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Un regard d’historien sur l’affaire des caricatures

La parution des caricatures de Muhammad et la rhétorique homicide insensée qu’elles ont suscitée dans le monde islamique est encore un mauvais coup porté aux « musulmans éclairés »[1], de plus en plus empêtrés dans les paranoïas opposées d’une Europe incapable d’extirper son soupçon primaire à l’égard de l’islam, et d’un monde musulman sous développé, figé dans une arriération obscurantiste apparemment indépassable.

Dans le quotidien d’une vie en Europe, le plus apparent demeure ce qui se laisse lire ou entendre dans les divers médias, complaisamment ouverts à des spécialistes de la défiance, de la suspicion et de la mise en demeure. Quant au monde musulman, chacun sait que rien ne sera possible tant que ne seront pas résolues les questions du développement sous tous ses aspects et la question de la démocratie et des droits de l’homme, sans cesse congédiée par des régimes despotiques de tous acabits, très bien tolérés par les Etats du monde développé.

Aussi, depuis cette Europe et du point de vue d’une empathie musulmane, il n’est pas inutile de proposer très rapidement à ceux qui veulent l’entendre, une perspective sur trois questions soulevées directement ou indirectement par cette désolante affaire. Cette pratique de la mise au point analytique, non pas pour s’expliquer ni se justifier, mais pour engager et entretenir le commerce de bonne compagnie nécessaire désormais à la construction des solidarités indispensables à un monde qui se réarticule, par la force des choses, autour de cultures, de temporalités, de processus, de mythes et de références prodigieusement composites. Cette pratique pour dépasser aussi l’attestation incantatoire de principes soi-disant universels, dont l’historicité a disparu des mémoires de leurs idolâtres, et dont l’application peut passer par des modalités multiples, oubliées par les ultras des deux extrêmes ou à imaginer pour demain.

La première de ces « mise au point », rapides et sommaires, à titre d’exercice de style, conduites aussi bien pour sa propre gouverne que pour l’information de qui ne porte point d’empathie musulmane, concerne la représentation graphique et la dérision en culture d’Islam, la seconde l’attitude dominante dans les sociétés musulmanes face aux figures religieuses et au sentiment de foi.

Une troisième, une peu plus longue, incongrue peut-être, apparemment hors sujet, explorant d’autres réalités, mais inévitable pour un citoyen cohérent du monde où nous sommes jetés, propose une réponse à la question assez rarement posée en terme d’analyse de système ; celle de savoir à qui profite aujourd’hui le plus la peur de l’islam.

La question de la représentation graphique et la culture de la dérision.

Sur le point de la représentation de la figure humaine et du prophète en particulier, il convient de s’inscrire en faux contre les affirmations de traditions anhistoriques construites a posteriori et reprises sans critique.

Il est en effet possible à ce propos, de fortement présumer, d’après d’incontestables traces archéologiques, que l’interdiction de la représentation animale et humaine ne semble pas en vigueur au tout début de l’Islam. Son apparition pourrait dater de l’époque de l’empire omeyyade (661-750), au second tiers du huitième siècle, dans des conditions mal définies, dans un contexte qui voit rejeter le culte des icônes par l’empereur de Byzance et les interdire aussi par le calife omeyyade dans les églises de son empire[2]. Sans doute de nombreuses influences, modes, intérêts politiques, surenchères religieuses, avec juifs et chrétiens iconophiles ou iconoclastes[3], jouèrent-ils dans l’interdiction, qui apparaît désormais consubstantielle à la religion du prophète dans les traditions postérieures et les reconstructions dogmatiques dont l’islam est aussi coutumier que toutes les croyances et doctrines.

