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Un courant vivifiant

Le 25 décembre 2002, Pierre Rossi a quitté ce monde discrètement, comme il a d’ailleurs toujours vécu. Ainsi a disparu dans une totale indifférence, un penseur d’envergure mondiale qui avait consacré sa vie à méditer sur le destin de l’homme dans le mouvement universel. Il aura laissé une œuvre capitale qui reste encore à connaître et à reconnaître en ce qu’elle nous enseigne l’essentiel dans la condition humaine et dans la solidarité des peuples. Avec une pensée riche, dense, profonde et en tout cas rarement égalée, il a su cerner magistralement les grands défis qui se posent au devenir de ce que Arnold Toynbee appelait “la grande aventure de l’humanité“.

« Il y a des cieux dans l’âme qui gouvernent les cieux de ce monde  », telle pourrait être la toile de fond de la pensée de Pierre Rossi. Cette citation, puisée dans le patrimoine irakien antique, lui a inspiré ce remarquable commentaire : «  Ce qui, traduit dans le langage du rationalisme occidental, signifie que la morale est en fin de compte plus politique qu’une politique sans morale. »

Né le 28 octobre 1920 à Aullène (Corse), il prépare l’Ecole normale supérieure au Lycée Louis-le- Grand et enseigne les lettres classiques. Agrégé de grammaire, chercheur et philosophe, il est un des observateurs les plus autorisés du monde arabe. Il a passé la majeure partie de sa vie en terre arabe.

Après avoir créé à Assiout (Haute Egypte) un foyer franco-égyptien, il fonde en 1952 et dirige à Bagdad le Centre culturel de l’Ambassade de France. Il a accompli au titre de chargé de missions culturelles de très nombreux voyages entre Alger et Mascate, visité tous les pays arabes et rencontré de nombreux chefs d’Etat. Il traite des questions arabes dans l’hebdomadaire “La Tribune des Nations” (où il signait ses articles sous le pseudonyme de Pierre d’Istria) et la revue “Orient“. Il appartient à une famille traditionnellement en relation avec l’Islam ; son grand-oncle a servi en Egypte sous le Khédive, qui le promut général et pacha.

Riche d’un immense savoir, Pierre Rossi était l’un des plus grands penseurs de son temps. Il présentait l’histoire autrement plus vivante que la pensée scolastique ne tente de la réduire. « Il ne faut jurer de rien. A chaque coin de l’histoire conformiste se tient un diable ricanant ». Ainsi nousmettait-il en garde – comme il n’a jamais cessé d’ailleurs de le faire sa vie durant – dans son article “Songes et mensonges de l’histoire“, paru dans la revue Intelligenza de septembre 1993, paraphrasant le célèbre tableau de Picasso “Songes et mensonges de Franco” (1937) qui dénonçait la tyrannie du franquisme. Pierre Rossi évoque dans cet article plusieurs grandes affaires symboliques (Sekenenrê Taâ, Jeanne d’Arc, Fouquet, Jésus, Dreyfus, Ravaillac, Napoléon) pour stigmatiser le mensonge au nom de la Raison d’Etat.

Très tôt, il s’est passionné pour “l’univers arabe” – comme il se plaisait à l’appeler – quand il a croisé, à sa source (“l’ensemble egypto-cananéo-babylonien“), ce «  courant vivifiant parti de l’Orient [qui] n’a cessé à aucun moment de faire lever en terre d’Occident une profusion d’arts et de méditations créatrices ». Un tel cursus devait tout naturellement l’amener à se démarquer du dogme orientaliste avec ses visions réductrices et ses abstractions idéologiques. Et s’il a grandement contribué à une meilleure compréhension de l’Orient, des Arabes et de l’Islam, il a également œuvré inlassablement à l’émergence d’un monde nouveau où l’on aurait assisté au déclin de l’esprit des croisades et à la fin du choc des civilisations. En témoignent les nombreux ouvrages d’une exceptionnelle rigueur intellectuelle qu’il y a consacré :

– “L’Irak des révoltes” (Editions du Seuil)

  •  “La Libye” (Editions Rencontre)
  •  “La Tunisie de Bourguiba” (Editions Kahia – Tunis)
  •  “De Suez à Akaba” (Editions Cujas)
  •  “Le pétrole arabe dans la guerre” (Editions Cujas)
  •  “Les Clefs de la guerre” (Editions Sindbad)
  •  “La verte Libye de Khadafi” (Editions Hachette)
  •  “La cité d’Isis, histoire vraie des Arabes” (Nouvelles éditions latines)
  •  “L’Irak le pays du nouveau fleuve” (Editions J.A.).

