Les mots sont des armes redoutables qui peuvent offenser, terrifier et hanter longtemps les esprits. Ceux contenus dans la lettre anonyme adressée, le 12 septembre, à la mosquée de Pau, ont glacé d’effroi les responsables de l’enceinte sacrée musulmane, d’autant plus que ce n’est pas par voie postale qu’ils leur sont parvenus… Mais accrochés sur la porte d’entrée du lieu de culte !
Ecrits à l’encre noire de la haine, ils ont déversé leur venin sur le papier, à travers des phrases explicitement menaçantes et injurieuses envers le Prophète Muhammad, dont l’une d’elles, hautement inflammable, a provoqué un fort choc émotionnel : «Je vous brûle, je brûle le Coran».
Bien dans l’air vicié et incendiaire du temps, propice à la multiplication des autodafés odieux du Saint Coran, notamment en Suède, au Danemark et aux Pays-Bas, elle a été prise très au sérieux par les responsables de la mosquée de Pau, qui n’étaient, hélas, pas au bout de leurs surprises…

En effet, sur le parking du lieu de culte, une autre découverte peu rassurante les attendait : des feuillets en arabe, vraisemblablement extraits d’un exemplaire du Coran, étaient éparpillés sur le goudron, après avoir été brûlés, aux côtés d’allumettes. « C’est très inquiétant », a réagi Abdeljalil El Ayoubi, vice-président de la mosquée de Pau, effaré devant une mise en scène qui a fait ressurgir de mauvais souvenirs.
« On n’est pas sereins, on s’imagine tout de suite le pire », a-t-il confié à France Bleu Béarn, ajoutant : « On se dit bien que ça peut très vite devenir extrême, peut-être en brûlant la mosquée, c’est déjà arrivé à Bayonne ».
Un frisson de peur parcourt depuis la communauté musulmane du Béarn, fief historique du roi Henri IV, promulgateur de l’Edit de Nantes sur la tolérance religieuse, car ce n’est pas la première fois que leur mosquée est la cible de menaces islamophobes : « C’est déjà arrivé il y a quelques années, on avait reçu un courrier mais ce n’était pas allé aussi loin », se désole Abdeljalil El Ayoubi.
Et de poursuivre en tirant la sonnette d’alarme : « La communauté musulmane est stigmatisée dans les médias, alors des personnes qui n’ont aucun recul peuvent passer à l’acte. En tant que Français musulmans, on est inquiets ».
Les responsables de la mosquée de Pau, qui ont été assurés du soutien du préfet du département, ont porté plainte et une enquête a été immédiatement diligentée. Ils envisagent désormais de doter le lieu de culte de caméras de vidéosurveillance.