L’idée selon laquelle l’islam serait ontologiquement opposé à la représentation des figures vivantes en toutes occasions est donc une absurdité que dément toute une production iconographique, depuis les illustrations médiévales en Syrie omeyyade, en Espagne musulmane jusqu’à la miniature dite persane, qui se produit en Iran, Inde et Asie, centrale et mineure. Cette miniature ne répugne pas à représenter la figure de Muhammad suivant des codes particuliers, du voile devant le visage et plus rarement à découvert[4], presque toujours nimbée de feu ou d’une mandorle[5], que l’on retrouve aussi dans l’art religieux européen, parallèlement à la classique auréole.

L’art musulman n’a d’ailleurs pas attendu, nous le disions, l’apparition de la miniature « persane » pour représenter l’homme dans la vie sous tous ses aspects. Les dessins d’al-Hariri (1054-1122) sont là pour en témoigner, de même que ceux, plus tardifs (XIIIe siècle) d’al-Wasiti, né en Irak, à Wasit, ou d’autres peintres andalous et maghrébins, témoins aussi bien des dévotions que des amusements de leurs contemporains. Les thèmes traités sont bien souvent le plaisir de vivre, l’amour, la femme, le vin, la chasse et la volupté de jardins précurseurs du paradis. Il ne manque pas non plus de sujets plus scabreux et d’épisodes assez dérisoires de la vie populaire, avec ses faiseurs de farces, ses malandrins, ses escrocs et ses dupes.

Ici la dérision s’exprime à l’envi, comme elle s’exprime, du monde turc au monde maghrébin dans les contes et histoires des Nasr al-Din Khoja, Qaraqush ou Djeha (aussi prononcé Goha). L’ironie, l’humour, la moquerie acerbe ou aimable, la provocation, la pitrerie, la farce étaient au rendez vous avec ces figures, en des époques où la dérision face à un calife, un émir, un khan, un pacha, ou simplement un riche marchand, pouvaient coûter la bastonnade, l’emprisonnement ou la mort. Il fallait donc du courage pour oser la manier et elle ne valait que par le risque pris lorsqu’elle s’exerçait à l’égard d’autrui. Elle pouvait en revanche se donner cours à l’envi contre soi même ou ses semblables. C’était alors la déontologie minimale pour une saine et juste pratique du persiflage et du sarcasme.

La culture musulmane face aux figures religieuses et au sentiment de foi.

S’il s’agit maintenant de savoir comment l’on réagit, depuis une empathie musulmane, croyante ou non, car il y a une manière musulmane de ne pas croire et de contester la religion, s’il s’agit de savoir comment l’on réagit depuis cette posture, face aux grandes figures religieuses, face au sentiment de croyance et de foi, il faut immédiatement relever le fait que les cultures d’Islam n’ont connu aucun des grands soupçons et des grands ressentiments dans lesquels peuvent s’ancrer les divers rejets du religieux en Europe.

En effet, si la chrétienté médiévale a suscité de la représentation de propagande, souvent au détriment du musulman, notons le, en proposant des images ou bas reliefs de Maures aux pieds de faunes ou nantis des attributs sataniques que sont les cornes ou la queue[6], jamais les relations inter religieuses, dans le cadre de la protection traditionnelle des non musulmans, n’ont déterminé de semblables œuvres dans le monde de l’Islam. Au surplus, l’inclusion profonde dans les références musulmanes des figures religieuses du christianisme rendaient impossibles la moindre dérision à l’égard de Jésus, vénéré par l’islam. Seule la conception coranique d’un Dieu unique, en aucune manière trinitaire, avec un Christ dépouillé de son statut divin, pouvait présenter une mise en cause de sa figure au regard du christianisme, mais jamais aucun musulman au long de l’histoire n’a pu sérieusement se livrer sur Jésus, ou une autre figure religieuse majeure de la tradition judéo chrétienne, à aucune critique semblable à celles qui ont pu être produites sur le prophète dans l’Europe chrétienne. Il y a donc là une inégalité de posture dans la longue durée, qui a généralement écarté, même les musulmans les plus critiques à l’égard de leur tradition, d’attaques délibérées contre les figures prophétiques notables et contre le sentiment religieux en lui même.