    Dans “L’Irak des révoltes” paru en 1962, il présente un peuple en lutte depuis des siècles contre sa terre, que l’eau empoisonne plus qu’elle ne la fertilise. Un pays où se mêlent les trois mondes, asiatique, arabe et européen. Une croisée de routes commerciales propices à l’établissement de grands empires. Des richesses pétrolières moins miraculeuses qu’on ne croit. Tel est l’Irak, enfermé dans un paysage qui l’isole et le maintient dans un âpre destin. L’histoire y est une suite ininterrompue de guerres sociales qui éclairent les conflits actuels d’une lumière curieuse. C’est à Basrah, sur les bords du Golfe Persique qu’est apparu au IXe siècle le premier socialisme militant dont se réclame aujourd’hui le syndicalisme arabe. Révoltes, répressions, jacqueries, grandes peurs, capitales réduites en poussière : la révolution du 14 juillet 1958 ne fut qu’un nouvel acte de cette tragédie permanente. Mais sa révolte pour le pain, l’Irak l’a transformée, par une démarche propre, en protestation de la conscience individuelle contre l’État. La doctrine dissidente chiite, qui a brisé l’unité de l’Islam, a fait de l’objection de conscience une force politique qui est la donnée fondamentale de l’esprit public irakien.

    Plus tard, en préfaçant l’essai d’Alice Bséréni, “Irak, le complot du silence” (Editions L’Harmattan 1997) tout ému et avec une grande sagesse, il écrira : «  Ici la tragédie est dans l’air. Vague après vague, le peuple irakien a essuyé toutes les guerres et tous les fléaux naturels possibles et imaginables, sans jamais plier le dos comme si, ayant bu à la mort avant la mort, il détenait une puissance de résurrection inconnue chez nous ; il émane de sa personnalité une sorte d’invulnérabilité intérieure qui lui fait regarder comme vaines les injures mécaniques qu’on lui fait subir. (…) La guerre du Golfe nous invite à méditer longuement là-dessus et à nous dire que les plus perfectionnés des machiavélismes finissent par connaître tôt ou tard leur maître qui s’appelle Vérité. »

    En 1970, il publie “Les clefs de la guerre” où il analyse les origines, le déroulement (bataille de juin 1967, renaissance palestinienne, “négociations armées” actuelles), et les perspectives de la guerre au Proche-Orient. Résistance passive, armées classiques et menées populaires soutenues par la révolution, telles sont les armes des peuples arabes. Pacifiques, ils sont entrés dans le système de guerre pour contrer les desseins impériaux du Nouveau Monde, responsable d’un drame qui porte en lui les germes d’un affrontement mondial. Sans la moindre concession aux idées reçues, il donne les clefs de ce conflit “américano-arabe” en Méditerranée, celles du système de guerre moderne. Entretenant d’étroites amitiés avec l’ensemble des responsables de la politique arabe, il possédait des informations de première main dont il a utilisé la substance pour écrire “Les Clefs de la guerre“.

    « Par Israël interposé et par Arabes révoltés nous voici donc invités à répondre à la seule vraie question qui vaille d’y réfléchir : où débouche la guerre conduite par les organisations oligarchiques mondiales contre les peuples et les sociétés nationales ? Est-il possible de fonder une politique sur la mise en boîte sous vide des hommes et des choses, sur la négation des originalités nationales, du temps, des espaces et de l’humanité réelle ? Est-il possible qu’Israël, qui est un rêve armé mais un rêve tout de même, l’emporte sur la civilisation arabe, réalité permanente ? (…)

    « Tenir Suez et ses abords pour contrôler l’ensemble de l’Ancien Monde, tel fut et demeure le souci majeur de Washington et telle est bien aussi la première clef du conflit israélo-arabe. (…)

    « Le système militaire étranger installé en Palestine par le Pentagone menace donc à la fois l’Europe, l’ordre arabe et la tradition asiatique. Il est normal qu’il ait vu se coaliser contre lui toutes les forces qui en Europe, au Proche-Orient et en Extrême-Orient refusent de se plier à la nouvelle puissance impériale que sont les États-unis. La coopération qui a pu s’établir entre Paris, Moscou, Le Caire, Hanoi et Pékin est donc la deuxième clef de ce qu’on a appelé “la guerre des Six jours”. (…)

