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Victoire de la jeunesse algérienne

Ce que la jeunesse Algérienne a fait, depuis le 22 Février jusqu’au 5 Avril 2019, est historique. Le monde entier est témoin. En moins de sept semaines, elle a obtenu une victoire politique. En vérité, trois victoires en une. La démarche pacifique de la contestation est la première victoire. L’unité de tous les Algériens est la deuxième victoire. L’adhésion de l’Armée Nationale populaire, en phase avec le peuple, est la troisième victoire.
C’est une deuxième indépendance. Il s’agit d’une soif de vivre et la volonté de prendre son destin en main. C’est un projet de société démocratique, pour notre temps, propre à l’Algérie. Elle se réapproprie les valeurs de Novembre et se projette dans l’avenir, consciente des impasses, des difficultés et du facteur temps. 
Ce n’est pas seulement un sursaut de dignité face à des dysfonctionnements politiques. Lié à un nouveau cycle de l’histoire, cela concerne le recouvrement de la légitimité populaire en vue de relever les nouveaux défis. Les enjeux sont stratégiques. Il était impératif de répondre à l’appel de la jeunesse. Reste à comprendre comment elle conçoit l’avenir. Chacun doit s’impliquer afin que la victoire se traduise en projet de société, cohérent et apaisant, et ne soit pas détournée.
La synthèse, le juste milieu, le défi national
La jeunesse, déterminée, démontre que la synthèse entre le passé historique et les exigences de la nouvelle génération peut s’accomplir. Les Algériens unis prouvent qu’ils peuvent être la manifestation vivante du juste milieu, de la ligne médiane. Articulation entre une culture nationale traditionnelle et une sécularisation constructive. Entre spécificité et mondialité, autonomie de l’individu et l’être ensemble, fidélité et changement, entre patriotisme et universalisme. Le plus important est ce qui unit
Dépassant les traumatismes du passé, les fractures, les séismes politiques et les pulsions négatives, dans le tableau des manifestations se sont exprimées la fidélité aux valeurs algériennes de bravoure et de tolérance et la créativité moderne. D’où de surcroît la mixité des styles, des classes, des âges. Tous unis par ce qui transcende : la citoyenneté algérienne, éprise de justice, de liberté et d’intégrité, à la recherche légitime du bonheur. Les jeunes, y compris les plus démunis, s’engagent en politique au sens noble et chantent leur amour pour la patrie, sans aucun ressentiment.
Islamité, arabité, amazighité, et authenticité et progrès, en toute harmonie, se conjuguent sur la terre de Novembre. C’est la réinvention d’une identité ouverte, fraternelle, responsable et vigilante, loin des surenchères, des instrumentalisations et des exclusions. L’enjeu désormais est de préserver le souffle de l’unité, par le dialogue, de saines émulations et les concurrences loyales.
Dans le monde actuel, être un peuple capable de vivre l’unité et la pluralité, l’ancien et le nouveau, dans la médianité, de manière libre et réfléchie, n’est pas aisé. Cela constitue le défi universel que veut relever une nouvelle Algérie.
La maturité politique des jeunes et leur capacité à faire la synthèse est le fruit de l’histoire du pays forgé par l’adversité. Les jeunes sont non seulement assoiffés de démocratie, de justice et d’intégrité, mais aussi d’un modèle de vie plénier, pas seulement enraciné, ni seulement moderne. Modernité et authenticité, un ensemble.
Les défis mondiaux
La jeunesse algérienne sait que le contexte mondial est préoccupant, injustement hostile aux pays attachés à leur souveraineté. L’Algérie est constante dans sa politique extérieure. Elle est un partenaire crédible et rigoureux pour la paix mondiale. En ce XXIe siècle, l’humanité vit une fin de civilisation, avec la menace d’une domination hégémonique. L’Algérie nouvelle vise le chemin d’une émancipation par la méthode pacifique, pour barrer la route aux manipulations.
La jeunesse algérienne vigilante a choisi sa propre voie pour faire face à l’autoritarisme et aux incertitudes du désordre mondial. Désordre marqué par la politique des deux poids et deux mesures et l’uniformisation qui sape les sociétés. La mondia-occidentalisation est ambivalente. Elle favorise le progrès technoscientifique et la règle de droit, mais dicte des comportements déshumanisants et fabrique des extrémismes, des ingérences, le détournement médiatique mortifère. Les hérésies du capitalisme visent l’hégémonie politique.
Nous avons besoin d’une pensée politique qui fait face à ces défis et bâtit des ponts entre les peuples. Ce qui se passe dans notre pays est exemplaire, et confirme la possibilité de sortir des extrêmes, de forger une société souveraine et fraternelle, en droite ligne des principes de Novembre et de ceux de la Charte des Nations unies.
Le peuple Algérien s’est levé pour tenter de relever de nouveaux défis politiques et existentiels. Il revendique non seulement le changement de système, pour accomplir les promesses de l’indépendance, mais aussi de répondre aux défis mondiaux de notre temps. Cela a trait au vivre ensemble mondial en paix. Tout comme l’héroïsme de Novembre avait nourri la libération d’autres peuples, la victoire de la contestation pacifique de la jeunesse algérienne donne à penser au monde.