Par la suite, les sociétés d’Islam n’ont pas connu, dans les périodes modernes et contemporaines, des conditions de sécularisation et de soupçon du religieux, du clérical, semblables à celles qui se sont trouvées en Europe, et particulièrement en France ; les évolutions économiques, géopolitiques et culturelles n’étant pas les mêmes. Au surplus, le fait colonial prolongé par ce que l’on a nommé le néo colonialisme, producteur pour une certaine part des faillites du développement des pays musulmans, a permis pendant au moins deux siècles, suivant des modalités régionales et culturelles diverses, aux agents religieux de se confirmer ou se légitimer comme des acteurs majeurs du jeu social, culturel et politique.

On constate donc ici aussi, dans le plus court terme, une dissemblance des évolutions historiques également productrice de différences dans l’attitude face au religieux. Seule peut être, la situation qui prévaut avec l’influence grandissante de ce que l’on nomme l’islamisme sur analysé par des instances, des officines et des individus de toutes sorte, des meilleurs, comme François Burgat, aux pires, qu’on se gardera de nommer, aurait pu contribuer à modifier cette posture. Il n’en est rien et il est d’évidence, même après les souffrances endurées par certains, que le respect du sentiment religieux, musulman ou autre, comme le respect des valeurs de démocratie et de liberté restent en général profondément ancrés. Cela n’empêche pas la critique des agents religieux et de multiples caricatures les brocardent, les tournent en ridicules dans de nombreux journaux et revues.

A qui profite la peur ?

Il est pourtant de fait, malgré l’ouverture et l’esprit de compréhension et de dialogue sans cesse manifesté par la majorité des musulmans d’Europe, quoi qu’en disent les sempiternels virtuoses de la suspicion, que la peur de l’islam perdure, s’enfle, renaît et risque de se ré enraciner de plus en plus fortement dans les esprits. Dans ce sens, les divas de la défiance systématique, ne manquent pas d’en rajouter lorsqu’on les invite à édifier les foules télévisuelles chaque fois que l’Arabe, ou l’islamiste, (il n’y a guère d’autre catégorie dans les sphères d’entendement de l’homo médiaticus), entrent dans le champ de l’actualité. Elles font le plus de mal possible et mettent à l’épreuve le réseau d’intercompréhension et d’échanges édifié patiemment par de multiples bonnes volontés. On pourrait sonder leur psychologie et trouver de nombreuses raisons à leur posture de mépris, de rejet et de refus de l’autre, déguisée sous d’excellents arguments. On n’y perdra pas son temps.

Ce qui importe en effet, c’est de comprendre enfin que la peur de l’islam n’est pas un accident politique, mais un outil politique, que la peur de l’islam n’est pas un effet de maladresses, une malencontre, un embarras, une péripétie regrettable, mais une construction délibérée, sans cesse remise en chantier, selon des modalités variables et renouvelées, souvent d’une extraordinaire duplicité, par ceux qui en tirent le plus de profits, symboliques, matériels et politiques.

Trois acteurs essentiels peuvent s’identifier dans ce psychodrame planétaire permanent.

Loligarchie prédatrice américaine.

Le premier, englobant tous les autres, les déterminant et les utilisant, est la puissance états-unienne, qui procède selon la logique d’une prédation oligarchique dans le cadre d’un système démocratique. Cette prédation, rendue possible par une démocratie américaine marquée par un caractère oligarchique issu du système mis en place par des pères fondateurs il y plus de deux cents ans, s’opère par une ponction directe sur la ressource fiscale fournie par les citoyens américains. De la sorte, à travers l’ensemble des crédits alloués aux divers organismes de défense, de recherche, de renseignements, d’aide internationale, de reconstruction, etc., ce sont des lobbies, des complexes industriels, des entreprises, des clans, des individus extrêmement privilégiés et interpénétrés de manière étroite avec le personnel politique, que la grande et puissante Amérique, avec ses ressources immenses, sa créativité sans égale, son peuple ardent et imaginatif, ses institutions exemplaires, enrichit depuis la guerre froide jusqu’à nos jours.