    « Il en est une troisième : l’adaptation des Arabes au système de guerre qui leur est imposé en recourant à une résistance nationale de longue durée, en opposant à la puissance des armes et du combat éclair celle de leur masse, de leur géographie, de leur économie ; déroutant ainsi les observateurs politiques qui en sont restés à croire que, tout comme à Crécy, l’équilibre des sociétés est modifié par le succès d’une charge de cavalerie (de Mirages ou de Phantoms…). (…)

    « Reste une quatrième clef : la nation palestinienne. C’est pour elle qu’a été ouverte la guerre il y a quelque cinquante ans et c’est par elle qu’elle se fermera. (…) Or, du fait de la puissance de la nation palestinienne, revendiquant la totalité de son sol au nom du droit le plus sûr, l’entité israélienne se trouve entachée d’illégalité et en quelque sorte prisonnière d’une Palestine dont elle peut nier le nom mais pas la réalité terrienne et humaine. »

    La cité d’Isis, histoire vraie des arabes“, paru en 1976 à Paris et réédité par l’ENAG à Alger en 1991, constitue la pièce maîtresse de l’œuvre de Rossi. Il y posait la problématique de l’Islam et l’impérieuse nécessité de connaître l’histoire du monde arabe. «  Une vision bornée de l’histoire nous a imposé d’en localiser les sources non loin de chez nous, dans l’aride péninsule hellénique et sur les misérables rives du Tibre. Les Européens réduisent volontiers les origines de leur culture aux cantons athénien et romain. C’est là une appréciation erronée : elle nous a été inspirée des partis pris confessionnels et politiques. (…)

    « Mais les préjugés demeurent ; mais un enseignement doctrinaire fausse nos jugements ; mais les images dont nous sommes hantés ont pris la place de l’évidence. Nous croyons que les cours d’histoire que nous suivons dans nos écoles sont identiques à ceux que professent Le Caire, Téhéran, Kaboul ou Calcutta. Ce n’est pas vrai. Sur cette illusion nous n’en avons pas moins établi nos prétentions à régenter les nations non occidentales. Quand nous aurons appris à peser l’exact poids des mondes qui nous entourent, nous découvrirons peut-être, outre la vraie fraternité, tout à la fois nos horizons et nos limites. Prestige du verbe, orgueil de soi, volonté de surélévation : lorsque nous avons prononcé le mot Occident, nous avons tout dit, comme si l’Occident était autre chose que la pente déclinante de l’Orient… (..)

    « Un courant vivifiant parti de l’Orient n’a cessé à aucun moment de faire lever en terre d’Occident une profusion d’arts et de méditations créatrices. Nous sommes restés des Arabes dans notre foi comme dans nos scepticismes. Dans l’Orfo de Monteverdi où plane la divinité solaire, dans la forêt infernale où rôde la panthère de Dante, tout autant que dans la science contemporaine où règnent l’atome et la logique des hypothèses, se fait entendre en sourdine le murmure continu de nos sources orientales. Il suffit d’y prêter l’oreille. »

    La cité d’Isis, où il a su magistralement mettre en évidence la fraternité des trois religions monothéistes, à travers le voisinage géographique et la parenté spirituelle, lui avait valu d’être invité officiellement à Damas.

    De même qu’il a publié deux romans, “Un soir à Pise” et “Les Conjurés d’Aléria”.

    Un soir à Pise” (Editions Flammarion). Ce soir à Pise, Niccolo et Pia del Tolomei donnent une réception pour l’anniversaire de leur mariage. La Pia y a convié un jeune Français rencontré – furtivement – sur une plage, l’été dernier. La passion qu’il lui voue l’enchante et l’effraie. L’enchante parce que, sous son regard, elle se sent enfin exister ; l’effraie parce que l’autorité ombrageuse se son mari lui est repos et protection. Dans ce premier roman, Pierre Rossi n’a refusé ni la clarté du récit, ni l’intrigue, ni même le “suspense”… Mais, si l’époque du drame n’est pas précisée, c’est pour faire entendre sans doute que ces personnages de passion, saisis dans le double mouvement d’une expérience et d’une culture sont aussi des “des figures”.

    Les Conjurés d’Aléria” (Editions La Table ronde). A l’aube de la Renaissance, la Corse aidée par des cités sarrazines se soulève contre la domination de la sérénissime République de Gênes. Sur ce fond historique, deux personnages s’affrontent dans une lutte sans merci où alternent insurrection et répression : le redoutable gouverneur militaire envoyé par Gênes pour mâter la révolte et l’ardente Maria di Ghjan Paulu, fille d’un petit noble corse, héroïne de la rébellion.

