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Grenade lacrymogène dans la mosquée : témoignage d’un fidèle

Djamel était parmi les membres de la délégation du quartier du Haut Clichy qui a rencontré hier le Préfet de Seine-Saint-Denis, ainsi que le sous- préfet de Raincy. Présent lors des faits, il nous livre son témoignage au sujet de la grenade lacrymogène lancée dans la mosquée de Clichy-sous-bois.

Que s’est-il passé dimanche soir durant le Tarawih, la traditionnelle prière du mois de ramadan

Pendant la prière au sein de la mosquée Bilel de Clichy -sous- bois, alors que les fidèles étaient en prosternation, des CRS ont tiré une grenade lacrymogène dans la salle de prière au milieu de l’assemblée. En fait, les CRS voulaient passer près de la mosquée, mais apparemment une voiture sembler gêner leur passage. Ces derniers ont donc ouvert la portière de la voiture pour desserrer le frein à main. Le propriétaire de la voiture qui a été prévenu par d’autres fidèles que sa voiture gênait, est alors sorti en courant pour présenter ses excuses aux policiers. L’un d’entre eux a baissé son casque et lui a mis sans aucune raison un violent coup de tête.

Un fidèle situé à l’entrée de la mosquée, et d’autres habitants du quartier qui étaient dans leurs balcons ont vu cette scène, et ont protesté contre cette injustice et cette violence gratuite. C’est à ce moment là, que les CRS ont envoyé cette grenade en direction de la mosquée. Plusieurs cartouches lacrymogènes dont une ou deux ont atterri au milieu des fidèles. Le jet n’était donc pas accidentel, les policiers savaient très bien que ce lieu était une mosquée et que la salle de prière était bondée.

Comment la grenade lacrymogène a-t-elle pu pénétrer dans la mosquée ?

Les portes de la mosquée étaient ouvertes pour permettre une certaine aération, c’est donc du côté des portes étroites que les CRS ont envoyé la grenade lacrymogène en direction des fidèles. Au départ, les policiers ont prétendu qu’un émeutier s’etait réfugié dans la mosquée. Ceci dit, aucune justification n’est valable pour agir ainsi. Comment peut-on concevoir qu’un représentant de l’Etat censé assurer l’ordre et la sécurité de tous, décide de lancer un projectile lacrymogène sur des innocents en prière ? Maintenant nous savons ce qui s’est réellement passé, et nous souhaitons que des excuses sincères soient présentées aux fidèles de la mosquée, aux clichois qui sont en état de choc après cet acte ignoble mais aussi à la municipalité.

Il y a eu ensuite des scènes de panique

Oui, les gens ont paniqué, on entendait des cris et des pleurs de toutes parts, des personnes âgées et des femmes se sont évanouies. Les gens craignaient de sortir du lieu de culte, de peur d’être pris pour cibles. Cet acte totalement irresponsable aurait pu entraîner des conséquences beaucoup plus graves à cause des bousculades que le lancement de cette grenade a provoquées. Il y avait beaucoup d’émotion. Il régnait un grand sentiment d’injustice. On a tous eu le sentiment également, que dès lors qu’il s’agit d’une mosquée, ces « forces de l’ordre » ne font montre d’aucun respect. Ces CRS auraient-ils agi ainsi avec un lieu de culte d’une autre confession ?

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Les responsables associatifs et religieux ont-ils tout de suite appelé au calme ?

Oui, tous les responsables associatifs et religieux ont aussitôt appelé au calme, mais ça n’a pas été évident après ces événements . Les jeunes qui ont vu leurs parents s’évanouir, ou en état de choc, étaient en proie à une forte colère. Lundi soir, tous les jeunes qui fréquentaient la mosquée, se sont organisés en vue d’une médiation afin de ramener tout le monde au calme. Les jeunes ne pouvaient pas aussi facilement rentrer chez eux et cesser les « émeutes ». Il fallait aussi leur dire que nous les comprenions, mais que nous avons une manière plus raisonnable d’exprimer notre mécontentement. Aussi, en signe de protestation contre les agressions policières, nous avons tous collé sur nos vêtements une affiche demandant : “RESPECT ET JUSTICE POUR NOS ENFANTS ET NOTRE CULTE”. La médiation s’est ensuite très bien passée, nous continuerons à agir pacifiquement en espérant qu’il n’y ait pas de provocations de la part des forces de l’ordre.

Quel est l’état d’esprit de la population clichoise ?

Nous sommes tous abattus après ces événements, même la majorité silencieuse qui était pacifique, est de plus en plus hostile à la présence des CRS sur leur lieu de vie. Ils ont commis quelque chose de très grave, aucunes excuses, aucuns regrets, rien n’a été exprimé, alors que les habitants attendent des explications et des excuses avec impatience !

Comment le calme peut-il revenir ?

Si la direction départementale de la sécurité publique reconnaît les faits et exprime ses regrets tout en sanctionnant les CRS incriminés, je pense que tout le monde comprendra que nous sommes vraiment dans un Etat de droit. Cette action, si elle est réalisée , aura des retombées très positives à Clichy-sous-bois et même ailleurs. Une certaine confiance en l’Etat pourra être restaurée. La population, ici, a besoin d’être rassurée sur les intentions réelles des services de “maintien de l’ordre” après les dernières bavures policières.

Propos recueillis par Salim Kouidri

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