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Les mêmes recettes cyniques sont toujours mitonnées pour tromper les uns et les autres et se tromper mutuellement, d’un organisme à l’autre, avec vraies ou fausses informations, vraies ou fausses enquêtes pour continuer à toucher des crédits ou recevoir des commandes d’Etat, depuis les multiples services de renseignement jusqu’aux fabricants d’armes et aux pétroliers, en passant par des scientifiques sans conscience et les multiples agents d’influence disséminés sur la planète et officiant dans les lieux d’autorité intellectuelle ou de pouvoir.

Parallèlement, tout un système d’intimidation des citoyens s’est mis en place, avec une idéologie quasi officielle, dispensée par grandes compagnies cinématographiques hollywoodiennes, puissants réseaux télévisuels privés et multiples Eglises plus ou moins fondamentalistes. L’exemple extrême que l’on donne de cette intimidation est l’action d’un Mac Carthy, au début des années 1950. On oublie à ce propos que ce sénateur anti-communiste a sévi sous un gouvernement démocrate qui ne le suivait pas et sans aval institutionnel, contre le gré, entre autres du Pentagone. Aussi est-ce plutôt dans le Patriot Act, voté par le Congrès dans le mois qui a suivi les attentats du 11 septembre 2001 et prolongé en juillet 2005, qu’il faut voir le parachèvement le plus parfait de l’intimidation idéologique aux Etats-Unis. Il agit en effet beaucoup plus efficacement que le maccarthysme, puisqu’il est en accord avec toute l’oligarchie au pouvoir et une majorité d’institutions, puisqu’il recueille enfin l’approbation d’une bonne partie du peuple. Cela grâce à l’action d’un président que l’on méprise partout, mais qui aura été sans doute un des plus efficaces à faire fonctionner l’ensemble du système de prédation oligarchique interne de son pays.

Le système des islamismes.

Le second acteur est représenté par le système des islamismes, installé dans tous les pays musulmans. C’est un ensemble à la fois complexe, insaisissable et marqué de près par toutes les instances de renseignement, de recherche, d’intoxication et de manipulation. Il est à la fois opérateur et objet d’opérations. Il se renforce et se légitime, dès que l’occasion lui en est fournie, de la peur de l’islam manifestée dans le monde développé de tradition européenne. Il en prend prétexte pour remobiliser une xénophobie anti-occidentale qu’il entretient et utilise, dans le même mouvement, pour conforter son influence sur des masses déshéritées, ne dédaignant pas d’user et d’encourager les formes les plus sanguinaires de la violence primitive. En effet, ces dernières sont un langage de terreur efficace, par leur charge symbolique et par ce qu’elles signifient directement, un langage adressé aussi bien à ces masses qu’à l’opinion internationale. Il prend prétexte enfin de toute manifestation notable de rejet de l’Islam en Europe pour entreprendre des opérations ponctuelles à visées internationales ou nationales, comme c’est indubitablement le cas à l’occasion de la parution de ces caricatures du prophète Muhammad.

Il rentabilise de la sorte la peur des autres pour renforcer globalement son influence sur le terrain musulman, et, par ce fait, augmente encore dans le monde développé la phobie anti-musulmane nécessaire, depuis quelques années, au bon fonctionnement de la prédation oligarchique états-unienne qui s’opère avec d’autant plus de fluidité que le contribuable américain, effaré par toute une violence primitive affichée, se persuade que son pays doit impérativement se protéger du terrorisme. Ainsi, l’ensemble de ces organisations, quel que soit leur degré d’institutionnalisation, agissent en systèmes structurellement reliés, tout en ayant l’air de s’opposer et de se combattre. On peut même dire, d’une certaine manière et pour un temps donné, que la symbolique d’opposition est indispensable à leur fonctionnement commun, lequel contribue également, dans le dispositif aujourd’hui en vigueur, à leur survie autonome.