    Pierre Rossi n’est pas resté indifférent à l’égard de l’Algérie, il eut cette pensée : «  Tout homme porte en lui la forme entière de l’humaine condition. La fraternité n’est pas seulement un commandement d’ordre moral. Elle est aussi et surtout une communion substantielle. C’est pourquoi si la victime de la torture est déchirée dans sa chair et dans son âme, son bourreau, quant à lui, s’exclut de l’espèce humaine. »

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    En 1995 il signe un article “Légalité et légitimité” où il pose la problématique des évènements qui ont secoué l’Algérie au début des années 90 tout en clarifiant sa position. Il reprend cet article sous le titre de “Repenser nos certitudes” pour préfacer l’ouvrage de Si Othmane “L’Algérie, l’origine de la crise ou, La guerre d’Algérie, suite et fin” (Editions Dialogue 1996).

    Il écrit : «  C’est pourquoi le présent ouvrage signé de l’Algérien Si Othmane, lorsqu’il traite de l’actuelle « guerre d’Algérie », il se réfère avec juste raison à la première guerre dont elle est issue et qui s’appelle conquête de 1830, conduite par l’État français contre le peuple algérien, une guerre qui n’a connu en fait ni trêve ni repos malgré les apparences. Écartant résolument les détails des circonstances présentes qui servent surtout le journalisme plus que les vérités fondamentales, Si Othmane pose le vrai problème qui depuis des siècles nous interroge sur la guerre et la paix. Problème qui touche aux racines mêmes de l’histoire. Car la guerre ne se propose pas seulement de tuer des hommes et de détruire des cités. Elle travaille patiemment, au delà de ces destructions brutales à démolir un ordre politique, culturel, esthétique et social, voire spirituel, bref un art de vivre. »

    Il continue son raisonnement : « Estimer comme le font certains que la crise algérienne se résoudra aisément une fois que les Algériens, tous les Algériens, se seront convertis à l’idéologie occidentale, c’est dire une fois que l’Algérie aura été dépossédée de son identité ancestrale, autant dire de sa mémoire, est une coupable illusion. Curieuse proposition puisque c’est précisément dans cette mémoire que le peuple algérien voit sa richesse la plus inaltérable alors que dans le modèle occidental qu’on voudrait lui inculquer, loin de saluer une promesse de bien-être, le peuple algérien y verrait plutôt le commencement d’une décadence qui l’entraînerait à n’être que la réplique simiesque d’une société bourrée d’abstractions autrement dit de corps morts. »

    Il conclut qu’« il ne peut en effet y avoir situation de légitimité qu’à la seule condition que la loi, fluctuante et précaire par nature, fasse cause commune avec le droit, valeur permanente et universelle.  »

    Sa passion pour le monde arabo-méditerranéen et asiatique ne s’est jamais altérée et, tout en apportant assidûment son précieux concours aux activités de l’Institut du Monde Arabe (IMA) de Paris, il rédige pour la revue Arabies de remarquables articles. Rappelons celui publié dans le numéro de janvier 1995 : “La route de la soie – Caravanes d’hier, stratégies de demain – Chemin des rois, chemin des peuples et des moines“.

    « Il en est des configurations géographiques comme des constellations célestes. Elles sont immuables. Il existe, sur terre, des emplacements prédestinés qui sont les passages obligés de l’histoire du monde. La grande constellation triangulaire du Sinaï est de ceux-ci. Laissons l’histoire officielle sacraliser certains “grands hommes” triés sur le volet. En réalité, c’est la géographie transposée en stratégie qui dresse les plans, impose sa loi, conduit les armées, les pèlerins et les marchands. (…)

    « Ce terme de Route de la Soie à résonance poétique ne doit pas faire illusion. Longtemps artère nourricière des trois continents d’Afrique, d’Europe et d’Asie, en matières premières, en produits finis, en sciences, en techniques médicales ou astronomiques, navales et agraires, industrielles et monétaires, en philosophies et religions, en art et en savoir-vivre, puis éclipsée par l’essor et la volonté de puissance de l’Occident, voici que cette route, sous la poussée d’une vitalité remontée du fond des âges, s’apprête à reprendre sa marche vers un Occident plus ouvert et plus conscient de l’héritage qu’il en a reçu et trop longtemps négligé. »

