec une droite évangéliste et messianiste dont le suprémacisme blanc ne l’empêche pas de professer ouvertement un « sionisme chrétien » est une aubaine pour le gouvernement Netanyahou et ses alliés de l’extrême-droite suprémaciste juive.
Même si l’imprévisibilité de Trump a pu susciter quelques inquiétudes au sein du gouvernement israélien, la rapidité avec laquelle la nouvelle administration Trump s’est retournée contre un accord de ce cessez-le-feu qui a été pourtant négocié par l’Administration Biden avec l’assentiment de Trump lui-même avant qu’il ne soit officiellement investi à la Maison-Blanche) montre que la convergence stratégique et idéologique entre les deux alliés est plus forte que tout le reste.
Le gouvernement israélien peut d’autant mieux compter sur le soutien de Trump dans sa guerre que ce dernier est occupé par sa guerre commerciale contre le monde entier et son bras de fer diplomatique avec l’Europe concernant le dossier ukrainien.
Le gouvernement Netanyahou croit par ailleurs, à tort ou à raison, que le contexte régional est désormais favorable à une guerre totale contre le peuple palestinien aussi bien à Gaza qu’en Cisjordanie en vue de régler à sa manière la question palestinienne. L’Iran, dont le principal vecteur régional (le Hezbollah libanais) est neutralisé, ne peut que faire le dos rond face à la belliqueuse administration Trump.
Enfin, le gouvernement Netanyahou ne peut qu’être encouragé dans son entreprise guerrière par l’attitude des pays arabes dont la modération suspecte ne peut qu’être interprétée comme un signal en faveur de la destruction de l’ennemi commun qu’est devenu le Hamas.
Dans la réalité, la complicité criminelle israélo-arabe dépasse ce mobile puisque c’est désormais le mouvement de libération nationale palestinien qui constitue un abcès de fixation social et symbolique pour toutes les révolutions à venir dans la région contre l’ordre impérialo-réactionnaire dont l’Etat d’Israël constitue le gendarme principal.
Les facteurs d’ordre militaire
Sur le plan militaire, la reprise de la guerre à Gaza ne sera pas une simple reproduction de ce qui a été vu durant la période qui s’étend d’octobre 2023 à janvier 2025.
Si la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens comme disait Clausewitz, alors la nouvelle guerre déclenchée par Israël risque malheureusement d’être encore plus effroyable dans la mesure où elle est appelée à concrétiser sur le terrain la conclusion terrible à laquelle le gouvernement israélien est arrivé sous la pression de l’extrême-droite suprémaciste juive, à savoir que la survie d’Israël passe exige désormais la destruction non seulement du Hamas (comme le prétend la propagande israélienne qui va être dès les prochains jours relayée massivement par les médias mainstream français) mais de la société palestinienne de Gaza.
Les informations que les médias israéliens ont laissé filtrer concernant le plan de guerre préparé depuis plusieurs mois déjà par le nouveau chef d’état-major de l’armée israélienne, le général de division, Eyal Zamir, ne laissent place à aucun doute. La reprise de la guerre à Gaza devrait avoir un seul objectif : exterminer le maximum de Palestiniens pour les obliger à partir.
En effet, le plan de guerre est axé principalement autour d’une invasion terrestre qui se démarquera de celle qui a été effectuée auparavant par une volonté d’occupation permanente du terrain et par la création de zones dites « humanitaires » pour les populations déplacées qui seront administrées directement par l’armée sur le modèle des camps que l’armée française a fait installer en Algérie.
La population du nord de Gaza sera déplacée une nouvelle fois vers le sud de l’enclave, peut-être définitivement en attendant que le gouvernement israélien règle le problème de ce surplus démographique qui dérange ses calculs à court terme.
Perspectives inquiétantes
Face à la funeste perspective d’une nouvelle guerre d’extermination qui constitue une grave offense à l’humanité, aucun mot ne peut exprimer ce que les hommes qui ont encore un coeur peuvent ressentir ni ce que la conscience humaine peut se représenter.
Seule la force peut arrêter la folie d’Israël. Et ceux qui ont cette force (les puissances nucléaires à l’échelle mondiale) n’ont visiblement aucun intérêt à aller jusque-là pour sauver le malheureux peuple palestinien qui a la malchance de se trouver face à un Etat qui agit comme s’il était au-dessus des lois internationales.
Il reste la force du faible qui peut être dans certaines circonstances redoutable quand elle se nourrit de la foi et quand elle est accompagnée par l’intelligence tactique de ceux qui sont obligés de se battre dans des conditions défavorables. Israël a la force de son côté. Pour le moment. Mais il n’est pas à l’abri de la ruse de l’histoire. Le narratif de la victoire surtout quand il est aveuglé par les apparences illusoires et le ressentiment n’est pas toujours bon conseiller
Les contradictions que cette guerre risque de mettre à jour, si elle n’est pas arrêtée à temps, peuvent s’avérer explosives et porter atteinte à la stabilité d’une région qui continue d’être un centre névralgique pour l’économie mondiale.
L’Egypte et la Jordanie sont aujourd’hui dos au mur. Jusque-là, elles ont montré, plus que de mesure, leur attachement aux Accords de paix séparée avec l’Etat d’Israël. Qu’en sera-t-il demain quand l’armée israélienne commencera à mettre au point concrètement son plan pour une expulsion massive des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie ?



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