L’économie politique
Sur le plan de l’économie politique, l’Algérien sait que l’on veut l’enfermer entre deux formules problématiques. La première, celle du libéralisme sauvage qui met l’accent sur les capitalistes pourvoyeurs d’emplois, pour faire oublier ses carences qui sont le chômage, le consumérisme immoral et l’atteinte à la nature. La deuxième concerne la redistribution collective de la rente par l’État comme gage de la paix sociale, pour occulter la question de la légitimité et de la valeur travail.
Ni l’accumulation individuelle de la richesse, ni le monopole de l’État ne doivent contrevenir aux règles du bien commun, de la transparence et de principes moraux. Toute la question est de pouvoir conjuguer économie de marché et justice sociale,  liberté d’entreprendre et éthique, contestation et ordre, en vue de sortir des antagonismes et des pouvoirs occultes. L’énergie débordante de la jeunesse, qui s’est libérée, reflète ses grandes potentialités. Si son degré d’implication dans la gestion du pays sera élevé, et comment peut-il en être autrement,  elle sera capable de transformer le pays vers le bien.
La ferme volonté populaire de n’accepter aucune prorogation du système, de rejeter les économies prédatrices et l’attachement à la dimension pacifique, et tout autant le refus catégorique de toute ingérence, a reflété l’exaspération maîtrisée et le haut niveau de conscience politique de la jeunesse, qui fait renaître l’idéal démocratique et l’aspiration à entreprendre.
Que faire demain ?                                                      
Suite à la triple victoire, des mesures de confiance apaisantes, conformes à la demande de rupture et de transparence, dans le respect de l’esprit des lois, les jeunes citoyens seront capables de faire lien avec l’État. En termes pragmatiques, par la concertation, comme l’exige le peuple, il s’agit d’engager sereinement et graduellement la transition démocratique, sur la base de valeurs communes.
De manière publique, commune, pacifique et joyeuse, les jeunes ont changé le cours de l’histoire. Sans démagogie, ni paternalisme, le devoir est d’être à leur écoute, de les accompagner, par de la pédagogie, la transmission de l’expérience historique. Afin que la vigilance et le juste milieu se confirment.
 Une des conditions de la réussite est de discerner entre l’État et le système. Sur la base de la demande populaire de changement, après la satisfaction de la revendication politique principale, il y a lieu de dépasser la stratégie de la dénonciation, pour œuvrer à la refondation politique et à l’émergence de l’État de droit. Les jeunes ne doivent pas hésiter à fonder de nouveaux partis politiques. L’important est de s’organiser, avec comme souci la démarche consensuelle et comme aboutissement des élections démocratiques. L’urne est la voie pour faire librement émerger des règles universelles et de nouveaux responsables politiques.
 Ne laissons personne sombrer dans le populisme et dresser des murs entre les jeunes citoyens et les institutions et entre les générations. La défiance ne signifie pas anarchie et nihilisme. La consolidation de la victoire, pour le vivre ensemble démocratique dépend maintenant du dialogue, du respect du droit à la différence et de l’égalité citoyenne.
Par la démocratie, il s’agit de préserver la cohésion de la Nation, la Souveraineté, l’Algérianité. Un patrimoine au-dessus des conjonctures. Il est la source d’inspiration de toutes les générations. Le Nous algérien, du lien social, de l’unité, du commun, dans la pluralité, alliant mémoire et avenir, élite et peuple, État et société, a vaincu. Il se renforcera, en relevant ensemble les défis, pour un autre avenir.
Une décisive et longue étape de la vie collective vient de commencer. Il s’agit de préserver les trois victoires : du pacifisme, de l’unité et du lien fort avec l’institution militaire, dans le cadre du nouvel horizon démocratique.
 Mustapha Cherif
*Professeur des Universités

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6 commentaires

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  1. M. Mustapha Cherif Avec tout le respect qui frôle la vénération que je vous porte Aujourd’hui je ne peux être d’accord avec vos propos Nous avons de par le passé vu et entendu tout cela , Je ne vous ferais pas l’injure de vous les rappeler (Ukraine Kirghizstan Yougoslavie nos voisins Egypte et Tunisie )Chaque fois l’occident les a récupéré en état de délabrement total .Et les années passant sont retombé dans le sous développement Economique Culturel et même Moral Je ne voudrais pas voir l’Algérie subir ce sort Après avoir été un phare pour l’Humanité

    • Pour la laïcité à la française NON Merci Ne serait il pas temps de laisser chaque peuple choisir son destin Cesser cet esprit néocolonialiste à vouloir tout le temps dire aux gens ce qu’ils doivent faire et même penser 60 Ans après la décolonisation les peuples sont devenu matures et sont adultes Que je sache personne ne vient donner des leçons aux “Bretons “comment ils doivent gérer leur vie Ne serait -il pas temps de laisser les peuples se choisir leur destin se croire plus intelligent que tous les autres se croire le Centre de l’univers “Nombril du monde”

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