    Il collabore à l’Encyclopedia Universalis et rédige les articles sur l’Irak et la Libye. Au sujet de l’Irak, il écrit notamment : «  Il est vrai que la découverte relativement récente d’importants gisements, de pétrole et de soufre notamment, ont attiré sur l’Irak l’attention des nations industrielles qui ont eu parfois tendance à réduire le pays à l’expression d’un pur et simple “espace économique”, alors qu’il se veut une “société politique” qui tente de se dégager un avenir conforme à un destin dont l’antiquité n’a pas effacé la nostalgie. En cela, l’Irak ne fait que vivre un drame propre à l’évolution contrastée des temps modernes. On y parle beaucoup de “révolution”, terme qui désigne sans doute, ici comme ailleurs, le désir d’un peuple de ne pas s’oublier, de remonter au contraire aux sources originelles dont il est issu. La conscience de ce qu’il fut amène l’Irak à s’engager dans une véritable reconquête de soi dont les phases, pour confuses qu’elles paraissent, ne doivent pas faire perdre de vue la lumière directrice. »

    Par ailleurs, Pierre Rossi a été :

    – Secrétaire général de l’Association pour la diffusion de la culture et de la langue arabes en France

    – Secrétaire général de l’Organisation Européenne pour les Droits de l’Homme et pour ses libertés fondamentales (OEDHLF)

    – Sociétaire de la Société des Gens de Lettres de France

    – Membre fondateur de l’association Amitiés franco-irakiennes

    – Président de l’Association Artistes Citoyens du Monde.

    Dévoué à la cause de la Corse, il avait des vues d’une société prospère ; il s’est engagé depuis son retour dans l’île pour militer à l’UPC, puis à l’Unità Naziunalista. Il a été président du comité de soutien à la liste électorale en 1984 et journaliste au “Ribombu” dans les années 80.

    Dans ce cadre, (re) devenu Petru Rossi, il avait co-signé en 1989, avecPierre Bartoli – “U disturbu 1789-1989, la mise à sac” et en 1991, avec Maître Lucien Felli, “La Corse, l’Europe et le droit“, parus aux Editions La Marge. Il a publié un recueil d’articles “Isula sola“. Il a également rédigé et préfacé le projet de constitution de la Corse indépendante.

    Pour cet attachement à la Corse, il n’a pas manqué de livrer sa pensée dans un article majeur paru sous le titre “Toujours rebelles” dans l’hebdomadaire Kyrn du 13 octobre 1989, à l’occasion d’un numéro spécial consacré à un colloque sur les îles. «  La mode est à l’ignorance de l’histoire. Sinon on saurait que toute île, si étroite soit-elle, a servi de marchepied à la communication des mondes et que c’est dans ce rôle qu’elle doit être jugée, appréciée, considérée. (…) Le cas de la Corse est dans ce domaine typique. On lui a inventé tout exprès un présent et un passé hors d’elle-même, afin de mieux programmer, une fois sa mémoire détruite, les étapes de son autodestruction. (…)

    « Il est donc indispensable pour parler de notre pays de nous référer à toutes les îles, mers et terres dont elle est la parente, l’alliée, la voisine ou non. Nous ne sommes pas nés d’hier, pas même en 1789 et nous survivrons certainement longtemps aux institutions, règlements, et constitutions dont on nous a enténébrés. (…)

    « La Corse comme ses autres sœurs insulaires de la Méditerranée est fille de l’Asie. Continûment depuis le IXe millénaire avant notre ère qui vit les grandes migrations parties d’Asie gagner de proche en proche jusqu’aux rivages de l’Atlantique hispanique ou vendéen, véhiculant le savoir vivre, le savoir travailler, penser et mourir, les îles n’ont cessé de vivre de la substance asiatique puis afro-asiatique. (…)

    « Soucieux avant tout de préserver la société de l’immoralité l’Orient a toujours préféré, hier comme aujourd’hui, la loi intérieure au droit extérieur, la pratique de la coutume à la juridiction positive, la psychologie à l’écrit, créant ainsi une civilisation où la garantie morale plus que la peur du gendarme maintenait la cohésion sociale à un haut niveau de responsabilité individuelle et collective. Ainsi par le sens de la solidarité, grâce à un collectivisme organique puissant, les îles ont pu se passer de l’énorme armature juridique inventé par un Occident, contre lequel elles ne pouvaient manquer de se rebeller. »

    Pierre Rossi est décédé chez lui en Corse le 25 décembre 2002, le jour de Noël et repose désormais dans sa terre d’Aullène.

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