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L’Europe verse des larmes de crocodile sur le Darfour, mais n’aide pas les réfugiés darfouriens

PEOPLE DISPLACED BY VIOLENCE IN NORTHERN JEBEL MARRA IN JANUARY AND FEBRUARY 2016, GATHER AROUND THE UNAMID BASE IN SORTONI, DARFUR.

Ces dernières années, les médias nous ont enseigné un mot nouveau, toujours prononcé au pluriel, les « janjawid », pour désigner de terribles cavaliers arabes qui massacrent les paysans et brûlent les villages dans une région désertique et mal connue de l’ouest du Soudan appelée le Darfour. Abdullah Fahraoui, originaire d’un petit village près de Niyala, dans le Sud de cette province, a fui la terreur et la misère en 2002.

Un long périple qui le conduit d’abord en Italie, puis en France. Les deux pays l’expulsent sans ménagement. Abdullah se retrouve en Suisse, presque par hasard. « Depuis bientôt cinq ans, je suis requérant d’asile, sans perspective d’avenir et sans nouvelles de ma famille », déplore ce grand jeune homme, aujourd’hui âgé de 34 ans. En clair, le Darfourien réclame en vain à la Confédération helvétique un statut de réfugié.

 

Abdullah Fahraoui, 34 ans, originaire du Sud du Darfour, à la gare de Cornavin, à Genève.

Le Comité des droits de l’homme de l’ONU a rendu vendredi dernier un rapport accablant sur le Soudan. « Des violations graves, systématiques et étendues des droits de l’homme, notamment des meurtres, des viols, des déplacements forcés et des attaques contre la population civile, ont été commises et continuent à être commises dans l’impunité la plus totale partout au Soudan, particulièrement au Darfour », dénonce le Comité dans un rapport de 9 pages, exigeant la fin « immédiate » de ces violations.

De leur côté, Nicolas Sarkozy et Gordon Brown, le nouveau Premier ministre britannique, ont réclamé ensemble l’envoi dans les plus brefs délais d’une force des Nations Unies, forte de 15 à 20 000 hommes, dans la province soudanaise. Le conflit a déjà fait quelque 200 000 morts et 2 millions de déplacés. « La situation ne peut plus durer, il y a urgence, des gens meurent et des gens souffrent, il faut que ça cesse », déclare le président français.

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Nicolas Sarkozy et Gordon Brown se sont même dit prêts à se rendre ensemble sur place au Darfour ! Mais, fort curieusement, rien n’est prévu pour prendre en charge les Darfouriens qui sont parvenus à fuir leur province. « Personne ne m’aide à régler ma situation. Il m’arrive de recevoir des courriers en allemand du Tribunal administratif fédéral, une langue que je ne comprends absolument pas », déplore Abdullah. Logé dans un foyer pour réfugié, avenue de la Praille à Carouge, dans le canton de Genève, il survit en travaillant deux heures par jour dans une entreprise de nettoyage.

« Ma demande d’asile a été refusée. J’ai introduit un recours en 2003. Mais depuis, je ne reçois que des lettres très vagues de l’administration. Je supplie pour que l’on règle définitivement ma situation », lâche le requérant, qui était ferronnier au Soudan. Toutefois, contrairement à l’Italie et à la France, qui l’ont reconduit à leurs frontières, la Suisse ne semble pas vouloir le renvoyer au Soudan. «  Je sais seulement que les habitants de mon village ont dû fuir. Ma famille a-t-elle pu se réfugier dans un camp ? Je l’ignore. Cela me rend malade de ne pas avoir de nouvelles de mes parents, de mes frères et sœurs », raconte Abdullah Fahraoui.

Peut-on véritablement dire que le Darfour est victime d’un génocide ? « Oui et non. Tout dépend de la manière dont on voit le degré d’intentionnalité des décideurs. Il est peu probable qu’ils aient de sang-froid voulu éliminer tout ou partie de la population négro-africaine du Darfour », répond Gérard Prunier, l’un des meilleurs connaisseurs de cette région d’Afrique, auteur de l’ouvrage « Le Darfour, un génocide ambigu » (*).

(*) La Table ronde, 2005, 263 pages.

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