Dès lors, une bonne compréhension des enjeux, d’un point de vue européen, serait de ne pas contribuer à renforcer ce fonctionnement et entreprendre un vrai projet d’affirmation planétaire souveraine, laquelle affirmation souveraine, dans l’état des réalités géographiques, politiques culturelles et démographiques d’aujourd’hui, ne peut s’envisager que dans une alliance sincère avec le monde de l’Islam. Nous sommes loin d’en être là.

Les despotismes du monde musulman.

Bref, trêve de digression géopolitique, rappelons enfin qu’il existe un troisième acteur dans cet agencement. Il évolue dans un entre deux à la fois inconfortable et obligé : c’est l’ensemble des despotismes du monde musulman, qui navigue entre ces deux systèmes, s’affrontant ou composant avec l’un ou avec l’autre, souvent avec les deux à la fois, pour opérer de son côté la prédation primitive[7] des ressources offertes par les pays et les peuples qu’ils dominent. La peur lui sert à se présenter comme un rempart contre l’islamisme au yeux du monde prospère de tradition européenne, soucieux de sa paix pavillonnaire comme de ses vagabondages touristiques aux plages et aux pyramides. A certaines occasions, comme en cette affaire de caricatures, il fait semblant de s’offusquer et profite de l’occasion pour électriser les foules et détourner un temps le mécontentement de ses populations.

Permanence du dispositif et des fonctionnements.

Une telle réalité géopolitique prolonge le système en vigueur à l’époque de la guerre froide, où fonctionnait au centre la même prédation oligarchique états-unienne, déterminante dans ce dispositif. L’ensemble des despotismes musulmans jouait, dans un contexte différent, au fond le même rôle géopolitique qu’aujourd’hui, avec peut être des marges de manœuvre plus claires pour des leaders encore bercés de l’illusion de l’indépendance et du développement.

La différence essentielle était que l’antagoniste majeur, pourvoyeur de l’obsession paranoïaque nécessaire à la mise en œuvre de la logique de prédation interne aux Etats Unis, n’était pas encore l’islam radical, alors sous contrôle des despotes musulmans et souvent auxiliaire de l’Amérique dans sa lutte contre le communisme. C’était l’ensemble soviétique, ennemi de toutes les libertés conquises par les démocraties de tradition européenne occidentale. C’était une entité visible. Elle était objectivement menaçante, par des armes, un système économique concurrent, une compétition mondiale pour imposer modèle et influence.

Aussi, lorsque tombait le mur de Berlin, que s’effondrait le monde communiste, le système de prédation oligarchique états-unien risquait de se trouver en manque d’ennemis nécessaires à la construction de la peur dont il a tant besoin. C’est alors que les diplomates américains manipulèrent un des plus sanguinaires despotes arabes, Saddam Husayn, et le piégèrent dans une guerre frontale, après l’avoir utilisé contre l’Iran, sans réaction aucune de la puissance soviétique en décrépitude.

Ainsi ledit despote fut érigé pour une longue décennie en menace pour le monde libre. Avec cynisme et brutalité, mais avec au fond la meilleure efficacité du point de vue des intérêts de son oligarchie, le premier président américain du XXIe siècle, prenant occasion de l’attentat du 11 septembre 2001, put éliminer ce pourvoyeur principal de frayeur, qu’une trop longue présence liée à une trop longue impunité, risquait d’user comme épouvantail de service, et le remplacer par le personnage le plus pratique, le plus souple, le moins précis et le plus manipulable, le plus fantasmatique, donc le plus opératoire pour le système ; le terroriste islamiste international.

