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Un manque de tact ?

Il est difficile, quand on adhère pleinement à la devise de la République (Liberté, égalité, fraternité) – même si la conjoncture nous rend plutôt sceptiques – de passer sous silence le “mais” présidentiel, à l’endroit de l’islam, lors de son intervention télévisée du mardi 16 novembre 2010. Monsieur Sarkozy souligne dans son intervention qu’il veut “un islam de France et non pas un islam en France”. Soit – même si cette nuance, devenue slogan pour certains, fut introduite et revendiquée par les musulmans eux-mêmes depuis 1990.

Elle fit l’objet d’un débat, au sein d’une organisation islamique française, qui avait aboutit à l’introduction de cette nuance dans son intitulé initial devenant ainsi, la fameuse “Union des organisations islamiques de France” (UOIF), plutôt qu’en France.

Le Président, toujours friand de nuances, ajoute : “qu’il y ait des lieux de cultes pour les musulmans, mais, c’est tout à fait naturel. Il y en a plus de deux mille ! Mais, en France, il n’y a pas de minarets et il n’y a pas de muezzin qui fait l’appel à la prière.” Dans cette construction syntaxique, c’est la deuxième conjonction “mais”, à valeur adversative, qui nous révèle le syndrome suisse des minarets. Un “mais” à l’adresse d’un électorat islamophobe à rassurer ou à conquérir. Oui, un “mais” qui se veut rassurant : “vous aurez un islam de France, effacé ; architecturalement non identifiable dans le paysage urbain français.” Le genre de “mais” qui, en réalité, creuse le sillon où germinent les discriminations qui renforcent, chez nombre de musulmans de France, le sentiment d’une citoyenneté de seconde zone.

Si, concernant le muezzin il ya chez les musulmans de France consensus sur sa discrétion – l’appel à la prière se fait à l’intérieur des lieux de culte – en revanche, se résigner à accepter une mosquée amputée de son minaret – dont la fonction aujourd’hui est, par ailleurs, purement symbolique – cela est vécue par les fidèles de l’islam comme une atteinte à leur dignité de croyants. Être contraint de travestir ou de ne pas inscrire dans le paysage urbain, au même titre que les autres cultes, le symbole architectural le plus saillant de sa foi, cela revient à admettre un statut d’infériorité qui génère un malaise et un sentiment d’injustice. Une sorte d’”islam honteux” comme disait pour l’islam des caves Abdelmalek Sayad.

Certes, le président Nicolas Sarkozy a rappelé, sur un ton qui dénote la satisfaction, que les musulmans de France ont à leur disposition plus de deux mille lieux de culte. Il a, cependant, omis de préciser qu’il s’agit là, à hauteur de 96%, de petites salles de prière dont la surface allouée au culte se situe entre quelques mètres et 500m2, et que seuls quatre mosquées ont une surface culte allant de 2000 à 5000 m2.

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En d’autres termes, si on opte pour l’estimation maximaliste selon laquelle il y aurait 17% de musulmans pratiquants qui fréquenteraient les lieux de culte islamiques en France pour la prière du vendredi, que le total des superficies de culte est d’environ 250 000m2 – sachant que chaque prieur occupe un mètre carré au sol –, et que la population musulmane de ce pays est d’au moins 5 millions de musulmans “potentiels”, on atteindra le chiffre de 850 000 “prieurs”, le vendredi – jour saint de l’islam – pour l’ensemble du territoire national métropolitain.

Il nous faudra donc environ 600 000m2 de plus pour satisfaire la demande en superficies allouées au culte proprement dit (1) . On est tenté de dire : “On est bien loin du compte Monsieur le Président !” On aurait, aussi, bien aimé l’entendre dire aux 5 à 6 millions de musulmans de France – qui célébraient ce jour là leur plus grande fête religieuse (l’Aïd el adhâ, fête du Sacrifice)- alors qu’il parlait d’eux : “bonne fête !” Il ne l’a pas fait !

Note :

Pour plus de détails sur ce point, lire notre article du 01/06/2009, ici-même.

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