Il suffit désormais de caricatures, de quelques tours de passe-passe, de n’importe quelle initiative d’un groupe ou d’individus irresponsables, de la rhétorique assénée par quelques agents d’influence, d’entreprises éditoriales habiles, de quelques opérations de désinformation, de films, d’émissions de télévision, pour que se ranime désormais à tout moment, à très bon marché, l’énergie essentielle à ce système ; LA PEUR, plus précieuse que tout pour régner sur l’Amérique et le monde et continuer de s’enrichir avec ses amis.



[1] La notion de musulman éclairé, issue de la terminologie néo illuministe et du vocabulaire des encyclopédistes français du XVIIIe siècle, peut présenter un intérêt pour s’auto désigner et se projeter dans l’avenir d’une société. Elle peut aussi présenter des inconvénients lorsqu’elle est reprise à son compte par le langage commun et qu’elle sert à des injonctions par cette société de prouver son caractère éclairé par des inféodations radicales et sans conditions. Au surplus, l’histoire des colonisations a très bien démontré que le musulman éclairé a été systématiquement éliminé, rejeté, ou, au mieux, méprisé et jamais écouté ni pris en compte. Le parcours pathétique de ceux que l’on appelait évolués, en Algérie, le montre bien. Ne parlons pas de la mise à l’écart des bourgeoisies rétives au Moyen Orient, et particulièrement en Irak, qui a laissé des sociétés entières orphelines de leurs élites traditionnelles. Quant aux masses, on s’est très bien arrangé pour les administrer avec la collaboration d’agents indigènes obéissants et serviles. C’est une vieille technique coloniale que de requérir les élites quand la masse fait peur et d’en appeler au bon peuple lorsque les élites dérangent. Mais enfin, nous sommes au XXIe siècle, il a passé de l’eau sous les ponts, et, comme disait parait-il Lincoln : « On peut traiter une personne en imbécile tout le temps. On peut traiter tout le monde en imbécile pendant un certain temps. On ne peut pas traiter tout le monde en imbécile tout le temps », (citation de mémoire et sans doute approximative, mais l’esprit y est).

[2] N’oublions pas que le calife de Damas règne sur un empire multiconfessionnel, où les musulmans sont encore minoritaires.

[3] N’oublions pas que le grand défenseur des icônes, saint Jean Damascène (650-750), contemporain par sa longue vie de toute l’aventure d’expansion arabo musulmane et longtemps collaborateur des califes, écrivit son œuvre d’apologie des icônes au cœur de l’empire musulman, pendant que l’empereur byzantin les interdisait à Constantinople. Quel écho précis put avoir ce débat interne au christianisme dans les populations et les élites des villes de Syrie Palestine, juives, chrétiennes ou musulmanes ? On ne peut pas dire qu’on le mesure exactement.

[4] Il existe à Paris de ces représentations du prophète à visage découvert dans des manuscrits persans de la Bibliothèque Nationale par exemple. Il n’est donc guère malaisé d’en trouver.

[5] La mandorle est un entourage en forme de flamme ou d’amande, qui englobe toute la personne du saint personnage. Elle se rencontre en occident chrétien autour de peintures ou de bas reliefs de la Vierge en particulier. Elle peut aussi entourer des scènes entières de l’histoire sainte.

[6] Voir sur ce point les travaux de Philippe Senac ou John Tolan.

[7] On pourrait évoquer ici le concept de « néo patrimonialisme » parfois utilisé pour désigner le mode de prédation de ces régimes. Cette prédation est primitive dans la mesure où elle ne doit pas passer par le biais d’une récupération indirecte de la manne fiscale, comme dans la prédation oligarchique aux Etats-Unis. Elle s’opère directement par le partage de cette manne entre membres de familles, de clans ou de tribus, installés dans l’appareil d’Etat ou dans les instances économiques. A certains égards, la forme particulière de prédation oligarchique organisée dans une démocratie, s’apparente, en ce qui concerne les deux présidents Bush et leur entourage, à du néo patrimonialisme.

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